DYNAMIQUE DE LA RÉGULATION PROTECTIONNISTE, par François Leclerc

Billet invité.

Les transactions commerciales internationales ne sont pas les seules à subir le contrecoup de la politique du chacun pour soi que Donald Trump a annoncé vouloir accélérer. La régulation en subit également les effets, reproduisant la traditionnelle disparité bancaire existant des deux côtés de l’Atlantique.

De surcroît, le monde financier a toujours été bicéphale, partagé entre New York et la City, et si la configuration à venir de cette dernière place est très incertaine en raison de la sortie du Royaume-Uni de l’Europe, cette dualité ne va pas disparaître. Il faut même que le Japon et la Chine soient aux prises avec de sérieuses difficultés pour qu’un nouveau pôle asiatique ne soit pas encore apparu en force sur les marchés. Car cela n’attend pas que la volonté de se désengager du Partenariat Transpacifique exprimée par Donald Trump se concrétise pour que les accords commerciaux se multiplient.

Que se passe-t-il dans le monde feutré des régulateurs des banques ? Faisant écho à une nouvelle réglementation américaine de la Fed, les autorités européennes veulent à leur tour adopter des règles similaires. Elles imposeraient aux filiales des banques américaines exerçant en Europe de renforcer leurs capitaux propres. L’objectif est que ces dernières disposent des ressources financières leur permettant de faire face aux exigences de leurs opérations, sans dépendre de leur maison-mère.

Chacun essayant de se prémunir des suites éventuelles des défauts de l’autre, c’en est fini de la volonté de construire un ensemble réglementaire commun ! Une autre logique s’instaure. Mais les banquiers ne voient pas nécessairement d’un œil bienveillant le retour d’une sorte de protectionnisme réglementaire, en raison de l’accumulation des coûts qui en résulte. Ils préféreraient s’en remettre à la libre circulation des capitaux.

C’est pourtant la Fed qui croyant bien faire a tiré la première, réclamant que les filiales américaines des grandes banques européennes détiennent des matelas de capital et des coussins de liquidité adéquatement calibrés, après avoir assisté à la crise grecque dont elle a saisi combien elle menaçait les grandes banques allemandes et françaises. Dans ces conditions, comment celles-ci auraient elle pu venir en aide si nécessaire à leurs filiales américaines ? Des mesures s’imposaient.

La fragmentation de la réglementation bancaire est en marche, ce qui est dangereux sur un marché financier qui ne l’est pas. On peut déjà avancer que la City va retrouver ses aises dans ce domaine, au prétexte de faire face à la perte de certaines de ses activités juteuses, comme les chambres de compensation. La vocation de ces dernières est de déménager dans la zone euro et de passer sous le contrôle de la BCE.

Nous connaissions déjà le petit jeu du moins-disant fiscal, celui du moins-disant en matière de régulation a commencé ! Patience, celui des désavantages concurrentiels à combler va bientôt pouvoir redémarrer ! C’est toujours le même conte que l’on raconte aux enfants pour les endormir.

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