Billet invité.
Le Royaume-Uni est entré dans une sérieuse crise politique, lui aussi. David Cameron démissionnaire, la désignation d’un nouveau premier ministre va mettre en évidence les divisions au sein du camp conservateur. De son côté, Jeremy Corbin est contesté au sein du parti travailliste dont les consignes de vote ont été très imparfaitement suivies par des pans entiers de son électorat traditionnel. Durant une campagne marquée par sa virulence, les deux grands partis ont été traversés en leur sein par une forte opposition entre partisans et adversaires du Brexit que le résultat du référendum ne va pas résorber.
2.367.240 pétitionnaires (*) se sont retrouvés en quelques heures pour demander au parlement de voter une loi imposant un second referendum, dans le cas où le résultat d’une première consultation serait jugé trop tangent (une majorité qualifiée de 60% sur la base d’un taux de participation inférieur à 75% est proposée). Cette demande a peu de chances d’être entendue, mais elle est pourtant tentée, comme si ses acteurs ne pouvaient pas admettre leur défaite. À la satisfaction des uns correspond le désarroi ou la détermination des autres.
L’analyse des votes disponible témoigne de lignes de fractures multiples qui n’ont aucune raison de se résorber. Les prolétaires précarisés des régions sinistrées n’ont rien de commun avec les retraités des petits villages cossus, ou avec les jeunes bobos urbains. La société britannique est éclatée, cela ne lui est pas propre. « L’indépendance » du Royaume-Uni n’était qu’un slogan, comment la concrétiser maintenant qu’elle est acquise ? Rejeter l’Union européenne n’apporte aucune réponse à cette question, or il va falloir gouverner et peu de changements peuvent être espérés.
Le Royaume-Uni est profondément divisé, et pas seulement socialement. Les Écossais ont une carte à jouer afin de rester dans l’Union européenne, leur indépendance acquise à l’occasion d’un nouveau référendum qui serait cette fois conclusif. Les travaillistes perdant leur réservoir de voix écossais seraient alors incapables de revenir seuls au pouvoir au sein d’un Royaume-Uni amputé.
Mais les reclassements ne s’arrêteront pas là. Le parti conservateur ne va pas sortir indemne de cette aventure engagée par David Cameron, et l’enjeu est qu’il puisse préserver son unité, à moins qu’il n’éclate. L’UKIP a déjà largement troublé le jeu traditionnel de la politique britannique et ne va pas s’arrêter là. Le bipartisme dominant appartient au passé, et le Royaume-Uni va devoir bâtir des solutions gouvernementales inédites. De ce point de vue au moins, le pays restera très européen…
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(*) à 20h20 GMT, le compteur continue à monter. Voir https://petition.parliament.uk/petitions/131215
« Le nombre de Russes favorables à des négociations de paix ou à un accord de paix immédiat avec l’Ukraine a…