Billet invité.
La bourse de Milan et la presse italienne ne s’y sont pas trompées, la BCE vient de sauver les banques italiennes qui filaient un très mauvais coton en débloquant la situation. Le mouvement de panique qui touchait les valeurs bancaires depuis le début de la semaine a pris fin, Matteo Renzi étant désormais en mesure d’affirmer que le système financier était « solide » en raison de la cuisine qui se mijote.
Les quelques 700 établissements du pays sont sous le poids d’un montant estimé à 200 milliards d’euros de « prêts non performants », et il fallait à tout prix les débarrasser de leurs actifs les plus fragiles. Le prélude à une concentration du secteur qui a péniblement débuté. Avec l’appui de Mario Draghi, une solution a été trouvée, ouvrant la perspective d’achats de titres par la BCE et favorisant du coup la conclusion d’un accord entre le gouvernement et la Commission à propos de la constitution d’une bad bank.
Cet accord en est encore au stade politique, car le fonctionnement détaillé de cette structure reste à finaliser. Sans surprise, le montage reposerait au minimum sur la garantie apportée par l’État à la création d’un fonds par les banques. Il serait aussi question que la bad bank titrise les actifs douteux afin d’en brader le stock auprès de hedge funds, la BCE intervenant pour acheter les mieux notés. Tout le monde serait de la partie…
La BCE n’est toujours pas parvenue à relancer l’inflation et peut au mieux se prévaloir d’avoir contenu la pression déflationniste. Mais elle peut encore rendre quelques petits services, en attendant de nouvelles mesures que Mario Draghi se devait d’annoncer en utilisant un vocabulaire martial pour satisfaire les marchés, afin de continuer à gagner du temps, le seul objectif auquel il puisse prétendre.
Cela ne concerne pas seulement le sauvetage du système bancaire italien, car il a également donné l’assurance que le nouvel examen en cours des « prêts non performants » n’aurait pas pour conséquence d’imposer aux banques de nouvelles provisions ou un renforcement supplémentaire de leurs fonds propres. Mario Draghi a décrit comme allant être « un long processus » le nettoyage des bilans bancaires atteint par la montée des créances douteuses, sans doute le temps qu’il faudra pour que l’économie reparte…
« Nous n’abandonnons pas ! » a-t-il lancé à la fin de sa conférence de presse, comme si la question pouvait être posée, après avoir précisé qu’il n’y avait « pas de limites » à l’action de la BCE (avec comme prix à payer la poursuite des jeux au Grand Casino). Cela peut se révéler efficace tant qu’il s’agira de continuer à endiguer la crise, car pour le reste la BCE n’en possède pas la clé.
Simultanément, les gouvernements italien, grec et portugais tentent de passer par le chas d’une aiguille. Le premier fait de l’instauration d’une polémique publique permanente avec la Commission sa politique, déterminé à continuer d’user des « flexibilités budgétaires » – une règle et non une concession selon lui – afin de continuer à se donner des marges de manœuvre budgétaires. Certaines choses « doivent changer » proclame Matteo Renzi, ce qui ne mange pas de pain ! Alexis Tsipras s’efforce de son côté avec peine de desserrer le nœud coulant de la réforme des retraites et Antonio Costa de maintenir à flot son gouvernement minoritaire en respectant ses engagements. La question est posée : les dirigeants européens peuvent-ils se payer le luxe d’un rebondissement de la crise dans le contexte actuel ? Quelle attitude vont-ils adopter ?
Il ressort une grande fragilité de ces situations, dans l’attente de leur dénouement qui est dans les mains de l’Eurogroupe, de la Commission et du gouvernement allemand. La perspective d’un accord entre le PSOE et Podemos, qui se cherche activement, participe de leur réflexion. Afin de créer une dynamique, Pablo Iglesias vient d’annoncer au Roi qu’il proposait au PSOE de constituer en commun un gouvernement dont il revendique la vice-présidence. Si cela devait se concrétiser, les rapports de force au sein d’une Europe déjà secouée par de multiples crises simultanées évolueraient et nul ne peut prédire ce qui en sortirait. La crise bancaire italienne colmatée, l’Espagne pourrait être un point de basculement si la pomme de discorde que représente l’avenir de la Catalogne pouvait faire l’objet d’une négociation avec un gouvernement de gauche, succédant à l’affrontement engagé avec celui de droite.
Mais les réactions enregistrées à propos du Portugal montrent qu’autre chose que le respect du pacte fiscal est en jeu. Le changement de cap politique est mal vécu par les marchés, se traduisant par l’annulation de privatisations, des hausses de salaire, la revalorisation des retraites et le retour aux 35 heures pour la fonction publique. Le détricotage des mesures d’austérité instaurées dans le cadre des réformes libérales européennes a beaucoup de mal à passer, car ce sont elles le principal enjeu.
» Donald Trump a choisi Brooke Rollins, présidente de l’America First Policy Institute, pour être secrétaire à l’Agriculture. « En…