QUAND LES ESPRITS ET LES FRONTIÈRES SE REFERMENT, par François Leclerc

Billet invité.

Réunis à Bruxelles pour la dernière fois de l’année, les dirigeants européens se sont appliqués à ne rien décider. Ils n’ont ni avancé sur la voie d’un compromis avec David Cameron, ni pris de nouvelles dispositions vis à vis des réfugiés, annonçant vouloir accélérer la concrétisation balbutiante de celles qui ont été décidées : à ce jour, 184 réfugiés ont été « relocalisés » dans le cadre du plan concernant 160.000 d’entre eux.

La question des migrations a été au centre des débats, les Britanniques entendant pour leur part réduire l’immigration en provenance des pays de l’Est européen, et les Européens le flux des réfugiés qui les déborde. Sont en jeu d’un côté le Traité de libre circulation au sein de l’Union européenne et de l’autre, le renforcement des frontières de Schengen. L’heure est bel et bien au repli.

En qualifiant d’« audacieux » le projet de corps de garde-frontières européen, les dirigeants ont par avance reconnu que son adoption n’était pas acquise en raison des abandons de souveraineté qu’il implique, renvoyant au premier semestre de l’année prochaine la recherche d’un compromis. Afin d’en trouver un autre avec David Cameron, dans la perspective du référendum britannique sur le maintien au sein de l’Union européenne, un accord est recherché pour le prochain sommet prévu en février. Le préfigurant, Angela Merkel a accepté le principe de retouches au Traité… à condition qu’elles aient lieu plus tard.

Une fois le Royaume Uni resté dans l’Union européenne au prix de nouvelles dérogations, la grande affaire sera de trouver un accord avec un gouvernement turc afin de stopper l’exode des réfugiés. Un sommet où serait invitée la Turquie pourrait en être l’occasion. La perspective en a été proposée par Mark Rutte, le premier ministre néerlandais qui prend la présidence tournante de l’Union européenne au 1er janvier.

Réunis jeudi dernier par Angela Merkel, dix pays de l’Union européenne dont la France s’était exclue ont discuté d’un projet de transfert direct des réfugiés de la Turquie à l’Union européenne. Mais cela ne concernerait qu’une cinquantaine de milliers d’entre eux, selon le chancelier autrichien Werner Faymann, et supposerait le blocage préalable de la frontière maritime de la Turquie, afin que « les flux commencent à s’approcher de zéro » a précisé Mark Rutte.

Le plan de « relocalisation » ainsi que la création des « hotspots » destinés à trier et enregistrer les réfugiés avant de les refouler ou de les diriger vers un pays d’accueil n’ont ni l’un ni l’autre fonctionné comme prévu. Tout leur réussissant, est-il vraisemblable que ce nouveau plan fonctionne, avec comme véritable objectif de bloquer la masse des réfugiés en Turquie au terme de tractations avec un régime dont les traits autocratiques se renforcent ?

Le gouvernement danois a comme projet la confiscation des valeurs des réfugiés après fouille à leur entrée, afin qu’ils contribuent au financement de leur asile. Tout à sa mansuétude, il a exclu de cette mesure leur alliance, leur montre et leur téléphone portable. Où va-t-on ?

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