Le Shanghai composite index, l’indice boursier chinois le plus en vue se situait il y a un an au niveau 2.100. Vint la bulle qui lui fit prendre son envol. À la mi-juin, il valait plus de 5.100. Le 8 juillet, il retombait à 3.500. Ce soir il vaut 3.663. Il n’est tombé dans la journée que de 1,7%, après une chute lundi de 8,5%.
Je vous ai parlé dans mon billet précédent des méthodes musclées que je qualifiais de « sur un mode communiste bien davantage que capitaliste » utilisées par les autorités chinoises pour enrayer l’effondrement : interdiction de vendre faite aux détenteurs de gros portefeuilles d’actions, suspension de la cotation des actions de plus de la moitié des sociétés cotées en Bourse, intervention massive du gouvernement, etc.
Il est possible d’ajouter pour la journée d’aujourd’hui quelques pièces supplémentaires au dossier.
Le Financial Times nous rapporte ainsi l’opinion de M. Zhao Xijun, numéro 2 de l’École de finance à l’université Renmin de Pékin pour qui « nous devrions mettre en place pour le long terme une ‘équipe nationale’ puissante qui soutiendrait le marché boursier. […] Ce n’est pas une mince affaire de modifier le sentiment de 80 millions de boursicoteurs, et comme les investisseurs conservent une confiance relative dans le gouvernement, c’est à lui de mettre en place une ‘équipe nationale’. »
Le Financial Times précise que « les investisseurs internationaux ont réagi aux interférences du gouvernement [chinois] avec un sentiment allant de l’incrédulité au dégoût », dénonçant « un système manipulé et truqué où le gouvernement est le seul acheteur substantiel ».
Le Wall Street Journal déplore lui aujourd’hui qu’il n’y ait pas en Chine de personnalité de la stature d’un Alan Greenspan autrefois à la tête de la Fed aux États-Unis ou de Mario Draghi aujourd’hui aux rênes de la Banque centrale européenne, qui puisse ramener un peu d’ordre sur les marchés par des paroles apaisantes.
Je soulignais hier la différence qui existe entre l’Occident pour qui le capitalisme est une religion à laquelle les citoyens croient avec ferveur et où l’argument d’autorité et la méthode Coué bénéficient tous deux, comme le souligne le Wall Street Journal, d’une véritable efficacité, et la Chine pour qui le capitalisme est une méthode de modernisation prosaïque qui marche ou qui ne marche pas. C’est pourquoi nous avons nous des Papes de la finance qui rassurent les ouailles de la place de la Bourse, et c’est pourquoi personne n’ose évoquer chez nous nos propres « équipes nationales », appelées « Plunge Protection Team », si ce n’est quelques blogueurs hérétiques, du genre de votre serviteur, comme ici le 8 septembre 2012 :
J’ai rapporté ici au fil des années les hypothèses de différents traders par ailleurs blogueurs ou autrement médiatiques, selon qui Goldman Sachs est le bras armé de l’État américain dans la manipulation en vue de créer un « vent d’optimisme » sur les marchés boursiers, autrement dit l’instrument du « Plunge Protection Team », l’équipe de protection contre la plongée, comme on surnomme le « Groupe de Travail sur les Marchés Financiers » constitué du Secrétaire au Trésor, du Président de la Fed, de la Présidente de la Securities and Exchange Commission (le régulateur des marchés au comptant) et du Président de la Commodity Futures Trading Commission (régulateur des marchés à terme). Il n’existe pas de preuves de telles allégations, les esprits curieux consulteront cependant régulièrement le site de la firme de collecte d’information relative aux transactions financières qu’est Nanex.
Chez nous, la main invisible du marché relève du dogme d’une religion féroce, et malheur à qui irait suggérer qu’il s’agit d’une grotesque superstition dont on intoxique le peuple, alors qu’en Chine, nation de mécréants, la main la plus visible possible de l’État rassure les foules.
1) On peut utiliser des bombes nucléaires pour stériliser l’entrée d’abris souterrains (au sens galeries bien bouchées, comme au sens…