Billet invité.
Merci aux commentaires constructifs et d’abord à Paul Jorion pour m’avoir permis de publier <a « http://www.pauljorion.com/blog/?p=73550″ target= »_blank »>La politique du pire sur son blog, consacré à deux ouvrages de Jean-Claude Michéa. Il ne me semble pas, comme beaucoup semblent s’en étonner, que le travail de Paul Jorion soit incompatible avec la pensée de Michéa. D’ailleurs ce dernier cite Jorion à plusieurs reprises pour rendre hommage à ses analyses (notamment Le complexe d’Orphée, p. 103 ; 126 ; voir aussi sa présentation des travaux de Jorion à Montpellier en mai 2012, en introduction à la conférence de celui-ci).
Difficile aujourd’hui de se refuser à bêler sans se voir accoler les anathèmes de zemmourien, soralien… d’autres m’apparentent à un auteur marxiste, à moins que cela ne vise Michéa ? Ces titres valent-ils réfutation ? Zemmour se dit lecteur de Michéa tout comme Michéa a lu Clouscard, dès lors, doit-on s’étonner de débusquer une influence ici ou là ? Mauss, Marx et Orwell ont marqué la pensée de Michéa ; Clouscard, Lasch, Castoriadis, Pierre Legendre également… La belle affaire ! Reste qu’aujourd’hui, Michéa constitue un des philosophes les plus pertinents pour penser notre société.
Je ne suis toujours pas convaincu que les préparatifs à la marchandisation de la personne humaine et l’exploitation du corps de la femme comme une vulgaire fabrique constituent un progrès. Des enfants traités en marchandises à l’épisode pathétique de ce nouveau-né trisomique que les parents adoptifs n’ont pas voulu prendre n’emportant que sa sœur jumelle et laissant le « produit défectueux » à sa mère naturelle… Ou encore ce milliardaire japonais, sans doute moins grossiste qu’humaniste qui a commandé à une clinique un lot de mille enfants.
Méfions-nous des philanthropes avoués, avocats de nouveaux droits et libertés inédites…
L’accaparement du pouvoir par un tyran ou des oligarques s’est toujours accompagné d’un détournement du langage, d’une restriction de ce qui est dicible et pensable. Cette analyse se retrouve aussi bien chez Platon que chez Orwell. Aussi, quant à savoir s’il doit y avoir des sujets tabou, hors du logos, il me semble que ce parti pris ne peut jamais déboucher que sur la violence.
38 réponses à “Jean-Claude Michéa et les autres, par Franck Richez”
Bonjour
Merci et bravo pour cet article sans tabou.
Tout à fait, là où il y a tabou, ceci ne peut déboucher que sur la violence.
Quant aux tyrans .. il n’y en a plus aujourd’hui.
Il ne reste que des serviteurs plus ou moins serviles du système ultralibéral.
Et, cet ultralibéralisme est une vague, que dis je un tsunami, lequel emporte tout.
Emporte tous les partis de Droite ou de Gauche, des dit extrêmes aussi.
Extrême Gauche « miroir aux alouettes » et extrême Droite « nationalisation du système ».
Quant à tous les philosophes cités dans votre article, ils se « démènent » comme des « petits diables dans un bénitier ».
Que le bénitier soit de Droite ou de Gauche, malgré leur « grands airs » ils sont, eux aussi, emportés par le tsunami (de l’ultralibéralisme).
Vous dites que : « Michéa constitue un des philosophes les plus pertinents pour penser notre société. ».
Je dirais plutôt pour décrire la société actuelle; tout en lui accordant un satisfecit, étant donné qu’il est de Gauche (vraiment de gauche).
Penser le monde de demain, lequel ayant développé les technologies de la vie et une robotisation de tout ce qui est lié au travail (à la production de biens de consommation), il faut penser autrement que par rapport aux schémas du passé; même si, surtout pour certains, le passé (les luttes gauchistes du passé) sont sur un piédestal.
Penser l’avenir, c’est penser mettre l’humain au centre des préoccupations sociétales et que tout le reste ne sont que moyens pour l’épanouissement de l’humain, de tous les humains ..
Là il n’y a plus de partis.
Là il n’y a plus de philosophes formatés à Droite, à Gauche ou/et aux dit extrêmes.
En effet, Michéa, comme Paul Jorion sont très compatibles: tout deux sont essentialistes.
Dans votre article à propos de ce « penseur » (Michéa), je n’ai pas lu « classe », et même si c’était le cas, pour Michéa, comme pour Jorion, la définition de celle-ci est essentialiste. Cela veut dire, et c’est également le cas pour Orwell, que la « classe » possède des qualités qui lui sont propres, naturelles en somme: vertu (du latin vir: attribut du mâle= viril), honnêteté (regardez vous-même l’origine du mot), sens commun, etc…
Ce qui signifie qu’aucun ne veut savoir que les classes et la société actuelle, société de classes se fonde sur des rapports entre ces classes (également rapport entre les genres), ces relations sont d’exploitation (capitalistes/prolétariat) et de domination (hommes/femmes).
Le prolétariat est une relation et ne contient rien, en lui-même, de positif (d’où son impossible affirmation), de même la femme ne contient rien, en elle-même, qui puisse fonder le dépassement de sa condition de dominée.
J’ai lu également dans votre précédent article des références à la position du Parti communiste Français, avec G.Marchais, à propos de l’immigration ( en résumé: les immigrés font baisser le prix de la force de travail), et il me souvient d’affiches apposés par ce parti : Fabriquons Français. Il ne restait plus alors qu’au F.N. qu’y ajouter : avec des Français.
Michéa est un populiste, et avec les populistes le glissement entre droite-extrême-droite et gauche-extrême-gauche est très facile, et c’est pour cette raison que les partis d’extrême-droite, tels le F.N. empochent la mise avec leur cocktail nationalisme-populisme, ils rassemblent les classes (inter-classisme) en les subsumant dans un abstraction unificatrice : le Peuple.
« Quand on parle de peuple, je me demande quel mauvais tour on va jouer au prolétariat »
K.Marx.
Vous êtes rigolo Kommunist ! « Michéa est populiste » et vlan, prends dans ça ta g*** pauvre nul de Michéa ! ça c’est de l’argument … essentialiste ? Mais est-ce que votre commentaire « contient » quelque chose d’essentiel finalement ?
Tant mieux si ça vous fait rire- ce dont je doute fort, néanmoins-, pourtant l’invocation des qualités telles que la « common decency » est une invocation au peuple.
Qui convoque le peuple -ou les « 99% » -est de fait populiste.
Ce que contient mon commentaire…c’est finalement la remarque de K.Marx, et c’est cela qui vous fait « rire ». Il y a des rires qui ne durent pas.
Pourquoi faut-il toujours s’envoyer des anathèmes à la figure
« Toi t’es populiste ! » (gros mot)
« Non. C’est celui qui dit qui y est »
Degré zéro du débat
Populiste n’est pas un « gros mot »,par contre votre appréhension est infantile.
J’ai dit pourquoi Michéa est populiste, j’ai dit pourquoi il est Jorion-compatible, parce que tout deux sont idéalistes et essentiallistes…encore des gros mots. Ou bien des conceptions qui semblent vous échapper?
« Fabriquons français »… Dans le cas de la désindustrialisation actuelle, ce slogan a une certaine gueule. Le contester au nom d’une crainte réelle ou supposée d’une victoire du FN est, au mieux, une erreur. A la lecture de ce papier, j’ose le terme de « salmigondi ». Tout ceci est un mélange hétéroclite d’idées plus ou moins affinées et de présupposés regrettables. Lutte des classes, populisme, nation, industrie nationale, et pour clore le tout, une mise en salade qui s’apparente fort aux critiques adressées à ceux qui croient encore que l’avenir est la nation, son peuple, et du travail pour ce dernier. Avec ce type d’argumentaire, effectivement le FN a de beaux jours devant lui. Je ne pense pas avoir lu le même Michea que l’auteur de ce billet. Mais reconnaissons qu’à propos du prolétariat et… des femmes, il a l’air incollable! L’air seulement. Que Marx a le dos large!
bien sûr, vous voulez vous y coller?
C’est vraiment fantastique une usine (B. Lavilliers)
Vous dites que « ce papier »est un salmigondi, sûrement…mais vous pensez peut-être que les lieux communs qui vous tiennent lieu d’idéologie sont d’un niveau très au-dessus.
Vos vieilleries sont pourries et puent depuis bien longtemps, vous n’étiez pas …au jus?
Allez Laver votre cerveau: :Marx lave plus rouge.
@ komunist,
Oui B. Lavilliers a raison : une usine c’est fantastique. Par tous les hommes qui y travaillent, par les techniques et les savoir-faire mis en œuvre, par cette organisation collective de travailleurs réunis …
J’ai vu fermer deux usines juste après le début de la Crise – financière et donc sans aucune justification relative à une quelconque raison économique. Et on y fabriquait français (oh quelle honte!) : elles étaient situées en France. Mais on les a sacrifié pour des profits allant à des gens ne payant pas d’impôts. D’une certaine classe sociale .
Oui c’est un légitime combat que de produire français et de lutter contre la désindustrialisation. Mais bien sûr pour vous qu’importe le peuple .. français… ou grec …. ou n’importe quel peuple ! Que des vieilleries. Oui, komunist , pitié ! SVP ne nous sauvez pas.
Marx a dit, je crois, que, lui , il n’était pas marxiste : à vous lire, on devine pourquoi.
une usine c’est fantastique. Par tous les hommes qui y travaillent, par les techniques et les savoir-faire mis en œuvre, par cette organisation collective de travailleurs réunis …
??? Ah bon? …C’est grandiose, certes, mais comme dit le vieux syndicaliste animateur de cet incroyable jardin de permaculture, Fraternités ouvrières, à Mouscron (Belgique):
@ Guy Leboutte, usine recouvre des réalités très diverses. Je sais bien que dans les usines type XIXe la séparation et le lutte des classes est exacerbée et que l’ouvrier se sent esclave car en effet il est traité comme un rien de rien, interchangeable. Mais dans le monde de la disparition du travail — et en particulier l’ industriel par la robotisation et les délocalisations — les usines sont également un lieu de travail qui a a évolué — et sans doute favorable le plus souvent. J’ai eu par exemple l’occasion de passer quelques jours pour des essais techniques des PME allemandes spécialisées dans les pompes pour PU et je vous assure que c’est différent de Zola. Et pour moi, actuellement et probablement les usines sont moins inhumaines que bien d’autres lieu de boulot et je pense aux entrepôts de grands distributeurs… ou les services d’urgences des hôpitaux publics lors des pics etc.
Mais je vais arrêter là. Je vois souvent ces impasses dans le fil qui se créent car nous ne discutons pas sur un forum ‘physique’, une agora, la place du village ou au bistro… Et donc les idées faites l’emportent par manque de précision.
à Komunist
Michea je ne connais pas, mais suffisamment lu du Jorion pour vous répondre qu’il n’est pas essentialiste et que votre assertion ne vaut donc pas tripette.
Pour la suite… pas envie en miroir de donner la leçon, voire la fessée.
Au final, le minimum que j’exige quand on cite, c’est la source ; problème : même pas trouvé sur marxist.org la phrase que vous attribuez à Marx, ni a fortiori son contexte « essentiel » pour la lire.
Votre pseudo tient du faux air, puisque même pas du faussaire au su de l’embarras à cerner quel serait de l’authentique.
Je sais rien de l’authenticité de cette citation de Marx et le fait est qu’on la voit souvent passer. Mais je l’adopte sans barguigner et tout autant sa version inversée (Quand on parle de prolétariat, je me demande quel mauvais tour on va jouer au peuple).
Vigneron, je te prends aux mots, à tes mots et t’invite à changer ton pseudo pour journaliste.
C’est vrai, la citation exacte est celle-ci : » Quand j’entends parler du peuple, je me demande quel coup se trame contre le prolétariat », et on ne la trouve nulle part…En fait, il s’agit selon toute probabilité d’une synthèse d’un paragraphe, ou en tout cas d’une phrase plus longue du « Le 18 Brumaire ». Lisez-le donc et faites moi savoir s’il y a de ma part trahison de l’esprit.
Pour la « tripette » de l’assertion, votre argument, lui, ne tient à rien: « j’ai lu, je sais ».
Eh, bien moi, j’ai lu et je sais aussi, mais pas la même chose.
Être essentialliste, être idéaliste, être aristotélicien,…c’est poser une nature humaine, une invariance de l’homme. Que cet homme soit défini comme d’essence divine, comme être de raison (homo sapiens), ou bien par un « mix » des deux ou de plusieurs catégories, ne change pas l’affaire. Ainsi, pour Aristote, l’homme est « un être politique », c’est-à-dire un être de « polis », la « cité », ce qui exclut les hommes esclaves, et même les hommes-femmes, ce qui exclut également les »barbares ». Les femmes sont considérées par ce penseur politique comme inférieures, et même radicalement différentes-autres- des vrais humains que sont les êtres politiques, les mâles habitants de la cité, et encore les mâles dominants, ce qui font vraiment la cité.
Lisez-donc, après ou avant P.Jorion, « Les femmes Grecques à l’époque Classique » de Pierre Brulé. Vous y apprendrez pourquoi l’idéologie bourgeoise a repris bien des points de ce penseur, par exemple par rapport à l’esclavage, au genre, etc…vous y lirez comment se comportaient les citoyens des cités -Athènes- envers les femmes, comment on pouvait y marier des enfants impubères à des hommes âgés de plus de trente ans, et comment ces mariages étaient réellement consommés, comment les enfants qui venaient au monde étaient choisis selon leur genre, et comment le sexe femelle était ségréguée, voire éliminée, comment le père devait présenter son enfant, garçon ou fille, devant sa « famille »et comment celle-ci pouvait déclarer cet enfant non-conforme, et par suite commander au père son abandon sur la voie publique, ou dans un lieu ad hoc…Ces trais culturels se retrouvent dans la Rome, tant appréciée par les révolutionnaires bourgeois, et les philosophes de l’Aufklärung.
L’essence de cet « être politique », c’est l’idée que le mâle dominant se fait de lui-même, et par conséquent, l’Homme c’est cette abstraction qui inclut tout ce qui lui ressemble, et exclut tout ce qui diffère: esclave, femme, enfant, déviant…
Cette conception qui justifie l’esclavage, la domination, est bien une naturalisation de l’être humain, et par voie de conséquence une négation du caractère construit, c’est-à-dire historique de l’être humain, ou plutôt de l’espèce humaine, comme espèce historique et sociale.
Les idéalistes, la plupart, sinon la totalité des « commentateurs » de ce blog, ne peuvent et/ou ne veulent entendre parler de ce qui est recouvert par leurs merveilleuses abstractions, du manteau abstrait jeté sur le concret de l’exploitation et des dominations.
Jugeant inévitables ces données, ils ne prétendent qu’à adoucir les conditions comprises comme essentielles, naturelles, anthropologiques,etc…cette idéologie est bien pratique, la pratique des classes dominantes.
Être esssentialiste, idéaliste, c’est penser dans ces catégories abstraites, c’est se payer de mots pour ne rien mettre en cause qui soit réellement d’importance :ni l’exploitation, ni l’assignation à genre, ni le capitalisme, ni les classes…c’est finalement vouloir préserver sa propre situation, et tout changer pour que rien ne change.
@vigneron
Il ne suffit pas d’inverser les termes d’une phrase pour devenir ipso facto dialecticien
Le problème réside en la définition de l’un et de l’autre terme:
Prolétariat est un concept qui peut s’expliquer et donc s’approfondir, se remettre en cause, etc…
Peuple est une abstraction, un fourre-tout, on peut y fourrer bien des catégories sociologiques : petit artisan, petit rentier, petit paysan, petit entrepreneur…
Le peuple n’est pas la classe, le peuple est d’abord national, la classe non, à peuple s’oppose, selon les conceptions idéologiques ayant cours everywhere, les élites, ceux d’en-haut, les 1%…la classe prolétarienne est, quant à elle exploitée et imbriquée par et à la classe exploitante, le prolétariat est impliqué dans son exploitation, il n’est pas uniquement dominé, il participe volens nolens, à cette exploitation -l’on pourrait dire à peu-près- la même chose des femmes par rapport aux hommes-.
Komunist, vous jouez comme Vigneron au journaliste, en osant écrire « citation exacte » ce « qu’on ne trouve nulle part ». Pire vous m’invitez à relire le 18 Brumaire, plutôt que chercher vous-même, sauf que vous ne trouverez aucune phrase dans ce texte qui articule « prolétariat » et « peuple » quand bien même ces deux termes sont légions. Donc « trahison », c’est votre mot si vous voulez, j’aurai employé plutôt « contrebande, fraude, textuelle ».
C’est surtout l’économie politique chez Aristote, dont Jorion fait son beurre, mais s’il s’étiquette essentialiste, qu’il me contredise himself. Oui d’avoir lu du Jorion depuis 2009 m’autorise un jugement. Et si vous prétendez « savoir » que Jorion est essentialiste dites nous d’où vous tenez ce point de vue. Faudrait quand même pas tout raccourcir et parce qu’ils ne sont pas marxistes, imaginer que les LGBT ne peuvent pas ne pas être essentialistes…
Pour le reste, merci de votre cours qui ne m’a rien appris.
@Rosebud 1871, 05
C’est vous qui ne savez pas lire, en tout cas pas Marx du 18 Brumaire, ou bien, mais cela ne s’exclut pas, vous êtes de mauvaise foi…
Qu’est-ce d’autre que « toutes les classes et tout les partis », sinon le Peuple dont vous vous gargarisez?
Les bouquins de P.Jorion sont certainement d’une lecture plus aisée…
Je ne vois pas pourquoi la philosophie de Jean-Claude Michéa serait incompatible avec les idées de Paul Jorion, …
Cela étant dit, si Michéa est un excellent critique de la dérive de la « gauche française », il ne me semble pas qu’il fasse autre chose qu’un brillant constat, et ne propose rien de convaincant pour qu’on puisse sortir du système socio-économique mondialisé dans lequel nous sommes empêtré. Et c’est justement, cette situation où aucune solution crédible et vendable démocratiquement n’émerge, qui fait que la résignation, le découragement ou la « fuite en avant » vers la droite, l’extrême droite ou le fondamentalisme religieux ont gagné une partie importante de ce qu’on appelle les classes populaires.
Je suis moi-même gagné par le découragement, car au delà du constat de la trahison de ceux qu’on a élu pour faire une politique et qui font le contraire, je ne vois pas comment on pourra empêcher le néolibéralisme de nous conduire dans l’abîme.
J’ai bien peur que ce système soit jusqu’à preuve du contraire le plus fort.
Qu’en pense Paul Jorion?
Allons, le remonte-pente Orwell n’est-il pas à portée de la main ?
« Common Economic Decency », un petit nom de ce genre là pour peler l’oignon des couches de propagande qui entourent la réalité, ce pourrait être une base.
En français? « Décence Economique Publique » (yeah, DEP, man), car le « common » anglais me semble se référer à la « chose publique », la res publica…
Et la res communis ? ça sonne comme « common »…
Y a-t-il une différence entre la « common decency » d’Orwell et la « philia » d’Aristote ?
(Michéa, Impasse Adam Smith)
Entre cet énigmatique « sentiment intuitif » de Michéa et, grosso modo, le bon vieux désintéressement de la philia d’Aristote, y’a un distinguo, non ?
Et (c’est) l’intérêt de lacommon decency, ce concept dont je trouve les origines dans l’anthropologie de Marcel Mauss, quand il démontre qu’aussi loin qu’on remonte dans l’humanité, le lien social ne se fonde pas sur le donnant-donnant, mais il se fonde sur ces habitudes de donner, recevoir et rendre, qui ont toujours fondé la vie à l’intérieur de la famille, entre voisins, entre collègues de travail. Et il y a des valeurs de générosité, de reconnaissance, de convivialité, qui ne peuvent pas être privatisées intégralement. Ce qui est, encore une fois, le défaut du libéralisme, c’est cette volonté de privatiser les valeurs morales et la philosophie, comme on privatise l’eau, l’électricité, l’école.
http://agora.qc.ca/documents/la_decence_ordinaire_common_decency
le soi est la partie de nous que nous devons actualiser (à savoir le noûs), et qui, dans l’amitié, ne peut être actualisée qu’avec et par les amis . Or ce point est très important car il permet de dépasser l’alternative de l’égoïsme et de l’altruisme à laquelle on a eu trop souvent tendance à vouloir soumettre la conception aristotélicienne de l’amitié . Aristote fondant la philia dans la philautia et la comprenant comme agir et sentir communs, on voit en effet qu’il ignore une telle partition et que la philia telle qu’il l’entend n’est ni égoïste, ni non plus altruiste ». De comprendre, autrement dit, qu’Aristote raisonne comme Mauss (même si l’auteure de cet article ne le dit pas). Et réciproquement, bien sûr. A.C.
http://www.journaldumauss.net/?Le-possible-et-l-amitie-chez
A première vue, je vois pas… Aristote est peut être plus direct. 🙂
Pourquoi donc tout les gens pertinents se réfèrent à Mauss, et à l’école personne n’en a jamais parlé!
Le binôme « aidos » et « dike » mis en avant par Stiegler (cela vient du Protagoras de Platon, «
» » (in http://socio-logos.revues.org/110#ftn11) me semble jouer un rôle semblable au binôme philia/common decency, à une petite « rotation dans l’espace » près peut être.
La common decency est la combinaison où la honte est engendrée par le manque de justice, marquant un choix.
La « philia » ne marque pas de choix face à une situation, elle est ce qui évite de s’habituer à la honte en continuant à pratiquer « la justice », quelques règles (suivant PJ de mémoire: les règles qui font que les équipes de foot ne casseront pas les buts, histoire de pouvoir jouer d’autres parties).
Aristote montre la gestion de la continuité du temps long autour du temps biologico-mémoriel plus court de l’affect, c’est ainsi du moins que j’entends la fixation du prix par les statuts réciproques d’Aristote.
@ timiota : il me semble que le Common n’est pas la res publica.
c’est une règle sociale.
@ Paul : je dirais que dans un cas, c’est une éthique sociale, dans l’autre, une éthique politique, en lien avec la vertu qu’est la justice. La Common decency est une norme conservatoire, la philia une norme nécessaire à la vie dans la cité, au sens politique.
Zeb, adoncques cet obscur « sentiment intuitif » serait selon toi une « norme conservatoire » ? Plutôt petit Conservatoire de Mireille ou plutôt Conservatoire des hypothèques le « sentiment intuitif » ? On patauge grave dans la glimouille lá, non ? Normal cela dit, l’accès à Michéa c’est toujours confondu selon moi avec un accès libre à la pataugeoire, c’est même le conservatoire de la pataugeoire.
Vigneron, Paul J. n’a pas mentionné Michéa dans sa question.
Lucas, Orwell est mort, hélas, et ce n’est donc que de Michéa dont eskon cause, hélas derechef.
Ah dac! J’ai d’ailleurs aperçu Aristote faire un footing hier soir…
Il est vrai que Michéa (enfin son travail) est le sujet du billet, et j’ai un peu compris votre point du vue sur ce sujet :).
Je préfère ce dernier billet, avec des exemples qui cernent l’essentiel, dommage tout de même que vous n’ayez pas repris à votre compte une idée présente dans les écrits de Michéa lui-même qui est que la gauche de gouvernement depuis quelques décennies a tourné le dos à son passé de contestation radicale du capitalisme qui remonte aux origines du socialisme, c’est à dire au XIX ème siècle, à un moment où par certains aspects nous nous retrouvons avec un capitalisme sans foi ni loi, quand nous constations le remise en cause de l’Etat providence, c’est à dire l’Etat pour le bien être commun. Mais, il est vrai, Michéa donne à la common decency un contenu à mes yeux parfois contestable, et c’est inévitable car il associe à celle-ci des exemples de solidarités populaires spécifiques dont il est alors parfois difficile de reconnaître dans tous les cas le caractère de progrès social, au lieu de l’associer au désir d’autre chose, à un modèle alternatif qui forcément implique l’émergence de solidarités nouvelles. Bref pouvons-nous nous payer le luxe d’une gauche qui regarde dans le rétroviseur au lieu d’aller de l’avant ?!
Michéa fait de bonnes critiques du système, prend le parti du peuple, ce qui n’est pas rien au moment où pour l’ordre établi la démocratie n’est bonne que lorsque sa voix se dilue dans les recettes capitalistes et libérales, mais il prend le risque inutile de fournir a nos adversaires des arguments parce que sa common decency dont il ne nie pas lui-même la nature conservatrice, même si c’est pour la bonne cause de la résistance au système, ne le distingue plus, le place sur le même terrain que ses adversaires, alors qu’il faudrait faire un pas en avant ou de coté pour les dépasser.
Oui, cf. mon post ci-dessus, la common decency, c’est un peu le temps court de l’affect (la honte) et de la retenue face à la toute-puissance (DSK !). Le temps long appelle le progrès social par une pratique, où se niche la philia, qui est une pratique permettant de conserver la capacité de honte, mais libre de faire évoluer les règles…
Pourquoi irait-on reprocher à un intellectuel (Michéa, Lordon, Stiegler, Jorion, Généreux, Piketty, Gauchet, Stiglitz, Todd, Dupuy, Graeber, Galbraith… – pardon pour ceux que j’oublie) de ne pas proposer de solutions, alors même que les solutions se lisent en creux dans les analyses et critiques qui sont faites du système.
Par exemple, interdire les paris spéculatifs, faire sauter les effets cliquets, nationaliser le système bancaire, retrouver une souveraineté….
La difficulté est politique, et la démocratie, si elle advient, ça sert à ça.
Et pour qu’elle advienne, il faut que le peuple se mette en mouvement (Lordon)…, mais personne n’a la recette, sinon ça se saurait.
La Grèce qui est décidément un laboratoire va à coup sur être pleine d’enseignements
Oui mais avant on pensait avoir (à tort) la recette, ce qui n’est plus du tout le cas actuellement ce qui ne favorise pas l’espoir d’un monde meilleur et la lutte politique.
J’espère me tromper, mais j’ai bien peur que l’alternance en Grèce, ne débouche que sur une désillusion de plus.
*La primauté de Mauss :
Pourquoi Mauss plutôt qu’Aristote ? Et pourquoi revenir à Mauss à partir de la « décence commune » d’Orwell ?
Je crois que ce qui intéresse Jean-Claude Michéa dans la logique du don telle que la caractérise Mauss, à partir du terrain de l’anthropologie, est son caractère universel, qui en fait un invariant en dépit de la diversité des cultures. A ce titre, prendre acte de la convergence du développement de la philia chez Aristote, philosophe et citoyen grec, revient peut-être moins à lui décerner une primauté chronologique qu’à valider à rebours les thèses de Mauss pour ce qui est de la Grèce antique en particulier.
Il faudrait savoir ce que pense Aristote de la philia chez les barbares. Mais je doute qu’il en faisait un universel.
Michéa revient souvent sur l’idée que la société capitaliste est une exception car elle rompt avec cet universel en congédient la décence commune pour se vouloir « axiologiquement neutre »…
*Lutte des classes :
Faut-il encore parler de la lutte des classes dans les mêmes termes que Marx ?
A ce sujet, je pense qu’on peut étendre le constat que Lasch faisait pour les USA à l’Europe :
« La meilleure façon de comprendre les conflits culturels qui ont bouleversé l’Amérique depuis les années 60 est d’y voir une forme de guerre des classes, dans laquelle une élite éclairée (telle est l’idée qu’elle se fait d’elle-même) entreprend moins d’imposer ses valeurs à la majorité (majorité qu’elle perçoit comme incorrigiblement raciste, sexiste, provinciale et xénophobe), encore moins de persuader la majorité au moyen d’un débat public rationnel, que de créer des institutions parallèles ou « alternatives » dans laquelle elle ne sera plus du tout obligée d’affronter face à face les masses ignorantes ». Cf., La révolte des élites et la trahison de la démocratie, p. 32, champs essai.
*La question d’une « tradition anarchiste tory » en France.
Est-il besoin d’aller chercher Orwell (auteur anglais du XXème)?
Dans Le complexe d’Orphée, p. 75. Bien qu’il évoque préférablement Orwell, Michéa trace un cheminement qui va de Leroux, au jeune Engels (« avant qu’il ne soit contaminé par le progressisme de Marx ») en passant par Proudhon.
Je pense pour ma part qu’un auteur comme Lafargue a un intérêt considérable sur ce point.
@F.Richiez.
Wikipédia: Durant la période où il enseigne à l’académie, Aristote suit la vie politique locale à laquelle il ne peut participer du fait de son statut de métèque (« étranger » à la cité).
Donc Aristote n’est pas « citoyen », s’il est Grec -c’est-à-dire-, hellénisé, son origine est macédonienne, file de médecin royal et de sage femme, c’est dire son appartenance à une classe supérieure, et prescriptrice.
L’obsessive recherche de l’ »invariant », c’est un trait dominant de l’idéologie dominante, pourtant la contradiction brise, dans le réel concret, comme dans votre phrase, cette prétention.
Le fait social c’est le fait historique, les sociétés sont histoire, l’histoire est variation.
L’invariant est variant.
Luttes de classes.
Quelle conception se faisait K.Marx de cela? Il y a beaucoup dans Marx, et parfois du contradictoire.
En tout cas les « conflits culturels »…est une expression très vaseuse, c’est quoi, finalement?
C’est bien du Michéa.
Le racisme, le machisme etc…ne sont pas exclusives aux classes dominantes, mais, encore une fois « L’idéologie dominante est l’idéologie de la classe dominante », donc, le « peuple » cher au populiste Michéa n’est pas à l’abri, comment le serait-il, de l’idéologie, qui, à toutes fins utiles, faut-il, encore le rappeler est une force matérielle. Par quelle magie le peuple serait épargné par cette idéologie? Pourquoi le peuple serait « bon » ou « mauvais », ne comprendrez-vous donc jamais que : « Telle société, tel individu ».
L’idéalisme vous aveugle-t-il donc à ce point?
Tenez, voici de la lecture : Жиль Дове. КурдиÑтан?
http://www.aitrus.info/node/414
Eh, oui da, c’est du Russe…
@Jacques Seignan
Là, je suis 100% d’accord avec vous, en écrivant cela, vous savez de qui et de quoi vous parlez: de vous-même, au premier chef.
En tant que cadre, ou assimilé, en tant que Français ou …assimilé,avec votre vue bornée par votre appartenance de genre et de classe, c’est-à-dire en fait médiée par votre appartenance au groupe réellement dominant, ou à ses affidés, vous ne pouvez qu’avoir des lunettes (ou des oeillères)favorisant une vision ethnocentrée et une conception de gestionnaire.
Vous parlez des jolies-usines qui produisent durable et vert, où travaillent les gentils-ouvriers, pas si exploités que ça (comme si l’exploitation était une catégorie morale…) et où la lutte des classes est heureusement adoucie (car vous ne savez pas ce qu’est la lutte des classes); vous ne savez donc rien des conditions prévalant en Inde, au Bengladesh (Reina Plaza)ou en Chine, au Viet-Nam, ou ailleurs?
Vous écrivez que ces unités de production (les usines modernes et garanties éco-durable et éthique de chez éthique) ne sont pas si inhumaines qu’à l’époque du bon vieil aixois, par ailleurs violemment anti-communard, Zola, peut-être que les deux modalités de l’exploitation ne s’excluent pas, l’avez-vous envisagé seulement?
Avez-vous envisagé seulement que les conditions prévalant dans la logistique, l’exploitation d’une masse de prolétaires jetables s’accorde très bien avec l’existence de fabriques modèles pour travailleurs-euses relativement bien formé-es?
Avez-vous seulement envisagé que le mode de production capitaliste est bien un mode de production (production des rapports de classe et de genre), et non, comme le ressasse Zébu, un système de « distribution de la richesse », avez-vous seulement envisagé qu’indépendamment du degré d’exploitation que conditionne la composition organique du capital (domination formelle/domination formelle)l’exploitation consiste, in fine, à reproduire toutes les conditions d’elle-même.
Ce que produit le mode de production capitaliste c’est sa reproduction, sa reproduction c’est la lutte des classes et des genres, l’économie dans toutes ses facettes c’est cette abstraction, la classe des travailleurs par son travail se reproduit en reproduisant la classe exploitante, et en se reproduisant, elle-même, comme classe exploitée, ce faisant elle participe à la reproduction et à l’assignation genrée (rôles spécifiques des hommes et des femmes) qui est centrale dans l’augmentation de la population, facteur décisif dans et pour l’exploitation de la force de travail.
L’aviez-vous seulement envisagé précisément?