HUMAINCRATIE. FRAGMENT 3, par Jean-Claude Baerts

FRAGMENT 3.

Nous avons vu :

F1
  • Une interrogation sur le vivre ensemble.
  • Avant-propos où Bergson nous explique qu’une innovation est nécessaire en présence d’un écueil.
  • Une liste non exhaustive de multiples écueils où le capitalisme conduit.
F2
  • Que l’Humanité est confrontée à son anéantissement à défaut de refondations par une évolution créatrice.
  • Qu’un nouveau paradigme propose de se focaliser sur l’humain.
  • Préambule soulignant le rôle de la fiscalité et sa mutation projetée.
  • Introduction présentant une nouvelle voie vers la richesse des nations, laquelle sera bien plus vaste que la possession de biens et d’argent ou leur opulence.

Nous verrons :

  • Préliminaire définissant le coût du travail et sa valeur. Distinguer les moyens ou la force productive du bénéfice engendré.
  • Principes de la nouvelle voie, celui de base et autres.
  • Financements complémentaires concernés par les bénéfices.

â–²Préliminaire.

Le coût du travail n’est plus représentatif de la valeur du travail.

Classiquement le salaire est assimilé au salaire brut. Le nouveau paradigme proposé adopte un autre point de vue.

Si le salaire net est 100, le grand brut est 223 ( « Prospero », rapport 2004 de McKinsey&Company pour la Belgique ), soit il y a 123 de ce que j’appellerai des charges salariales (cotisation sociale, IPP, cotisation patronale) qui sont des composantes du coût du travail et qui sont extrinsèques à la valeur du travail.

En effet, raisonnons par l’absurde : si l’Etat pour combler son déficit décidait d’augmenter ces charges par un facteur 10, soit les porterait à 1.230, la valeur de la même prestation de travail en deviendrait 1.330, ce qui est absurde car la prestation de 100 n’a pas changé dans son essence, mais seulement son coût nominal.

Autre exemple : si un ordinateur fabriqué entièrement en Occident coûte cinq fois le prix du même ordinateur fabriqué en Orient, il n’a pas pour cette raison une valeur cinq fois plus élevée.

C’est dire que ces charges salariales relèvent de décisions arbitraires et ne sont pas déterminées par un libre marché qui en fixe la valeur en fonction de la prestation intrinsèque du travail.

Aussi la rémunération du travail basée sur le coût n’équivaut plus à la valeur réelle du travail mais lui attribue une valeur virtuelle. Ainsi sont payées des taxes sous forme de charges et accessoirement du travail, tout comme les accises frappent certains produits en étant plus importantes que la valeur intrinsèque des biens qui en sont grevés.

Ces charges deviennent alors un procédé, et ne sont plus le produit ou le service en soi, mais un procédé de lever des fonds pour un autre but ou destination.

Et effectivement, sauf l’IPP, elles ont été instaurées à l’origine comme une assurance et un placement obligatoires pour garantir une sécurité au travailleur en cas de perte de travail, de maladie, incapacité ou comme survie à la retraite. Un amalgame avec le travail a été réalisé.

Mais le travail est une force productive alors qu’une couverture de sécurité et la pension sont une récolte due à un résultat engrangé. Comparativement c’est comme si on exigeait dans une entreprise que le capital qui finance les investissements de production, soit consommé en même temps pour payer les salaires.

Aussi je plaide pour que soient séparées les deux entités, le travail ou salaire net d’une part à financer comme les coûts de production, de son surplus recueilli d’autre part, les charges salariales, à financer par les bénéfices.

Constatons enfin qu’en augmentant le coût du travail en le grevant de charges salariales, la valeur du travail perçu comme son coût, en est discrédité, car le travail en tant que moyen de production est dévalorisé face à des moyens alternatifs tels que engins, machines, automates, informatique, …

Il est même discrédité entre personnes, et de surcroît générateur de jalousies.

En effet, supposons un exemple dans le contexte d’autrefois en l’absence de charges sociales, où à titre didactique un cadre gagnait par jour la somme de 100, un net identique au brut qui est inexistant, et où un ouvrier gagnait par jour 50, un net identique au brut qui est inexistant.

Le cadre commandant un travail de 2 jours à un ouvrier devait dépenser 100, soit 1 jour de son salaire de cadre.

Avec la démocratie sociale, toujours à titre didactique le cadre gagne maintenant par jour un brut de 200 et un net de 100, et un ouvrier gagne maintenant par jour un brut de 100 et un net de 50.

Le cadre souhaitant commander le même travail de 2 jours à un ouvrier doit dépenser 2×100, le salaire normal et légal réclamé par l’ouvrier, soit 2 jours du salaire brut de l’ouvrier.

Le cadre doit alors dépenser 2 jours de son salaire net, car il ne dispose pas du supplément au brut qui est une épargne forcée pour le futur (maladie, pension).

Le même travail représente alors une dépense immédiate double et il s’appauvrit d’un jour de son propre travail.

Et si pour ce faire il doit commander ces 2 jours d’ouvriers à une entreprise son appauvrissement est amplifié du profit que prendra l’entreprise y compris sur l’épargne forcée pour le futur (maladie, pension) de l’ouvrier.

Pas étonnant dès lors si autrefois le salaire d’un cadre suffisait à subvenir pour toute sa famille, alors que actuellement les deux époux sont requis d’apporter un salaire. De surcroît la vie éducationnelle en a subi un bouleversement imposé sur un mode universel et engendrant l’obligation de dépenses nouvelles.

Pas étonnant dès lors que les cadres ne font plus appel aux ouvriers et qu’ils s’astreignent et s’approvisionnent aux ‘Do it yourself’ qui y ont vu l’opportunité d’un créneau porteur et engendrent globalement des activités à moindre consommation d’emplois. Et devoir exécuter tout soi-même n’est pas un signe de progrès.

Les cadres habituellement prestent plus d’un double horaire par rapport à un ouvrier, ayant donc une rémunération horaire de moitié de celle conclue contractuellement. Mais cette charge est naturellement acceptée vu leur subvention unique à la famille, et ce malgré un stress conduisant régulièrement au burn-out, voire au suicide, ou au danger de karoshi, mort subite par sur-travail.

Pas étonnant dès lors qu’ils soient exigeants aujourd’hui pour un niveau de rémunération élevé, au moins plus du double ou le quadruple, lequel ne fera qu’élargir le fossé des différences salariales par multiplication à chaque niveau hiérarchique.

Quant à nombre de petits indépendants qui n’ont pas la ressource financière de se faire aider vu le coût salarial et sa charge administrative, ils font appel à leur épouse, tous deux travaillant alors plus d’un double horaire pour un seul maigre revenu et souvent avec le risque d’hypothéquer leurs avoirs.

Comment espérer dans ces conditions qu’un chômeur qui ne trouve pas d’emploi prenne le risque sans protection de se mettre à son compte ? Le saut de situation est disproportionné et il refusera le risque d’une disproportion fatale.

Ainsi « La société des égaux » (Pierre Rosanvallon) a encore du chemin à parcourir et le politique à s’investir pour une éthique équitable.

â–²Principes.

1) Cette nouvelle voie considère que la richesse engendrée est le propre des activités économiques où des individus travaillent en synergie, et non de l’individu isolé.

Il s’ensuit que l’indépendant solitaire est considéré comme travaillant pour sa survie et non supplémentairement pour la communauté. Aussi dès que ses gains en solitaire dépasseront un plafond, il sera incité à se mettre en société.

2) Il en résulte également que les besoins de l’Etat providence ne sont pas à générer par les individus mais par les entreprises, et plus précisément par leurs bénéfices.

3) En accord avec John Locke et écartant un danger d’aliénation soulevé par Karl Marx, et afin de respecter la valeur réelle du travail par un coût identique, toute taxation du travail, cotisation sociale ou impôt, devrait être supprimée et interdite ; ceci constitue le principe de base que la nouvelle voie vise à atteindre, d’abord en extrayant cette charge de l’exploitation des entreprises, ensuite en réduisant son montant.

Après « Laissez-faire les hommes, laissez-passer les marchandises » des Physiocrates, il faut « laissez-libre le travail ».

L’inclusion de ce principe universel sur le travail dans les droits de l’homme serait même à soupeser.

Nos dirigeants européens se rapprochent déjà pour eux-mêmes de ce régime malgré des rémunérations conséquentes, ce qui pourrait porter une atteinte à « La société des égaux » (Pierre Rosanvallon). Mais c’est pour le moins un exemple qui inspire.

Taxer le travail de l’humain est aussi agressif que de taxer les volumes d’air qu’il respire.

Il résulte de ce principe de base que pour les entreprises le coût salarial réduit sa valeur nominale artificielle de grand brut à sa valeur réelle, le net. Le travail retrouve ainsi sa valeur d’étalon universel (Adam Smith) dans le monde, et même dans nos contrées en supprimant toute distorsion entre prestation externe et privée, voire même souterraine.

Par ailleurs le financement des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu ne sont plus des charges salariales de l’Exploitation générale des entreprises, mais relèvent des Bénéfices réalisés, soit de la richesse générée par les activités et de valeur minimale imposée par l’effectif recensé et par un taux de marque).

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