VENIR VOIR LA VIE À ATHÈNES, par Pierre Bousquet

Billet invité.

– « Viens à Athènes, viens voir la vie ici, c’est important de pouvoir témoigner… ».

C’est ainsi, que répondant à l’invitation d’une amie pharmacienne à Athènes je suis arrivé en Grèce alors que les yeux de la communauté internationale était plutôt tournés vers Chypre.

Que signifie concrètement une baisse de 25 % du P.I.B. en quelques années ? quelles sont les conséquences sanitaires d’un chômage de plus de 25 % (et de 60 % chez les moins de 25 ans), comment agir face à la pénurie de médicaments ?

Et bien, j’ai été édifié.

J’ai visité le Metropolitan Community Clinic at Helliniko, premier dispensaire créé à Athènes à l’initiative des « indignés » de la place Syntagma en 2011.

Ce dispensaire fonctionne actuellement grâce à quelques 160 bénévoles (dont 100 médecins) et offre des soins gratuits et, quand c’est possible, des médicaments à tous les nécessiteux. La tâche est immense. Maîtrise des dépenses oblige, un chômeur se voit privé de protection sociale au bout d’un an environ, de même les travailleurs indépendants incapables de s’acquitter d’une cotisation forfaitaire faute de moyens. A l’heure actuelle un tiers des citoyens grecs ne bénéficie d’aucune protection sociale.

L’activité du dispensaire en est le reflet : lors de ses huit premiers mois de fonctionnement, celui-ci a accueilli 1 200 personnes. Pour les six derniers mois, 6 000 et actuellement il réalise jusqu’à cent consultations par jour soit près de 2 000 par mois.

Il convient de préciser qu’au début de son activité, il était peu connu mais il était le seul. Il y a maintenant plusieurs dispensaires de ce type à Athènes.

J’ai rencontré Konstantinos Lourantos, président de l’association des pharmaciens d’Athènes. Les pharmacies ne sont payées par les organismes de sécurité sociale qu’après un délai de 4 à 5 mois, certains dossiers traînent depuis… 2011 ! Dans ces conditions, l’avance des frais (tiers payant)  devient un luxe inaccessible. Nombreuses sont les pharmacies qui ne peuvent plus faire face à leurs échéances et mettent la clé sous la porte.

Ces problèmes de trésorerie conduisent certains laboratoires à ne plus livrer de médicaments entraînant une pénurie aggravée par le comportement rapace de grossistes qui n’hésitent pas à détourner les médicaments vers des pays où ils sont vendus plus chers.

La crise en Grèce occasionne un profond rejet de la classe dirigeante. On se prend à penser en se promenant autour de la place du parlement à Athènes que les gouvernants plutôt que d’investir dans la santé le font dans les forces de police, omniprésentes.

– «… les mots sont importants,…dis-leur qu’ici c’est la guerre. »

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