Billet invité.
La bourse est en plein boom sur toutes les grandes places financières, ce qui ne va pas sans naturellement susciter quelques inquiétudes, en raison d’une situation économique nettement moins florissante. Certes, il y a toujours des analystes pour parler de rebond et de rattrapage, en raison des importantes baisses enregistrées sur les marchés d’action, et d’autres qui veulent croire que les marchés, toujours aussi clairvoyants, voient poindre une reprise que les statistiques ne laissent pas présager. Mais d’autres conviennent que la masse des liquidités présentes sur le marché n’y est pas pour rien. Ce qui a d’ailleurs suscité une alerte, passée inaperçue, de l’Institute of International Finance, qui s’est inquiété d’une absence d’anticipation… par rapport à un resserrement de la politique monétaire des banques centrales qui fait l’objet de rumeurs de marché.
La liquidité, pour le moment, est quoiqu’il en soit, surabondante. A défaut d’être économique, la relance est donc financière ! Seuls les esprits chagrins peuvent s’inquiéter de ce paradoxe, et souligner qu’il est l’effet de la recherche de meilleurs rendements et d’une fuite en avant caractérisée. Car le marché obligataire, décidément, n’offre le choix qu’entre des rendements très faibles ou des risques très grands. Les résultats des grandes banques américaines montrent pourtant qu’il est possible de tirer son épingle du jeu : Goldman Sachs affiche ainsi des résultats faramineux, flirtant avec les frontières réglementaires élastiques du trading sur fonds propres, montrant la voie aux autres. On ne s’étonnera pas après des projets bâtards de séparation des activités bancaires des gouvernements allemand et français. On observe par ailleurs de nouvelles tentatives de relance d’une titrisation toujours aussi peu flambante, et même quelques émissions de CDO (colletarized debt obligation) qui ne manquent pas de pudeur !
Impressionnés par les libéralités des banques centrales, les chroniqueurs économiques sont partagés, entre ceux qui agitent le chiffon rouge du retour de l’inflation et ceux qui pensent qu’il y a de la marge en raison de la situation exceptionnelle que nous vivons. Mais l’inflation des actifs n’est nulle part contestée, la discussion portant sur le fait qu’une nouvelle bulle est ou non déjà en cours de constitution. Qui dit bulle, dit éclatement futur de celle-ci, ce qui pose la question de comment et où la prochaine pourrait éclater.
C’est en scrutant le marché des produits dérivés, dont on sait l’ampleur colossale, que l’on peut en avoir une petite idée. Paradoxalement, ce sont en effet les mesures de régulation du marché des OTC, très limitées, qui pourraient en créer les conditions. L’affaire est en train de se jouer à propos des chambres de compensation des dérivés et de la gestion du collatéral qui doit y être apporté en garantie, afin que celles-ci ne deviennent pas des lieux systémiques par excellence. Le collatéral en est l’enjeu, à la fois source de profits importants pour ces chambres de compensation et de coût pour ceux qui doivent les apporter. Or, la compétition étant très grande pour se positionner sur ce marché futur très prometteur, c’est à qui rivalisera déjà pour proposer la meilleure optimisation des appels de marge et user de son influence auprès des régulateurs pour en multiplier les possibilités grâce à des techniques de compensation.
Dit plus simplement, l’objectif est tout simplement de réduire les garanties. Connaissant le génie créatif des financiers, de quels mécanismes vont-ils encore accoucher et quelle catastrophe vont-ils potentiellement créer ? Ce n’est bien sûr qu’une simple hypothèse.
1) On peut utiliser des bombes nucléaires pour stériliser l’entrée d’abris souterrains (au sens galeries bien bouchées, comme au sens…