JP Morgan Chase a donc décidé de racheter Bear Stearns, jusqu’à récemment la cinquième banque d’investissement américaine en capitalisation. JP Morgan acquiert la firme – qui, en parallèle avec les négociations de rachat, remplissait les formulaires de déclaration de faillite – pour la somme ridicule de 236 millions de dollars. Malgré une chute du prix de ses actions de près de 50 % vendredi (*), Bear Stearns valait encore alors, du moins sur le papier, 3,54 milliards de dollars. Le prix payé par JP Morgan représente 6,7 % de ce chiffre.
La Fed soutient la transaction en se portant garante des fonds les moins liquides de Bear Stearns pour un montant de 30 milliards de dollars. Autre intervention de sa part, en arrière-plan : une baisse d’un quart de point de son taux d’escompte qui se retrouve dès lors à 3,25 % – ce qui ne devrait pas arranger le dollar sur les marchés lundi !
Les dirigeants de la Fed ont passé un weekend agité, tout comme ceux du ministère américain des finances. Il fallait faire vite : tout devait être ficelé avant l’ouverture du marché de Tokyo – sans quoi le cataclysme annoncé depuis l’été dernier était prévu pour demain. Un exemple entre mille, l’analyste financier Jim Sinclair qui écrivait vendredi : « Jamais dans l’histoire économique il n’y eut une nuit comme celle-ci. Si j’écris aussi tard, c’est en raison de l’énormité des forces qui convergent. […] je suis en résonnance avec la vitesse de la désintégration. Ces maudits produits dérivés traités de gré à gré et leurs fabricants qui, soit dit en passant, enrichirent la communauté bancaire internationale au-delà de leurs rêves les plus fous, défont maintenant leurs positions à la vitesse de la lumière ».
(*) Voir Wall Street en régime de crise.
5 réponses à “Échappé belle !”
ouvrir un compte de 20 G$ pour acheter une banque 236 M$, merci le tour de passe-passe …
Sur ce que j’ai pu lire, la FED prête 20 B$ à JPM sous forme de « non recourse loan ». La FED se contente donc désormais de garanties, si on peut encore ainsi les appeler, sur lesquelles elle ne pourra disposer d’aucun recours en cas de problème sur leur acceptabilité (dégradation de l’émetteur et/ou de l’éventuel réhausseur p.ex.). Ca frise donc, dans les faits, le prêt « sans garantie ». Le montant est fort comparable à la totalité des augmentations de capital venues des fonds souverains au début de la crise.
Ainsi, on peut lire la lente dégradation du bilan de la FED, qui a déjà consommé la moitié de ses réserves :
– au début de la crise : prêts limités avec garantie parfaites type Tresauries
– il y a quelques mois : prêts, dans des volumes en hausse, contre des garanties potentiellement douteuses (dégradation, faillite de l’assureur)
– il y a quelques semaines : prêts anonymes avec des montants toujours croissants, contre des garanties probablement déjà au moins en partie douteuses
– depuis hier : prêts contre une quasi-absence de garantie dans les faits.
Les autres problèmes n’ont pas encore émergé (immobilier commercial, CDS … où, par ailleurs, JPM est le plus gros intervenant) ; les effets de la récession, ou du ralentissement, ne sont pas non plus encore là (emploi, PIB, …)
Les actions de USA Inc., les dollars, en portent le stigmate : à 1.60 $/€ nous nous retrouvons au niveau des années 73 : 6.56/1.60 ~ 4.10 encore au-dessus des 4 FF/$ de cette époque. Lors de premier choc pétrolier les USA était une nation créditrice et à l’équilibre pétrolier (en fait elle atteignait son pic de production). Aujourd’hui c’est un débiteur, importateur net de pétrole.
[…] (1) Comme je vous le rapportais aussitôt dans Echappé belle ! (2) Comme je l’ai expliqué dans Northern Rock : le retour de l’Etat. […]
[…] cette époque, c’est que la finance est entrée dans sa « drôle de crise ». Depuis le sauvetage de Bear Stearns, le 17 mars, un vague espoir s’est installé que la Fed entendra de la même manière venir à la […]
[…] ———————- (*) Voir Wall Street en régime de crise et Echappé belle !. […]