Billet invité.
J’ai 56 ans, je suis mère et grand-mère de 8 petits enfants.
Je suis née en 53 au Vietnam un an avant la débâcle française. D’un père français d’origine italienne habitant en Tunisie, et d’une mère vietnamienne dont je ne connais que le nom. A un an, j’ai atterri en Tunisie pour 5 ans, (jusqu’à la guerre d’indépendance) où j’ai été abandonnée et adoptée par un couple de modestes Siciliens.
Chassés de Tunisie, nous sommes arrivés en France, dépouillés, humiliés. « Victime de l’indépendance ». J’ai vécu en pension religieuse et militaire de 9 ans à 14 ans, jusqu’au certificat d’études.
J’en suis sortie comme un chat ébouillantée, mais j’avais un petit bagage culturel qui m’a bien aidée à survivre. A cette époque, il était rare de voir une asiatique, c’était « martien », d’où le fameux « chinoise verte ».
Mai 68 chez des Siciliens ça ne pouvait pas coller. Juge des enfants, mise à […], j’en garde un bon souvenir, à côté des coups des Siciliens, c’était doux : une expérience inoubliable, du meilleur comme du pire.
J’ai donc changé trois fois de nom sans me marier, d’où ma dérision envers ce monde, ce qui ne me permet pas d’avoir des relations normalisées. Par la suite, j’ai fait une école bidon d’étalagiste-décoratrice, financée par un job de pompiste. A cette époque les pourboires étaient intéressants, presqu’une paie.
Une école pour riches filles paumées dans le quartier d’Ainay qui arrivaient en cours en jetant leurs clés d’Austin sur leur bureau, pendant que j’arrivais en mobylette puant le gasoil.
J’habitais au-dessus d’un garage entre le stade de Gerland et les abattoirs qui fonctionnaient encore avant que cela ne devienne le centre culturel Tony Garnier.
Je rêvais d’une famille, je l’ai faite, et ça m’a sauvée. Bien entendu, seul un original pouvait m’attirer. Le père de mes enfants, entrepreneur mais aussi chanteur auteur, compositeur, n’a pas résisté à cet écart, il s’est suicidé en 97 mais nous étions séparés depuis 1985, mes enfants avaient 9-5-3-1 ans.
Depuis je navigue seule.
Deux de mes filles ont chacune trois enfants après avoir arrêté leurs études au brevet.
J’ai été grand-mère à 42 ans. Leurs compagnons de culture musulmane me mettent un peu la pression. Mon fils de 33 ans, papa de jumelles depuis peu, a hérité de la bosse du commerce qui roule depuis sa grand-mère paternelle. Après le décès de son père alors qu’il était en sport études tennis, il s’est lancé à 19 ans sur les marchés avec 5 m de tréteaux dans le prêt-à-porter, Il a déjà monté plus de 6 magasins à […], possède sa marque qu’il fait fabriquer en Chine. Pour l’heure, il va ouvrir sur 1000 m² au centre de […], une restauration rapide.
Une génération conditionnée à l’argent où les chômeurs et les RMIstes sont méprisables. Reste une fille magnifique de 27 ans célibataire, qui avait un avenir prometteur dans la musique comme DJ hip-hop, mais trop intègre dans ce monde macho où le monde de la nuit est violent et faux.
En 93, à […] dans une ville nouvelle où j’ai vécu 19 ans avec mes enfants ; j’avais lancé le temps d’un trimestre, un petit journal au titre de « Pluton, la planète la plus éloignée du soleil ». Il avait pour but de donner la parole à ceux qui ne l’avaient pas, mais aussi de parler écologie.
Depuis, je suis toujours un électron pauvre mais libre et je me sens quand même très heureuse.
La vie est un super voyage.
37 réponses à “La vie est un super voyage, par rienderien”
Dans un bureau de poste, en France.
Aujourd’hui, fin de mois, j’ai du me confronter
aux terribles dilemmes du métier de guichetier.
Des retraits d’trois euros, on commence à en voir,
quand c’est tout ce qu’il reste et qu’il faut bien manger.
Et puis le plus terrible, en ce jour de vacances,
une mère de famille et ses trois enfants sages
qui vient pour un retrait à l’heure du déjeuner :
le compte est en débit, limite de l’IB*.
Si je fais mon boulot, je retiens le chéquier…
Sans une protestation, la jeune femme est partie,
immédiatement suivie par un homme retraité
dont le compte affichait une insolente santé.
Alors je me refuse à généraliser
mais il en est ainsi dans notre société
et tenir un guichet est un drôle de métier
qui éclaire les textes de Jorion l’érudit,
qui donne une vision de c’qu’il faudrait changer…
Merci pour cette leçon de vie.Vous avez accompli Madame ce qu’il y a de mieux: vous avez fait 4 enfants et vous avez créé une famille.
Je sais de quoi je parle ,moi qui ai perdu un fils de 27 ans.
Il manque une pièce au puzzle.
La logique de la vie est rompue.
La sérénité reste à toujours une chimère…
Chanson pour des gens qu’on empêche de voyager
Quelle France aimons-nous vraiment,
celle de Sarko, mesquine, injuste et vindicative,
ou celle de Django, vivante, chaleureuse et humaine ?
Ma première guitare
J’avais quinze ans,
C’était le temps
De ma première guitare,
Et tout ce temps
Revient souvent
Du fond de ma mémoire.
Ces quinze ans-là
C’était Django
Qui les mettait en fête.
En ce temps-là
C’était Django
Qu’on avait dans la tête.
Dans sa musique, il y avait comme une odeur de feu de bois,
Il y avait un je-ne-sais-quoi,
Moitié Harlem,
Moitié bohème.
Et sur tout ça passaient, joyeux, de merveilleux nuages,
Pareils à ceux
Qu’ont dans les yeux
Tous les gens du voyage.
Depuis ce temps,
J’ai eu le temps
De changer de guitare,
Et le gitan
De mes quinze ans
Est là dans ma mémoire.
Et, bien des fois,
C’est malgré moi,
Il me vient quelques notes
Comme un refrain
Venu soudain
Du fond d’une roulotte.
Alors sous mes doigts monte l’odeur du feu de bois,
J’entends comme un je-ne-sais-quoi
Moitié bohème
Moitié Harlem.
Et sur mon coeur passent, joyeux, ces merveilleux nuages
Pareils à ceux
Qu’ont dans les yeux
Les enfants du voyage.
(Paroles : Jean Broussole / Musique : Sacha Distel – 1978)
onreflechit@yahoo.fr