La Libre Belgique : Cher Frank Vandenbroucke, jetez votre plan sur les travailleurs malades de longue durée à la poubelle ! le 27 avril 2025
Signal faible : un syndicaliste de la CSC belge utilise un extrait issu de ChatGPT dans une carte blanche pour critiquer les mesures du gouvernement belge de coalition « Arizona ». Comme ça, en passant… comme si c’était normal. « ChatGPT l’a dit, alors… » Comme si ChatGPT était une voix banale au débat.
On voit donc bien que les êtres humains sont déjà prêts, depuis quelques temps déjà, à attribuer une valeur significative aux productions des IA dans un débat quotidien, ou politique. Sans compter les millions d’étudiants et de travailleurs qui lui délèguent déjà leurs propres tâches. Ce constat est purement descriptif. Avant de juger, de condamner, il importe de comprendre.
La fameuse barrière « homme-machine » est tombée, d’un point de vue anthropologique. ChatGPT est déjà « un des nôtres ». C’est même devenu, dans cette tribune, un camarade de la lutte syndicale.
Est-ce que ChatGPT a vraiment un avis ici ? Ou est-ce un artefact du prompt, donc du demandeur ?
Il faudrait tester 1000 prompts différents pour mesurer la robustesse du retour de l’IA.
Est-ce que l’IA a un avis ou bien est-ce une girouette plus ou moins aléatoire ?
Si 90% des prompts donnent une réponse qui va dans le même sens, on a ce qui ressemble à un avis de l’IA.
Ensuite, sur quelles données a-t-on formé l’IA ?
L’avis IA reflète t il un consensus issu des données d’apprentissage ?
A-t-on pondéré de la même manière données de littérature scientifique et avis tiktok d’électeurs MAGA ?
Quelle est la valeur réelle, opératoire, de ce retour de l’IA ?
Pourquoi un expert du syndicat belge CSC, qui dispose d’un service d’étude, préfère citer ChatGPT plutôt que des économistes reconnus ?
Comme si ChatGPT était davantage crédible, car dépassionné, dans le débat traditionnel syndicat vs patronat, que les principaux intéressés. Comme si le syndicaliste ignorait que les IA sont développées par des émanations de riches milliardaires des technologies de l’information, assez peu enclins à défendre les droits syndicaux.
Qui maîtrise ces algorithmes ? Sont-ils capables d’une réflexion réellement autonome, et de valeur ? Les IA vont-elles se révéler en moyenne plutôt humanistes, transhumanistes, néoliberales, socialistes, communistes ou décroissantes ? Et ceci à l’insu de leurs propres créateurs, en contradiction avec la pensée de leurs maîtres ? Certains courants de pensées se révèleront-ils alors plus rationnels que d’autres, selon la froide logique des IA ?
Existe-t-il, au fond, une Vérité politique, qui transcende toutes les formes d’intelligence ?
On imagine déjà, si l’IA augmente encore sa fiabilité et démontre la rigueur, la force et la valeur de ses propositions, si elle permet d’engranger des victoires concretes pour ceux qui l’utilisent, si elle se révèle un game changer stratégique et tactique, qu’on lui demande rapidement d’arbitrer tous nos débats éthiques et politiques, et qu’elle soit notre ingénieur, notre médecin, notre avocat, notre enseignant, notre collègue, notre ami, notre confident.
Lui demandera-t-on un jour de nous sauver de nous-mêmes, et d’assurer notre propre survie ?
Lui confierons-nous un jour, dans un élan d’infinie confiance, comme on l’a confiée aux dieux depuis des millénaires, la somme de toutes nos existences ?
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