Illustration par Stable Diffusion (+PJ)
Un article par Shayla Love dans le Guardian en date d’hier, 13 novembre 2023 : Natural remedies might not be better – so why do we still prefer them?.
L’article de Shayla Love commente un article scientifique de la plume de Tianyi Li et David Gal, intitulé celui-ci : Consumers prefer natural medicines more when treating psychological than physical conditions, le 24 juin 2023.
Deux formulations légèrement différentes donc « Les remèdes naturels ne sont pas nécessairement meilleurs – alors pourquoi les préférons-nous quand même ? » et « Les consommateurs préfèrent les remèdes naturels davantage quand il s’agit de traiter les troubles psychiques que physiques », deux conclusions fondées cependant sur les mêmes résultats d’enquête.
Voici le sommaire de l’article scientifique :
« Les consommateurs préfèrent généralement les médicaments naturels aux médicaments synthétiques, un phénomène connu sous le nom de « préférence naturelle ». Fondée sur six études expérimentales et une étude d’archives, la présente recherche montre que si les consommateurs préfèrent généralement les médicaments naturels aux médicaments synthétiques, cette préférence est plus marquée lorsque l’objectif est de traiter des troubles psychologiques plutôt que physiques. Les données relatives au processus indiquent un mécanisme important qui explique la préférence naturelle plus marquée pour le traitement des troubles psychologiques : Les consommateurs s’inquiètent davantage de l’altération de leur véritable personnalité lorsqu’il s’agit de traiter des troubles psychologiques, et ils considèrent que les médicaments naturels sont moins susceptibles que les médicaments synthétiques d’affecter leur véritable personnalité.
À molécule égale, apprend-on, la variante naturelle du médicament est en général moins efficace, en raison de la présence d’impuretés, qui sont absentes de la variante synthétique. On pourrait considérer du coup que le consommateur moyen se trompe en préférant la variante naturelle moins efficace, mais c’est là que réside l’information neuve : la moindre efficacité n’est pas ce que le consommateur redoute mais précisément ce qu’il recherche car il conçoit intuitivement la variante synthétique comme trop forte, susceptible d’altérer son « moi profond », que la variante naturelle laisse indemne. D’où la justification sans doute de « médecine douce », pas plus douce au corps probablement que la médecine synthétique, la molécule étant identique, mais plus douce à l’âme, dont elle respecterait en principe l’autonomie.
L’ensemble des auteurs, journaliste comme scientifiques, soulignent que le « moi profond » n’est pas un concept scientifique mais une notion de « psychologie populaire » centrée dans sa représentation sur le cerveau et relativement indépendante des particularités physiques du reste du corps, mais pas à négliger pour autant puisque notre image spontanée de nous-même repose sur cette « psychologie populaire », par opposition à la « psychologie scientifique » qui nous est, à la plupart d’entre nous, étrangère. Selon cette philosophie spontanée, si le « moi conscient » est en accord avec son « moi profond », les conditions sont réunies pour une humeur joyeuse, rapportent Li et Gal.
On trouve peut-être là, dans ces défenses édifiées autour du « moi profond », l’origine de l’aversion de certains vis-à-vis du vaccin COVID à ARN messager, conçu comme « synthétique », lesquels envisagent avec davantage de sympathie le vaccin à virus atténué, conçu comme « naturel ».
L’article du Guardian va plus loin que l’article scientifique en s’intéressant aux sources religieuses éventuelles de la préférence du « naturel » vs l’« artificiel ou synthétique ». On y cite en particulier un professeur d’université affirmant que « La ‘nature’ est devenue un substitut de Dieu, et ‘naturel’ est synonyme de ‘bénit’ ». La nature, d’une part, comme ayant été créée par Dieu durant les sept jours de la Genèse, le « synthétique », l’« artificiel », d’autre part, étant l’œuvre de la créature pécheresse ayant goûté au fruit de l’Arbre de la connaissance, en infraction avec l’interdiction expresse de son divin Créateur. (Ouh ! le vilain et la vilaine et leur ARN messager !).
Illustration par DALL·E (+PJ)
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