Illustration par DALL·E (+PJ)
L’espace des images possibles est de très grandes dimensions, une immense majorité serait « de la neige » comme sur les écrans d’autrefois.
L’espace des images que nous pratiquons est construit historiquement (et anthropologiquement) sur le passage d’information (plutôt à sens unique, d’ailleurs, plus à sens unique que la voix, qui peut faire l’objet de modulations réciproques, dont les « chjami e rispondi » des chants corses (et pas que) sont un exemple).
Les images qui ont répondu à cet usage contiennent « donc » des informations, éventuellement hiérarchisées (comme les tableaux de Hyeronimus Bosch bien connus, ou les Carpaccio). Mais la plupart de ces informations sont reliées à des catégories du discours, lequel est linéaire et assez dépourvu d’ambigüité (que celles et ceux qui ne s’expriment qu’en contrepèterie et jeux de mots me pardonnent).
De ce fait, nous avons surtout fréquenté un sous-ensemble d’images à lecture « orientée » sinon unique.
Mais faire porter deux « significations linéaires » (ou plus) dans une même image est possible, et en soit pas nouveau, l’exemple classique étant le « canard-lapin ».
On est là dans des territoires qui sont des « vallées de l’étrange », assez souvent pour les humains (« uncanny valley »), le système de corrélation du cerveau (+ yeux) ne sait pas très bien quoi faire de cette double possibilité et erre sans trouver le fil de la suite (le « conatus » est retourné sur lui-même dirait Spinoza (?) ). L’odorat et le goût ne nous posent pas ce type de malaise, il me semble, le toucher faut voir (les enfants auxquels on fait toucher des objets connus avec une paire de doigts préalablement croisés, ça leur fait drôle, mais moi ça fait un peu longtemps).
Il est intéressant que l’IA parcourt avec une égale facilité les terrains « à une signification » ou « à deux significations » (etc. certainement) et cela évoque en effet la stéganographie, mais cela me semble limite anecdotique.
La chose me semble au fond plus intéressante à l’envers : en lisant des données existantes, ne pas en tirer qu’une signification (et pas tant que ça en synthèse, même si on peut reconnaitre une forme d’exploit en comparaison d’un humain).
Le fait que l’IA puisse extraire un ensemble de significations « étendu » à partir d’un certain jeu de données (empirique) et non pas une seule « chaine causale », disons, pourrait être un début de dé-TINA-isation des interprétations des données économiques et sociales. Elles ne disent pas que « c’est la gestion publique de tels services qui les rends mal-opérants », elles diraient plus de choses.
Mais là encore, quel relai pour donner forme à cette pluralité sans la projeter de nouveau sur les intérêts d’un petit nombre (of the few and not of the many) ? Que faire pour que la pluralité ainsi révélée s’allie à la réciprocité (qui obligerait les significations des plus nombreux (the many) à avoir une place dans l’interprétation faite par une IA ?
Le terrain de l’intelligence est en effet en train de se recomposer. Comment mutera la « bêtise systémique » (que décrivait Bernard Stiegler) ?
Illustration par DALL·E (+PJ)
Laisser un commentaire