Retranscription de Notre contribution à la pensée économique, le 1er décembre 2022
Rassemblons-nous autour d’un nouveau paradigme en économie et en science financière. Écrivez-moi ici !
Bonjour, nous sommes le 1er décembre 2022 et aujourd’hui, cet exposé s’intitulera « Notre contribution à la pensée économique ».
Or, ce n’est pas une manière de dire « Ma contribution à la pensée économique » avec un nous de majesté. Non, c’est « notre »… Le nous en question, c’est vous et moi. Mais je vais expliquer de quoi il s’agit.
Je suis victime, comme n’importe qui qui publie quelque chose sur la toile ou d’une manière ou d’une autre dans un réseau social ou autrement, je suis victime depuis que je suis là sur la toile, c’est-à-dire depuis 2007, de trolls. Les trolls sont là. Ils vous insultent. Ils essayent de vous faire douter de vous-même. Ils vous disent que le monde entier est monté contre vous et c’est normal parce que vous êtes moche, etc. mais quand on atteint mon âge, les trolls se spécialisent dans le message suivant : « Vous êtes vieux donc désespéré ».
Je suis psychanalyste par ailleurs et donc, quand j’entends ça [rires], je me dis : « Bon, il y a des vieux désespérés qui ne savent pas comment occuper leurs journées et ils l’occupent comme cela ». Mais l’idée est assez commune bien entendu que si l’on est vieux, on est désespéré. C’est lié à la triste réalité qu’on souffre peut-être ici ou là : ça augmente au fil des âges, mais c’est surtout malheureusement parce que beaucoup de gens, en jetant un regard en arrière, ne sont pas tout à fait satisfaits de la manière dont les choses se sont passées et, en particulier, il y a des regrets. Beaucoup de gens ont des regrets : « Ah, j’aurais dû plus faire ceci ou cela ! ». « Quand on m’a proposé un poste en Afrique, j’aurais dû l’accepter mais je me suis dit que bla bla bla » et ainsi de suite : beaucoup de regrets.
J’ai la chance de ne pas avoir de regrets de ce type-là et j’ai une raison toute particulière pour ne pas être désespéré quand je suis vieux, c’est la chose suivante : c’est que, dans ma vie, je me suis spécialisé à essayer de modifier la manière dont les gens pensent un certain nombre de problèmes. Il y a des cadres à travers lesquels on réfléchit et on appelle ça, voilà, depuis la fin des années 50, on appelle ça, en histoire des sciences, en philosophie des sciences, on appelle ça un paradigme [Kuhn, Thomas S. (1962). The Structure of Scientific Revolutions]. Il y a des paradigmes.
Un paradigme, par exemple, c’est de considérer que l’ensemble du système solaire tourne autour de la Terre, une représentation géocentrique et on oppose à ça à partir, voilà, du 16ème ou 17ème siècle [Nicolas Copernic (1543) De revolutionibus orbium coelestium], une vision héliocentrique avec le soleil au milieu et ça nous oblige à repenser véritablement les choses en termes d’astronomie en particulier.
Autre décentrement de ce type-là, quand Darwin nous dit – j’emploie la phrase expéditive – que « l’homme descend du singe » et que l’idée s’instille petit à petit que effectivement, l’Homme, l’espèce homo est une espèce comme les autres et, finalement, pas très éloignée des autres grands singes comme les gorilles, les chimpanzés, les bonobos, les orangs-outans et effectivement, quand maintenant nous utilisons la génétique et que nous regardons si nous sommes proches de ces animaux-là, eh bien, comme le dit M. Frans de Waal, en fait, nous ne sommes pas proches, nous sommes au milieu. C’est nous qui sommes au milieu des autres grands singes, voilà. Ça conduit à des décentrements.
J’ai essayé de faire ça tout au cours de ma vie dans un certain nombre de domaines. Alors, dans un cas comme moi, pourquoi est-ce qu’on n’est pas désespéré quand on est vieux ? C’est parce que la reconnaissance vient, on adopte petit à petit – ça prend du temps – on adopte petit à petit vos vues et donc, d’une certaine manière, la satisfaction d’avoir vécu ce qu’on avait envie de vivre, elle augmente, elle ne diminue pas. Bon, on peut tomber dans le jardin et se casser la rotule, des choses de cet ordre-là [rires] et la probabilité augmente que des accidents de ce type-là interviennent mais sinon, pour ce qui est d’être désespéré en se disant qu’on n’a rien pu accomplir, là, au contraire, on a cette grande satisfaction.
Alors, très rapidement parce que je vais parler de la pensée économique, quelques exemples. J’ai la satisfaction qu’on vient de consacrer une série de vidéos à ma carrière d’anthropologue qui était ma formation initiale. Vous allez pouvoir voir ça. C’est dans une collection YouTube qui s’appelle « Les possédés et leur monde » où je suis en compagnie d’autres anthropologues dont on retiendra peut-être le nom grâce à cette série et j’ai la chance aussi que je donne encore un cours d’anthropologie après qu’à partir de 2016, qu’on m’ait demandé d’enseigner à nouveau l’anthropologie à l’Université Catholique de Lille. On m’a d’abord demandé d’enseigner la finance. Et puis je donne donc un cours d’anthropologie qu’on appelle « interculturelle » vu le cadre dans lequel ça se donne mais c’est une très bonne idée puisque l’idée d’interculturel attire notre attention sur le fait que le regard de l’anthropologue, ce n’est pas un regard innocent, ce n’est pas un regard qui vient de nulle part, ce n’est pas le regard de l’objectivité absolue, c’est le regard qui vient d’une culture particulière et qui est porté sur d’autres cultures, même si c’est à l’intérieur-même de son propre pays que ces cultures sur lesquelles l’anthropologue porte le regard se trouvent parce qu’il y a une multitude de cultures. Elles peuvent être traditionnelles, qui était la raison pour laquelle moi je suis allé étudier, vivre avec les pêcheurs de l’île de Houat dans le Morbihan, mais ça peut être des groupes tout à fait particuliers [que l’on étudie de cette manière].
Donc, ma carrière d’anthropologue est reconnue. C’est une grande satisfaction. J’ai été formé à la psychanalyse à la fin essentiellement des années 1980 – début des années 1990. Je n’avais jamais utilisé cette formation jusqu’à très récemment. La Covid nous a donné plein de bonnes idées sur la manière d’organiser le travail et je pratique la psychanalyse pratiquement à temps plein, disons, allez, à deux-tiers de temps en ce moment, je peux le dire, à la satisfaction peut-être pas de tous mes analysants et analysantes mais, en tout cas, de certains [rires].
Enfin, sur le plan de l’Intelligence Artificielle qui est un domaine où on m’a fait le grand honneur à une époque où ça n’existait pas pratiquement comme discipline de me faire entrer dans une équipe de recherche à British Telecom en Angleterre, à la fin des années 1980 : 1987 à 1990 en réalité, j’ai travaillé sur un projet d’Intelligence Artificielle qui n’avait pas retenu beaucoup l’attention si ce n’est maintenant parce que les chercheurs sont partis dans une voie de garage dont on nous annonce encore qu’elle va réussir des prouesses extraordinaires mais je ne le pense pas et le moment est venu de se tourner vers le genre de choses que je proposais à l’époque et donc, le moment est véritablement venu.
Donc, sur ces trois plans-là, anthropologie, psychanalyse, Intelligence Artificielle – je dois ajouter que je suis président en ce moment d’une petite start-up qui s’appelle Pribor.io et qui se consacre justement à valoriser les idées que j’avais mises en place dans les années 1980 et auxquelles j’ai continué, bien entendu, de réfléchir depuis dans le contexte d’une évolution considérable quand même de ce domaine qui a beaucoup de réussites à son actif mais qui, pour le moment, dans la voie du deep learning, atteint les limites de ce qu’on pouvait faire et les tentatives de pousser plus loin dans cette même voie ne donnent pas grand-chose.
Enfin, dernier domaine, domaine auquel je me suis consacré finalement, je dirais, officiellement le plus tard parce que mes livres dans ce domaine ont commencé à paraître… Bon, n’allons pas trop vite. J’ai publié en 2002 un ouvrage qui s’appelle : « Investing in a Post-Enron world ». Il y avait un très grand intérêt à l’époque pour l’effondrement de la compagnie Enron. Un éditeur connu, McGraw-Hill, m’avait demandé de faire un livre là-dessus mais ils ont insisté pour en faire quelque chose qui s’adresserait en priorité aux investisseurs, aux gens qui achèteraient des actions, etc. L’idée était : qu’est-ce qui a changé dans un monde après Enron ? Et j’en ai profité, dans ce livre en anglais donc, de placer pas mal d’idées qui étaient des idées je dirais assez originales que j’avais en théorie de formation des prix essentiellement. J’avais beaucoup réfléchi à ça à partir du moment où j’avais analysé mes données de l’île de Houat, sur la pêche à l’île de Houat et ensuite, quand je l’ai utilisé comme socio-économiste pour les Nations Unies dans une douzaine de pays d’Afrique occidentale, d’Afrique de l’Ouest.
J’avais développé des vues sur la manière dont ce type d’activité, la pêche, fonctionne, mais j’avais été obligé de déborder et de produire une réflexion générale sur la formation des prix, constatant que le modèle traditionnel d’interprétation qu’on appelle « la loi de l’offre et de la demande » ne fonctionnait absolument pas sur mes données. Il fallait autre chose et là, je me suis réintéressé au modèle qu’Aristote avait proposé en son temps et, je l’ai remis à neuf. Je l’ai défendu dans des articles en français et en anglais également et donc, il y a eu, là, je dirais, le début pour moi d’une réflexion de type économique un peu différente : out of the box, sortir hors du cadre, dans l’explication de la formation des prix.
Ensuite, il s’est trouvé que le monde, de la même manière que le monde avait apprécié mes talents de mathématicien appliqué en me faisant venir en Intelligence Artificielle, de la même manière, le monde de la finance a apprécié la boîte à outils que j’avais mise au point sur un plan mathématique. On était intéressé en finance, en particulier, on s’intéressait à des gens qui avaient travaillé sur des fusées pour la NASA et on s’est intéressé aussi aux gens qui avaient déjà travaillé dans le domaine de l’Intelligence Artificielle, sachant que c’étaient des gens qui avaient accès à des méthodes peut-être pas plus pointues mais plus diversifiées, qui avaient une bonne boîte à outils. On avait besoin de ça dans la finance et le fait est que j’ai pu constater qu’en 18 ans de « consultant », de « banquier », de personne plus ou moins active dans des projets de pointe comme le trading à haute fréquence ou alors le traitement automatique des demandes comme le système auquel j’ai participé à IndyMac Bank en Californie, à Pasadena, un système de traitement totalement automatisé des demandes de prêt, allant de la demande qui se faisait en ligne à ce moment-là, pour la premières fois [1998-2000], et 10 minutes plus tard, ce qui à l’époque était tout à fait remarquable, 10 minutes plus tard, il y avait la décision d’attribuer le prêt ou non.
Ensuite, à cette époque-là, je me suis retrouvé en position tout à fait particulière, tout à fait privilégiée pour pouvoir prévoir la crise qui se développait à ce moment-là. Je travaillais dans des domaines qui n’étaient pas nécessairement du subprime mais qui étaient apparentés, enfin dans la mesure où le prime est apparenté, sauf la différence, bien entendu, c’est que dans le prime, les gens ont l’argent pour rembourser le prêt. Indymac travaillait dans un domaine qui était à mi-chemin entre du prime et du subprime [« Alt-A »], c’est-à-dire des indépendants aux revenus assez irréguliers qui avaient du mal à présenter des fiches de paie – ils n’en avaient pas – et surtout des preuves que leurs entrées seraient régulières et suffisantes. Je me suis trouvé là et là, j’ai pu…
Bon, 18 ans dans la finance, c’était une fenêtre tout à fait privilégiée sur la manière dont la finance fonctionne véritablement et donc, j’ai eu la chance d’aller au-delà de ce que les manuels vous racontent, que les textes de théorie financière racontent et qui est extrêmement éloigné de la vérité, de la réalité telle qu’elle se passe dans les banques. Et là, j’ai donc commencé à produire des livres comme… le premier s’appelait : « L’implosion », le deuxième s’appelait : « La crise » au moment même de la crise. On s’est intéressé à la boîte à outils que j’avais mise au point en économie, en sciences économiques et en finance, en raison de son efficacité. J’ai écrit donc un livre sur le fait que la crise des subprimes allait se passer qui s’appelle : « La crise du capitalisme américain » (25 janvier 2007) et quand la crise a eu lieu [septembre 2008], on a pu voir que je maitrisais le sujet. Je n’étais pas quelqu’un qui avait dit au hasard : « Il y aura une crise, etc. ». J’ai encore vu ça l’autre jour : il y a quelqu’un qui a dit : « Oui, mais il a dit ça au hasard. Il a dit ça comme ça ! ». Non, non, non, c’est un livre de 250 pages qui expliquait pourquoi il y aurait une crise dans le secteur subprime aux États-Unis et donc quand la crise a eu lieu, j’ai eu une certaine reconnaissance dans ce domaine-là pour avoir compris ce qui allait se passer, pas pour avoir dit en jouant à pile ou face que ça allait se passer, pour avoir expliqué ce qui allait se passer. Bon, et au moment où ça se passe, j’écris des livres qui décrivent en direct ce qui se passe, qui sont en parfaite cohérence, tout à fait compatibles, avec ce que j’ai expliqué sur la manière dont ça allait se passer.
Bon, de fil en aiguille donc, on a commencé à s’intéresser véritablement à ce que je pensais. On m’a même confié un enseignement : on a créé une chaire à Bruxelles, à la VUB « Vrije Universiteit Brussel », le pendant de l’Université Libre de Bruxelles, une chaire qu’on a appelée « Stewardship of Finance » : la finance au service de la société et, malheureusement, je dirais, peut-être pour la popularisation de mes vues, c’était en anglais. Bon, c’était en anglais dans une université néerlandophone alors que j’avais écrit tous mes livres en français jusque-là. Mais, voilà, les idées se répandaient. J’ai continué à écrire des livres parfois en collaboration avec Bruno Colmant, avec Vincent Burnand-Galpin. J’ai continué à écrire dans ce domaine de la finance et il y a donc un corpus original, avec une théorie originale, sur la formation des taux d’intérêt, originale sur la formation des prix, originale sur une représentation globale des rapports entre le capitalisme, l’économie de marché et l’idéologie libérale, un certain nombre de choses, l’idée du « soliton ». L’idée du soliton d’une crise qui a plusieurs facettes qui se combineraient et qui se développeraient, donneraient une ampleur plus considérable à la crise globale du fait de la combinaison d’une mauvaise théorie économique, d’un monde naturel en effondrement du fait de notre activité parce que notre espèce dépasse la capacité de charge de son environnement et en raison de la complexité même. En fait, le fait que, nous, nous sommes à l’intérieur de sociétés de plus en plus complexes en raison des interactions considérables entre les différents individus et nous ne maîtrisons pas ça. Et par ailleurs, nous confions de plus en plus à des machines de prendre des décisions à notre place, même avant l’Intelligence Artificielle.
Alors, pourquoi le titre de ma vidéo ? Pourquoi appeler ça « Notre contribution à la pensée économique » ? Parce que le moment de la reconnaissance, il est là aussi en ce moment. Je ne vais pas vous donner, je dirais, des preuves de ça mais je peux vous le… croyez-moi sur parole, et je crois que le moment est venu – et c’est pour ça que je dis « notre contribution » à ce que vous et moi, vous qui vous êtes intéressés à ces théories particulières, nouvelles que j’ai proposées, qui les appliquez peut-être, qui les diffusez peut-être dans un enseignement, qui entendez peut-être d’autres enseignants en parler de la manière dont j’ai introduit le style. Le moment est venu, je crois, que nous nous rassemblions. La mayonnaise étant en train de prendre. Là aussi, avec un certain retard puisque mes livres sur le sujet ont commencé à paraître en 2002, c’est-à-dire il y a exactement 20 ans. Mais il faut du temps, il faut du temps en particulier, il faut le savoir, si vous proposez un changement de paradigme dans une discipline, à un endroit particulier de la connaissance. Sachez que ça prend un temps énorme pour percoler, pour que les idées se diffusent, mais ça finit par venir. La preuve pour moi dans le domaine de l’Intelligence Artificielle, la reconnaissance, voilà, de ce que j’ai pu faire en anthropologie, le fait que je puisse pratiquer la psychanalyse et maintenant, en ce moment même, le fait qu’une reconnaissance, je dirais, globale de ma contribution personnelle à la pensée économique est en train d’avoir lieu. Mais reconnaissons maintenant son existence en tant que notre contribution à la pensée économique. Faites-moi savoir ce que vous faites. Faites-moi des propositions. Dans un monde post-Covid, nous avons compris qu’il est extrêmement facile de créer ici et là des « universités populaires ». Ça ne coûte rien. Si, ça coûte un abonnement aux versions, je dirais, les plus performantes de Zoom et des machins comme ça : ce sont des sommes absolument ridicules. De même que, quand j’avais lancé mon blog, ça m’avait coûté 60 €, ce qui est quand même un tout petit investissement pour ce que ça a pu produire par la suite.
Alors, voilà, c’est un appel. Manifestez-vous. Faisons des choses ensemble. Le moment est venu, le moment est propice. La mayonnaise est en train de prendre. On commence à s’intéresser véritablement, comme ça a été le cas il y a 2 ou 3 ans pour ce que j’avais pu faire en Intelligence Artificielle : le moment est venu maintenant que je communique davantage avec vous par des leçons, par des séminaires qu’on organise, par des choses de cet ordre-là. Le moment est venu et nous savons, nous avons les outils et nous avons compris, dans un monde post-Covid (j’espère post-Covid !), comment on peut faire les choses autrement, en particulier en restant chez soi et avec des moyens extrêmement modestes comme investissement de départ.
Voilà, j’attends de vos nouvelles. À bientôt !
Laisser un commentaire