Voilà qui est bien délicat, que dire de François Ruffin, dont j’ai une certaine méconnaissance… Il m’intéresse à cause de son positionnement qui remet sous les projecteurs les agissements des entreprises et de ceux qui les dirigent en n’étant plus des capitaines d’industrie, mais des comptables-évaluateurs de productivité en totale méconnaissance de la pertinence de ce qu’ils produisent. La pertinence du produit est laissée à l’appréciation des actionnaires, qui se comportent comme des acheteurs de production, misant sur une ligne d’assemblage comme on mise sur un numéro à la roulette, et l’abandonnant sans remords pour une autre dans un mépris total de ce qui pourrait être développé ou créé, dans un mépris total des bureaux d’études et des ingénieurs…
Ce mépris se caractérise dans les doctrines du haut management français par d’incompréhensibles volontés d’abandonner les noms historiques des entreprises pour en dévaluer le potentiel de sympathie, pour détruire les identités au travail en leur sein, pour désaffilier l’outil industriel de l’attachement suscité auprès de ses citoyens nationaux.
Une marque comme Air France, vous comprenez, quelle poisse pour ces dirigeants nouveaux genre, qui vendent à la découpe ici pour avoir les moyens de racheter ailleurs ce qu’ils se sont refusé à développer sur place, dans une gestion de joueur de casino surfant sur sa chance et ses opportunités. Or les marques suscitent tout de suite un émoi dans la population lorsqu’on les vend, ou les liquide (le peuple comprenant bien que sous prétexte de gestion, on s’attaque par des externalités à son patrimoine et à ses efforts).
Autant les Américains veillent sur leurs marques (car c’est un potentiel commercial gratuit, issu d’un héritage et d’investissements amortis depuis longtemps), autant nos dirigeants français « new age » n’ont cure de tout cela. SNCF//Alstom//Total//Suez//EDF//GDF//France Télécom, etc. Mais il faut bien constater que nos médias dans un concert de convergences suspectes, font tout pour ne jamais parler d’industries, d’entreprises, d’économie (seulement pour nous parler de la dette et pas de l’activité du développement ou de l’emploi), et se mobilisent uniquement sur le sociétal et le sécuritaire de façon obsessionnelle, maladive, envahissante au point que n’existe nul autre sujet. Disparus, l’écologie, la soutenabilité de la croissance, la réalité physique de ce qui est prôné, le patrimoine industriel, historique, disparu l’aménagement du territoire… etc. etc.
Donc Ruffin, parmi les autres politiques a sa petite musique là-dessus qui me plaît bien, mais qu’il a du mal à imposer en interview (je l’ai vu avec Apolline de Malherbe). Face à des journalistes malicieusement autistes, il faut faire comme le Georges Marchais de Thierry Le Luron, « Vous venez avec vos questions, et moi je viens avec mes réponses ». Car le journaliste interviewer a tendance à transformer l’homme politique en éditorialiste de plateau de télévision commentant les sujets qu’on lui impose, loin de son coeur de métier.
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