Billet invité.
Après la dégringolade du bitcoin qui a fait la une de la presse mondiale, les alertes sur la dangerosité des crypto-monnaies se succèdent. Dernier épisode en date, la semaine dernière, la plate-forme d’échanges japonaise Coincheck s’est vu subtiliser l’équivalent de 430 millions d’euros en NEM par des hackers. Le plus grand casse à ce jour de crypto-monnaies !
L’année dernière, le Japon n’avait pu empêcher le retentissant dépôt de bilan de la société d’échanges de bitcoins Mt. Gox en dépit de ses tentatives d’encadrement du marché de 2014. Les casses ou détournements de fonds sur les plates-formes d’échange se multiplient un peu partout dans le monde. Phénomène inquiétant, les attaques font preuve d’un fort savoir-faire technique. La cyber criminalité haut de gamme accompagne le développement du marché. La société Ledger, spécialisée dans les coffres-forts virtuels, ne s’en plaint pas.
Les mesures nationales se multiplient, en attendant que le G20 de mars prochain, qui est saisi, annonce de nouvelles dispositions encore à l’étude. Les gouvernements allemand et français présenteront des propositions de régulation communes. Figureront parmi celles-ci, sans nul doute, un contrôle plus strict des plateformes de transactions, un point faible évident. Mais Bank of America, Citigroup, JP Morgan, Capital One et Discovery n’ont pas attendu qu’une réglementation prenne corps. Dès samedi dernier, elles ont interdit les achats de bitcoin avec les cartes de crédit qu’elles ont émises à destination de leurs clients. Certains de ceux-ci les auraient utilisées et se retrouveraient incapables de rembourser leur crédit en raison de la chute de la valeur de la crypto-monnaie.
Mais sans doute faut-il trouver une autre raison à leur interdiction, le volume de ces opérations n’étant pas connu. Application incontrôlée de la technologie Blockchain, que les banques cherchent à utiliser sous une forme hybride protégeant leur modèle économique qui repose sur leur position de tiers de confiance, les crypto-monnaies peuvent prétendre à une vie autonome. Et par ailleurs les banques seraient menacées si les banques centrales décidaient d’émettre leur propre crypto-monnaie tout en permettant aux particuliers d’ouvrir directement un compte dans leurs livres.
La Banque des règlements internationaux (BRI) a étudié les variantes de crypto-monnaies émises par les banques centrales. Toutes s’y intéressent discrètement. Comme les banques commerciales, doivent-elles prendre l’initiative pour ne pas se trouver prises de court et prendre la décision d’émettre leur propre crypto-monnaie ? Avec quels objectifs ? Le saut ne serait pas si grand après tout, les banques centrales ont déjà leur propre monnaie, dont l’usage est réservé, les droits de tirage spéciaux (DTS).
La Corée du Sud et la Chine ont déjà pris des mesures contraignantes, la Russie s’apprête à les suivre et l’Inde a prohiber les crypto-monnaies. Cette semaine, Facebook a annoncé l’interdiction de toute publicité relative à celles-ci afin de déjouer les escroqueries. Mais les commentateurs sont sceptiques et doutent de la possibilité de stopper la fièvre, le marché n’ayant par exemple pas donné de signe de fléchissement après le dernier casse japonais. En particulier en Asie, haut-lieu des transactions.
Interrogé par l’AFP, Robert Ophèle, le président de l’Autorité des marchés financiers française (AMF) juge qu’il serait « désastreux » qu’elles deviennent « un instrument banalisé du circuit économique ». La bataille n’est pas gagnée d’avance, les crypto-monnaies s’inscrivant dans la logique spéculative des activités financières en général. Les raisons de les utiliser ne manquent pas, par exemple, lorsqu’il s’agit de contourner les contrôles des transferts bancaires et monétaires des gouvernements. En Floride, on enregistre actuellement la venue de capitaux provenant d’Amérique latine sur un marché immobilier où les achats en bitcoin ne sont pas dédaignés. Le Forum de Davos, occasion de nombreux échanges de vue sur le sujet, a également permis à Jamie Dimon, le Pdg de JPMorgan Chase, de revenir de manière remarquée sur ses propos en cessant de qualifier de fraude le bitcoin, sa clientèle fortunée réclamant d’y avoir accès.
Dans les coulisses, le malaise grandit quant au degré de disruption que ces nouvelles monnaies pourraient avoir sur les secteurs bancaires et des paiements. Pour prendre un exemple de son ampleur potentielle, la société américaine Ripple, à l’origine de la crypto-monnaie XRP, se donne comme objectif de prendre la place de SWIFT, ce réseau qui relie 11.000 banques et institutions mondiales et fournit des services sécurisés de messagerie de transfert financier.
Les crypto-monnaies ne devraient pas être « banalisées » juge l’AMF qui les prend avec des pincettes. Mais prend-elle bien en compte les grands changements qui attendent le système financier ?
@Hervey Addiction ! Vous y allez peut-être un peu fort, non ? 😉 En fait, dans un premier temps, je…