Illustration par ChatGPT 4o
C'est vrai qu'on devient super-paresseux. J'ai voulu voir jusqu'où on pouvait aller avec le nouveau ChatGPT o3.
P. J. :
Ce qui a été résumé dans votre rapport : « Qu’est-ce qu’une IA générative comprend ? », sous forme de règles (générées par les humains) par opposition à des corrélations statistiques (générées par les LLM) me rappelle les objections d’Aristote à la vision de Platon d’un monde entièrement « participant » aux nombres et son propre développement d’une vision des mathématiques où celles-ci offrent des outils pour « styliser » le monde plutôt que pour le modéliser. Je crois me souvenir que cela se trouve dans la Métaphysique d’Aristote. Pouvez-vous rappeler ce que disent Hamelin (1909) et Ross (1923) à ce sujet ?
ChatGPT o3 :
Thought for 3 m 30 s
Voici un résumé concis de la manière dont Octave Hamelin (Le Système d’Aristote, éd. 1909, en particulier le chapitre XVI) et W. D. Ross (Aristotle, 1923 ; longue note dans Metaphysics vol. I §B.5 & vol. II sur M–N) interprètent la célèbre querelle entre Aristote et Platon sur « les nombres partout » et le statut des mathématiques dans la Métaphysique. Je me concentre sur le point que vous soulevez, à savoir la différence entre les règles qui « modélisent » la réalité (vision platonicienne, vision des nombres idéaux) et les mathématiques en tant qu’outil qui se contente de « styliser » ou de schématiser la réalité (vision d’Aristote).
1 Hamelin (1909)
Thème | Lecture de Hamelin |
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Point de départ platonicien | Platon considère les nombres (arithmoi) et les figures géométriques comme des substances séparées auxquelles tous les objets sensibles « participent ». |
Critique d’Aristote | Dans les Livres M–N, Aristote refuse tout domaine mathématique séparé. La série numérique n’est pas une substance ; c’est un attribut de la quantité et de la pluralité, qui n’existe qu’en étant divisible et comptée dans les choses changeantes. |
Abstraction (aphairesis) | Le mathématicien « abstrait » la quantité des corps matériels ; l’abstraction est une opération mentale, non une scission ontologique. Les mathématiques stylisent donc le monde : elles extraient l’aspect quantitatif utile pour la démonstration, sans reproduire la réalité terme à terme. |
Outil, non ontologie | Les mathématiques fournissent « l’équivalent d’une cartographie » de la nature, mais n’en constituent pas le mobilier. La métaphysique commence là où les mathématiques s’arrêtent : avec les causes et la substance. |
Résultat | Hamelin présente ainsi Aristote comme refusant la “métaphysique numérique” de Platon au profit d’un usage scientifique et pragmatique des mathématiques : indispensables pour styliser l’expérience, mais jamais fondement de l’être. |
2 Ross (1923)
Thème | Lecture de Ross |
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Place dans la Métaphysique | Ross commente longuement B 5 et M 2, où Aristote teste si les objets mathématiques sont des substances. La question‐clé est la séparabilité. |
Réponse d’Aristote | Pour Ross, Aristote répète que les objets mathématiques n’existent pas “absolument” (οὐχ ἁπλῶς ἔστιν) : ils existent dans les corps sensibles et par abstraction, donc ne sont pas des substances. L’argument décisif de M 2 : traiter lignes, plans, etc. comme indépendants conduit à une « accumulation absurde » d’entités. |
Rôle positif des mathématiques | Les mathématiques restent précieuses pour leurs démonstrations exactes ; l’abstraction permet d’isoler l’invariant quantitatif. Mais ces preuves n’exposent pas les causes des êtres naturels ; seul le physicien et la « philosophie première » le font. |
Ross versus Platon | Ross souligne que le projet d’Aristote est « ouvertement anti‐platonicien » : les nombres ne sont pas des principes premiers ; ce sont des instruments logiques pour comprendre le monde sensible. |
Note érudite | Ross (t. I 223, 247) relie l’aporía de B 5 à l’attaque de M 2 et N 1 ; la recherche récente a confirmé ce lien. |
3 Verdict convergent
Les deux commentateurs soulignent la distinction qui vous intéresse :
- Platon : “tout est nombre” → la réalité est littéralement modélisée par les formes numériques.
- Aristote : “stylisation” → les mathématiques stylisent la réalité par abstraction ; elles fournissent des règles claires de raisonnement mais ne dictent pas le plan ontologique des êtres.
Hamelin insiste sur cette idée avec le vocabulaire idéaliste français (« stylisation scientifique »), tandis que Ross l’exprime en termes analytiques anglo-saxons (« objets mathématiques existant seulement en abstraction »). En langage moderne : les règles, chez Aristote, sont nos projections heuristiques, alors que, pour Platon, elles constituent le code natif du monde.
C’est exactement la tension que votre parallèle entre règles humaines et corrélations statistiques des LLMs remet en lumière.
Conclusion ? ChatGPT o3 nous permet effectivement de devenir super-paresseux. Sérieusement, les intellectuels ont-ils encore une raison de quitter le bord de la piscine 😜 ?
Illustration par ChatGPT 4o
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