La scène se passe avant-hier, jour de Noël. Tout était fermé bien entendu mais comme nous avions fait la fine bouche devant le petit-déjeuner « au buffet » de l’hôtel où nous étions descendus à Granville, à la double représentation anticipée de la tranche de fromage industriel sous cellophane et du patron fronçant les sourcils si nous descendions à 9h01, passée l’échéance fatidique qu’il nous avait posée ayant mieux à faire un matin de Noël que de poireauter à nous attendre, nous étions à la recherche de deux cafés-crème : un pour chaque.
Et à Pontorson, nous avons trouvé un café-tabac-buraliste ouvert, la foule des amateurs de loto et autres tiercés débordant en une longue file sur le trottoir. Dans la salle, là aussi, la même foule : pas une table où s’asseoir et nous nous apprêtions à ressortir de l’établissement quand un monsieur d’une soixantaine d’années, assis seul à une table pour quatre, nous a fait un petit signe, nous invitant à partager sa table, ce que nous avons fait avec reconnaissance et satisfaction.
En fait, il n’était pas seul car sa femme l’a rapidement rejoint, ayant à la main deux jeux à gratter : un pour lui et un pour elle. Ils étaient comme nous, voyageurs, venant eux de Fougères, comme ils entreprirent alors de nous l’expliquer. Et là, la pensée m’est venue : « Ces personnes sont vraiment très aimables : je vais les faire gagner ! ».
J’aimerais ajouter que la pensée m’est apparue aussitôt saugrenue : que je connais non seulement les lois de la physique mais que j’y crois, et que je sais que nul, et en particulier pas moi, ne dispose du pouvoir de faire gagner quiconque au loto. Et pourtant, curieusement, ce matin-là, pas du tout ! Je me disais au contraire en les regardant gratter : « Allez-y, gagnez ! ».
La dame s’est vue gratifier de 50 euros, et le monsieur, de 10. Et à la pensée qui me revient de leurs visages épanouis, je me dis, comme au moment-même : « Je suis vraiment bien content de les avoir fait gagner ! ».
Illustrations par DALL·E … ressuscité !
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