Illustration par DALL·E.
Christine Laplace :
Bonjour Monsieur Jorion, j’ai été étonnée de trouver un papier récent du renommé
Jean-Paul Delahaye intitulé :
Simulation : la thèse de l’illusion se précise (je pensais que l’hypothèse fumeuse de
Nick Bostrom n’était reprise que par les pseudo-sciences). Or Delahaye confirme que l’hypothèse est prise en considération par de très sérieux scientifiques notamment par une équipe de chercheurs canadiens dont le travaux présentés prennent en compte la nature quantique de notre monde. « Sommes-nous les marionnettes dont les fils sont tenus par des êtres supérieurs qui nous auraient programmés dans leur super-ordinateurs, la question est bien plus sérieuse qu’on l’imagine », dit-il. Heureusement Delahaye semble circonspect dans son article : il a la prudence de se contenter de rapporter les arguments pour ou contre des scientifiques qui s’y intéressent.
Je ne parviens pas à comprendre qu’une hypothèse aussi rocambolesque de prime abord puisse faire débat dans les milieux scientifiques : en l’absence de preuves, simplement à travers un jeu de probabilités certains se plaisent à affirmer la validité d’une telle invraisemblance initialement véhiculée par la science-fiction. J’ose espérer que ce type d’ approche reste marginal.
Que pensez-vous de tout cela ? L’approche scientifique ne se détériore-t-elle pas ? Est-elle déformée par la vulgarisation ? La spéculation risque-t-elle d’éloigner la rigueur scientifique ? Où allons-nous ?
Paul Jorion :
Merci Madame, je crois qu’il faut en effet avoir vécu une vie de mathématicien dans sa tour d’ivoire pour prendre l’hypothèse d’un monde entièrement programmé au sérieux, et plus spécifiquement tout ignorer du mécanisme de l’évolution biologique.
Si nous prenons l’être humain comme exemple, nous sommes une excellente mécanique certainement mais nous ne sommes pas la solution optimale : la solution optimale permettrait au poignet d’opérer une rotation de 360° et aurait utilisé la roue un peu partout dans notre corps comme nous l’avons fait nous spontanément aussitôt que nous avons créé des robots. Et, comme je le rappelle souvent : l’approche optimale nous aurait pourvu de l’œil mieux conçu du poulpe où le réseau sanguin est à l’arrière du nerf optique et non devant comme chez nous où il obscurcit partiellement l’image et requiert une astuce cérébrale qui permet d’ignorer l’image de ces petits vaisseaux sanguins, etc.
Pourquoi aussi un programmeur inventerait-il pour les animaux, plusieurs méthodes distinctes pour respirer, pour voler, pour nager, etc. au lieu de n’avoir retenu que la méthode optimale ?
Donc, tout à fait d’accord avec vous : la simulation est une hypothèse de savant distrait. Il est regrettable qu’ils soient si nombreux !
Illustration par DALL·E.
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