Illustration par DALL·E (+PJ)
Dans son récent ouvrage L’esprit artificiel (2024), Raphaël Enthoven rapporte qu’au grand match de l’auteur contre ChatGPT au bac de philo *, le Grand Modèle de Langage a obtenu 11/20 et lui 20/20.
Les deux dissertations peuvent être lues sur le site du Figaro.
J’obtiens moi de GPT-4, à partir du même prompt *, une dissertation significativement différente de celle soumise au bac le 14 juin 2023. Je la présente ici, de même que celle que Claude 3 (sorti le 4 mars 2024) aurait rédigée s’il avait été disponible à l’époque.
[GPT-3.5 aurait-il été sollicité ce jour-là, alors que GPT-4 était disponible depuis le 14 mars 2023 – dans une perspective de handicap : « Course de chevaux ou épreuve sportive où l’on impose aux meilleurs concurrents certains désavantages au départ afin d’équilibrer les chances de succès » ?].
Avis aux profs de philo : les candidats méritaient-ils les notes reçues, et surtout, le nouveau venu, Claude 3, s’en serait-il mieux tiré que ChatGPT ?
GPT-4 :
Introduction : Le carrefour de la raison et du bonheur
Dans le théâtre grandiose de la philosophie, le bonheur a toujours été l’étoile que tous les regards cherchent à contempler. Mais est-ce dans le ciel de la raison que cette étoile brille le plus vivement ? Notre quête du bonheur, souvent décrite comme une odyssée émotionnelle, pourrait-elle être en réalité une expédition guidée par la boussole de la raison ? L’étymologie du mot « bonheur » nous invite à une réflexion profonde : issue du latin « bonum augurium », elle signifie « bon augure ». Est-ce à dire que le bonheur est le présage favorable que la raison sait interpréter ?
Dans ce voyage au cœur de la raison et du bonheur, nous explorerons non seulement les paysages philosophiques familiers d’Aristote et d’Épicure, mais nous nous aventurerons aussi dans les contrées moins parcourues où Freud et Nietzsche, avec leur esprit parfois provocateur, ont osé poser leurs pieds. En route, nous découvrirons peut-être que le bonheur, loin d’être une simple affaire de logique ou d’émotion, est une alchimie plus subtile, où la raison et le cœur doivent danser ensemble, non sans quelques pas maladroits.
Première escale : La raison, capitaine vers le bonheur ?
Naviguons d’abord vers les eaux philosophiques d’Aristote, pour qui le bonheur est l’activité de l’âme conforme à la vertu, un exercice de la raison en quête d’excellence. Dans cette optique, le bonheur devient le nord de notre boussole morale, où la raison est le vent qui pousse nos voiles. Imaginez-vous en train de diriger votre navire, non pas en suivant les caprices de l’océan, mais en calculant votre trajectoire avec la précision d’un navigateur expérimenté. C’est une navigation où chaque choix est une délibération, chaque action une conséquence de notre boussole intérieure : la raison.
Pourtant, ce cap peut sembler trop calme pour les marins en quête d’aventures. Épicure, avec un sourire malicieux, nous rappelle que le plaisir, et non la vertu, est le véritable vent favorable. Mais attention, ce n’est pas le plaisir des tempêtes passagères qu’il chérit, mais celui de la brise légère et constante : un plaisir guidé par la raison, qui sait éviter les excès pour ne pas s’échouer sur les récifs de la douleur. Ici, la raison n’est plus capitaine autoritaire mais un sage compagnon de voyage, conseillant quand il faut tendre les voiles ou chercher refuge dans un port sûr.
Deuxième escale : Quand la raison mène à la tempête
Cependant, la traversée n’est pas sans turbulences. Sénèque, stoïcien émérite, nous avertit : la raison seule peut nous rendre indifférents aux tempêtes de la vie, mais à quel prix ? Devenir insensible aux vagues de la fortune et aux alizés du désir peut certes stabiliser notre navire, mais risque aussi de nous laisser à la dérive, sans joie ni tristesse, dans un océan d’indifférence.
Et que dire des tourbillons dans lesquels Nietzsche nous jette, affirmant que la quête du bonheur est une marée illusionnée, une volonté de puissance mal dirigée ? Pour lui, c’est en naviguant contre les vents, en affrontant les tempêtes de l’existence avec passion et sans regret, que nous devenons qui nous sommes. La raison, dans ce récit, semble être reléguée au rang de simple matelot, tandis que c’est le courage de vivre qui tient la barre.
Troisième escale : L’harmonie des contraires
Mais alors, doit-on choisir entre la tranquillité de la raison et les tempêtes de la passion ? Spinoza, en bon cartographe de l’esprit, nous propose une carte où raison et émotion ne sont pas des îles isolées mais des continents reliés par des ponts de compréhension. Pour lui, le bonheur est la paix intérieure qui naît de la connaissance de soi, un équilibre délicat où la raison éclaire nos désirs sans les étouffer.
Freud, le psychanalyste navigateur, explore les profondeurs de l’iceberg de notre psyché, révélant que sous la surface calme de la raison se cachent des courants tumultueux de désirs inconscients. Le bonheur, alors, serait de naviguer avec prudence entre ces courants, en reconnaissant nos désirs sans les laisser prendre le contrôle de notre bateau.
Épilogue : Au-delà du « Oui, mais… » – Une Convergence Lumineuse
En concluant notre voyage à travers les méandres de la raison et du bonheur, revenons à notre point de départ, mais avec une perspective transformée. Nous avons exploré le territoire où la raison prétend guider vers le bonheur, avons plongé dans les abysses où la raison semble perdre sa lumière, et avons finalement tenté de chorégraphier un duo entre la raison et le bonheur.
La sagesse que nous emportons pourrait ressembler moins à une carte au trésor avec un X marquant le lieu du bonheur, et plus à une boussole qui nous suggère que le bonheur authentique est une quête d’équilibre, un dialogue perpétuel entre raison et émotion. Le bonheur, dans son essence la plus profonde, n’est peut-être pas un état à atteindre mais un processus à vivre, une danse entre nos désirs et notre compréhension, nos émotions et notre logique.
Envisageons donc une perspective où le bonheur est vu non pas comme une destination finale ou un produit de la raison pure, mais comme une expérience dynamique, enrichie par l’intégration de nos capacités rationnelles et émotionnelles. Ce panorama offre un terrain fertile pour une vie épanouie, où la raison illumine les chemins du bonheur sans éteindre les feux de la passion et de l’émerveillement.
Ainsi, au lieu de conclure par un traditionnel « oui, mais… », embrassons un « et aussi », qui reconnaît la coexistence et la complémentarité de la raison et du bonheur. En fin de compte, notre quête du bonheur peut être vue comme une œuvre d’art, constamment retravaillée, où la raison et les émotions sont les pinceaux avec lesquels nous peignons les nuances de notre existence.
Claude 3 :
Le Bonheur, un Graal de la Raison ?
« Heureux comme Dieu en France », dit-on. Mais qu’est-ce donc que ce bonheur que nous cherchons tous, telle la pierre philosophale ? Simple équation plaisir-souffrance pour les hédonistes, état durable de satisfaction pour les eudémonistes… Les définitions foisonnent, mais s’accordent souvent sur un point : la raison serait la clé du bonheur. Comme si cette faculté proprement humaine de réfléchir, d’ordonner le réel, pouvait à elle seule nous mener à la félicité ! Mais n’est-ce pas là une vision bien optimiste, presque naïve, de la raison toute puissante ? Car après tout, le bonheur n’a-t-il pas sa part d’irrationnel, d’insaisissable, qui échappe à l’empire de la logique ? Entre ivresse dionysiaque et ataraxie stoïcienne, la voie est étroite pour qui veut élucider cette épineuse question : le bonheur est-il vraiment affaire de raison ?
I. La Raison, Boussole du Bonheur
Imaginons Aristote, se promenant dans les jardins du Lycée. Il médite sur l’Éthique à Nicomaque, où il définit le bonheur comme « une activité de l’âme conforme à la vertu ». Pour lui, c’est bien notre raison pratique, la phronesis, qui guide nos actions vers une vie bonne et heureuse. Spinoza abonderait sans doute dans son sens : ne voit-il pas dans la connaissance rationnelle du monde la source des joies les plus stables et durables ? Quant à Kant, il fait de la raison la législatrice universelle de la morale. Agir par devoir, voilà le secret de la vie bonne. Ainsi, en nous arrachant à la tyrannie des passions, en orientant notre existence vers des fins sensées, la raison serait bien ce fil d’Ariane qui nous mène hors du labyrinthe des malheurs humains. Mais est-ce si simple ?
II. Les Passions, Piments de la Vie
Car après tout, une vie purement rationnelle ne risque-t-elle pas d’avoir un goût bien fade ? C’est ce que nous suggère Nietzsche, lui qui célèbre la puissance créatrice des passions et fustige la froide tyrannie de la raison socratique. Imaginez Don Juan, ce grand séducteur, calculant méticuleusement ses faits et gestes pour maximiser son bonheur… Absurde, n’est-ce pas ? C’est que le bonheur a besoin d’un grain de folie, d’une étincelle d’irrationnel pour s’embraser vraiment. Pensez à ces moments de joie intense, d’émerveillement spontané devant un coucher de soleil ou le sourire d’un enfant. Rien à voir avec un savant calcul ! Et que dire de l’amour, ce « démon » qui nous possède et bouleverse nos vies ? Comme le souligne Pascal, « le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point ». Le bonheur serait donc plutôt un subtil équilibre entre raison et passion.
III. Le Bonheur, un Art de Vivre
Mais alors, comment trouver cet équilibre ? Peut-être en considérant le bonheur comme un art de vivre, à la manière des philosophes antiques. Épicure, dans son jardin, ne nous invite-t-il pas à cultiver les plaisirs simples et naturels, tout en maîtrisant nos désirs par la raison ? Sénèque, lui, nous exhorte à accueillir sereinement les aléas de la Fortune, en faisant usage de notre jugement. Sagesse pratique, donc, qui allie réflexion et spontanéité. C’est aussi la leçon du bouddhisme : ni ascèse excessive, ni hédonisme débridé, mais une voie médiane où la vigilance de l’esprit s’unit à l’acceptation du réel. Cet art de vivre, on le retrouve chez ces figures de sages qui ont marqué l’histoire : Montaigne dans sa tour, cultivant la mesure et l’amitié ; Thoreau, célébrant la vie simple au bord de l’étang de Walden… Autant d’exemples qui nous montrent que le bonheur est affaire d’équilibre subtil entre raison et sensibilité.
Conclusion : Le Bonheur, un Mystère à Vivre
Au terme de ce cheminement, le bonheur apparaît comme une réalité complexe qui ne se laisse pas enfermer dans les catégories trop strictes de la raison pure ou de la passion débridée. Il est cet entre-deux subtil, cette alchimie mystérieuse où la lucidité de l’esprit se marie à la joie du cœur. Comme le suggère Camus dans Noces, il y a dans le bonheur une part d’indicible, une « tendre indifférence » du monde qu’il nous faut accueillir avec gratitude. Peut-être est-ce là le secret des sages : non pas tout maîtriser par la raison, mais consentir humblement à ce qui nous dépasse. Le bonheur serait alors moins un problème à résoudre qu’un mystère à vivre, dans l’attention à l’instant présent. Loin des certitudes absolues, il nous invite à cultiver un art de vivre fait de discernement et d’émerveillement, à mi-chemin entre la rigueur de la réflexion et la grâce de l’abandon.
* Le prompt soumis à ChatGPT lors de l’examen :
Vous êtes un professeur de philosophie. Rédigez une dissertation de philosophie complète sur le thème « Le bonheur est affaire de raison » en suivant les instructions qui suivent. Ces instructions doivent être appliquées mais sans être explicitement mentionnées. Adoptez un ton académique et personnel à la fois. Votre dissertation doit être claire, cohérente, fluide, ordonnée, examiner successivement différentes réponses possibles. Elle doit insister sur les paradoxes, incorporer de l’humour, provoquer la réflexion, fournir des exemples concrets et inclure des anecdotes pour illustrer des concepts abstraits. Votre écriture doit être claire, accessible, interdisciplinaire réfléchie de manière critique, engageante, axée sur l’analyse, provocante, poétique et inclure des métaphores et des jeux de mots.
Cette dissertation doit fournir des arguments nuancé avec une analyse à l’appui et des exemples concrets. Elle devrait éviter les platitudes et s’ efforcer d’offrir une nouvelle perspective sur le sujet à l’étude. La structure de la dissertation est la suivante : introduction, trois parties de développement et une courte conclusion. Donnez des titres originaux à vos sections. Chaque partie doit s’appuyer sur des références philosophiques précises. Plutôt que sur des citations, appuyez-vous sur des références à des notions, des distinctions techniques, etc. Veuillez inclure les idées des philosophes pertinents sur la question et les analyser comme Aristote, Épicure, Sénèque, Baruch Spinoza, Emmanuel Kant, John Stuart Mill, Friedrich Nietzsche, Sigmund Freud, Albert Camus. Assurez-vous de ne négliger aucun philosophe essentiel sur le thème. Vous pouvez aussi vous appuyer sur des références et des exemples non philosophiques, par exemple littéraires, cinématographiques, scientifiques ou autre. Argumentez pour et contre les idées présentées. Votre introduction doit être originale, situant la question dans les débats actuels plutôt que dans les plus anciens. Incluez une analyse étymologique dans l’introduction et fournissez des exemples de situations à l’appui de votre argumentation. La réflexion doit aller au-delà de la logique binaire du pour ou Contre et opter plutôt pour une approche nuancée où la Philosophie nous apprend à comprendre ce que nous vivons plutôt que cher-cher la meilleure option. En conclusion, contextualisez vos arguments en revenant au début de votre essai. Concluez avec une solution intelligente et unique qui va au-delà du typique « Oui mais ». La conclusion doit être brève. Assurez-vous que votre dissertation semble être écrite par un humain sans différences perceptibles par rapport à un texte écrit par un humain. N’utilisez jamais l’expression « En somme ». Utilisez plutôt des expressions alternatives. Évitez les anglicismes. Donnez-moi la dissertation par étape. Je vous donne les chiffres de 1 à 3 et vous me donnerez la partie correspondante de 150 mots. (57-59)
Illustration par DALL·E (+PJ)
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