Je passe rapidement sur ce que vous pourrez lire ailleurs : que Claudine Gay est primo d’origine haïtienne et secundo est une femme, que devant une commission parlementaire, acculée par des accusateurs d’extrême-droite, elle a dit que condamner le génocide des Juifs dans la période 1940-44 « dépendait du contexte », alors que le souci sincère de la défense des Juifs est le cadet des soucis de l’extrême-droite en général – sauf quand ça l’arrange, et que la préoccupation majeure de l’extrême-droite qui l’a fait tomber est de poursuivre l’œuvre de la Cour suprême des États-Unis quand elle a interdit récemment la pratique de l’ « action affirmative », l’exigence de parité à l’égard des sexes et des minorités ethniques, et tout particulièrement celles qui furent martyrisées dans l’histoire des États-Unis : populations d’origine et descendants d’esclaves razziés en Afrique.
Je vais mettre l’accent plutôt sur trois aspects moins mis en avant.
Premièrement, les universités américaines sont l’otage de donateurs richissimes qui exercent une censure de fait sur ce qui peut y être dit en exerçant un chantage sur leur financement. On peut alors dire ce que l’on veut sur « les droits sacrés de la liberté d’expression », le poids des uns et des autres décidera de la position officielle de l’institution, quelle que soit la mobilisation des enseignants, quelle que soit la mobilisation des étudiants.
Deuxièmement, même si chacun sait que de manière générale les universitaires qui deviennent administrateurs d’un établissement universitaire ne sont pas les vedettes sur le plan scientifique – dont les talents sont mobilisés sur le front du savoir, une université telle Harvard se tire une balle dans le pied quand elle est conduite à affirmer, comme dans ce cas-ci, que les critères exigés des enseignants sur le plan de la connaissance sont moins stricts que ceux appliqués aux étudiants. Peut-on tenter de dissimuler de manière plus maladroite le fait que l’instauration à marche forcée de la parité et la promotion de minorités oblige dans certains cas à relâcher les critères qui valaient autrefois – du moins en principe – pour tout le monde ?
Troisièmement, une université – quelle qu’elle soit – peut-elle en venir à affirmer que le plagiat est un délit mineur pour sauver sa présidente ? Bien sûr, ce sont des militants d’extrême-droite qui ont organisé la chasse au plagiat dans les travaux de Claudine Gay, il n’en reste pas moins vrai qu’il est problématique que la thèse de Mme Gay ainsi que la quasi totalité des rares articles qu’elle a publiés soient truffés de passages purement et simplement découpés dans les écrits d’autres personnes sans mention de leur auteur. Que certains de ces scientifiques pillés disent aujourd’hui par soutien que « ce n’est pas grave » ajoute simplement à la confusion. On n’exige de personne qu’il ou elle ait entièrement sucé de son pouce ce qu’il ou elle écrit dans une publication mais il demeure essentiel que si le premier auteur de ce que l’on écrit est connu, son identité soit mentionnée ainsi que la source. Sans répression du plagiat, il devient impossible de dire qui est un bon étudiant, qui est un bon enseignant, et c’est toute l’institution universitaire qui perd son sens.
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