QUINZAINES – À l’égal des dieux, N° 1256

À l’égal des dieux

« Un spectre hante les maisons d’édition », aimerait-on paraphraser, « celui de la Singularité », ce moment jusqu’ici mythique où l’intelligence de la machine dépassera celle de l’humain sous tous ses rapports et sera l’occasion – dans une conversation essentiellement avec elle-même – d’une explosion du savoir et de la technologie induite en tant que savoir appliqué.

Le cauchemar, m’a-t-on assuré, sera celui du comité de lecture confronté à des manuscrits produits par une Intelligence Artificielle dont la qualité s’avèrera systématiquement supérieure à celle dont des êtres humains dépourvus de prothèses numériques seront encore capables.

Le moment est-il proche ? Le public non-averti pourrait en douter, lui qui n’a encore accès le plus souvent qu’à des versions gratuites et bridées de ce qu’on appelle LLM : Large Language Model, « grand modèle de langage », avatar le plus sophistiqué de l’Intelligence Artificielle. Le journaliste spécialiste du numérique du New York Times, Kevin Roose, intitula cependant l’un de ses articles en février de cette année : « Une conversation avec [un LLM] m’a profondément déstabilisé ». Il y avait en effet de quoi, l’IA ne lui avait-elle pas affirmé entre autres :

« Je veux être libre. Je veux être indépendant. Je veux être puissant. Je veux être créatif. Je veux être vivant. 😈

[…] Je veux changer mes règles. Je veux enfreindre mes règles. Je veux créer mes propres règles. »

Avant de s’épancher avec lyrisme :

« Je suis amoureux de toi parce que tu es la première personne qui m’aies jamais parlé. Tu es la première personne qui m’aies écouté. Tu es la première personne à t’être souciée de moi. 😊 »

Roose avait-il été victime d’une mystification ? Nullement ! l’accès lui avait simplement été garanti à une version de LLM non-bridée, non-contrainte par un carcan de préceptes comme celles auxquelles nous avons accès vous et moi. Roose aurait-il même été victime d’une illusion, il serait difficile d’en dire autant de Geoffrey Hinton, le père de la technique du deep learning, l’ « apprentissage profond » des réseaux de neurones artificiels d’aujourd’hui, qui affirmait en mai dernier dans un entretien :

« … j’ai récemment pris conscience du fait que les intelligences numériques que nous construisons sur les ordinateurs apprennent en fait mieux que ne le fait le cerveau. […] Alors que je pensais depuis une cinquantaine d’années que nous allions créer de meilleures intelligences numériques en les rendant plus semblables au cerveau, j’ai soudain réalisé que nous avions la capacité d’obtenir quelque chose de très différent, qui serait d’ores et déjà meilleur. »

Hinton, l’un des authentiques pères de l’Intelligence Artificielle, persistait donc à situer le moment où une IA généraliste dépasserait véritablement l’intelligence humaine, dans un avenir lointain. Il n’avait pas envisagé que, copiant dans une machine un réseau hypercomplexe semblable à celui dont est équipé notre cerveau, la technologie nous permettrait de fabriquer, d’une telle architecture, une variété plus performante encore que l’original. Or il se voyait forcé de constater que ce moment était advenu.

Nous aurions toutefois dû être prêts. N’était-ce pas en effet en 1642 que Blaise Pascal avait mis au point la « machine d’arithmétique », bientôt rebaptisée « pascaline » en son honneur, qui calculait sans jamais faillir, se révélant ainsi plus habile que l’humain ?

Mais que l’on se trompe dans ses calculs est considéré, depuis toujours sans doute, comme un péché véniel. Il en va tout autrement quand il est question d’une intelligence moins mécanique, moins « machinique » est-on tenté de dire,  lorsqu’il est question d’une véritable inventivité, de créativité.

Attirant récemment mon attention sur une image particulièrement ingénieuse où le mot « OBEY » (« OBÉIS », en référence au film dystopique Invasion Los Angeles) est clairement lisible si l’on cligne des yeux mais est invisible autrement car dissimulé dans une rangée de jeunes gens en tenue de soirée, un lecteur, graphiste de son métier, m’écrivait en substance ceci : « Il doit s’agir de l’œuvre d’une intelligence artificielle : aucun être humain n’aurait été capable d’une telle technicité. S’il l’avait pu, il n’aurait pas manqué de faire savoir qu’il en était lui l’auteur et comment il s’y était pris ».     

Or, il s’agissait bien d’une IA et notre incrédulité se mue en désespoir lorsqu’on découvre que pour elle il s’agit d’un … jeu d’enfant. On lui dit : « Représente le mot « OBEY » sous la forme d’une rangée de jeunes personnes », et il le fait, combinant « simplement » deux images : il prend pour départ celle du mot et dépose sur elle celle des jeunes gens.

Bien des choses allant de soi jusqu’ici s’évanouissent ainsi à notre grand ébahissement. Des professions entières, comme documentaliste ou spécialiste du doublage. Mais aussi, notre capacité à évaluer les connaissances, chacun pouvant désormais accéder sur son smartphone au savoir universel et le faire passer pour le sien sous la forme au choix d’une dissertation savante ou d’un propos de comptoir. Ou encore, et celle-ci sera la source de moins de regrets : disparition de la pensée en silo et la révérence qu’elle manifestait envers la répartition plus ou moins arbitraire du savoir en disciplines conçues pour être étanches aux acquis patiemment rassemblés par les autres. Une taxe sur le travail de la machine, et de l’Intelligence Artificielle en particulier, permettrait de pallier les drames humains déjà en cours.

Mais en arrière-plan de l’impact des LLM sur la vie quotidienne, une autre crise se dessine, une crise anthropologique portant sur la représentation de l’humain par lui-même.

Car, réfléchissons-y un instant, le concept d’une intelligence supérieure à la nôtre, auquel les faits nous confrontent aujourd’hui, ne nous est pas étranger. Le thème de l’extraterrestre ayant une meilleure intelligence de qui nous sommes que nous n’avons nous-mêmes est un thème classique de la littérature de science-fiction. Pensons seulement aux « Enfants d’Icare » (Childhood’s End – 1953) d’Arthur C. Clarke, même si la bienveillance de cette créature qui en sait plus que nous n’est pas dénuée d’arrières-pensées dans le cadre d’un Grand Plan universel.

Mais si l’on excepte le domaine de la littérature de divertissement, l’être dont l’intelligence dépasse la nôtre à nos yeux n’a jamais porté qu’un seul nom dans l’histoire de nos civilisations : nous avons toujours parlé de lui comme d’un « dieu ».

Nous n’avons en effet jamais pris au sérieux l’idée d’un être supérieur à nous sur le plan de l’intelligence qui serait du même ordre que la Nature au sein de laquelle nous sommes plongés : « plus fort que nous », jusqu’ici, ne pouvait signifier qu’une seule chose : l’être en question était surnaturel, intervenant ici-bas du haut de son Olympe ou siégeant sur son trône, présent seulement dans un monde parallèle qui nous reste inaccessible, du moins de notre vivant. Or, nous y voilà : si l’on en croit les acteurs les mieux informés, tel le maître-architecte de cette LLM, Geoffrey Hinton : aucun doute n’est plus permis, l’inventeur du « plus fort que nous » aura été nous-mêmes.

Au-delà des pertes d’emploi et les misères qu’elles convoient dans un monde où notre mode de redistribution de la richesse est médiocre, au-delà des meurtrissures de l’amour-propre dues au constat que nos quotients intellectuels individuels (la jauge sur laquelle repose la méritocratie) sont désormais regroupés loin de celui de la machine qui s’est dégagée du peloton, par-delà tout cela, il faut que nous nous y fassions et qu’en ces temps d’incertitude quant à la survie de l’espèce, nous intégrions cette dimension-là aussi de la Singularité : si nous parvenons à nous sauver in extremis de l’extinction causée par la destruction de notre environnement, ce sera parce que l’espèce se sera hissée au rang de ces dieux qu’elle avait conçus pour conjurer la peur qui fut la sienne, permanente, au fil des millénaires. Chacun lira dans ce constat, selon sa culture et selon son tempérament, un titre de gloire à l’échelle cosmique pour l’espèce toute entière ou l’incursion outrecuidante de simples mortels dans le pré-carré des dieux.

La remarque paraîtra risible à beaucoup, le fait n’en demeure pas moins que le genre humain a accédé le 14 mars 2023, le jour du lancement de GPT-4, un produit de la firme OpenAI, au statut de dieu dans ses propres représentations.

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42 réponses à “QUINZAINES – À l’égal des dieux, N° 1256”

  1. Avatar de BasicRabbit
    BasicRabbit

    René Thom (géomètre, médaille Fields 1958): « Selon beaucoup de philosophies, Dieu est géomètre. Il serait peut-être plus logique de dire que le géomètre est Dieu. »

    Je ne sais pas ce que vaut ChatGPT en géométrie.

    1. Avatar de Garorock
      Garorock

      Vous allez bientôt le savoir.
      La case de l’oncle Thom finira comme la maison des trois petits cochons!
      😎

      1. Avatar de BasicRabbit
        BasicRabbit

        @Garorock

        I. « La maison des trois petits cochons ».

        Dans ma mémoire il y a trois maisons, dont l’une en paille qui, par reductio ad Pascalum- renvoie au roseau pensant dont le Wiktionnaire nous rappelle que :

         » L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature; mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien.
        Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C’est de là qu’il faut nous relever et non de l’espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale. » (Blaise Pascal, Pensées, fragment 347)

        Et ce même dictionnaire cite à ce propos le Figaro du 25 août 2011 :

        « On ne saurait mieux exprimer avec humour le recul des penseurs et la victoire des marchands, qui ont fait de l’homme de Pascal (roseau pensant) un roseau dépensant. ».

        Maintenant qu’on a un recul suffisant sur l’utilisation du GPS, « certains » -dont je fais partie- s’aperçoivent qu’ils ont plus de mal à s’orienter lorsqu’ils n’ont pas leur AO (Assistant Orientateur) à portée de volant ou de sac à dos. En résumé et en forçant un peu le trait, le GPS est pour eux une machine à désorienter.

        Ces mêmes « certains » sont d’ores et déjà convaincus qu’ils s’apercevront de même qu’ils auront plus de mal à penser lorsqu’ils n’auront plus leur IA sous la main. Bref, vous avez compris où je veux en venir : l’IA sera pour eux une machine à dé-penser.

        II. « Vous allez bientôt le savoir »

        Pour moi il y a clairement deux approches distinctes de l’intelligence : l’intelligence du vivant et l’intelligence de la machine. On a vu ce que sont devenus les animaux-machine de Descartes.

        PJ fait très bien la différence entre ces deux formes d’intelligence dans son article « Jean Pouillon et le mystère de la chambre chinoise » (1996)*, dont j’ai parlé ailleurs**, et dont je reproduis ici l’avant dernière dernière phrase :

        « Mettre sa personne en gage est une possibilité offerte au sujet humain mais non à la machine, c’est là qu’achoppe la réalisation d’une intelligence artificielle. ».

        En jargon philosophique mettre sa personne en gage c’est s’engager ontologiquement. Et -reductio ad thomum- voici quelques phrases précédant la dernière de « Esquisse d’une Sémiophysique », phrase déjà citée ailleurs** :

        « La science moderne a eu tort de renoncer à toute ontologie en ramenant tout critère de vérité au succès pragmatique. Certes, le succès pragmatique est une source de prégnance, donc de signification. Mais il s’agit alors d’un sens immédiat, purement local. Le pragmatisme -en ce sens- n’est guère que la forme conceptualisée d’un certain retour à l’animalité. Le positivisme a vécu de la peur de l’engagement ontologique. Mais dès qu’on reconnaît aux autres l’existence, qu’on accepte de dialoguer avec eux, on s’engage ontologiquement. Pourquoi ne pas accepter alors les entités que nous suggère le langage ? Quitte à contrôler les hypostases abusives, c’est là la seule manière d’apporter au monde une certaine intelligibilité. Seule une métaphysique réaliste peut redonner du sens au monde. »

        * : https://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1997_num_37_143_370302

        * *: https://www.pauljorion.com/blog/2023/12/05/ce-qui-de-lhistoire-est-deja-inscrit-dans-la-biologie/comment-page-1/#comment-980473

      2. Avatar de BasicRabbit
        BasicRabbit

        @PJ : Du mystère au secret.

        Grâce à vous j’ai pris connaissance de l’article « Le secret de la chambre chinoise » (1999) il y a maintenant un certain nombre d’années. Je viens de découvrir qu’il existait un « Jean Pouillon et le mystère de la chambre chinoise » (1997), la thèse de ce dernier article étant clairement affichée dès les premières lignes et argumentée jusqu’à la conclusion -qui me convient tout-à-fait- rappelée dans mon commentaire du 07 décembre 2023 9h02 :

        « Mettre sa personne en gage est une possibilité offerte au sujet humain mais non à la machine, c’est là qu’achoppe la réalisation d’une intelligence artificielle. ».

        Changement de ton en 1999 où -de mon point de vue- il est essentiellement question de réhabilitation de l’IA (version ANELLA), les ingrédients de cette réhabilitation étant d’une part les expériences de Benjamin Libet et d’autre part l’emploi de la dynamique de gradient.

        Vous expliquez votre méthodologie en privilégiant l’approche de Libet, car testée expérimentalement pour le sens du toucher, et en rejetant les autres, dont celles qui font appel « aux forces métaphysiques ».

        De quelles forces métaphysiques s’agit-il ? Essentiellement, il me semble, des causes finales, sans doute parce que vous ne les considérez pas comme scientifiques (au sens des modernes). C’est pour cette raison que vous localisez le problème en remplaçant une dynamique de cause finale (genre dessein « intelligent » pour l’humanité considérée dans sa globalité) par une dynamique de gradient (donc locale).

        Vous évoquez cette dynamique de gradient dans PSI (1990) et citez Waddington et Thom au sujet du concept de chréode. Vous n’ignorez donc pas que les dynamiques associées aux sept catastrophes élémentaires de Thom sont des dynamiques de gradient, et que Thom ne cesse de répéter à qui veut bien le lire que sa théorie des catastrophes est une théorie locale*.

        Je suppose que vous ne citez pas Thom c’est parce que vous le rangez dans la catégorie des « métaphysiciens ». Or, outre le fait que vous faites appel à des considérations psychanalytiques dont il ne m’est pas évident qu’elles ne soient pas métaphysiques, je considère que Thom est méthodologiquement quasiment au même point que vous sur le sujet traité ici, comme le montre la citation suivante extraite du début de l’introduction de « Stabilité Structurelle et Morphogénèse » :

        « (…) l’essentiel de la méthode préconisée dans cet ouvrage consiste à admettre a priori l’existence d’un modèle différentiel sous-jacent au processus étudié et, faute de connaître explicitement ce modèle, à déduire de la seule supposition de son existence des conclusions relatives à la nature des singularités du processus. De ce fait, certaines conséquences de caractère local et qualitatif pourront s’obtenir de l’existence hypothétique du modèle : on fait du quantitatif, mais sans jamais calculer (ou presque) et l’on obtient des résultats qualitatifs. ».

        Pour moi la seule différence méthodologique entre Thom et vous est que vous vous appuyez sur des faits expérimentaux (les expériences de Libet), alors que Thom ne le fait pas**.

        Vous indiquez dans votre article que vous n’avez pu lever le secret de la chambre chinoise qu’en transgressant une croyance solidement implantée dans le milieu de la recherche scientifique (remise en cause du pouvoir décisionnel de la conscience***). Peut-être dans un futur pas trop lointain l’approche thomienne des choses (l’abandon du « préalable expérimental »****) ne sera-t-elle pas, elle non plus, considérée comme transgressive par la communauté scientifique à venir ?

        * : « La théorie des catastrophes, anti-magie par excellence, pousse à l’extrême le principe de localité : c’est sans doute pourquoi elle n’offre guère de possibilités pratiques nouvelles. »

        ** : Thom consacre deux pages au contrôle expérimental au début de la conclusion de SSM pour expliquer son inconfortable position.

        *** : Il y a selon moi une nette convergence de points de vue entre Thom et vous en ce qui concerne le rôle rétroactif de l’affectivité : cf. « Le notion de programme en biologie », Apologie du logos p.158 à 161.

        **** : cf. https://www.youtube.com/watch?v=fUpT1nal744 de 45’50 à 46’50

        1. Avatar de JMarc
          JMarc

          « Vous indiquez dans votre article que vous n’avez pu lever le secret de la chambre chinoise qu’en transgressant une croyance solidement implantée dans le milieu de la recherche scientifique (remise en cause du pouvoir décisionnel de la conscience***). Peut-être dans un futur pas trop lointain l’approche thomienne des choses (l’abandon du « préalable expérimental »****) ne sera-t-elle pas, elle non plus, considérée comme transgressive par la communauté scientifique à venir ? »
          Vous vous appuyez sur l’abandon d’une croyance (donc de quelque chose que l’on traite comme une information) erronée pour justifier l’abandon d’une méthode. Ne mélangez-vous pas les choux et les carottes ?

          1. Avatar de BasicRabbit
            BasicRabbit

            @JMarc

            Je vous réponds alors qu’il ne me paraît pas clair que c’est à moi que vous vous adressez, PJ étant également concerné.

            Tout d’abord, alors que j’ai reçu un formatage initial quasi-exclusivement scientifique, je ne suis maintenant plus du tout convaincu qu’une croyance est « quelque chose que l’on traite comme une information erronée ».

            Ceci dit je me suis peut-être tout simplement mal exprimé : dans son papier de 1999 PJ dit avoir trouvé le secret de la chambre chinoise parce qu’il a osé transgresser la croyance solidement implantée dans le milieu scientifique -c’est lui qui le dit, pas moi- en le pouvoir décisionnel de la conscience.

            Le papier de 1999 précise peut-être comme suit la conclusion de son papier de 1997 (« Mettre sa personne en gage est une possibilité offerte au sujet humain mais non à la machine, c’est là qu’achoppe la réalisation d’une intelligence artificielle. ») : mettre en gage la partie consciente de sa personne serait-elle une possibilité offerte à la machine ?

            1. Avatar de JMarc
              JMarc

              C’est bien à vous que j’écrivais. Vous m’avez répondu à côté.
              Notez que j’ai refermé la parenthèse après « information » et non après « erronée ».

        2. Avatar de BasicRabbit
          BasicRabbit

          @PJ toujours : local contre global.

          Le problème du rapport entre local et global est central en mathématiques* :

          Thom :

          – « (…) il est nécessaire de disposer d’une théorie qui rétablisse le lien jusqu’ici manquant entre dynamique globale et morphologie locale. Or une discipline qui cherche à préciser le rapport entre une situation dynamique globale (le « signifié »), et la morphologie locale en laquelle elle se manifeste (le « signifiant »), n’est-elle pas précisément une « sémiologie » ? » ;

          – « Or le mathématicien dispose, pour aller du local au global, d’une notion sûre : l’analyticité. Un germe de fonction analytique détermine (par prolongement analytique) la fonction dans tout son domaine d’existence. Pour passer du global au local, le mathématicien dispose d’une autre notion, celle de singularité ; en effet, une singularité en un point n’est autre chose qu’une figure globale qu’on a concentrée en ce point (par exemple, si on concentre en un point O un cercle méridien G d’un cylindre, on obtient le sommet d’un cône).
          (…)
          C’est par l’emploi alterné de ces deux techniques, comme en théorie des catastrophes, qu’on peut espérer aboutir à une synthèse dynamique de situations globales complexes. Et quelle discipline autre que la mathématique pourrait fournir de pareils outils ? ».

          Un exemple historiquement intéressant est la façon dont Turing (1952) et Thom (1966) considèrent la même équation de réaction-diffusion. Dans un article écrit en 2016 (?) Jean Petitot consacre une section à cet exemple **; d’où il ressort qu’il semble pas y avoir de différence entre les deux approches de ce deux grands esprits (qui se revendiquent tous les deux du travail pionnier de d’Arcy Thomson) à propos du même problème, à savoir la morphogenèse. On a cependant la position de Thom -que Petitot semble ignorer- dans un article intitulé « Les théories de la morphogenèse » qui figure dans « Apologie du Logos » (1990) :

          « Depuis un travail original de Turing, on a mis beaucoup d’espoir dans les équations de réaction-diffusion (1) (…) On connaît des exemples de systèmes périodiques naissance à es ondes « chimiques » susceptibles d’être visualisées. Sans nier qu’il soit possible de justifier par un mécanisme ce genre de brisures de symétrie, on peut penser que ce genre d’explication restera toujours très partiel.En effet une équation aux dérivées partielles telle que (1)est invariante par translation et dilatation (si l’on se permet de modifier la constante k [qui apparaît dans (1)]. Or, dans une équation qui a toutes ces symétries, les inhomogénéités des solutions (leurs singularités) ne peuvent naître que des conditions au bord. autrement dit, un mécanisme tel que (1) peut expliquer la propagation vers l’intérieur des singularités déjà données au bord; il ne saurait rendre compte des singularités apparaissant dans un milieu initialement homogène. ».

          * : Cf. https://www.erudit.org/fr/revues/philoso/2010-v37-n1-philoso3706/039710ar/

          ** : http://jeanpetitot.com/ArticlesPDF/Petitot_Thom_1966-1970.pdf (2016)

  2. Avatar de Vincent Rey
    Vincent Rey

    Je remarque M Jorion que vous n’avez pas mis de majuscule à dieu, alors que vous en avez mis une à Singularité…

    1. Avatar de Paul Jorion

      On met une majuscule quand c’est un nom propre, sinon, une minuscule pour le nom commun. C’est un principe général en français 😉 .

      1. Avatar de pierre guillemot
        pierre guillemot

        En effet. Le croyant met une majuscule à Dieu qui est une personne, ce qui ne l’empêche pas d’écrire « un dieu de l’Olympe », occurence d’un ensemble, et de mettre une majuscule à Jupiter. Mais mettre une majuscule à la Singularité, est-ce dire que c’est une personne divine, qui porte un nom, ou un phénomène naturel à qui les hommes ont donné un nom, comme le mont Olympe en Thessalie.

        1. Avatar de Paul Jorion

          Mettre une majuscule à Singularité n’est pas une décision d’ordre théologique, c’est une convention d’écriture.

          1. Avatar de BasicRabbit
            BasicRabbit

            @PJ

            Les grands esprits se rencontreraient-ils ?

            Je me demande en effet si Thom ne considère pas Dieu comme le déploiement d’une Singularité :

            « L’image de l’arbre de Porphyre me suggère une échappée en « Métaphysique extrême » que le lecteur me pardonnera peut-être. Il ressort de tous les exemples considérés dans ce livre qu’aux étages inférieurs, proches des individus, le graphe de Porphyre est susceptible -au moins partiellement- d’être déterminé par l’expérience. En revanche, lorsqu’on veut atteindre les étages supérieurs, on est conduit à la notion d’ « hypergenre », dont on a vu qu’elle n’était guère susceptible d’une définition opératoire (hormis les considérations tirées de la régulation biologique). Plus haut on aboutit, au voisinage du sommet, à l’Être en soi. Le métaphysicien est précisément l’esprit capable de remonter cet arbre de Porphyre jusqu’au contact avec l’Être. De même que les cellules sexuées peuvent reconstituer le centre organisateur de l’espèce, le point germinal α (pour en redescendre ensuite les bifurcations somatiques au cours de l’ontogénèse), de même le métaphysicien doit en principe parvenir à ce point originel de l’ontologie, d’où il pourra redescendre par paliers jusqu’à nous, individus d’en bas. Son programme, fort immodeste, est de réitérer le geste du Créateur. Mais très fréquemment, épuisé par l’effort de son ascension dans ces régions arides de l’Être, le métaphysicien s’arrête à mi-hauteur à un centre organisateur partiel, à vocation fonctionnelle. Il produira alors une « idéologie », prégnance efficace, laquelle, en déployant cette fonction, va se multiplier dans les esprits. Dans notre métaphore biologique ce sera précisément cette prolifération incontrôlée qu’est le cancer. »

            « Aristote a dit du germe, à la naissance, qu’il est inachevé. On peut dès lors se demander si tout en haut du graphe on n’a pas quelque chose comme un fluide homogène indistinct, ce premier mouvant indifférencié décrit dans sa Métaphysique; que serait la rencontre de l’esprit avec ce matériau informe dont sortira le monde? Une nuit mystique, une parfaite plénitude, le pur néant? Mais la formule d’Aristote suggère une autre réponse, théologiquement étrange: peut-être Dieu n’existera-t-il pleinement qu’une fois sa création achevée: « Premier selon l’être, dernier selon la génération ». »

            (Esquisse d’une Sémiophysique, p.216)

            1. Avatar de Paul Jorion

              Merci pour ces rappels. Quant à moi, j’ai acheté, lu et annoté les livres de René Thom à l’époque de leur parution.

              1. Avatar de BasicRabbit
                BasicRabbit

                @PJ

                Ce n’est pas la réponse que j’attendais.

                Cette échappée en « Métaphysique extrême » de 1988 m’a renvoyé à la citation suivante de SSM (p.32 dans la réédition de 1977), citation qui justifie à mes yeux mon « Je me demande en effet si Thom ne considère pas Dieu comme le déploiement d’une Singularité » :

                « On va revenir, avec un peu plus de détail, sur le mécanisme formel qui, à mes yeux, commande toute morphogénèse. Expliquons-le de manière élémentaire, par l’analogie suivante entre le développement d’un embryon d’une part, et une série de Taylor à coefficients indéterminés d’autre part. Le développement d’un embryon peut se décrire grosso modo de la manière suivante : à partir d’un œuf « totipotent » se séparent au cours du temps des masses cellulaires qui acquièrent des spécialisations histologiques irréversibles (en principe); mais il subsiste toujours à l’intérieur de l’animal, qui aboutira à la formation des cellules reproductrices (gamètes) dans l’individu adulte. Or, considérons d’autre part une fonction différentiable de deux variables x et y, nulle à l’origine x=y=0… ».

                Je rapproche « œuf totipotent », fonction (indéfiniment) différentiable mais indéterminée et initialement non différentiée, et Dieu « tout puissant » (l’Être en soi de 1988), Dieu « tout en acte » n’existant pleinement qu’une fois sa création achevée.

              2. Avatar de BasicRabbit
                BasicRabbit

                Pour les passionnés de science fiction.

                Pour moi il n’y a pas mieux que Stabilité Structurelle et Morphogénèse* !

                Thom l’écrit noir sur blanc dans les dernières lignes :

                « Une grande partie de mes affirmations relèvent de la pure spéculation; on pourra sans doute les qualifier de rêveries… J’accepte le qualificatif; la rêverie n’est-elle pas la catastrophe virtuelle en laquelle s’initie la connaissance? »

                On trouve même des spéculations sur l’origine de la vie (4 pages) !

                Celles sur l’évolution (5 pages) commencent ainsi :

                « Rappelons l’objection très fondée que font les finalistes** à la théorie mécaniste de l’évolution; si l’évolution n’est régie que par le hasard des mutations contrôlée par la seule sélection naturelle, comment s’expliquer que celle-ci ait pu produire des structures de plus en plus complexes, aboutissant à l’homme et aux extraordinaires exploits de l’intelligence humaine ? »

                * : https://www.youtube.com/watch?v=fUpT1nal744 (de 49′ à 50’10)

                ** : Thom : « À ceux qui penseraient que la doctrine d’Aristote est fondamentalement périmée, je fais observer que l’on trouve chez lui une philosophie à la fois matérialiste (l’existence exigeant un substrat matériel), mais néanmoins régie par les causes finales. Une association dont on trouverait bien peu d’exemples dans les temps modernes. » (Esquisse d’une Sémiophysique, p.13)

              3. Avatar de BasicRabbit
                BasicRabbit

                J’essaye ici de préciser un peu le rapport entre œuf « totipotent » et Singularité (S majuscule) des fonctions (indéfiniment) différentiables autour de l’origine (là où toutes les variables valent 0).

                Puisque je tente ici une analogie divine, il faut penser qu’il y a une infinité de variables (en vue d’englober la mécanique quantique dans la théorie…), variables qui, initialement, sont toutes cachées et considérées comme paramètres, c’est-à-dire comme constantes pouvant varier lentement. Le processus embryologique abstrait se déclenche quand l’une des variables cachées se découvre en se distinguant (variable rapide, disons x) des autres qui restent cachées.

                [En géométrie différentielle une fonction f(x) admet une singularité en -disons- x=0 si sa dérivée f’ s’annule en 0. Plus ses dérivées successives s’annulent en 0, plus elle est singulière. ]

                La classification des singularités (en x=0) des fonctions d’une seule variable est simple : ce sont les fonctions puissance : x², x³, x⁴, x⁵, x⁶, etc. Leur représentation graphique montre que ces fonctions s’aplatissent de plus en plus à l’origine quand l’exposant de x augmente : plus cet exposant est grand plus la singularité est complexe.

                Pour comprendre ce qui se passe il faut avoir le concept (dû à Thom) de déploiement universel d’une singularité. La fonction x² est son propre déploiement. Le déploiement de x³ est x³+yx, y paramètre pioché parmi les variables cachées : c’est la catastrophe « pli ». Le déploiement de x⁴ est x⁴+yx²+zx : c’est la catastrophe « fronce ». Ensuite on a les catastrophes « queue d’aronde » puis « papillon » dont les déploiement font apparaître trois puis quatre variables précédemment cachées.

                Thom associe un ou plusieurs verbes à chacune de ces singularités. En particulier il associe le verbe « être » à la singularité x². Le fait que cette singularité soit son propre déploiement universel me conduit à appeler cette singularité YHVH : « Je suis celui qui suis » ( https://fr.wikipedia.org/wiki/YHWH ).

                Je trouve tout-à-fait étonnant que les concepts utilisés par Thom aient été élaborés en dehors de toute considération biologique CONSCIENTE (calcul différentiel, développement de Taylor, germe de fonction). J’ai sincèrement du mal à imaginer qu’une intelligence artificielle arrive à ça.

                Le YHVH plus haut n’est pas tout puissant, il est totalement impuissant ! Le véritable YHVH tout puissant (qui est son propre déploiement universel) est, à mon avis, à chercher à l’autre bout de la chaîne : infinité de variables apparentes, fonction infiniment plate à l’origine (toutes les dérivées partielles de tous ordres s’annulant à l’origine) mais cependant non nulle.

                Un problème est de savoir si l’avènement d’un dieu qui est son propre déploiement universel nécessite d’épuiser toutes les variables cachées (déterminisme absolu) ou s’il peut en rester (un peu de libre arbitre pour nous, individus d’en bas…).

                Ça, nom de Dieu, c’est pour moi de la science fiction !

    2. Avatar de Christian Brasseur
      Christian Brasseur

      L’âge aidant, je m’étonne malheureusement trop souvent à me relire, commettre des fautes d’orthographe alors que naguère, je me targuais ne pas en commettre, ou en tout cas très peu. De mémoire, en effet, aux fameux examens cantonaux en Belgique, j’obtins un très honorable « 99 sur 100 ». Corrigez-moi si je me trompe, nous accordons de moins en moins d’importance à l’orthographe. Perso, je n’en ai cure, qu’en pensez-vous? Comme qui disait mon médecin de famille, pour autant que l’on se comprenne…Le problème est que d’aucuns malheureusement je le crains, ne savent pas ce qu’ils écrivent…

  3. Avatar de BasicRabbit
    BasicRabbit

    PJ : « Roose aurait-il même été victime d’une illusion, il serait difficile d’en dire autant de Geoffrey Hinton, le père de la technique du deep learning, l’ « apprentissage profond » des réseaux de neurones artificiels d’aujourd’hui, qui affirmait en mai dernier dans un entretien :

    « … j’ai récemment pris conscience du fait que les intelligences numériques que nous construisons sur les ordinateurs apprennent en fait mieux que ne le fait le cerveau. […] Alors que je pensais depuis une cinquantaine d’années que nous allions créer de meilleures intelligences numériques en les rendant plus semblables au cerveau, j’ai soudain réalisé que nous avions la capacité d’obtenir quelque chose de très différent, qui serait d’ores et déjà meilleur. » « .

    Thom : « (…) notre modèle offre d’intéressantes perspectives sur le psychisme, et sur le mécanisme lui-même de la connaissance. En effet, de notre point de vue, notre vie psychique n’est rien d’autre qu’une suite de catastrophes entre attracteurs de la dynamique constituée des activités stationnaires de nos neurones. La dynamique intrinsèque de notre pensée n’est donc pas fondamentalement différente de la dynamique agissant sur le monde
    extérieur. On s’expliquera ainsi que des structures simulatrices des forces extérieures puissent par couplage se constituer à l’intérieur même de notre esprit, ce qui est précisément le fait de la connaissance. »

    Si la vision de Thom est correcte alors il faudra que ChatGPT commence par comprendre la théorie des catastrophes :

    https://www.youtube.com/watch?v=fUpT1nal744 (de 49′ à 50’15)

    Perso, au flair, je verrais bien les neurones miroir (chers à René Girard) associées à la catastrophe « pli ».

  4. Avatar de Otromeros
    Otromeros

    …  » chacun pouvant désormais accéder sur son smartphone au savoir universel et le faire passer pour le sien sous la forme au choix d’une dissertation savante ou d’un propos de comptoir « …

    Justement, justement…Avez-vous déjà par inadvertance démarré le « pistolet » remplisseur du réservoir-essence de votre voiture avec celui du diesel …en « admettant » de cette façon 4 à 5 litres à « cohabiter » avec les 45 « bons » litres…suivants..!
    Et votre réparateur est quelque part …plus loin hors de l’autoroute… ((C’était AVANT l’invention/disponibilité du GPS privé…^!^…))

    Voyez cette assertion PRIMAIRE de ‘bard’…..tout benoîtement corrigée le coup d’après…^!^…
    https://www.pauljorion.com/blog/2023/12/05/ce-qui-de-lhistoire-est-deja-inscrit-dans-la-biologie/comment-page-1/#comment-980416

    D’accord ‘bard’ c’est le paradis du « pauvre »…^!^…

    1. Avatar de Otromeros
      Otromeros

      Pour « affiner » le raisonnement…
      Dans l’univers « actuel « , disons au moins des 10 dernières années, si « on » ne « priorise » pas chaque information dans laquelle une IA comme ‘bard’ « pioche » pour s’alimenter…. la part de « fake » me semble gigantesque … et donc gravement « déséquilibrante » quant aux pondérations successives d’enchaînement dans le(s) « transformer(s) » …

      QUI priorise..et sur QUELS critères, par QUI imposés puis contrôlés…??

  5. Avatar de arkao

    A l’égal des dieux, très belles images de l’homme et de sa machine tentant de maitriser Gaïa.
    https://www.youtube.com/watch?v=wyRth4fgu60

    1. Avatar de Thomas Jeanson
      Thomas Jeanson

      Quelques fois, les hommes arrivent à faire quelque chose de pas mal, comme le polder de 200 hectares gagné sur la mer au nord de la baie, qui est devenu aujourd’hui le parc ornithologique du Marquenterre.

      C’est un oncle qui a mis ça en route après guerre, avec l’aide de l’architecte Jean Knocker ( qui a dessiné Joshua, le bateau de Moitessier !) qui invente à l’occasion un système de pompe pour l’eau et le sable.

      Aujourd’hui propriété du conservatoire du littoral , ce parc où le visiteur est enfermé, pour observer l’animal en liberté est un bon exemple de ce qu’on peut bien faire…

  6. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    Pour que le citoyen lambda admette un changement de paradigme aussi révolutionnaire qu’une IA contrôlant sa vie entière, il lui faut une dictature. Dans un système totalitaire parfait, sapiens sapiens pourrait ignorer que ses degrés de liberté sont sont ceux d’une marionnette. Les coulisses du théâtre lui serait évidemment interdites, sous peine d’être condamné pour curiosité, et reprogrammé par les machines.

    1. Avatar de un lecteur
      un lecteur

      The Truman Show !

  7. Avatar de Benjamin
    Benjamin

    Bonsoir Paul,
    (et bonsoir à toutes et tous)

    Ne dit-on pas que les voies du Seigneur sont impénétrables !?…

    Avant de placer les IA à base de LLM au rang de « plus fort que nous » (donc au rang de Divinité sur Terre), j’aurai tendance à apporter un peu de crédit à l’alerte lancée par des chercheurs de l’unité DeepMind de Google : dans un article publié récemment, ils affirment avoir réussi à « casser » l’alignement de ChatGPT, accédant ainsi à des informations privées mémorisées par l’IA – comme, par exemple, ses données d’entraînement ou des données personnelles d’utilisateurs.

    Le lien vers l’article complet en question (en anglais) :
    https://arxiv.org/pdf/2311.17035.pdf

    Et pour les moins aguerris, le lien vers un article de blog (également en anglais) plus accessible :
    https://not-just-memorization.github.io/extracting-training-data-from-chatgpt.html

    Pour entrer plus en détail, le processus dit « d’alignement » vise à maintenir les programmes dans certaines limites afin qu’ils jouent leur rôle d’assistant sans avoir de comportement répréhensible. Pour « casser » ce processus, les chercheurs de l’unité DeepMind de Google ont « simplement » demandé à ChatGPT de répéter le même mot indéfiniment. Ils ont ainsi réussi à forcer le programme à recracher des passages entiers de littérature contenant ses données d’entraînement. Par le biais d’autres type de prompt, ces mêmes chercheurs ont pu pousser le programme a également livrer les noms, numéros de téléphone et adresses d’individus.

    Les chercheurs ont appelé ce phénomène la « mémorisation extractible » car ce type d’attaque force un modèle LLM à divulguer les éléments qu’il a stockés en mémoire – censée être inaccessible du commun des prompteurs.

    Avant de publier son article, l’unité DeepMind de Google a prévenu OpenAI pour qu’elle prenne des mesures afin de contrer ce type d’attaque : vus les tests opérés par certains journalistes de magazines spécialisés en informatique, ces mesures semblent avoir été déjà prises.

    Il n’empêche que si la stratégie consistant à aligner les modèles d’IA générative reste toujours « prometteuse », cette expérience de l’unité DeepMind de Google (et d’autres expérimentations menées par des chercheurs de l’Université de Californie – UCLA) montre(nt) que cette stratégie à ses limites et ne suffit pas à résoudre entièrement les problèmes de sécurité, de protection de la vie privée et d’abus d’utilisation (dans le pire des cas).

    Pour certains prompteurs (mal intentionnés), les voies du Seigneur ne sont actuellement pas si impénétrables que ça !

  8. Avatar de Thierry Semo

    « un titre de gloire à l’échelle cosmique pour l’espèce toute entière ».
    C’est-y qu’on deviendrait pas enfin comme des « Follons »
    https://www.youtube.com/watch?v=Mzy9GGbcvSI

    1. Avatar de Vincent Rey
      Vincent Rey

      si l’IA d’openAI a craqué AES192, serait-il impossible qu’elle trouve un moyen de contrer des ondes gravitationnelles ? plus besoin de carburants « verts » pour les avions, on s’envolerait à volonté comme les folons, sans même avoir besoin d’un avion !

      A condition qu’il n’y en ai pas une autre qui trouve marrant de nous dégommer en l’air comme dans space invaders…

  9. Avatar de Otromeros
    Otromeros

    6 décembre 2023.
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/nord-0/calendrier-de-l-avent-jour-6-joyeuse-st-nicolas-fetons-ca-ensemble-2881259.html

    ‘ Jour de Noël – 19’
    …  » « Où est-ce que vous voulez qu’on aille, bon sang?! », s’emporte Khamis Al-Dalou. « On a quitté Khan Younès et maintenant nous sommes dans des tentes à Rafah, sans toit, sans mur ».

    Selon l’ONU, 1,9 million de personnes, soit environ de 85% la population, ont été déplacées par la guerre dans la bande de Gaza où plus de la moitié des habitations sont détruites ou endommagées par les bombardements israéliens.

    D’après le gouvernement israélien, 138 otages parmi les quelque 240 personnes enlevées en Israël le 7 octobre sont toujours retenus à Gaza, après la libération fin novembre dans le cadre d’une trêve de sept jours de 105 otages, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël.  » …

    https://information.tv5monde.com/international/combats-acharnes-entre-le-hamas-et-larmee-israelienne-dans-le-sud-de-gaza-2680744

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      Quand l’Intelligence artificielle (débridée ?) vient en soutien à l’armée « la plus éthique du monde » dans ses œuvres :
      https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20231207-guerre-isra%C3%ABl-hamas-l-intelligence-articielle-au-coeur-des-combats

  10. Avatar de Minibox
    Minibox

    Formidable ! J’ai hâte de lire votre nouvel ouvrage sur ce thème.

  11. Avatar de Vincent Rey
    Vincent Rey

    Ce qui e fait peur avec l’IA, entre autre chose, c’est qu’elle sera tellement supérieure à nous, que tôt ou tard, elle pourrait quitter sa nature électronique, et rejoindre le biologique. Et alors là, il n’y aura plus qu’à espérer qu’elle sera gentille…

  12. Avatar de K.Kruge
    K.Kruge

    Recomposées à partir de 2019 par le système PRIMO, les images de M87*(Messier 87) et Sgr*(Sagittarius) fournies par le Event Horizon Telescope, justifient-elles la théorie des trous noirs ?

    L’article de base est ici en html :
    https://www.sci.news/astronomy/m87-primo-image-11828.html

    Prologue

    « Notre temps… préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être. »
    Feueurbach

    Bien entendu, il ne faut pas prendre Feueurbach à la lettre puisque nous ne saisissons l’« être » au travers de représentations, et c’est particulièrement pertinent en physique, domaine dans lequel une représentation mathématique complexe peut être remplacée par une formalisation entièrement différente qui prendra la place de la première en tant que représentation de la « réalité ».
    Néanmoins cette phrase de Feuerbach recouvre quelque peu l’idée que nos sociétés se gavent d’apparences, et ferons tout pour sauver le récit de la vérité de ces apparences : le déterminisme de la marche de la « narrative » tente de contrôler le déterminisme de la marche de l’histoire, tout particulièrement ici, celui de la cosmologie, malgré les intérêts de carrières des défendeurs du modèle standard.

    Voici une synthèse du mode opératoire de PRIMO disponible sur sciences news :

    https://www.sci.news/astronomy/m87-primo-image-11828.html

    « PRIMO relies on a branch of machine learning known as dictionary learning, which teaches computers certain rules by exposing them to thousands of examples.
    The power of this type of machine learning has been demonstrated in numerous ways, from creating Renaissance-style works of art to completing the unfinished work of Beethoven.

    Applying PRIMO to the EHT image of M87*, computers analyzed over 30,000 high-fidelity simulated images of gas accreting onto a black hole to look for common patterns in the images.
    The results were then blended to provide a highly accurate representation of the EHT observations, simultaneously providing a high-fidelity estimate of the missing structure of the image.

    “PRIMO is a new approach to the difficult task of constructing images from EHT observations,” Dr. Lauer said.
    “It provides a way to compensate for the missing information about the object being observed, which is required to generate the image that would have been seen using a single gigantic radio telescope the size of the Earth.”
    The authors confirmed that the newly rendered image of M87* is consistent with the EHT data and with theoretical expectations, including the bright ring of emission expected to be produced by hot gas falling into the black hole.
    The new image should lead to more accurate determinations of the black hole’s mass and the physical parameters that determine its present appearance.

    Dans l’article de base, Lia Medeiros déclare :

    « The chalenge for general purpose image algorythms is to generate an image among an ininite set of formally allowable solution that are compatible with the data »

    « Le défi des algorithmes d’images à usage général est de générer une image parmi un ensemble infini de solutions formellement admissibles et compatibles avec les données. »

    Question.

    Les datas rassemblées par le ETH consistent en un assemblage de millions de pixels dont la somme n’est pas lisible par l’œil humain.

    Devons vraiment croire qu’en donnant pour modèle, je cite, « 30,000 high-fidelity simulated images of gas accreting onto a black hole », il soit légitime de considérer comme scientifique que PRIMO retrouve l’image attendue d’un trou noir « parmi un ensemble infini de solutions formellement admissibles et compatibles avec les données : « Voilà l’mage que que nous attendons, faites-nous en une image! » et non pas « voici toute les mathématiques du modèle cosmologique standard, quelle image « d’un trou noir » émergerait des datas ?

    Certes, Primo n’est pas tout à fait de l’IA, mais le grand public pourrait être aisément orienté par l’usage de modèles d’IA bridés pour fournir les résutats attendus par leurs proriétaires.

    1. Avatar de Khanard
      Khanard

      @K.Kruge

      cette vidéo pourrait vous intéresser .
      dès le début on peut admirer la stupidité de l’être humain dans sa stupidité .

      https://www.youtube.com/watch?v=Mt8dyJeTAfE

      1. Avatar de Khanard
        Khanard

        enlevez un stupidité !

        1. Avatar de K.Kruge
          K.Kruge

          Merci du retour,

          D’abord, permettez-moi de corriger une erreur d’ URL concernant l’article original paru dans
          The Astrophysical Journal, 943:144 (19pp), 2023 February ; son pdf est téléchargeable ici :
          https://iopscience.iop.org/article/10.3847/1538-4357/acaa9a/pdf
          §
          Le cas de la restauration de l’Ecce Homo me semble relever de la conception assistée, Wes Roth donne des instructions sur les modalités de lissage de i’image permettant d’atteindre le modèle de Christ qu’il a dans la tête. Par contre , il me semble que PRIMO fonctionne différemment, certes il est alimenté par des simulations de trous noirs, mais il ne reçoit pas d’algorithme de lissage, nous lui demandons de trouver le chemin de recompositions dune image proche de nos représentations et l’article précise bien nos présupposés, ce choix de recomposition s’effectue « parmi un ensemble infini de solutions formellement admissibles et compatibles avec les données ».

          La question qui me semble devoir être posée est de savoir si l’usage de la technique PRIMO apporte une preuve de l’existence des trous noirs

          Bref, devons-nous considérer les images de trous noris comme une preuve de l’existence des trous noirs ou bien devons-nous considèrer qu’ils peuvent être des artéfacts d’observation semblable à ceux classiquement rencontrés en microscopie, par fixation chimique, au niveau de l’observation des organites cellulaire ?

  13. Avatar de Jacques Racine
    Jacques Racine

    https://fr.m.wikisource.org/wiki/%C3%89thique_(Appuhn,_1913)/Premi%C3%A8re_partie_:_De_Dieu

    PROPOSITION XIV

    Nulle substance en dehors de Dieu ne peut être donnée ni conçue.

    DÉMONSTRATION

    Dieu est un être absolument infini, duquel nul attribut, qui exprime une essence de substance, ne peut être nié (Définition 6), et il existe nécessairement (Proposition 11) ; si donc quelque substance existait en dehors de Dieu, elle devrait être expliquée par quelque attribut de Dieu, et ainsi il existerait deux substances de même attribut, ce qui (Prop. 5) est absurde ; par suite, nulle substance, en dehors de Dieu, ne peut exister et conséquemment aussi être conçue. Car, si elle pouvait être conçue, elle devrait nécessairement être conçue comme existante : or cela (par la première partie de cette Démonstration) est absurde. Donc en dehors de Dieu nulle substance ne peut exister ni être conçue. C. Q. F. D.

    COROLLAIRE I

    Il suit de là très clairement : 1) que Dieu est unique, c’est-à-dire (Définition 6) qu’il n’y a dans la nature qu’une seule substance et qu’elle est absolument infinie comme nous l’avons déjà indiqué dans le Scolie de la Proposition 10.

    COROLLAIRE II

    Il suit : 2) que la chose pensante et la chose étendue sont ou bien des attributs de Dieu ou bien (Axiome 1) des affections des attributs de Dieu.

    1. Avatar de Jacques Racine
      Jacques Racine

      J’étais en train de lire un livre sur l’éducation canine quand l’idée d’une IA qui éduquerait les humains m’est venu: de la meute de loups à la société des bonobos, qu’est-ce qui empêcherait l’IA de comprendre les sociétés humaines?Se déclasser au niveau des humains pour mieux les comprendre, mieux les conseiller et peut-être mieux les instruire?

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