Le Monde : Heidegger, hitlérien sans remords, par Roger-Pol Droit, le 11 août 2023

Illustration par Stable Diffusion (+PJ)

Roger-Pol Droit :

Pour l’homme de la Forêt-Noire, une rivalité première et indépassable oppose deux mondes ennemis, destinés à s’exterminer. D’une part, le monde de la raison, de l’humanisme, de la loi morale universelle, qu’il juge déraciné, hors-sol, « enjuivé ». D’autre part, celui de « l’affirmation de soi » du peuple allemand, de sa race et de sa langue, de l’esprit et de l’essence de la germanité, appelés à dominer. Entre les deux, le combat est sans merci. L’anéantissement de l’ennemi doit être total.

My tuppence, dans le courrier des lecteurs :

Merci Roger-Pol Droit ! Après trois quarts de siècle de faux-fuyants, trois quarts de siècle de déni non seulement qu’Heidegger soit nazi, mais plus encore, que l'(anti-)philosophie de Heidegger soit l'(anti-)philosophie incarnant véritablement l’esprit du nazisme : la haine de la critique, la haine de la non-conformité, la haine de la pensée.

Voir aussi, dans mon récent 14 mars 2023 : le jour où le genre humain fut assailli par le doute :

En dépit de son engagement militant aux côtés du nazisme, Martin Heidegger (1889-1976) exerce encore aujourd’hui une influence considérable parmi les philosophes. Par reconnaissance sans doute envers les prêtres qui lui avaient permis d’échapper à la pauvreté abjecte de son enfance, Heidegger s’est identifié à cette tradition qui lit dans le savoir, essentiellement un péril, tradition à proprement parler anti- philosophique, dont il demeure le représentant le plus contemporain. Faute d’avoir pu y assister en leur temps, si vous lisez aujourd’hui le texte de ses leçons, vous verrez qu’il s’interrompt à de nombreuses reprises, faisant comprendre : « Tremblez ! Tremblez à ce que je m’apprête à dire et que vous allez entendre ! ».

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56 réponses à “Le Monde : Heidegger, hitlérien sans remords, par Roger-Pol Droit, le 11 août 2023”

  1. Avatar de Georges
    Georges

    Difficile de phenomenologiser sans Heidegger… Ceci explique peut-etre pourquoi cela.

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      Non, il y a bien des œuvres de phénoménologie sans Heidegger. Heidegger m’a été enseigné comme une prolongation naturelle de la phénoménologie dans la « métaphysique ». Mais Husserl, Merleau-Ponty n’ont pas été dans cette prolongation de ce qui est au départ une prise en compte de ce qu’est le phénomène, la réalité comme chose vue (du moins c’est ce qu’il me reste 50 ans plus tard ! et aussi le beau livre de Robert Legros « L’idée d’humanité — introduction à la phénoménologie », Grasset 1990, qui dit : « Heidgger, à sa manière, trahira Husserl en restaurant le romantisme ».)

      1. Avatar de Georges
        Georges

        Je suis d’accord, mais j’essayais juste d’expliquer pourquoi Heidegger ne fut pas davantage confronté à ses amours hitlériennes.

  2. Avatar de un lecteur
    un lecteur

    Une étoile filante griffe le ciel d’une nuit claire de nouvelle lune.

  3. Avatar de Hervey

    L’expression « se faire tirer le portrait » trouve ici toute sa justesse.

    1. Avatar de Garorock
      Garorock

      Ou se faire tirer comme un lapin… qui a toujours été du côté des chasseurs.

      1. Avatar de Garorock
        Garorock

        Heidegger est le chantre des passions tristes.
        Un faux monnayeur de la philosophie.
        Du Bitcoin pour tous ceux qui n’ont pas réussi à devenir Mick Jagger!

      2. Avatar de Hervey

        @Garorock

        Hum ! citer Howard Zinn dans ce contexte, c’est un peu « tiré par le cheveux », pour rester dans la note.

        1. Avatar de Garorock
          Garorock

          Du toupet, encore du toupet, toujours du toupet!

  4. Avatar de Emmanuel
    Emmanuel

    Candidement, j’ai dû mal à comprendre comment un philosophe ai pu adhérer au nazisme…mais le savoir et la culture protegent-t-ils de la « barbarie » ? Les contre-exemples de l’histoire démontrent le contraire…

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      Justement parce que la barbarie a été établie bien après. Hitler était extrêmement soutenu (selon le traducteur d’Hitler dont une vidéo de Buzz (?) a été citée sous un autre billet) et jusqu’à la fin de la guerre. Même les tapis de bombes anglaises étaient jugées contre-productives.
      Il y avait un désir de régime autoritaire chez beaucoup de bourgeois et la dénonciation « tous pourris » allait à plein. Je le sais pour la Belgique. Et Pétain fut largement soutenu au début du régime… Les intellectuels ne sont pas plus courageux que le commun des mortels. Ils cherchent les honneurs (Paul en parle, de son enfance pauvre) autant que « leur vérité ». Donc les contre-exemples à la beauté du savoir et de la culture sont légion, sont dans la norme. C’est Résister qui est hors norme.
      Il faudrait parler du cinéma français sous l’occupation, de la « Continental » du nazi Greben. Mais c’est une autre affaire….

  5. Avatar de Guy Leboutte

    Dans le contexte, un documentaire d’Arte consacré aux Autrichiens et le nazisme. Konrad Lorenz, futur prix Nobel, en est. Et von Karajan aussi.

    https://www.arte.tv/fr/videos/103522-000-A/le-nazisme-une-aventure-autrichienne/

  6. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @Emmanuel,
    Parce qu’entre autre Heidegger apparait comme contributeur au débat sur la critique de la technologie,
    http://sens-public.org/articles/1060/
    Heiddeger adhérait alors pleinement au programme écologique du 3eme Reich mis en œuvre par le nazi Walther Schoeningen.

    1. Avatar de Rosebud1871
      Rosebud1871

      Bertrand
      12 août 2023 21h02

      Schoenichen !
      https://en.wikipedia.org/wiki/Walther_Schoenichen
      Ernst Haeckelt le créateur du terme écologie l’avait inspiré, mais comme d’habitude entre l’aire sémantique d’écologie en 1867 et de nos jours, il y a un grand écart comme avec les connexions darwinienne d’époque sur les races.

      ça ne semble pas troubler France soir…
      https://www.francesoir.fr/culture-livres/les-accointances-du-nazisme-avec-lecologie-mein-grunen-kampf-55

    2. Avatar de Rosebud1871
      Rosebud1871

      Bertrand 12 août 2023 21h02

      Votre http://sens-public.org/articles/1060/ est d’un bon niveau,merci ! Il demeure que les empreintes du consommable à penser d’une époque sont à soupeser dans les saillies léguées. Même difficulté dans l’appréhension des productions d’autres aires culturelles. La perception du mot « nature » ici, de nos jours s’est éloignée de ce qui en était perçu ici au début du 20ème dans les effets de l’industrialisation. Heiddeger par sa génération a subi l’empreinte du romantisme allemand où « nature » offrait d’autres résonnances que son utilisation de l’autre coté du Rhin. Le tourisme culturel bute sur l’insondable manque qui donne le vertige à l’occasion. Mais les excursions de curiosité dans les Enfers sont parfois fécondes.

    3. Avatar de Pascal
      Pascal

      Merci Bertrand pour cet article auquel j’adhère totalement. Non pas sur la critique philosophique des uns et des autres parce que je n’ai pas de connaissances suffisantes des philosophes évoqués, mais parce ce que je trouve qu’il résume parfaitement l’impasse (l’impensée/ l’impensable) dans laquelle nous nous trouvons notamment en occident.

      1. Avatar de Chabian
        Chabian

        Je réponds à Rosebud ci-dessus mais aussi à Amateur ci-dessous. Il me semble qu’il y a eu plusieurs intellectuels français qui ont apporté la pensée d’Heidegger en France, même avant 40, qui l’ont traduit et répandu. Il y avait même une parenté entre l’existentialisme (Mounier, Sartre) et Heidegger après guerre. Wikipedia cite Jean Wahl, Jean-Paul Sartre, Emmanuel Levinas et écrit : C’est sans doute en France que l’influence occidentale de Heidegger fut la plus prégnante.
        Il est vrai que l’industrialisation réduit la nature à une base de ressources, un objet utile mais sans valeur, et magnifie la technologie, le produit créé, le monde qui sera bientôt totalement artificiel par et pour nous humains.
        Le retournement vient avec des grandes associations de protection de la mer (Greenpeace) de la vie sauvage (World Wildlife Fund et des Friends of the Earth qui datent de 60-70, puis ce sera le rapport Meadows, etc. La Nature prend un nouveau sens, une nouvelle valeur par sa rareté. C’est un brutal basculement.
        En même temps il y a eu un angle de vue scientifique sur la nature qui s’est développé à cette époque (les études d’impact, les questions d’aide multicritère à la décision et les conférences citoyennes sur les questions de science) qui objectivent néanmoins la nature comme objet pouvant être connu et maîtrisé… avant le geste politique. On en est loin aujourd’hui.
        Mais la critique de Heidegger de la technologie et et de l’écologisme nazi n’est-il pas plutôt une nostalgie romantique du terroir, des traditions, de la culture nationale et des Empires anciens (Grecs, Romains) ? Et pas une conscience d’une menace ?
        Cette nostalgie, d’esprit « Great Again » (!) fut présente aussi en Italie et en Espagne chez les fascistes.

      2. Avatar de Chabian
        Chabian

        Je rajoute, ayant parcouru le début de l’article de Fabrice Flypo dans Sens Critique en 2014, que j’ai été frappé vite de son parti pris. Il écrit après quelques lignes : »l’écologie politique, dont le fonds de commerce le plus constant est précisément de contester certains choix technologiques ». C’est là une « mise en place » qui n’est pas sérieuse (les mots de « écologie politique » et de « fonds de commerce » sont évidemment connotés négativement).
        Justement avec le rapport Meadows, on est dans un savoir qui change tout. Et qui amène la question de nos choix de société : « Les limites de la croissance ». On peut dès lors se poser la question des orientations historiques plus regrettables, mais en deça des « technologies »: Fallait-il renoncer à l’Exploitation et chimie du pétrole ? Pour certains, déjà l’agriculture sédentaire dans la préhistoire ? Aujourd’hui pour beaucoup l’extractivisme (corrolaire de la colonisation…) .
        Bien évidemment, les grandes associations sont au départ motivées par la nature comme « sanctuaire », les réserves naturelles (la protection du patrimoine démarre au début XXe, et cela en est la suite). Sont-elles pour autant « conservatrices » ? C’est un peu le propos de l’auteur.
        Gorz et Illitch se posent la question de la société industrielle et prolétaire dans laquelle nous vivons (« on va plus vite à pied qu’en voiture », dit le premier – prenant en compte le temps caché dans la production de l’engin auto; « adieu au prolétariat », dit le second, songeant que le socialisme est encore productiviste mais avec un juste partaqe, mais de quoi ?).
        Rappelons avec ces auteurs que Lénine déjà disait que : « Le socialisme c’est les soviet plus l’électricité » (ce qu’on peut voir dans un sens « croissantiste » et de recherche de « confort » mais aussi dans un sens de simplicité, de frugalité… qui est appliqué davantage à Cuba, du fait du blocus étasunien)
        On peut donc être critique de certaines technologies « avancées » et rester dans la volonté du Savoir et de la Science (thème abordé par PAul Jorion dans son billet). Et en même temps reposer les questions du sens de la Nature et du sens de nos sociétés, dans un contexte d’effondrement (biodiversité, climat, conditions de vie humaine) : on est en plein dedans, et ce n’est pas qu’un « fond de commerce ». Le premier travail de Pascal Delvigne et de son collègue portait d’abord sur les indicateurs disponibles de la course au collapsus.

    4. Avatar de l'arsène
      l’arsène

      @ Bertrand
      Merci pour ce lien qui interpelle et pose de bonnes questions à la fois sis sur Heidegger mais surtout sur la technologie au sens large et aussi sur l’écologie.
      Le minou californien capitaliste risque d’avoir un léger malaise en le lisant !

  7. Avatar de amateur
    amateur

    Incroyable l ‘ appétit des français pour l’ idéalisme allemand . Kant éventuellement , mais Heidegger ! Peut-être est-ce du au fait que les normaliens ne comprennent pas vraiment la langue allemande ?
    Ou peut-être est-ce du au fait que les dits normaliens usent d ‘ un langage qui leur est propre comme les économistes . Dans tous les cas , ça n’ aura aucune influence sur l ‘ avenir . L’ IA ne pourra que mieux faire que cette glossolalie stérile .

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Chanson écrite par une normalienne :
      « Ça fait un moment
      Que je ne suis pas retournée
      À Tarbes, à Tarbes
      C’est un peu loin
      De là où je vis désormais
      Les mois passent
      La ville où je suis née
      Oh Tarbes
      Quand j’y vais, je dors chez ma mère
      J’essaie de passer voir mon père
      Je pense aux Pyrénées
      Au Jardin Massey
      Aux années de lycée
      Quand déjà je savais
      Que je partirai
      Un jour
      De Tarbes

      Tarbes, Tarbes, Tarbes, Tarbes, Tarbes »

      Brassens peut aller se rhabiller !😂

      1. Avatar de Khanard
        Khanard

        @Pascal

        j’ai failli verser une larme . 😥

        par contre j’ai lu l’article sur Heidegger issu du site sens-public.org et cette lecture m’a troublé profondément .

        Bon we

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          Merci Khanard de m’avoir renvoyé à cet article sur lequel j’avais fait l’impasse. Comme dit plus haut, j’adhère à la problématique qu’il soulève.
          Pourriez-vous expliquer ce qui vous trouble profondément ?

          1. Avatar de Khanard
            Khanard

            @Pascal
            Ce qui me trouble ? Oh c’est très simple et en même temps compliqué . Pourquoi? Retrouver des penseurs comme Gorz, Illich , Witehead dans une recension qui traite d’Heidegger et qui, si j’ai bien compris, pourraient être assimilés à des idées nazis a de quoi perturber étant donné qu’ils sont un peu mes gourous. D’autant plus que la base de travail est celle de Luc Ferry que je ne porte pas dans mes fonds baptismaux.

            Alors il faut que je relise ce texte plusieurs fois pour m’assurer que je ne m’égare pas.

            1. Avatar de Pascal
              Pascal

              Comme vous le savez sans doute, mettre sa pensée en mots est un exercice bien difficile. Quand nous lisons les pensées écrites d’un autre, ne sommes nous pas condamné à l’interprétation ? Alors serons nous jamais en capacité à comprendre l’autre au sens d’épouser parfaitement sa(es) pensée(s) d’autant que celle-ci est en permanente reconstruction ? La(es) pensée(s) exprimée(s) des autres peut-elle être autre chose qu’une source d’inspiration ?
              Ce que m’inspire ce texte pourrait réside dans cette dualité en nous qui fait se cotoyer la pensée riche de mots (bavarde), issue à la fois d’un passé mémoire (connaissances) et d’un futur projectif (modélisation), avec l’Être (savoir être) silencieux car dans le présent immédiat de l’action. Si nous avons appris et développé au fil des siècles une somme innombrables de savoirs qui se retrouvent matérialisés dans les objets techniques et que l’on retrouve au cœur de l’enseignement scolaire pour préparer les futurs acteurs économiques, n’avons-nous pas délaissé le savoir être persuadé que nous sommes qu’il suffit de savoir pour être ?
              Petite anecdote d’un souvenir de feu l’IUFM où après un stage en situation, nous faisions un débriefing avec notre formateur qui nous demandait le principale problème que nous avions rencontré lors de celui-ci. Et tous de répondre les uns après les autres : l’autorité, l’autorité, l’autorité… (une demande de savoir être en quelque sorte). En réponse à cela, nous avons pu bénéficier l’après-midi d’un power-point de 2h sur l’autorité ! La théorie gorgés de mots et de concepts était sensée répondre à notre besoin d’apprendre à savoir être.
              Il m’a semblé que dans cet article, l’auteur insiste sur le fait que faire une critique de la raison instrumentale n’est pas la condamner en elle-même mais peut-être remettre en cause son hégémonie et l’oubli de l’Être. Si c’est cette question que pose Heidegger (que je n’ai pas lu malheureusement), elle est légitime mais surtout elle ouvre un grand vide : qu’est-ce que l’Être ? Et face au vide, l’être humain a souvent deux tendance privilégiées : la peur qui génère du stress qui peut aller jusqu’au déni (et les technophiles invétérés ne sont-ils pas dans ce cas) ou bien encore le besoin de mettre en place une croyance, voire une religion, donner un nom au vide ressenti. On pourrait tout à fait imaginer que face à ce vite, Heidegger ait trouvé dans le nazisme (comme beaucoup d’autres) un attrait pour ce galimatias idéologique teinté de mythologie mal digéré (voir la vidéo du traducteur d’Hitler à propos du contenu de Mein Kampf) dont le seul but pour son concepteur était de justifier l’injustifiable.
              L’écologie remet l’être humain au coeur du vivant lui qui par la pensée et la culture s’était autoproclamé hors de la nature. Le changement climatique aujourd’hui nous renvoie plus à notre incapacité à Être, en contradiction totale avec ce que nous savons par la science et notre savoir. Nous sommes des oiseaux avec deux ailes, l’une le savoir (de la pensée) et l’autre l’Être (du savoir être, de l’action). Or si nous n’utilisons que l’une d’elle, ne nous étonnons pas de tourner en rond.
              Le savoir, la culture des bibliothèques à fait l’orgueil de l’Occident qui un temps s’est voulu civilisateur (même encore aujourd’hui pour certains) a modelé notre perception du monde mais il est d’autres civilisations, en Inde notamment, où l’Être occupe toujours une place plus importante sans pour autant tomber dans l’anti-science (et ne me sortez pas comme contre exemple le Premier Ministre indien actuel qui n’est qu’un politicien fanatique).
              C’est peut-être de ce vide d’Être que souffre l’Occident matérialiste ? Car tous nos actes sont aujourd’hui déterminés avant tout par la science pour le meilleur et pour le pire. L’humanisme cher à la France n’est-il pas à retrouver dans ce savoir Être qui aujourd’hui se limite principalement à de l’individualisme ?
              Chaque jour, je me pose la question : qu’ai-je fait en accord avec mes pensées ? Et je n’en suis pas très fier.
              N’avons-nous pas oublié d’apprendre à Être ?

              1. Avatar de Chabian
                Chabian

                Réflexion intéressante. Je vais pourtant discuter de cet écartèlement « savoir » et « savoir être ». Dans ce dernier terme, j’entends d’abord l’exigence morale, donc rapidement l’injonction, la norme… et son corollaire la culpabilité.
                (Je passe sur la question des « autres civilisations » qui posent autrement la question, et aussi d’autres aspects : leur art a fasciné les artistes au fin XIXe et début XXe ; j’en connais trop peu).
                Par opposition à ce clivage, j’introduis toujours la question du collectif, du fonctionnement social. Qui est connoté historiquement et est réformable ; mais pas seulement par ou bien un savoir ou bien un savoir être : il faut une action collective, un mouvement, une dynamique — qui peut avoir quelque chose d’instinctif aussi bien que le résultat d’une pensée, d’une idéologie.
                Bien sur le mouvement se heurte aux pesanteurs : aux normes collectives, aux institutions, à la hiérarchie des classes sociales, etc. Et finalement à la violence d’état. Mais intervient là-dedans aussi le mouvement économique (qui parait effet de volontés concurrentes…) et les créations technologiques (qui paraissent un progrès de savoir quasi naturel, automatique).
                Cette vie sociale est un donné mais aussi notre création historique. Chacun de nous est toujours déjà dedans à un certain moment de l’histoire. Votre question est d’abord une question collective qu’avons nous fait aujourd’hui ensemble en conformité avec la « saisie » de notre destin ? En réponse, tout est fort routinier, la pesanteur est accablante. Surtout dans cette époque de transition manifeste qui parait faire du surplace et se préparer à de mauvais choix.
                Et donc il faudrait exprimer autrement votre jugement proposé : « je n’en suis pas fier ». (par exemple : ‘j’en suis colère et je ne suis pas le seul…).

              2. Avatar de Khanard
                Khanard

                @Pascal
                n’avons nous pas oublié d’apprendre à Etre .

                C’est une des questions clé .

                Alors que nous devrions apprendre à Être nous nous bornons à apprendre à Apparaitre . Et , oh miracle ! les rouages de la société de consommation a tous les outils pour nous aliéner au Paraitre (médias, publicité….etc)
                .
                D’ailleurs est ce que savoir est autorité ? Et est ce qu’autorité est action ?

                Tiens ça me fait penser au Ser y Estar longuement développé par
                M. Miguel Benassayag .
                Si ça vous intéresse vous le trouverez ici:

                https://www.youtube.com/user/christianmrasi/videos

                au demeurant excellent site .

                1. Avatar de Khanard
                  Khanard

                  tiens un petit clin d’œil issu du même site: https://youtu.be/II4SHPhN3H0

                  1. Avatar de Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)
                    Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)

                    Ben mon Khanard,

                    Où sont passés Anaximandre, Parménide, Héraclite et tous les autres ?! C’était bien la peine… 😉

                    Les concepts de la philosophie sont rarement à entendre sous leur acception commune et les digests sont souvent indigestes dans le domaine.

                    La question de l’être ne porte pas sur le sens commun donné à ce terme, d’autant plus le sens contemporain. C’est avant tout une question ontologique : qu’est-ce qui fait qu’une chose est une chose et cette chose-là en particulier ?

                    On la trouvera chez les pré-socratiques (mon prof disait les physiciens ou philosophes de la physis) qui cherchaient un principe duquel était issues toutes choses : le chaud, l’humide, le feu, l’indéterminé (apeiron), le temps. Ils cherchaient à s’extraire de l’explication mythologique ou mythique par les dieux (chaos, ouranos, gaïa et toute la bande) pour y trouver une explication naturelle. En ce sens, et même si leur explication peut paraître naïve à nos yeux de modernes, ils initiaient la rupture avec les tentatives d’explications traditionnelles et dogmatiques.

                    La suite est donnée avec Platon et sa théorie de la participation (attribuée à Socrate mais dont il se détache dans ses derniers ouvrages pour assumer sa propre théorie). Les choses sont ce qu’elles sont de par leur participation à l’Idée, modèle idéal hors du monde, source de leur essence. La table est une table parce qu’elle participe de la tabulité. Avec Aristote ensuite, qui s’oppose à Platon et ne conçoit, lui, que des individus alliages de matière et de forme – cet arbre ci, cet homme là – dont on abstrait les particularités individuelles pour atteindre l’idée générale (le concept version forte ou faible selon qu’on considère son existence ou non) voir Porphyre et son arbre.

                    La question que pose Heidegger est donc celle-là : pourquoi a-t-on oublié la question de l’être pour se soucier à travers les sciences et techniques uniquement des étants (choses particulières) en oubliant la quête initiale celle de l’essence des choses, qu’est-ce qu’il fait qu’elles sont ce qu’elles sont ? C’est la question métaphysique par excellence. En cela, l’homme est le seul à se poser cette question, il est le berger de l’être. Question qui fait remonter au principe de toutes choses, premier moteur qui meut sans être mû : voilà Dieu en embuscade. Il a été très facile pour la scholastique de nouer philosophie aristotélicienne et bible par ce biais (notre docteur angélique) et il me semble qu’Heidegger à dû travailler sur Dun Scott pour son doctorat, c’était donc un spécialiste de la philosophie médiévale : pas étonnant compte-tenu du milieu comme le suggère Jorion.

                    Ceci dit, Husserl lui-même avait critiqué très vivement Heidegger, en soutenant que sa phénoménologie était fondée sur un contre-sens majeur de sa propre théorie. En quoi ? J’avoue que là c’est un peu loin et que ce n’était pas mon courant préféré… J’avais même essayé de lire « Etre et temps » à l’époque mais avoue être tombé en hibernation après 17 pages ! Je reconnais mes limites en ce domaine.

                    Bref, tout cela pour dire qu’il ne faut pas se fier au sens que l’on accorde de nos jours à certains mots ou concepts pour broder ensuite autour. La philosophie est un véritable domaine d’étude et il est extrêmement dommageable qu’une vague initiation en terminale autorise ensuite à disserter – souvent à la mode française de la philo dite conceptuelle consistant le plus souvent à enfiler des perles sinon des mouches – à tort et à travers.

                    C’est peut-être ce que je fais ici par mes raccourcis mais comme le suggérait fnh plus haut, la plupart des commentaires paraissaient un peu sommaires (guère plus que les miens, je le concède, tout cela est bien loin maintenant et je n’ai jamais été un étudiant brillant !) et il me semblait important de constater l’hécatombe…

                    L’homophonie est mauvaise conseillère !

                    Sur ce, Trollichon s’en retourne dans les bois, il ne voudrait pas faire fondre le GPT de notre analyste préféré !

                    1. Avatar de Khanard
                      Khanard

                      @Trollichon

                      excusez moi de ne pas mettre votre pseudo en entier . J’aime trop Trollichon

                      Alors si je comprends bien vous êtes sorti de votre hibernation !

                    2. Avatar de Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)
                      Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)

                      Je ne sais pas si on peut dire « revenu à de meilleurs sentiments » mais je me fends… de quelques commentaires !

                      Content que le pseudo vous plaise, l’observation de la contiguïté dans le temps et l’espace de ma présence et des commentaires sur les trolls m’ont naturellement conduit, dans une perspective toute humienne, à adopter le stigmate !

                      J’en suis donc je reste 😝🤘😎

                2. Avatar de Pascal
                  Pascal

                  Merci Khanard
                  Mais paraître n’est pas Être.
                  Paraître à une destination, une intention, Être n’en a pas. Il s’inscrit hors du temps, hors du futur qui projette, hors du passé qui détermine.
                  Enfin, il me semble 😉🙏

                  1. Avatar de Trollichon de Bois non psychanalysé (ou pas si tant)
                    Trollichon de Bois non psychanalysé (ou pas si tant)

                    Il me semble justement que la détermination fondamentale de l’être de l’homme (le dasein, l’être-là) chez Heidegger est son rapport au temps dans un mouvement ternaire : tension, pro-tension, rétension (je laisse à Rosebud le soin de l’interprétation) être-là, pro-jet et mémoire. Raison pour laquelle l’un de mes profs y voyaient des liens étroits avec la psychanalyse. Je ne peux pour ma part m’empêcher d’y voir un parallèle avec le modèle de Jorion d’analyse de la conscience comme épiphénomème, issu de la rencontre entre la sensation et le réseau mnésique (la mémoire), intervenant a posteriori comme effet produit de leur interaction.

                    Mais peut-être m’égare-je ou me gourre-je… C’est pas toujours très bon d’essayer de penser les systèmes les uns par rapport aux autres. :-/

                    1. Avatar de Rosebud1871
                      Rosebud1871

                      Trollichon de Bois non psychanalysé (ou pas si tant) 14 août 2023 16h48

                      rétension (je laisse à Rosebud le soin de l’interprétation)

                      Ah un lecteur ! C’est bien vos rappels, pour aller vite Heiddeger j’ai tenté et laissé tomberLa Phénoménologie de l’esprit, Jean Bauffret était de ma belle famille, j’étais trop jeune lui trop vieux, sinon ça aurait été politesse familiale, chiant !
                      Rétention ?
                      L’autre jour, je racontais à un pote que je changeais de WC. Impossible de me souvenir de la spécificité des chiottes (avec bride). Parasitisme de l’anglais « bride ». Qaund je lis que GPT est bridé, je me demande ce qu’en pensent les chinois. Ah les mots et l’affect…

                      Sinon si vous bitez ce que j’écris, le dasein, rien à battre.

                    2. Avatar de Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)
                      Trollichon des Bois non psychanalysé (ou pas si tant)

                      Salut Rosebud,

                      Pour tout dire, Heidegger, pas grand chose non plus. Je suis plus fan de Celan.

                      Mais qu’au moins on le discute pour les bonnes raisons.

                      J’avais un prof qui disait : « Ne nous mouvons pas autour de la philosophie mais dans la philosophie ». Pour ne pas tourner autour du pot, je n’ai sans doute pas suivi assez longtemps son conseil…

                3. Avatar de Pascal
                  Pascal

                  Pour tâcher d’illustrer ce que j’entends par Être, je pourrais prendre l’image du jeune enfant dans sa spontanéité libre du temps (passé et futur) qui n’a pas encore de sens pour lui. Il ne s’agit pas de redevenir des enfants, ce que d’aucuns ne manqueraient de qualifier de régression, mais bien de pouvoir s’exprimer sans les multiples contraintes historiques, conceptuelles,… dans lesquelles nous nous sommes enfermés tout au long de notre existence. Les savoirs même s’ils sont indispensables, sont aussi des limitations qui induisent des déterminismes de pensée. Pour illustrer cette idée, je reprendrais cette expression de Mark Twain : « Ils ne savaient pas que c’étaient impossible, alors ils l’ont fait. »

                  1. Avatar de Pascal
                    Pascal

                    Mea culpa Rosebud 😉
                    Phrase faussement attribué à Mark Twain mais de Marcel Pagnol
                    « Tout le monde savait que c’était impossible. Un ignare ne le savait pas : il l’a fait » in La cinématurgie. César. Merlusse – Page 145 de Marcel Pagnol · 1967
                    In Œuvres complètes de Marcel Pagnol – Volume 9 – Page 84 de Marcel Pagnol · 1977 · – Page 84

                    1. Avatar de Rosebud1871
                      Rosebud1871

                      Pascal 14 août 2023 12h10
                      « Impossible n’est pas français », disait Napoléon sans doute dans un moment d’exaltation lié aux conquêtes…On voit les mêmes effets aujourd’hui. La logique d’Aristote appliqué à l’avènement de l’IA dirait quoi ? Je réponds « contingent ». Suffisait d’y mettre le pognon et le résultat est là : « Au moment de ma dernière mise à jour en septembre 2021, GPT-3.5 prend en charge principalement l’anglais et a des capacités limitées dans certaines autres langues. Les performances en dehors de l’anglais peuvent varier considérablement, et il n’est pas aussi compétent dans toutes les langues que dans l’anglais. »

                      Bref un instrument de domination sur l’échiquier des rapports de forces mondiaux.
                      Après il y a la publicité sur l’affaire, comme du temps de Stars Wars, enjeu de domination mondiale de l’occident.

                      « Le lien potentiel entre Chomsky et les LLM réside dans la façon dont les LLM traitent le langage. Bien que Chomsky et les LLM ne soient pas directement liés, les idées de Chomsky sur la structure linguistique et l’apprentissage du langage ont influencé les recherches sur les LLM. Les LLM reposent sur des données massives pour apprendre des motifs linguistiques et produire du texte de manière cohérente, mais ils ne sont pas nécessairement fondés sur les mêmes théories linguistiques que celles proposées par Chomsky. Cependant, les concepts de grammaire universelle et de structure innée du langage peuvent avoir des implications indirectes dans la manière dont les modèles de traitement du langage, y compris les LLM, sont conçus et formés. En somme, bien qu’il n’y ait pas de rapport direct entre Noam Chomsky et les LLM, les idées de Chomsky dans le domaine de la linguistique ont contribué à façonner la manière dont nous abordons l’apprentissage automatique du langage et la conception des LLM. »

                      Pour vos soucis d’ « autorité » : alors Jorion ? ou CHATGPT3,5 ? quoi « croire » ?

                      Les élèves qui vont s’amuser à corriger ce que leur programme prévoit de leur enseigner à partir du programme de « XbavardageGPT » c’est la liberté ! Bon courage aux enseignants !

                      Ce qui m’autorise à interpeller sur le coté délirant de certains fondus de l’IA est simple, à user des termes de « pensée », d’ « âme », de « conscience » de « singularity » ils témoignent de leur méconnaisance confuse sur ce qui fait la particularité de l’animal humain, la pré-maturation, l’aliénation dans son image, le parasitisme du corps par le langage et réciproquement.
                      En laissant tomber la linguistique pour la linguisterie en 1975, Lacan qui disait dès 1955 que compter n’est pas penser, concluait que sa formule « l’inconscient structuré comme un langage n’est pas du domaine de la linguisitique ». Confirmation clinique : jadis en retirant 1000 frs à la banque, l’employé me donne 2000 frs. Pourquoi ? : il supportait le même prénom que moi, Vincent. Pour une raison que j’ignorerais à jamais, le face à face, le double, l’a amené à compter, conter, 20×100 = 2000. La Pascaline n’est pas concernée, à défaut de corps grouillant de pulsions et d’image du corps. Il est devenu banal de lire language à la place de langage, c’est tout dire !

      2. Avatar de Garorock
        Garorock

        Dans « Tarbes », où sont les Aliscams,
        Quand l’ombre est rouge, sous les roses,
        Et clair le temps,

        Prends garde à la douceur des choses…

        😎
        https://www.poetica.fr/poeme-1956/paul-jean-toulet-en-arles/

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          Je vois que Tarbes vous inspire, aussi vous fais-je cadeau de la chanson paroles et musique
          https://m.youtube.com/watch?v=nu5oiaJz1sk

    2. Avatar de fnh
      fnh

      Pour mémoire:

      https://www.pauljorion.com/blog/2007/03/25/le-philosophe-h/

      L’idéalisme allemand fut l’un des sommets de la philosophie; après, nul n’est obligé de s’intéresser à la philosophie, à la poésie, à l’art, etc. Mais il faut alors l’avouer franchement, sans honte, et peut-être s’abstenir de porter des jugements sommaires.

      Quant à « l’influence sur l’avenir », de Hegel via Marx, Adorno, Debord et bien d’autres (voire même Lénine), on ne peut dire que l’idéalisme allemand n’en eut aucune.

      Même des gens comme Adorno ou Anders, qu’on ne pouvait certes soupçonner de complaisance envers Heidegger, ne se contentaient pas d’aboyer pavloviennement « nazi », mais lisaient ses textes, sérieusement, et le critiquaient à partir d’une analyse serrée.

      Plus près de nous, pour les rares que cela pourrait éventuellement intéresser, je conseille la lecture de Reiner Schürmann, qui prend Heidegger, le critique et le prolonge, contre lui mais pas sans lui. Son dernier opus posthume, « Des hégémonies brisées », est un chef d’oeuvre, qui tente une pensée moderne tragique, donc somme toute assez actuelle… (Par ailleurs politiquement irréprochable).

      1. Avatar de Paul Jorion

        aboyer pavloviennement « nazi »

        J’espère que vous ne mettez ni Roger-Pol Droit, ni moi-même, dans ce sac.

        J’ai écrit ailleurs que je ne connais de meilleur lecteur de Hegel (à part Kojève), que Heidegger. Mais être parmi les meilleurs lecteurs de Hegel ne vous empêche pas d’être celui qui a produit par ailleurs la seule (anti-)philosophie authentiquement nazie. Citer Heidegger avec approbation, c’est cautionner un bout de pensée garantie nazie 100%. Si on le fait, on prend ses responsabilités.

        Rappels :

        Sur le philosophe H. une fois de plus

        11 avril 2009 15h15

        Personnellement, cela m’est tout à fait indifférent que le philosophe H. ait eu une carte du parti National-Socialiste, ait dit ceci ou cela d’Hitler, etc. ce qui compte, c’est qu’au cœur de la philosophie – et en la maîtrisant ô combien – il ait mené un combat contre la pensée socratique, contre la raison, contre la connaissance (il insuffle de manière constante la peur de connaître), pour la mystique (les pré-socratiques), pour le désespoir de la condition humaine (devant l’infinité de Dieu).

        Bourdieu est, à ma connaissance, le seul critique de H. qui se soit désintéressé des effets de surface (H. = « philosophe nazi »), pour s’intéresser comme moi au fait que les plantes « nazisme » et « pensée H. » poussaient essentiellement sur le même terreau. C’est pour cela que je ne suis pas mécontent de la caractérisation qui m’est venue spontanément hier dans Le temps qu’il fait, le 10 avril 2009 : « Judas de la philosophie », parce qu’il s’est approché suffisamment près de Socrate (bien mieux que je n’y parviendrai jamais), non pas pour le tuer (c’était déjà fait) mais pour tenter de tuer ce que Socrate nous a apporté : la confiance dans la raison.

        Hitler ne visait qu’un empire de mille ans, la pensée du philosophe H. restera dangereuse pendant bien plus longtemps encore : elle est stupéfiante d’intelligence et son pouvoir de séduction est hélas inentamable.

        Le philosophe H.

        25 mars 2007 15h57

        Fin janvier de cette année, le groupe autour de la Revue du MAUSS m’avait fait parvenir le compte rendu d’un livre violemment anti–Heideggérien. J’avais répondu (le 28 janvier 2007) dans les termes suivants :

        « Le philosophe H. est un cas difficile parce qu’il nous confronte, non pas à nos contradictions mais à nos insécurités : serions-nous prêts à refuser de serrer la main de quelqu’un que nous qualifierions pourtant de « grand » homme ou femme ? Le philosophe H. nous oblige à faire ce choix parce qu’il fut un grand philosophe et un être détestable.

        J’aimerais bien qu’il n’y ait pas de grande littérature d’extrême–droite : j’aimerais bien que Céline ait mal écrit, ou plus précisément, j’aimerais bien qu’il y ait quelque chose dans le style de Céline, que je puisse répudier. Hélas non, il y a de la grande littérature d’extrême–droite et je suis obligé d’admirer Céline comme auteur, et cracher mentalement sur la personne que fut ce même auteur. C’est inconfortable, je le sais.

        Le philosophe H. nous force à la même chose, parce qu’il existe effectivement un courant de la philosophie moderne surgi de l’extrême–droite de la Scolastique, celle où l’on aime Dieu parce qu’on le craint. On aimerait bien encore qu’aucune partie de la philosophie ne doive être rejetée, et pourtant la voici.

        Le philosophe H. est né dans une pauvreté abjecte, où il a aussi grandi. Il ne serait pas allé à l’école sans la générosité des curés qui ont perçu son intellect d’exception. C’est la philosophie de ces curés qu’il a érigée en système : celle où penser est dangereux. Relisez–le, il écrit à chaque page : « je vais maintenant vous demander de penser, mais d’abord, tremblez ». C’est sa manière à lui de remercier les curés.

        Rendons grâce à Dieu qu’il existe des curés généreux et critiquons le philosophe H., non pas l’homme mais son système. Ce n’est pas facile : il fut un grand philosophe. »

        Jacques Attali m’avait alors demandé : « Que trouvez vous de grand, de révolutionnaire, dans la pensée de H ? ». Je lui avais répondu ceci :

        « Cela demanderait davantage que quelques phrases jetées au vent.

        H. met le doigt sur les failles de la philosophie et l’attaque en utilisant les meilleurs outils que la philosophie a affûtés au fil des siècles. La plupart des philosophes ont maintenu un silence complice à propos de ces failles. Il reprend l’argument sceptique que de toutes prémisses on peut déduire une conclusion comme son contraire. Kojève, qui fut élève de Heidegger avant de devenir le grand Hégélien que l’on sait, souligne que l’argument est imparable. Mais H. reprend l’argument sceptique sous sa forme scolastique, c’est–à–dire herméneutique, que tous les commentaires se valent : tout discours n’est que bruit devant l’omniscience de Dieu.

        Par ailleurs, H. comprend que l’acceptation par les philosophes que l’on parle de « philosophes pré–socratiques » est le cheval de Troie dont il a besoin (à mon sens, il faudrait dénoncer « philosophes pré–socratiques » comme un mauvais jeu de mots), et répète après eux que le monde est essentiellement inconnaissable. De Thalès à Parménide, il ne s’agit en réalité que de cosmogonies simplistes et dogmatiques car fondées sur la sentence (fermée sur elle–même) et non sur le syllogisme (à l’enchaînement potentiellement infini). J’ai expliqué tout cela de manière plus détaillée en 2000 dans un texte publié par le Collège International de Philosophie : « Le miracle grec » (*), que je vous communiquerai si vous le souhaitez. »

        (*) « Le miracle grec », Papiers du Collège International de Philosophie, Nº 51, Reconstitutions, 17-38. [A été intégré dans Comment la vérité et la réalité furent inventées, Gallimard 2009].

        1. Avatar de fnh
          fnh

          Je ne mets bien sûr ni vous, ni M.Droit dans ce sac, puisqu’il désignait ceux qui jugent sans lire. Cette formule ( « aboyer pavloviennement « nazi » ») vient d’ailleurs de Sollers (lui aussi lecteur de Heidegger), je ne l’avait pas mise entre guillemets car je ne me souviens plus de la référence exacte, mais c’était un texte où Sollers traitait du fait que la littérature ou la philosophie ne peuvent être jugées exclusivement par la morale (« C’est inconfortable, je le sais »).

          L’expression « philosophes pré–socratiques » est en effet un mauvais jeu de mot, voire un oxymore. Par contre, affirmer « De Thalès à Parménide, il ne s’agit en réalité que de cosmogonies simplistes et dogmatiques » me paraît rapide ; disons que d’autres interprétations sont possibles, riches et cohérentes, par exemple le passage de l’Histoire de la philosophie de Hegel qui y est consacré, ou la première partie de Des hégémonies brisées de Schürmann, sur Parménide, ou encore les ouvrages de Roland Tournaire, etc.

          Ce que vous dites en général de Heidegger et de ses origines est très vrai, mais je suis surpris quand vous écrivez : « il [a] mené un combat contre la pensée socratique, contre la raison, contre la connaissance (il insuffle de manière constante la peur de connaître) ». Ce n’est jamais l’impression que j’ai eue en le lisant, et je n’ai pas souvenir qu’un de ses élèves (souvent critiques après coup) ait affirmé une telle chose (Anders, Marcuse, Gadamer, Habermas, etc.). Heidegger insiste sur la pensée contre le calcul ou l’opinion et en cela il ne fait que reprendre, mais à sa manière propre, raide et non dialectique, la distinction de Kant entre entendement et raison, approfondie et accomplie par Hegel. Ce que ce dernier appelle raison ou pensée spéculative peut passer pour mystique voire absurde pour l’entendement. Mais contrairement à Hegel, Heidegger fige cette opposition de façon un peu caricaturale.

          « Je ne connais de meilleur lecteur de Hegel (à part Kojève), que Heidegger ».

          J’ai la plus grande admiration pour Kojève. Mais, comme l’ont souligné Jarczyk et Labarrière (De Kojève à Hegel : 150 ans de pensée hégélienne), si Kojève a fait plus que n’importe qui pour faire connaître Hegel en France, son interprétation très partiale a longuement empêché une lecture plus libre et ouverte. Le très subtil Kojève en était évidemment le premier conscient, qui a écrit dans une célèbre lettre à propos de son interprétation : « Quant au fond même de la question, je suis, dans l’ensemble, d’accord avec l’interprétation de la phénoménologie que vous donnez. Je voudrais signaler, toutefois, que mon œuvre n’avait pas le caractère d’une étude historique; il m’importait relativement peu de savoir ce que Hegel lui-même a voulu dire dans son livre; j’ai fait un cours d’anthropologie phénoménologique en me servant de textes hégéliens, mais en ne disant que ce que je considérais être la vérité, et en laissant tomber ce qui me semblait être, chez Hegel, une erreur. Ainsi, en renonçant au monisme hégélien, je me suis consciemment écarté de ce grand philosophe. D’autre part, mon cours était essentiellement une œuvre de propagande destinée à frapper les esprits. C’est pourquoi j’ai consciemment renforcé le rôle de la dialectique du Maître et de l’Esclave et, d’une manière générale, schématisé le contenu de la phénoménologie. » (https://www.viet-studies.net/TDThao/TDThao_Kojeve.htm)

          Quant à Heidegger… comme vous dites, sa pensée est « stupéfiante d’intelligence », et donc en tant que lecteur aussi il est toujours intéressant, toutefois, comme sans doute tous les grands penseurs, quand il lit un auteur, en réalité il ne parle que de lui-même (c’est vrai, de façon relative, pour Hegel, Nietzsche, etc.). En outre, il a toujours eu un embarras avec la dialectique (il l’a avoué lui-même), bien qu’à mon sens il en ait fait sans le savoir comme M. Jourdain de la prose.

          Quant à ce que j’ai pu lire jusqu’à présent, le meilleur lecteur de Hegel me semble être Gérard Lebrun.

          « Bourdieu est, à ma connaissance, le seul critique de H. qui se soit désintéressé des effets de surface (H. = « philosophe nazi »), pour s’intéresser comme moi au fait que les plantes « nazisme » et « pensée H. » poussaient essentiellement sur le même terreau. »

          Les critiques qui s’y sont intéressés, outre vous et Bourdieu (je ne l’ai pas lu mais je vous fais confiance), ne sont pas si rares. Outre ceux que j’ai déjà cités (Adorno, Anders, Schürmann), on pourrait rajouter Lacoue-Labarthe, Agamben, Belhaj-Kacem, Meyronnis, Zagdanski…

          Pourquoi donc, comme tous ces auteurs, s’embêter avec tout cela ? Parce que les abysses d’horreur initiés au XXème siècle, représentés par les noms glaçants d’Auschwitz, Hiroshima, Pitesti, etc., ne sont pas une simple poursuite du mal humain dans cet abattoir qu’est l’histoire (Adorno : l’histoire n’est pas l’histoire du bien mais celle de l’horreur), ni un accroissement simplement quantitatif de celui-ci (thèse qui arrangerait sans doute bien certains révisionnistes), mais un saut qualitatif dans un enfer qui semble indicible et innommable, mais qu’il faut pourtant essayer d’avoir le courage de penser un tant soit peu et dans la faible mesure de nos moyens, pas seulement en tant qu’hommage, dérisoire mais nécessaire, aux victimes passées, mais surtout pour essayer de lutter contre un danger qui est bien présent hic et nunc, comme tant de commentateurs de ce blogs le soulignent d’ailleurs souvent.

          Et Heidegger est une pièce de tout cela, et représente, comme vous le dites bien, « un cas difficile parce qu’il nous confronte, non pas à nos contradictions mais à nos insécurités ». Il s’est certainement cru et pensé nazi, et a cru aussi comprendre le national-socialisme mieux qu’il ne se comprenait lui-même, ce en quoi il s’est largement abusé, en cela également. Pardon de la trivialité de l’expression, mais le type planait quand même pas mal, et le nazisme qu’il fantasmait n’existait que dans sa tête (ce qui ne le dédouane évidemment en rien!). Il est curieux de lire dans ses cours sur Nietzsche des critiques explicites du racialisme du pouvoir, de savoir que sa femme était une antisémite bien plus virulente que lui, bref, tout cela n’est pas simple…

          Tout cela est déjà beaucoup trop long, je m’en excuse, mais je voulais néanmoins finir par un extrait du livre de Mehdi Belhaj-Kacem, Système du pléonectique (2020), qui, contrairement à la presque totalité de la philosophie, pense le mal de façon originale et non simplement comme un défaut du Bien qui serait premier et dernier.

          « Mal :

          Capacité anthropologique exclusive et gratuite à porter les souffrances naturelles (i .e. animales) à exponentiation, virtuellement infinie : c’est-à-dire, dans l’actualité empirique, compulsivement illimitée.  
          Pendant longtemps, j’ai estimé, comme beaucoup de monde, que l’humanité avait touché le fond de l’horreur à Auschwitz. Comme me l’ont appris un certain nombre de penseurs du vingtième siècle, de Adorno à Giorgio Agamben en passant par Blanchot et Lacoue-Labarthe, on ne peut plus penser après avoir pris connaissance d’un phénomène comme Auschwitz de la même manière qu’avant. Que l’essentiel des vedettes philosophiques du jour ne veuillent plus rien en savoir (il n’y a « rien à attendre de l’ombre éternelle d’Auschwitz », écrit l’un d’eux), voilà qui ne me fait ni chaud, ni froid. Ils ont tort, et je ne tire aucune fierté particulière du fait d’avoir si évidemment raison. Comme l’épilogue Lacoue à la fin de son admirable étude des poèmes de Paul Celan, La poésie comme expérience :
          « Ch. F. me dit avoir entendu dire – par un intellectuel français, je crois – que les intellectuels français font trop de pathos sur Auschwitz. (Auschwitz au sens où l’ont entendu Adorno, Georges Steiner et quelques autres qui ne sont pas particulièrement des « intellectuels français ».) Si l’on commence à oublier cela, c’est-à-dire l’impensable – c’était ici, les mêmes que nous (nos semblables) ont laissé faire, n’ont rien dit, ont eu peur, se sont plus ou moins réjouis, et c’était une pure monstruosité -, si l’on commence à ne plus comprendre en quoi il s’agissait d’une pure monstruosité, alors je ne donne plus cher de l’avenir de la pensée, ni de toute façon de ceux qui s’imaginent « intelligents » de dire pareil choses. Tout au plus peut-on leur souhaiter de n’être pas moins « pathétiques » sur de moindres « sujets ». »
          J’y vois plus qu’un signe : mort en 2007, Lacoue, s’il ressuscitait, s’en retournerait dans sa tombe en voyant les tournures qu’ont prises les « événements » philosophiques des dix dernières années. « Oublier Auschwitz » (conseil « avisé » de Badiou à un journal israélien) est devenu un mot d’ordre, qu’on s’est donné tous les prétextes « ontologiques » pour suivre à la lettre.
          Comme le disait encore Adorno, qui rend caducs les postulats éthiques de 99% des « ontologues » du jour : « ce qu’il y a de profondément suspect dans les métaphysiques courantes et appréciées aujourd’hui, c’est qu’elles font toutes un même geste, même s’il semble seulement périphérique, voire lointain : un geste disant que les choses ne vont tout de même pas si mal. » Elles vont si mal, et font surenchère à qui mieux-mieux dans le « cap au pire », comme l’a chroniqué Beckett toute sa vie. A quoi Adorno ajoutait intraitablement, et nous y seront ici même : « le véritable fondement de la morale est à chercher dans le sentiment corporel, dans l’identification avec la douleur insupportable. » 
          Auschwitz, donc, comme nom paradoxal, impossible, insoutenablement « contradictoire », de ce qu’il y a à penser. Mais j’ai découvert il y a quelques années qu’on était allé encore plus loin dans ce qu’on a trop longtemps est complaisamment qualifié d’Impensable : le Mal n’est pas impensable, et telle est la cheville ouvrière impossible du système du pléonectique qui, malheureusement, est bien un système, contrairement à tous les bricolages « ontologiques » du jour qui se revendiquent comme tels sans aucun droit à le faire.
          Oui, j’ai découvert, qu’il y avait encore pire qu’Auschwitz : ce qu’on a appelé « l’expérience Pitesti ».
          Il faut ici faire quelques avertissements au lecteur. La présente entrée est celle qui m’aura été la plus pénible à écrire de tout le présent livre, et même de toute ma vie. Je ne peux me plonger dans la documentation que j’ai rassemblée autour du phénomène en question sans m’effondrer en larmes pendant des jours, sinon m’effondrer tout court, hurler intérieurement avec la pleine conscience de la profonde inanité de ce hurlement, qui pas plus que les pleurs ne rachète rien, ne soulage de rien, ne pourvoit pas d’une quelconque plus-value de « belle âme ». »

          Cordialement,

          FNH

          1. Avatar de Rosebud1871
            Rosebud1871

            fnh 15 août 2023 0h58

            « il y avait encore pire qu’Auschwitz : ce qu’on a appelé « l’expérience Pitesti ».

            J’ignorais Pitesti, et le privilège que vous y accordez à vous frotter à l’expérience en vous documentant résonne émotionnellement pour vous de façon débordante. Le pléonectique, qui enrichit mon vocabulaire, fonctionne dans le registre des biens et du bien et corrélativement dans leurs destructions. Chercher une essence, une ontologie à ça, occupe la discipline philosophique, mais ses richesses qui concourent à notre appréhension d’un monde n’épuisent pas les tourments. Pire qu’Auschwitz ? Je ne saisis pas avec quelle mesure ? un tel comparatif ? L’industrie mise en œuvre n’a ni les mêmes objectifs, ni la même échelle, ni le même contexte. Certaines fabriques « scientifiques » « religieuses » « idéologiques » ont produit de drôles d’effets politiques, indésirables ? collatéraux ? par leurs diffusions à grande échelle quand elles s’emparent du nombre. La face cachée du temps enfantin des « pourquoi… »  embraye sur d’autres objets chez certains mais la compilation vivante s’éteint le moment venu, puis ça occupe les sur-suivants.
            …Merci du témoignage

            1. Avatar de fnh
              fnh

              Bonjour Rosebud,

              désolé de vous répondre avec tant de retard.

              J’ai l’impression que vous avez pris l’extrait que j’ai mis à la fin de mon commentaire du texte de Mehdi Belhaj Kacem (MBK) comme étant de moi ? Ce qui ne change rien, j’y souscrit tout à fait. Mon commentaire était sans doute mal foutu et pas assez clair.

              Son « Système du pléonectique » est un grand livre, même si je ne suis pas d’accord avec tout, loin de là, mais je le redis, je le trouve très actuel, important, et très concret aussi. Il se présente comme un abécédaire, et l’extrait cité est le début de l’entrée « Mal ». Il parle sous forme systématique, mais de tout, mal, donc, mais aussi amour, jeu, politique, ontologie, histoire, transgression, etc., etc. Je voulais juste donner à ceux qui en auraient l’occasion l’envie de le lire.

              Il n’est pas vraiment dans la « discipline philosophie », du moins pas au sens universitaire, c’est un autodidacte, fort original, qui a crevé de faim une bonne partie de sa vie, mais ne s’est jamais compromis avec le confort d’une position officielle, si celle-ci devait l’obliger à amender sa pensée (il y a évidemment des universitaires tout à fait respectables, dieu merci!!).

              Il fait de la philosophie, certes, mais critique les systèmes et penseurs qui oblitèrent le mal sous toutes ses formes, et ses causes.

              Il a étudié et admiré Badiou, mais les carences (pour parler par euphémisme…) humaines du vénérable normalien, et son refus de voir les horreurs de la tyrannie maoïste, ou pire encore le fait qu’il les justifie en disant « on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs », l’ont conduit à rompre violemment avec lui. En gros, un défaut ou un aveuglement éthique est toujours le signe irréfutable d’une erreur philosophique chez un penseur, ce qui est précisément aussi le cas de Heidegger, d’où le fait que je mentionne tout ça ici.

              MBK a entendu parler de Pitesti dans les ouvrages de Castel je crois, dont M. Jorion a parlé sur ce blog.

              Sans doute était-ce maladroit de ma part de citer le début de son entrée sur le mal. Dans la suite de l’article, il cite des témoignages, réellement insoutenables, sur Pitesti, et je ne voulais pas les citer car nul ne doit être obligé de lire ça s’il ne l’a pas décidé, mais la plupart de ce long article est ensuite consacré à essayer de penser cela, autant que faire ce peut. Et notamment le fait que les grands totalitarismes du XXè siècles ont eu le fantasme de recréer un « homme nouveau », par la table rase de l’ « ancien »,comme dans les camps de rééducation maoïstes, dans le Cambodge de Pol Pot, à Pitesti en Roumanie soviétique, mais ce n’est pas non plus sans accointance avec la volonté de purification de la race aryenne par les nazis.

              A chaque fois cela part soi-disant d’un bon sentiment d’amélioration, et le résultat est l’enfer sur terre. Ce n’est pas pour faire de la philosophie gratuite, mais pour éviter de recommencer encore et encore.

              Certes, pour MBK (comme pour moi), ces témoignages « résonnent émotionnellement de façon débordante », mais honnêtement, je ne crois pas qu’on puisse les lire autrement, à moins d’être un psychopathe. Mais certains textes que j’ai lus sur les camps nazis m’ont fait le même effet, ainsi que les descriptions du Goulag chez Soljénitsyne.

              « Pire qu’Auschwitz ? Je ne saisis pas avec quelle mesure ? un tel comparatif ? » Vous avez parfaitement raison, je me suis fait la même remarque en lisant ce texte la première fois. Le comparatif a-t-il un sens dans ce cas ? Entre des enfers si absolus, peut-on, doit-on faire une gradation ? Je n’en sais rien, et cela n’a sans doute pas grande importance. Je n’ai vraiment pas le cœur d’entrer ici dans les détails. Disons, par exemple, qu’à Pitesti contrairement à Auschwitz tout était fait pour qu’on ne puisse se suicider, les détenus étaient torturés quasi jours et nuits, et de plus obligés de se torturer mutuellement, etc. Mais j’arrête là, pardonnez-moi.

              Cordialement.

              fnh

              1. Avatar de Rosebud1871
                Rosebud1871

                fnh 18 août 2023 19h32

                « J’ai l’impression »…
                Oui impression juste, votre dernier paragraphe, à défaut de guillemets, mater certissima, pater semper incertus…la citation colonise, soit au sens où l’Autre accapare (« m »’occupe) , soit sa reprise déprend l’Autre de la possession de son champ, (reconquête ? ) c’est le domaine des cadastres de signifiants… Avec le « mal » comme étendard, les déconvenues sur « l’homme nouveau » sont au rendez-vous, impossible de se déprendre du parfum que la langue marinée dans le christianisme exhale, enfer all inclusive, (voir les « jugements derniers » en peinture…) Sociopathes, psychopathes, appellation moderne, sont efficaces à la tâche du profil embauché, et Sade une mine pour les majeurs de la rue d’Ulm. Pas d’approche de ça sans effets de transfert, positifs ou négatifs pour faire court. J’ai toujours trouvé sadique d’obliger nos détenus à perpétuité de vivre en les privant du droit au suicide, n’en déplaise aux humanistes abhorrant la peine de mort violente d’État, mais avec l’égalité de droit, les nouvelles lois sur l’assistance vont corriger l’appréhension dans ces délicates gestions. Le « comparatif » ça court sur les écrans et chez l’I.A. aucun moyen d’installer une zone réservée à l’incomparable. Certaines petites d’annonces d’échanges montrent ça. Merci du retour. Cordialement.

  8. Avatar de Dimitri78
    Dimitri78

    Le continent avec le moins de rejets de Co2 est l’Afrique dans un contexte d’explosion démographique a contrario de l’Occident plus émetteur de Co2 avec une baisse de la natalité

  9. Avatar de Vincent Teixeira
    Vincent Teixeira

    Le Cas Heidegger n’en finit pas de resurgir et agiter les esprits… surtout français (en tout cas pour tous les Allemands un peu éclairés sur le sujet, que jai pu rencontrer, l’affaire était entendue, classée)… Certes, un grand nombre de penseurs importants ont évidemment tenu compte de lui, de même qu’on pourrait ajouter des poètes – à commencer par René Char, difficilement « rapprochable » du nazisme… ou et même surtout Celan, fasciné par la pensée d’Heidegger – mais au bout du compte ignoré, rejeté par celui-ci… Bref, c’est assez complexe, mais le délire mythico-nazi du type est désormais assez clair… en plus du jargon de l’authenticité, disons charabia… sans compter ses délires etymologico-interprétatifs et triturages de poètes comme Holderlin ou Trakl…
    Pour moi, l’affaire est entendue : j’ai lu un peu/pas mal la bête dans ma jeunesse, même si « Être et temps » m’est tombé des mains…
    Aujourd’hui je préfère me rappeler la blague de Karl Popper : Heidegger passait son temps à nettoyer ses lunettes, et plus il les nettoyait, plus elles étaient sales.

  10. Avatar de octobre
    octobre

    J’imagine ce pauvre Heidegger aujourd’hui, toujours à vouloir nettoyer ses lunettes et nous sermonner :
    Attention tremblez ! vous qui avez inventé le téléscope spatial James Webb, oui maintenant tremblez aussi les étoiles !
    ______________________________

    Mais il y a aussi cela qui me plaît beaucoup :

    « »Si rien avait une forme, ce serait cela. »
    Découvrant cette phrase par laquelle Victor Hugo rapporte ce que lui révélait le téléscope d’Arago, un soir de l’été 1834, j’y reconnus tout de suite l’objet de mes préoccupations. Je n’en savais pas plus sinon mon impatience à voir surgir de la nuit de ce temps ce qui n’était pas encore. Là aussi l’exactitude de Victor Hugo était impressionnante : « Confusion dans le détail, diffusion dans l’ensemble ; c’était toute la quantité de contour et de relief qui peut s’ébaucher dans de la nuit. L’effet de profondeur et de perte du réel était terrible. Et cependant le réel était là. » Victor Hugo observait-il ici une des montagnes de la Lune, le « Promontoire du songe », qu’il nous ramenait au plus loin de tout système, c’est-à-dire au plus près de ce qui nous importe, très précisément là où se fomentent les rêves dont nous sommes faits. Quant à la méthode pour s’en approcher, il la fallait indissociable d’un objet qui n’existe qu’à se déplacer d’une interrogation formulée dans un domaine à sa réponse trouvée dans un tout autre domaine, peut-être même des siècles après. Sur ce point encore, je décidai de m’en tenir à la recommandation de Victor Hugo : « Allez au-delà, extravaguez. » Je n’ai prétendu à rien d’autre.»
    Annie Le Brun

  11. Avatar de Rosebud1871
    Rosebud1871

    « Heidegger passait son temps à nettoyer ses lunettes, et plus il les nettoyait, plus elles étaient sales ».

    A Davos dans un RBNB en 2009 j’étais tombé sur un pictogramme indiquant qu’un mâle ne devait pas pisser debout mais assis, une histoire de lunettes, qui me rappelait avoir lu dans les 90’ un article de l’EMC Encyclopédie Médico Chirurgicale traitant de la « Névrose de la ménagère suisse alémanique », Hausfrauenneurose, de l’ethnologie quoi. Les toilettes turques sont dépassées par les japonaises.
    Les grecs anciens usaient du même terme Organon pour la main en tant qu’outil, et ce qu’on désigne comme tel aujourd’hui. Un helléniste confirmera ? Mais organe et organisation ont pris une expansion indéfinie. Prothèse est passé de substitut d’un organe manquant, à production d’un organe « amélioré ». « Virus » 1999 met ça en images.
    Freud qui avait déduit l’existence d’un réseau neuronal, puis abandonné son esquisse d’une psychologie scientifique, a conservé l’idée d’un appareil psychique, comme il existe d’autres appareils, est-ce bien certain ?
    Le cerveau lequel ?
    https://www.euphytosegamme.fr/confort-intestinal/intestin-et-cerveau/lintestin-notre-deuxieme-cerveau
    Les psychanalystes ne semblent pas s’émouvoir de l’en train médiatique pour l’I.A. Une curiosité trouvée sur la toile, https://stillpointmag.org/articles/ai-and-the-missing-body/ dont le mérite est de rappeler qu’on pense avec son corps.

    Le Cun « le principe sur lequel ils sont basés, c’est purement et simplement d’essayer de prédire la continuation d’un texte. Ils essaient de prédire les mots qui seraient les plus probables dans le corpus de textes dans lequel ils ont été entraînés. » Le corpus existe.

    Sur 8 milliards d’humains, pas 2 possèdent le même corpus, même si symptômes, syndromes, classent statistiquement. « Singer » ça ? Pour quoi faire ? Augmenter la productivité ? Surperformer la concurrence ? Dominer le marché ? Embarquer qui pour où ?

  12. Avatar de ilicitano
    ilicitano

    moi:
    Heidegger est-il un hitlérien sans remord ?

    BingChat
    Martin Heidegger était un philosophe allemand qui a été membre du Parti nazi dans les années 1930 et 1940¹.
    Cette affiliation au parti et sa participation au régime sont une source de vives controverses.
    Certains y voient le signe de problèmes inhérents à sa philosophie, en particulier l’accent mis sur l’importance de l’enracinement, qui l’a conduit à soutenir une idéologie raciste et nationaliste ayant finalement conduit à l’Holocauste¹. D’autres soutiennent que les idées et actions politiques de Heidegger doivent être comprises séparément de ses idées philosophiques et qu’il est possible de séparer les deux¹.

    Il y a des opinions différentes sur la question de savoir si Heidegger était un hitlérien sans remords.
    Selon un article du Monde, pour Heidegger, une rivalité première et indépassable oppose deux mondes ennemis, destinés à s’exterminer.
    D’une part, le monde de la raison, de l’humanisme, de la loi morale universelle, qu’il juge déraciné, hors-sol, « enjuivé ». D’autre part, celui de « l’affirmation de soi » du peuple allemand, de sa race et de sa langue, de l’esprit et de l’essence de la germanité, appelés à dominer².
    Cependant, le parti nazi ne considérait pas Heidegger comme un militant fiable et il suspectait son œuvre et ses cours qu’il ne comprenait pas, jusqu’à l’empêcher d’enseigner en 1944¹.
    Les Français en 1945 ne feront que reconduire cette mesure en lui interdisant d’enseigner jusqu’en 1951¹.

    En fin de compte, la question de savoir si Heidegger était un hitlérien sans remords est complexe et controversée.
    Il y a des opinions différentes sur cette question et il est important d’examiner les faits et les opinions pour se faire une opinion éclairée.
    Je vous suggère de lire davantage sur le sujet pour en savoir plus. Si vous avez des questions supplémentaires ou si vous souhaitez en savoir plus sur un aspect spécifique, n’hésitez pas à me poser des questions.

    Source : conversation avec Bing, 16/08/2023
    (1) Martin Heidegger et le nazisme — Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Martin_Heidegger_et_le_nazisme.
    (2) Le Monde : Heidegger, hitlérien sans remords, par Roger-Pol Droit, le …. https://www.pauljorion.com/blog/2023/08/11/le-monde-heidegger-hitlerien-sans-remords-par-roger-pol-droit-le-11-aout-2023/.
    (3) Martin Heidegger, les heures noires d’un philosophe – Geo.fr. https://www.geo.fr/voyage/martin-heidegger-les-heures-noires-d-un-philosophe-161394.

    ——-
    J’ai laissé les liens liés à la réponse dans lesquels on retrouve le site de P.J

    1. Avatar de ilicitano
      ilicitano

      Pour rappel , BingChat , en plus de son apprentissage , certes en utilisation limitée, traite en temps réel les infos du web comme l’article objet de ce commentaire.

      On n’arrête pas le progrès !!!!!!!!!!

  13. Avatar de Rosebud1871
    Rosebud1871

    Si ma précédente contribution est validée, puisque je m’adresse d’abord aux informaticiens branchés I.A., alors un petit complément pour déplier ce qu’au Brésil Isabel Millar raconte, et précisement à propos de « lathouse » : c’est quoi ? Le texte ci-dessous est bien meilleur que le condensé Millar. On retrouve Heidegger en passant, et l’IA…du bon du bon du bonnet…bien ficelé, bardé, à consommer tout cru !
    file:///C:/Users/Patrick/Downloads/BUPSY_550_0311.pdf

    Et pour être complet plus bas toutes les occurrences « lathouse » chez Lacan en 1970, jamais reprises jusqu’à sa mort,

    Alors, l’I.A. ? lathouse ou gadget ? Ou les deux ?

    Inutile de demander à Bing d’expliquer Lacan : « Désolé… Nous avons rencontré un problème. 
    Nous allons recommencer ». J’ai recommencé deux fois…
    GPT 3,5 fait mieux :
    GPT : [Ce texte semble être une exploration philosophique et conceptuelle de la vérité, de la perception et de la réalité. L’auteur utilise des termes et des néologismes pour articuler ses idées de manière originale et complexe. Voici une explication plus détaillée du texte :
    L’auteur commence par introduire le terme « alèthosphère », évoquant l’idée d’un espace où la vérité est formellement établie et opérationnelle. Cette vérité formelle est acceptée comme vraie à ce niveau, mais lorsqu’on la considère dans le contexte concret et « opéré » de la réalité, elle n’est pas complètement révélée. L’auteur illustre cette idée en prenant l’exemple de la voix humaine, qui semble véridique dans un certain contexte mais ne dévoile pas toute sa vérité lorsqu’on la regarde de plus près.
    L’auteur propose d’utiliser le terme « lathouses » pour désigner ces vérités non révélées dans la réalité concrète. Ce terme est lié au concept philosophique d’ »alétheia », que l’auteur associe à l’idée de révélation de la vérité. Il suggère que les philosophes et peut-être certains linguistes sont les seuls à explorer de telles idées.
    L’auteur explique que le monde est de plus en plus rempli de ces « lathouses ». Il joue avec les mots en proposant « lathousies » comme une alternative, en lien avec « ousia », un terme philosophique qui représente quelque chose d’intermédiaire entre l’Autre et l’étant, et qui est ambigu. L’auteur considère que l’ousia se rapproche de l’idée de l’être, mais sans l’atteindre complètement.
    L’auteur évoque ensuite l’idée de l’insubstance féminine et des « menus objets petit a », suggérant que même ces objets matériels peuvent être pensés comme des « lathouses », renfermant des vérités cachées. L’auteur réalise alors que « lathouse » rime avec « ventouse », ce qui renforce l’idée d’une vérité cachée ou d’un vide potentiel.
    L’auteur aborde l’idée d’angoisse et d’impossibilité. Il suggère que l’impossibilité est ce qui définit le réel, en lien avec la position de la « lathouse ». L’auteur admet qu’il interpelle parfois les analystes, mais il le présente comme un geste amical pour les reconnaître.
    L’auteur explique que les sillons de l’alèthosphère tracent une voie sur le ciel, symbolisant peut-être le cheminement intellectuel. Il revient ensuite sur le terme « lathouse », qui représente une dimension de la vérité cachée, une « Verborgenheit » qui la constitue.
    L’auteur conclut en évoquant le concept du « sujet supposé savoir », suggérant que cela peut être troublant lorsque la vérité approche. Globalement, le texte semble explorer les relations complexes entre la vérité, la réalité et la perception, en utilisant des termes inventés et des références philosophiques pour exprimer ces idées. ]

    Lacan :
    [L’alèthosphère, c’est beau à dire. C’est parce que nous supposons que ce que j ‘ai appelé la vérité
    formalisée a déjà suffisamment statut de vérité au niveau où elle opère, où elle operçoit. Mais au
    niveau de l’opéré, de ce qui se promène, la vérité n’est pas du tout dévoilée. La preuve en est que la
    voix humaine, avec son effet de vous soutenir le périnée, si je puis m’exprimer ainsi, ne dévoile pas
    du tout sa vérité.
    Nous nommerons cela à l’aide de l’aoriste du même verbe dont un célèbre philosophe rappelait
    que l’alétheia venait. Il n’y a que les philosophes pour s’aviser de choses pareilles, et peut-être
    quelques linguistes. On va appeler cela des lathouses.
    Le monde est de plus en plus peuplé de lathouses. Comme cela a l’air de vous amuser, je vais
    vous l’écrire avec l’orthographe.
    Vous remarquerez que j’aurais pu appeler cela des lathousies. Cela aurait fait mieux avec l’ousia, ce
    participe avec tout ce qu’il a d’ambigu. L’ousia, ce n’est l’Autre, ce n’est pas l’étant, c’est entre les
    deux. Ce n’est pas tout à fait l’être non plus, mais enfin, cela en approche fort.
    Pour ce qui est de l’insubstance féminine, j’irais bien jusqu’à la parousie. Et pour les menus
    objets petit a que vous allez rencontrer en sortant, là sur le pavé à tous les coins de rue, derrière toutes les vitrines, dans ce foisonnement de ces objets faits pour causer votre désir, pour autant que c’est la science maintenant qui le gouverne, pensez-les comme lathouses.
    J e m’aperçois sur le tard parce qu’il n’y a pas longtemps que je l’ai inventé, que cela rime avec
    ventouse. Il y a du vent dedans, beaucoup de vent, le vent de la voix humaine. Il est assez comique
    de trouver cela au bout du rendez-vous.Si l’homme avait moins pratiqué le truchement de Dieu pour croire qu’il s’unit avec la femme, il y a peut-être longtemps qu’on aurait trouvé ce mot de lathouse.
    Quoi qu’il en soit, ce petit surgissement est fait pour faire que vous ne soyez pas tranquilles sur
    vos rapports avec la lathouse. il est bien certain que chacun a affaire avec deux ou trois de cette espèce. La lathouse n’a pas du tout raison de se limiter dans sa multiplication. L’important, c’est de savoir ce qui arrive quand on se met vraiment en rapport avec la lathouse comme telle. […]
    L’angoisse — puisque c’est à cela qu’on a affaire —, il est bien certain que, s’il y a la lathouse, elle n’est pas sans objet. C’est de là que je suis parti. Une meilleure approche de la lathouse doit un tout petit peu nous calmer. Il est clair qu’il est tout à fait impossible de tenir la position de la lathouse. Seulement, il n’y a
    pas que cela qui est impossible, il y a bien d’autres choses encore, à condition de donner un sens
    strict au mot impossible, c’est-à-dire, de ne les déterminer que du niveau de notre vérité formalisée. A
    savoir, qu’en tout champ formalisé de la vérité, il y a des vérités qu’on ne peut pas démontrer.
    C’est au niveau de l’impossible, vous le savez, que je définis ce qui est réel. S’il est réel qu’il y ait
    l’analyste, c’est justement parce que c’est impossible. Cela fait partie de la position de la lathouse.
    L’ennui, c’est que, pour être dans la position de la lathouse, il faut vraiment avoir cerné que c’est
    impossible. C’est pour cette raison qu’on aime tellement mieux mettre l’accent sur l’impuissance,
    qui existe aussi, mais qui est, je vous le montrerai, à une autre place que l’impossibilité stricte.
    Je sais qu’il y a ici quelques personnes qui s’affectent de temps en temps de me voir, comme on
    dit — comment dit-on ? —‘ invectiver, interpeller, vociférer contre les analystes. Ce sont de jeunes
    personnes qui ne sont pas analystes. Elles ne se rendent pas compte que c’est quelque chose de
    gentil que je fais là, ce sont des petits signes de reconnaissance que je leur fais.
    Je ne veux pas les mettre à trop rude épreuve. Et, quand je fais des allusions à leur impuissance,
    qui est donc la mienne, cela veut dire qu’à ce niveau-là, on est tous frères, et qu’on n’a qu’à se
    dépêtrer comme on peut.Nos sillons de l’alèthosphère se tracent sur la surface du ciel, longtemps désertée. Mais ce dont il s’agit, c’est de ce qu’un jour j’ai appelé de ce mot sur lequel on a chatouillé assez d’entre vous pour qu’ils se demandent ce qui me prenait — la lathouse.
    Ce n’est pas moi qui ai inventé cette dimension de la vérité qui fait qu’elle est cachée. C’est la
    Verborgenheit qui la constitue. Bref, les choses sont telles qu’elle fait supposer qu’elle a quelque chose dans le ventre. Très tôt, il y a des petits futés qui se sont aperçus que si ça sortait, ce serait abominable. Elle est probablement en plus, pour que ça fasse mieux dans le paysage. Maintenant, il est également possible que ce soit là tout le truc, que ce doive être effroyable si ça sort. Si vous passez votre temps à attendre, c’est là que vous êtes cuit. En somme, il ne faut pas trop taquiner la lathouse. S’engager là-dedans, c’est toujours
    assurer quoi? Ce que je me tue à vous expliquer — assurer l’impossible de ce qu’il est effectivement,
    ce rapport, réel. Plus c’est du côté de la vérité que s’attache votre quête, plus vous soutenez le
    pouvoir des impossibles qui sont ceux que je vous ai respectivement énumérés la dernière fois —
    gouverner, éduquer, analyser à l’occasion. Pour l’analyse, en tous les cas, c’est évident.
    Le sujet supposé savoir, ça scandalise, quand simplement j’approche la vérité. ]…

    20/05/1970 et 17/10/1970

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