14 mars 2023 : le jour où le genre humain fut assailli par le doute I. L’intelligence de la machine a dépassé la nôtre en 1642

Je vous ai parlé d’un petit livre que j’étais en train d’écrire. Je le présenterai ici aux abonnés du blog en un feuilleton de 17 épisodes.

Illustration par DALL-E (+PJ)

Le premier qui s’appliqua à tailler patiemment un silex pour en faire la pointe d’une lance ou d’une flèche, avait mis son intelligence au service du façonnage d’un outil, lequel lui permettrait de tuer un animal à l’endroit et à l’instant qu’il déterminerait lui-même, plutôt que compter sur le moment où l’animal dans ses parcours erratiques se laisserait prendre au piège conçu à son intention, seul moyen connu jusque-là pour s’approprier sa viande.

L’intelligence de l’inventeur de cette arme lui avait permis de contenir l’incertitude qui existait jusque-là dans la capture de l’animal visé. Celui qui conçut le joug trouva le moyen de faire tirer le chariot par un bœuf plutôt que par lui-même. Son propre labeur, à son grand soulagement, avait désormais été délégué à un animal de trait.

De même, celui qui trouva le moyen de transposer le cheval de chair en cheval-vapeur, mit son intelligence au service d’un gain d’énergie considérable pour les générations à venir. Remplacement du travail humain d’abord par celui de l’animal, ensuite par celui de la machine. « Machine » : un nouveau nom pour l’outil, que nous lui attribuons quand il est d’une architecture complexe ou simplement plus volumineux que l’outil de base. De l’outil à la machine : un éventail de divers fruits de l’intelligence humaine.

Une délégation du travail aux animaux domestiques que l’intelligence humaine avait su organiser. Mais il y avait mieux à faire encore : répliquer dans la machine, non plus la force de travail de l’humain mais son intelligence en tant que telle.

En 1642, Blaise Pascal avait inventé la « machine d’arithmétique », bientôt rebaptisée « pascaline » en son honneur. Nous humains, étions jusque-là seuls à savoir calculer, désormais la machine saurait le faire aussi. Puis vint la calculette, suivie de l’ordinateur personnel, enfin le smartphone, ordinateur de poche entre autres pouvoirs merveilleux dont il dispose. Compter toujours plus vite, et d’emblée à l’abri de l’erreur de calcul à laquelle nous humains, demeurons prompts. L’intelligence de la machine avait dépassé une fois pour toutes celle de l’humain.

Demandons-nous pourquoi ce dépassement ne nous fit à l’époque, ni chaud, ni froid, alors qu’à l’heure qu’il est la machine nous dépasse en toutes manières de raisonnement et que cela a conduit le genre humain au bord de la crise de nerfs.

La raison en est que le calcul est un secteur spécialisé de notre expertise dont il est relativement facile de se passer ; d’ailleurs nous ne découvrons jamais suffisamment d’excuses à celles et ceux qui parmi nous « n’ont pas la bosse des maths ». Le calcul ne nous apparaît pas comme le meilleur de nous-même : il a toujours été à nos yeux, mécanique, entendez « machinique » : une fois connue la recette, ce que l’on appelle aujourd’hui doctement l’« algorithme », son application se fait de manière quasi automatique. Certes, il a fallu réfléchir une fois, la première, pour concevoir cet algorithme, mais à partir de sa mise au point, tout a semblé couler de source.

Illustration par Stable Diffusion (+PJ)

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