Silicon Valley Bank

La Silicon Valley Bank a été saisie. La Federal Deposit Insurance Corporation qui garantit les dépôts bancaires à hauteur de 250.000 dollars est intervenue et a pris possession de la banque au nom du gouvernement américain (allant au devant d’une panique bancaire durant le week-end et une foule en colère lundi à la première heure).

En montant des actifs : 209 milliards de dollars, il s’agit de la seconde faillite la plus retentissante aux États-Unis. Le record étant toujours celui que détient Washington Mutual depuis 2008.

Les déboires de la Silicon Valley Bank relèvent de ce que l’on qualifie de « crise obligataire » : lorsqu’une hausse du coupon consenti par le gouvernement sur ses obligations récemment émises déprécie les obligations déjà en circulation ayant été émises avec un coupon plus faible.

Par comparaison en effet de leur rendement, une obligation qui ne verse que peu d’intérêts se revendra moins cher qu’une autre dont les versements d’intérêt sont plus élevés.

Or la Federal Reserve, la banque centrale américaine, emprunte désormais à des taux plus élevés, les taux ayant été relevés pour « lutter contre l’inflation », lire : « Pour ne pas décourager les capitalistes qui se jetteraient du toit de l’Empire State Building si le taux de leurs rentes était plus faible que le taux de l’inflation » (= l’ « euthanasie du rentier »).

C’est là l’explication du paragraphe suivant que l’on peut lire depuis 2 heures dans le Financial Times :

Les problèmes du groupe bancaire découlent d’une décision prise au plus fort du boom technologique de placer 91 milliards de dollars de ses dépôts dans des titres à long terme tels que des obligations hypothécaires et des bons du Trésor américain, qui étaient considérés comme sûrs mais qui valent aujourd’hui 15 milliards de dollars de moins que lorsque SVB les a achetés, après que la Réserve fédérale a augmenté les taux d’intérêt de manière agressive.

Piqûre de rappel : mon billet du 26 septembre 2008

Une des grandes chansons politiques des années pré-soixante-huitardes est un montage de Paul Simon datant de 1966 : 7 O’clock News / Silent Night. « Douce nuit » est chantée au premier plan par Simon & Garfunkel tandis qu’en arrière-plan, la radio égrène les nouvelles, dont nulle n’est bonne.

Voici mon propre remake : lancez la musique et lisez les nouvelles en première page du Wall Street Journal.

La production de CO2 a bondi de 3 % en 2007, mettant le monde sur les rails du pire scénario de réchauffement climatique

Très peu de scénarios favorables en vue alors que la crise continue de s’étendre

Le Pakistan fait savoir que des salves d’avertissement ont accueilli deux hélicoptères américains qui traversaient la frontière avec l’Afghanistan

Les régulateurs fédéraux ont saisi Washington Mutual : il s’agit de la plus importante faillite bancaire dans l’histoire des Etats-Unis

Un procureur de Guantanamo ayant affirmé que ses supérieurs ont fait disparaître des preuves, a refusé de témoigner dans un cas de crime de guerre

Le marché monétaire à court terme est en plein désarroi, augmentant la probabilité que le tarissement du crédit affecte l’économie

La Chine a lancé un équipage de trois hommes dans l’espace

L’interdiction des ventes à découvert par la Securities & Exchange Commission signifie la fin du marché des obligations convertibles, une source essentielle de financement pour les compagnies en difficulté

Un des principaux critiques de l’établissement de colonies en Cisjordanie a été blessé dans un attentat à la bombe

Les ventes de logements neufs aux États–Unis ont baissé en août de 11,5 % par rapport à juillet

L’ouragan Kyle s’est formé au Sud des Bermudes

La chicanerie politique jette le trouble dans les négociations relatives au plan de sauvetage s’élevant à 700 milliards de dollars. Les économistes et les milieux financiers s’interrogent : le plan fonctionnera-t-il comme prévu ?

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89 réponses à “Silicon Valley Bank

  1. Avatar de Toulet Alexis
    Toulet Alexis

    Les aventures, mécomptes et autres affres de la Silicon Valley Bank, de la Signature Bank et autres font un feuilleton sans doute haletant, mais ne risque t il pas d’attirer notre attention sur l’arbre aux dépens de la forêt ? Appeler la chute de ces institutions un épiphénomène serait sans doute aller trop loin, mais enfin est-ce si important que cela ?

    Rappelons qu’à partir de 2008 face à la crise des subprimes, et encore en 2020 face à la crise du Covid, le choix fondamental a été fait par les principales institutions monétaires mondiales de lutter contre le risque d’effondrement financier en faisant le nécessaire pour compenser les pertes des déposants – à l’exception limitée d’un cas d’effondrement de banque à Chypre en 2013 où le choix inverse a été fait – et d’une manière générale la plus grande partie des pertes, quelle que soit leur ampleur, qui menaceraient de provoquer des effondrements financiers.

    Ce choix n’était pas acquis d’avance, le choix inverse aurait été pensable, c’est-à-dire accepter une crise peut-être très sévère, mais probablement courte, en escomptant une reconstruction plus saine par la suite, l’exemple des institutions faillies incitant toutes les autres à une prudence renouvelée – et en gros à arrêter de faire un peu n’importe quoi. On peut discuter si cette voie aurait été préférable ou si au contraire elle aurait été plus dangereuse, la discussion serait intéressante, mais en définitive vaine. Le choix fondamental de « faire le nécessaire » pour compenser les pertes dangereuses, c’est-à-dire de créer l’argent pour compenser ces pertes, a été fait, il a été confirmé par la suite, et il est très difficile d’imaginer qu’il soit changé maintenant.

    L’avantage de la compensation des pertes par création d’argent frais est qu’elle limite les crises à court terme. L’inconvénient, c’est que les problèmes au fond ne sont pas résolus – seulement mis sous le tapis. Les promesses les plus sincères et les plus touchantes ont certes été faites à partir de 2008 d’utiliser le répit fourni par l’expédient de la création monétaire pour résoudre les problèmes de fond, les mains étaient toutes sur le cœur sans doute, mais comme le disait un ancien président français – celui qui a donné son nom au musée des Arts premiers – « Les promesses n’engagent que ceux qui les croient ». Pas grand chose n’a été fait, bien entendu.

    Que va t il se passer en 2023 après SVB, Signature et d’autres faillites peut-être ? Eh bien la même chose qu’à partir de 2008, voyons !

    La chose a été exprimée de façon saisissante par Neel Kashkari en mars 2020. L’un des principaux responsables de la Banque fédérale américaine, administrateur notamment du TARP en 2008 le programme d’ « achats d’actifs en difficulté » c’est-à-dire les 700 premiers milliards de dollars fraîchement imprimés pour empêcher l’effondrement d’institutions financières en difficulté, il était bien placé pour en connaître, et on lui demandait si les Américains devraient craindre pour leur argent à la banque. Sa réponse fut on ne peut plus claire ( voir https://finance.yahoo.com/news/fed-infinite-cash-put-test-151758847.html )
    « Il y a une quantité infinie de liquidités dans la Réserve fédérale. Nous ferons tout ce qu’il faut pour nous assurer qu’il y a suffisamment de liquidités dans le système bancaire »

    Kashkari s’exprimait peut-être de façon un peu imprécise, ce n’est pas que la Banque fédérale américaine dispose d’une quantité « infinie » de dollars – ce qui supposerait qu’elle les ait déjà créés – c’est plutôt qu’elle peut en créer une quantité illimitée. Autant qu’elle le décide – littéralement. Mais son mot exprime bien sa force de conviction, qui est celle de l’institution qu’il sert.

    C’est bien ce que la Banque fédérale a fait en 2008, qu’elle a continué à faire dans les années suivantes à rythme plus régulier, et encore en 2020. Il serait extrêmement surprenant, pour ne pas dire proprement extraordinaire, qu’il en soit différemment cette fois-ci.

    Cette détermination de la Banque fédérale américaine, des autres principales banques centrales, de créer tout l’argent qu’il faudra pour que les institutions financières principales ne s’effondrent pas, est le phénomène. Les mésaventures de telle ou telle banque comme SVB, Signature, ou autres, ne sont guère qu’un épiphénomène par comparaison.

    Pour le dire autrement, c’est l’ensemble de la crédibilité du système monétaire mondiale (dollar, euro, yen, etc.) qui a été mise en gage de la survie des plus grandes banques mondiales et du système financier en général. Cette mise est naturellement énorme, gargantuesque ! Elle explique que ce système financier ait pu survivre et prospérer sans réforme sérieuse depuis près de 15 ans.

    Est-elle suffisante pour assurer que ce système reste indéfiniment viable – plus précisément, jusqu’à ce que l’instabilité écologique et/ou l’épuisement des énergies fossiles provoque de toute façon certains effondrements ? Ou est-il pensable qu’elle s’avère à un moment insuffisante, c’est-à-dire qu’un effondrement du système monétaire survienne pour des causes intrinsèques plutôt que comme conséquence d’effondrements plus « physiques » ? Bien malin qui saurait le dire, et je ne m’y risquerai pas.

    Ce qui semble certain, c’est que la survie du système financier, même si la mise en gage du système monétaire est suffisante pour l’assurer, n’empêche pas qu’il n’est pas réformé et reste profondément malsain.

    Voilà encore un véritable phénomène. Non un simple épiphénomène comme la chute de la banque X ou Y même si elle fait les grands titres des gazettes.

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  1. Mes yeux étaient las, bien plus que là, juste après l’apostrophe : la catastrophe.

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