Ce 6 mars, l’indice boursier parisien a dépassé son plus haut niveau historique en franchissant la barre des 7.400 points – certes très ponctuellement sur un court laps de temps… mais de manière effective.
Ce nouveau record du CAC 40 s’inscrit dans un contexte de rebond général des marchés financiers, tant européens que nord américains, initié fin 2022 – et ce malgré des vents qu’on aurait pu penser (en France) « contraires » à une telle tendance :
- Prolongation de la guerre en Ukraine au-delà de 2022
- Remontée des tensions entre les USA et la Chine avec la « crise » des ballons sonde chinois au-dessus de l’Amérique du Nord
- Le ralentissement constaté de l’économie chinoise en 2022
- La forte inflation (notamment en zone euro) presque qualifiée d’incontrôlable par certains économistes
- Remontée des taux directeurs
- Resserrement monétaire (1 euro ≈ 1 dollar)
- Envolée des dettes d’État (notamment en zone euro et en France)
- Crise énergétique européenne
- Contestations sociales en France ou en Grande-Bretagne
- …
Dans certains « milieux autorisés » (comme Coluche disait en son temps), on analyse cette tendance haussière du CAC 40 comme la résultante de nouvelles bulles spéculatives autour de l’écosystème lié à la transition écologique (matières premières et entreprises du secteur) ou l’intelligence artificielle (sous l’effet de ChatGPT et des autres IA médiatiquement mises en avant).
Et qui dit bulle spéculative dit « krach boursier » potentiel : le CAC va-t-il (très) tôt ou (pas si) tard (que ça) s’effondrer violemment ?… Et si oui, l’État français (hyper endetté) pourrait-il encore voler au secours des marchés financiers et des banques ?…
La réponse à cette dernière question trouve peut-être sa réponse dans l’air glacial que soufflent les vents « contraires » sur le marché de l’assurance et de la réassurance.
En effet, du fait de la sinistralité « climatique » (sécheresse, canicule, incendies, orages violents avec grêle, coulées de boue, inondations, …), de l’inflation qui pèse sur les coûts d’indemnisations, de la guerre en Ukraine ou du risque « cyber » associé (une grande entreprise ou administration française sur deux a subi une tentative de cyberattaque en 2022), le secteur des sociétés d’assurance et de réassurance s’est retrouvé, en France, sous tension en 2022.
Pour le marché de la réassurance, c’est même la pire année depuis 1999 (et les fameuses tempêtes des 26 et 27 décembre, à savoir Lothar et Martin). Au niveau européen, selon le réassureur Swiss Ré, les seules tempêtes hivernales de 2022 ont coûté près de 4,5 milliards d’euros d’indemnisations aux réassureurs et, plus globalement, le coût des catastrophes climatiques a augmenté de 5 à 7% par an depuis 2010 dans la zone euro – tendance qui ne devrait pas s’arranger, car le changement climatique est responsable de la fréquence croissante de phénomènes extrêmes touchant de plus en plus des zones urbanisées européennes. Le français SCOR (quatrième réassureur européen) a enregistré une perte historique de plus de 500 millions d’euros en 2022, entrainant le départ de son Directeur Général début 2023.
Dans ces conditions, les réassureurs (notamment français) ont été amenés à :
- Réduire leurs rachats de contrats auprès des assureurs
- Accroître fortement leurs tarifs
- Augmenter les franchises en raison de sinistres de plus en plus fréquents.
Par effet de bord, les capacités de « refinancement » des assureurs auprès des réassureurs se sont réduites d’autant en 2023. Et du fait des contraintes financières imposées par la réglementation européenne dite « Solvabilité 2 », les assureurs seront contraints de répercuter ces réductions de marge de manœuvre économiques sur leur clientèle finale (particuliers et entreprises) via une hausse des primes/cotisations d’assurance en 2024… si ce n’est en 2023 (révision tarifaire d’urgence) si la bourse venait à dévisser (risque de marché pour l’assurance vie et les PERIN) dans un nouveau contexte de sinistralité « climatique » (risque de souscription).
Or, le secteur de l’assurance est le plus grand investisseur institutionnel européen (notamment en matière d’innovation sociale) et, en France, a servi (partiellement) de garant pour l’État lors du refinancement des marchés financiers et des banques en 2007-2008. Autrement dit, si la bourse de Paris devait entrer une nouvelle fois dans une très forte zone de turbulence suite à l’éclatement d’une (ou plusieurs) bulle(s) spéculative(s), l’État français devrait certainement faire cette fois sans le soutien du marché de l’assurance… ce dernier devant lui-même se contenter d’un soutien limité des réassureurs.
Et au final, par effet « dominos », cela risque d’être une triple peine pour les Français :
- Pertes de capital placés en épargne selon les positions prises par les banques
- Hausse des tarifs de l’assurance
- Hausse à venir des impôts pour compenser la (nouvelle) dette générée par l’État
Tout ça dans un contexte d’inflation, de revalorisations salariales et/ou des prestations sociales dérisoires et de réformes structurelles pas toujours bien fondées économiquement…
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