5.1.2022. “Être captivé”.
Un passage dans mes notes mérite quelques éclaircissements : “Être captivé = capturé. Nous sommes parfois les objets des événements se déroulant en-dehors de nous. Exemple : la fille dans la Kalverstraat. Réflexion sur les appartenances chez Lévy-Bruhl”. L’idée là, c’est que n’émerge à la conscience que le produit d’une “soupe” dont l’essentiel se malaxe et se transforme à un niveau inconscient. Cela apparaît tout particulièrement quand nous sommes captivés, c’est-à-dire à proprement parler capturés par des éléments extérieurs qui façonnent alors entièrement notre comportement : nous en sommes l’objet. La “fille dans la Kalverstraat”, c’est une jeune femme qui me précède dans cette étroite rue commerçante d’Amsterdam, et dont j’interprète d’abord la démarche quelque peu erratique comme due à l’ivresse, avant de me rendre compte que non, elle est probablement sobre, mais progresse à son pas en étant captivée par les diverses boutiques de luxe dont les devantures retiennent un bref moment son attention à gauche et à droite. Elle n’est pas maîtresse de sa trajectoire : ce sont les objets présentés dans les vitrines qui en décident. Quand je mentionne “les appartenances chez Lévy-Bruhl”, je renvoie aux réflexions du philosophe de l’entre-deux-guerres quant au fait que, selon les cultures et les individus, le Moi individuel investit dans un rayon plus ou moins large, des choses extérieures aux limites de son corps définies par sa peau : si l’on raye ma voiture, j’en serai fâché, mais ne crierai pas vengeance comme le fera mon voisin dans les mêmes circonstances car il le vivra lui de la même manière que si on lui avait véritablement poché un œil. Dans le cas de mon analysant YH, lorsque le minerai dans sa mine se révèle être “à faible teneur”, c’est sa propre personne qui lui apparaît soudain comme “à faible teneur”, et c’est à ce moment-là et pour cette raison-là, qu’il dévisse.
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