Lettre ouverte à la communauté élargie
28 novembre 2022
Acte 2 d’une démission : contre l’école de commerce d’indulgences, Susciter la métamorphose, pas le greenwashing
Presque trois mois après ma démission des cours liés à une faculté d’enseignement de la gestion en Belgique (la Louvain School of Management, LSM) et la publication d’une lettre ouverte (voir ici : Un appel à la métamorphose urgente des sciences de gestion) qui a déjà reçu un large écho médiatique, je reviens vers vous pour faire le point.
En tant que lanceur d’alerte ma démarche fut de faire usage public de la raison critique, en mettant en évidence – de manière argumentée – la dimension écocidaire de l’enseignement actuel de la gestion. Face à l’absence de toute réponse sérieuse de l’institution concernée au profit de quelques campagnes publicitaires de greenwashing, nous pouvons considérer – jusqu’à preuve du contraire – que le propos de ma première lettre ouverte n’a pas été invalidé : l’institution n’a pas encore mis un seul pied dans la métamorphose, se dirigeant de toute évidence dans la direction opposée : la poursuite du statu quo. La nécessité de poursuivre l’alerte et la mobilisation reste donc une priorité.
Une intention identique
Car, même si l’essentiel de mon message est déjà contenu dans la première lettre ouverte (l’acte 1), il apparaît nécessaire d’apporter quelques précisions pour la suite du mouvement initié. Le constat reste malheureusement inchangé : l’enseignement de la gestion – dont celui proposé par la LSM1 – contribue à l’écocide, et les campagnes de publicité prétendant le contraire indiquent de toute évidence une incompréhension profonde des enjeux réels. L’objectif de l’alerte lancée reste dès lors identique : provoquer une prise de conscience de l’urgente nécessité d’une métamorphose de ces sciences économiques appliquées afin de contribuer – à leur mesure – à la mutation de nos sociétés humaines, de nos organisations, de nos institutions et tenter de quitter la trajectoire d’écocide.
Reposons en quelques mots le cadre général de l’acte 1 : notre système socio-économique (la Mégamachine2) induit structurellement un écocide planétaire menant aux effondrements du vivant (humanité y compris)3. Notre modèle de développement est devenu une arme de destruction massive de ce vivant. Les pratiques de gestion (en appui sur une certaine science économique orthodoxe) y concourent à leur mesure, notamment par un effet de levier conséquent dans la formation des futur·e·s dirigeant·e·s de nos organisations et institutions. Leur rôle n’est donc absolument pas anodin, pour le meilleur (s’ils décidaient réellement de s’engager dans la métamorphose) et pour le pire (en continuant la poursuite de l’existant). Dénoncer le statu quo dans les écoles de gestion est donc un impératif éthique.
Démissionner ou rester : complémentaires sans être équivalents
Je réaffirme que la critique ne porte pas sur des personnes, la majorité d’entre elles étant – comme dans beaucoup d’organisations – de bonne volonté. Mais cette volonté ne suffit pas, c’est bien aux échelles organisationnelles et institutionnelles que doivent se mettre en place et se secréter ces modifications radicales. De plus, nous ne pouvons plus compter sur la seule perspicacité de quelques individus au sein de leurs cours respectifs pour quitter le business-as-usual alors que la majorité des autres contenus de cours le perpétuent avec ferveur. Pour la métamorphose, c’est un cadre rénové qui est requis, soutenant les déviants4 déjà à l’œuvre ET empêchant les conservateurs de poursuivre sur leur lancée. Sans ces deux mouvements conjoints les déviants s’épuiseront – comme souvent – et laisseront toute la place aux militant·e·s de l’immobilisme. Je pense en avoir apporté à mon échelle une illustration supplémentaire.
Si le fait de démissionner ou de rester au sein de ces institutions devient la question principale du débat, ce sera au détriment du problème de fond. Ce qui nous occupe est bien la métamorphose – de tout notre modèle sociétal et – de l’enseignement des sciences économiques appliquées et de l’art de la gestion, avec toutes les forces vives qui seront capables de quitter le déni et de nourrir ce mouvement avec sérieux. La ligne de fracture et de démarcation réside donc bien entre déviants et conservateurs, qu’ils soient dans ou hors les murs de l’institution.
Ne nous leurrons cependant pas, la métamorphose requise est d’abord un caillou dans la chaussure qui – derrière le masque des campagnes marketing grandiloquentes et des discours engagés – suscitera un rejet viscéral et toutes les stratégies pour éviter, retarder, empêcher le changement. Cela bousculera les intérêts de beaucoup, viendra fissurer les égos incapables de remise en question. Cela nécessitera du courage (de remettre son métier en question et au travail, de désobéir, de prendre position parfois contre ses intérêts carriéristes, d’arrêter la compromission avec les acteurs économiques du business-as-usual), de l’humilité (de reconnaître erreurs du passé et fourvoiements actuels, de quitter sa tour d’ivoire, de demander de l’aide, de reconnaître son désarroi), de l’intelligence (et non du smart-bidule, pour quitter le déni au sujet du réel, pour tresser savoirs et sagesse, pour écouter et intégrer ce que crient chaque jour les scientifiques sérieux). Ces qualités semblent encore devoir être insufflées, même au sein des milieux intellectuels privilégiés comme en atteste le sentiment de solitude qui étreint le déviant lorsqu’il quitte la mêlée. Rien de surprenant pourtant : le parcours requis pour faire carrière et accéder aux postes dirigeants privilégie pour l’instant très peu de ces qualités.
Car si démissionner – dans une démarche explicite de prise de position – ou rester sont complémentaires, ils ne sont absolument pas équivalents, que ce soit dans la force et la clarté du message envoyé auprès des citoyen·ne·s et de l’institution, que dans les implications directes pour tout lanceur d’alerte. Gardons en effet à l’esprit – dans notre cas – la réelle mise en danger matérielle et financière, la destruction potentielle de toute carrière académique dans le système actuel, l’inconfort du sentiment d’abandon de ne plus apporter notre voix critique (et donc dissidente) aux étudiant·e·s, ainsi que la perte conséquente du plaisir à dispenser ces cours. Le prix à payer pour s’engager en démissionnant est conséquent5 mais la démarche est nécessaire. Les nombreux messages de soutien et d’encouragement en prennent d’ailleurs bien la mesure.
L’ampleur de la transformation du système pour entamer une métamorphose et quitter l’écocide requiert une toute autre énergie que la logique des petits pas, un tout autre engagement que celui de distiller quelques concepts à la mode dans des contenus de cours aux paradigmes inchangés depuis des décennies. Cela requiert avec certitude une pression forte de l’ensemble des déviant·e·s pour forcer le changement face aux militant·e·s du statu quo. Cela requiert une mobilisation collective – une ébullition digne d’un nouveau mai 68 – pour permettre ce mouvement de bascule.
Cela requiert une radicalité éthique bien plus conséquente que des engagements mous et incrémentiels : pensons-nous encore avoir 50 ans devant nous pour avoir le temps de ménager toutes les susceptibilités ?, de mettre à jour les habitudes d’enseignement ?, de permettre à l’ensemble du corps professoral de prendre tout son temps pour ce saut de conscience ? Que des facultés qui forment à la gestion donnent – par leurs propres actes de gestion, et contrairement à leur paradigme « d’agilité » et « d’innovation » – cet exemple de conservatisme anti-scientifique leur hôte de facto tout crédit intellectuel et moral.
Un premier acte confirmé par les réactions de la société civile et la non-réponse de l’institution
Ma première lettre ouverte a été largement diffusée, et je continue de recevoir énormément de messages de soutien, de demandes et de propositions venant de tous horizons. Beaucoup d’entre vous se demandent que faire et comment contribuer à cette métamorphose. Je vous en remercie vivement et cela me touche beaucoup. Je suis très ému lorsque m’écrivent cette famille d’agriculteurs, ce professeur retraité, ces soignant·e·s, ces étudiant·e·s (de Belgique et d’ailleurs), cette enseignante du secondaire, ces citoyen·ne·s, ces parents, ces multiples entrepreneur·e·s, cette association d’ingénieur·e·s, cette faculté d’architecture, ces cadres d’organisations, ces ouvriers et ouvrières, ces employé·e·s, ces chercheur·e·s, cette informaticienne. Je perçois en vous lisant la mesure de la résonance de l’acte 1, de ce que provoque un geste radical issu d’une prise de position éthique. Je ne suis pas seul. Vous n’êtes pas seul·e·s. Nous sommes de plus en plus nombreux et nombreuses. À nouveau les spectaculaires déclarations de diplômé·e·s français·e·s de grandes écoles le démontrent. C’est la preuve que ce débat public est légitime, nécessaire, urgent. C’est aussi la confirmation que cette mutation est demandée au sein – et bien au-delà – des secteurs de la gestion et de son enseignement. Plus aucun·e gestionnaire lucide ne peut continuer le business-as-usual tel qu’il est encore enseigné dans les facultés de gestion et les écoles de commerce.
Mais si la toute grande majorité des témoignages indique qu’un nombre conséquent d’étudiant·e·s, enseignant·e·s, citoyen·ne·s ont été sensibles et ont compris ce que je tentais de mettre en évidence, la réaction de l’institution universitaire – et en premier lieu de la LSM, directement concernée – reste absolument inexistante sur le fond du problème. Je ne parle même pas ici d’une réponse qui me serait adressée personnellement mais bien d’une réponse sérieuse et argumentée à destination des étudiant·e·s, des enseignant·e·s, des chercheur·e·s, et de l’ensemble de la société civile. Je n’ai rien constaté qui serait digne d’une pensée universitaire : aucune tentative, même timide, de s’emparer de la controverse scientifique et éthique, alors qu’il s’agit de la mission même de l’Université. A fortiori, aucune remise en question de la réforme goutte-d’eau-qui-fait-déborder-le-vase, aucun retour aux programmes antérieurs en attendant une réelle métamorphose de ceux-ci.
Rien. Le silence de l’institution face à la collectivité est assourdissant.
Et cela fera donc bientôt trois mois qu’en Belgique de jeunes étudiant·e·s – futur·e·s gestionnaires – ont entamé un cursus dans lequel aucun cours de sociologie, de philosophie, de psychologie, d’épistémologie, d’histoire ne viendront soutenir leur esprit critique. Trois mois qui annoncent déjà la suite de leur programme : l’enseignement du business-as-usual et de son nécessaire greenwashing, l’absence de toute perspective critique sérieuse au sujet de l’économie orthodoxe (pourtant invalidée par les faits empiriques), l’inexistence du moindre bagage suffisant sur le fonctionnement du vivant, de la planète, des sociétés humaines, des institutions, des politiques publiques, et des dégradations systémiques induites par ces mêmes pratiques de gestion qui pilotent la Mégamachine.
Ma démarche était pourtant de faire un usage public de la raison critique, en posant un constat argumenté et documenté sur la perte d’esprit critique et la victoire de la raison instrumentale au service de la Mégamachine, notamment via le maintien – voire l’aggravation dans le cas de la réforme LSM – du paradigme dominant en gestion. J’estime – par cet acte de lanceur d’alerte – avoir mobilisé l’essence-même de ce qu’est le cœur de tout projet universitaire, de son ADN, en alertant notamment sur une dérive obscurantiste contraire à l’esprit des Lumières. Que cette démarche de sauvegarde de l’égrégore de l’Université ne soit pas reconnue et traitée par l’université est pour le moins interpellant. La stratégie de toute institution conservatrice face à un lanceur d’alerte qui met le doigt là où ça fait mal est de ne rien en dire, faire le gros dos et miser sur des campagnes de communication creuses, qui ne sont que des diversions en vue de préserver l’image de marque6. Rien d’original, la plupart des organisations actuelles font de même. Une nouvelle chassant l’autre, cette stratégie est souvent payante. Pourtant, ces campagnes creuses révèlent une fois de plus et – malgré elles – avec force toute la nécessité de la métamorphose à opérer dans les organisations. Cependant, l’égrégore de l’Université lui interdit absolument d’adopter le conservatisme. Université et conservatisme sont antinomiques. Le silence de la LSM et de l’UCLouvain sont donc inacceptables. Communiquer sur la bonne prise en compte des « enjeux de société » que seraient, entre autres, l’ « économie verte », le « découplage », le « développement durable », la « transition numérique », la « consommation responsable », la « finance durable », comme si nous étions encore dans les années 90, dénote toute l’incompétence de l’organisation au sujet de l’écocide en cours et de la métamorphose nécessaire pour y mettre fin. Tant que l’institution se mure dans le silence et l’inertie, le lanceur d’alerte a le devoir d’enfoncer le clou :
-
- l’institution n’aura aucune crédibilité dans la métamorphose tant que les ouvrages de référence pour ses étudiant·e·s resteront ceux d’il y a plus de 20 ans7, et continueront de présenter l’économie par le prisme unique du paradigme néoclassique voire de l’idéologie néolibérale ;
- les déclarations seront ridicules et les engagements risibles tant que les cahiers de charge8 des cours en gestion ne comporteront pas une seule fois des termes relatifs au fonctionnement basique de la planète et du vivant9, aux conséquences systémiques du modèle de développement occidental10, à l’existence d’une pensée dissidente en économie11, à des formes de gestion alternatives, concrètes et variées12, aux mécanismes sociétaux13 qui sous-tendent et permettent de déconstruire les idéologies ;
- rien de sérieux ne sera entamé tant que l’ambition sera de saupoudrer du « développement durable » dans les cursus : la première recommandation du grand Plan Transition de l’université14 par exemple est que les programmes de bacheliers intègrent des acquis d’apprentissage transversaux liés au développement durable, en utilisant un « MOOC Développement durable » valorisé à 5 ECTS. C’est donc là toute l’ambition d’une université face à l’écocide planétaire et à la menace existentielle qu’il revêt pour l’humanité et le vivant ? : la forme d’enseignement la plus pauvre humainement (un MOOC est seulement et avant tout une vidéo en ligne), abordant un concept mou et soluble dans toutes les pratiques les plus délétères depuis 40ans – le développement durable – et pesant moins de 3 % dans les 180 ECTS que nécessite un bachelier ;
- les déclarations continueront de signifier une approche totalement non systémique des enjeux réels, ainsi qu’un manque flagrant d’analyse critique des techniques15 tant qu’il s’agira – sous le prétexte fallacieux de rendre nos modes de vie soutenables – de s’engouffrer par exemple dans la mode de la transition numérique, de la voiture électrique, des smart-bidule et autres métavers. Ces techniques16 ne peuvent que perpétuer l’écocide tant que le cadre sociétal de l’illimitisme reste identique. Ce futur est-il seulement désirable en plus d’être totalement insoutenable ? Avons-nous réellement envie de ce type de dystopie ? Est-ce donc via cette pauvreté existentielle17 que les facultés de gestion vont – comme elles déclarent vouloir le faire – re-nourrir de sens la jeunesse ?
Nous sommes apparemment encore loin d’une voie18 pour réhabiliter une connaissance enracinée dans l’état du réel, systémique et complexe, critique et émancipatrice, universitaire, non mutilante. Saupoudrée d’un tel sucre impalpable, la formation en gestion proposée par la LSM conserve donc son goût toxique d’écocide. Combien d’espèces doivent encore disparaître, combien de degrés supplémentaires, combien de réfugiés environnementaux supplémentaires, combien d’hectares stérilisés, combien d’études scientifiques, combien de COP, combien d’actions de désobéissance19 seront encore nécessaires pour prendre au sérieux la métamorphose ? De qui se moquent – et pour encore combien de temps – les business schools et facultés de gestion ?
Non à l’école de commerce d’indulgences : un appel à la « métamorphose », pas au greenwashing publicitaire
Face à l’écocide, le « trop peu, trop tard » équivaut à l’inertie. Sur le fond, j’évoquais dans l’acte 1 le terme précis de métamorphose. Étant l’enjeu central de notre siècle, il est essentiel de bien en comprendre le sens et la portée, ainsi que les implications qui en découlent. Dans le vocable du systémicien, il existe deux types de changement pour un système (une organisation ou une institution p.ex.) : le premier relève d’un ajustement dans le cadre existant. Il est nommé « changement de type un » (noté chgmt1). Dans de nombreuses situations un chgmt1 est pertinent car il est suffisant, mais face à l’écocide induit par la Mégamachine, à cause de la menace existentielle qui pèse sur l’humanité, ce n’est absolument pas le cas. Traiter les symptômes est inefficace, comme l’atteste la dégradation des indicateurs de l’état du vivant depuis plus de 50 ans. Or, et nous y reviendrons, la totalité des modifications apportées (et proposées pour la suite) par l’institution universitaire, par la LSM, par les facultés de gestion, etc. relèvent uniquement de ce type de chgmt1, malgré ce qu’en présentent les campagnes de marketing. Ma démission et mon propos public sont donc probablement incompréhensibles pour celles et ceux qui agissent dans le cadre existant. Nous sommes dans les mécanismes du déni et de la résistance au changement, les milieux universitaires et intellectuels, en ce compris les milieux dits « agiles » et « innovants » du management, n’y faisant pas exception.
Revenons à la théorie systémique : l’autre type de changement ne relève pas d’un ajustement dans le cadre existant, mais d’une modification radicale du cadre lui-même. Il est nommé « changement de type deux » (noté chgmt2) et implique une modification de la structure et du fonctionnement des processus systémiques. La transformation naturelle d’une chenille en papillon nous en offre un exemple : un papillon n’est pas une chenille améliorée, qui aurait subi un ajustement, il s’agit d’autre chose, d’une autre structure, d’un autre fonctionnement, d’autres processus. On a changé de système. Et l’on ne passe jamais à un papillon en tentant d’améliorer ou d’ajuster une chenille.
On n’obtient pas non plus un chgmt2 en accumulant graduellement les chgmt1. Pour un chgmt2, une rupture systémique est indispensable. Ce que la théorie indique également est qu’un système insoutenable face à l’évolution du contexte tend à essayer tous les chgmt1 avant d’être contraint d’opérer un chgmt2. Tout système cherchera à ne pas se métamorphoser, à maintenir son homéostasie, à persévérer en l’état, quitte – dans le cas de la Mégamachine – à menacer l’ensemble du vivant. La théorie indique également que les chgmt2 ne surviennent que très exceptionnellement de l’intérieur du système. Dans la plupart des occurrences, c’est la contrainte externe au système qui le conduit au chgmt2, le cas échéant en se mêlant aux forces déviantes internes au système.
Le point essentiel de la mise en application de cette théorie des systèmes est qu’une métamorphose relève obligatoirement d’un chgmt2. Face à l’écocide, il n’est donc pas question de garder le cap actuel en augmentant incrémentalement et localement certains efforts, il faut changer de système. Il ne s’agit pas de continuer l’existant en le verdissant un peu, il s’agit de quitter cette stratégie pour enseigner tout autre chose en gestion et en économie. L’enjeu n’est pas de rendre durable, soutenable, circulaire, éthique, certifié, notre modèle socio-économique actuel, mais d’en sortir de toute urgence. Le changement est un changement de nature (faire tout autre chose, tout autrement) et non un changement de degré (faire un peu mieux ou différemment la même chose).
S’il faut réaffirmer que les sciences économiques appliquées resteront nécessaires, que la pratique de l’art de la gestion et du pilotage des organisations répondent à un besoin fondamental des activités humaines, c’est uniquement sous la condition de leur métamorphose. Sans cela, il vaut mieux au plus vite fermer l’ensemble des business school et facultés de gestion tant qu’elles continueront de fournir structurellement à la Mégamachine des cohortes annuelles de « gestionnaires de l’existant », que la participation consciente ou inconsciente à l’écocide transformera automatiquement en écocidaires. Poursuivre l’existant, en termes éthiques, s’apparente à une prise d’otage criminelle des générations futures.
Tout ceci permet donc d’apporter une discrimination fondamentale entre une modification quelconque et une réelle métamorphose. De nombreuses institutions choisissent, consciemment ou inconsciemment, de donner l’image d’un changement, sans réellement se modifier, à cause de leur conservatisme non avoué couplé aux contraintes structurelles. Un chgmt2 ne peut pas se réduire au recyclage de l’existant. Il touche l’ADN d’une organisation. Dans le cas de l’université, l’ADN est constitué de la recherche, de l’enseignement et du service à la société. Il est bien sûr souhaitable d’alléger l’empreinte écologique de l’université, de diminuer la consommation d’énergie, de verdir un campus, de décourager au maximum l’usage de la voiture individuelle, d’isoler les bâtiments, etc. Mais là ne se manifeste pas – doit-on vraiment le rappeler ? – le plus grand impact de l’université sur la société. Ce sont les « idées et les cerveaux qu’elle remplit de ces idées » qui constituent le principal impact de l’université. Face à l’écocide en cours, l’université n’a plus le droit de remplir les cerveaux de la jeunesse avec les mêmes idées obsolètes que celles qui ont causé la catastrophe.
La jeune activiste Greta Thunberg indiquait récemment que le greenwashing est une des pires menaces actuelles utilisée par les dirigeants des pays et des organisations pour ne rien faire20, tandis que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, martelait au sujet des engagements de l’Accord de Paris que « Notre monde ne peut plus se permettre de faire du greenwashing, d’avoir de faux-semblants, de retardataires »21 , et ajoutait dans le cadre de la COP27 que « Nous sommes sur une autoroute vers l’enfer climatique, avec le pied toujours sur l’accélérateur »22. Lorsque l’université – et les écoles de gestion en particulier – se contentent de verdir quelque peu leur empreinte écologique et quelques cours sans modifier radicalement23 le contenu principal de leur recherche, de leur enseignement et de leur service à la société pour cesser de contribuer à l’écocide et contribuer au contraire à la métamorphose, il est logique d’affirmer qu’il ne s’agit que d’un phénomène de greenwashing criminel. Le greenwashing doit être dénoncé non seulement lorsqu’il est employé par des entreprises ou des pouvoirs publics, mais a fortiori lorsqu’il est employé par l’Université.
Poussons la logique des changements systémiques à son terme. Face à l’écocide, continuer de proposer et d’implémenter des chgmt1 s’avère de plus en plus contre-productif. L’énergie dépensée, les ressources consommées, le temps passé à implémenter ces changements sont en effet gaspillés au lieu d’être employés pour s’atteler à la métamorphose urgente. Pire, ces chgmt1 entretiennent une forme de mensonge en donnant l’illusion que le problème serait résolu ou en voie de l’être24. Le message envoyé est dès lors désastreux. Alors que l’incendie ravage notre maison, le greenwashing équivaut à peindre en trompe l’œil des sorties de secours sur les murs. Comme l’indiquent de nombreux observateurs critiques, les « petits gestes » et les « petits pas », non seulement ne nous permettent pas de nous hisser à la hauteur de l’urgence par la métamorphose, mais surtout servent de diversions criminelles face à l’écocide. Le greenwashing est l’équivalent moderne du scandaleux commerce des indulgences au début de la Renaissance.
L’institution ne peut se cacher derrière l’argument que « cela prend du temps » et qu’on « avance progressivement ». C’est inadmissible. La métamorphose requiert un changement urgent et radical. L’état des lieux scientifique se renforce sans équivoque depuis 50 ans, nous ne pouvons plus tergiverser encore un demi-siècle. Les quelques efforts actuels mis en place par l’université auraient été pertinents il y a 20 ou 30 ans, mais sont en 2022 largement périmés. Devant l’impossibilité scientifique d’encore prétendre « qu’on ne savait pas », la justice et l’éthique jugeront chaque année d’inaction comme une passivité criminelle. Chaque excuse25 employée est une forme de corruption morale qui permet de poursuivre l’existant. Employer ces prétextes relève du cynisme, de l’incompétence ou de la bêtise, et n’a donc pas sa place au sein de l’université. La lutte contre l’écocide ne peut en aucun cas être le sujet d’une « mineure » (sic) ou un « acquis d’apprentissage transversal » (sic). La lutte contre l’écocide ne peut être que l’enjeu prioritaire, majeur, de l’ensemble de l’action de l’Université. There is no university on a dead planet.
Quel est le point commun entre une faculté de gestion et un marchand de soda ? La voie de garage du développement durable !
C’est à la mode, la majorité des organisations – les universités ne faisant pas exception – communiquent sur leur conscience de la situation environnementale (climatique uniquement, bien souvent26), sur leur volonté de changer et leurs engagements, sur leurs bonnes pratiques et leur inscription dans une responsabilité sociétale, etc. On peut se demander avec ironie pourquoi le GIEC, le PNUE, l’IPBES, et autres groupes ne sont pas démantelés sur le champ, tant leur existence semble désormais inutile lorsqu’on entend tout ce battage marketing.
En tête de gondole, toute la mystique du « développement durable » et de ses avatars. Or, celui-ci est malheureusement tout sauf un chgmt2. Comme je l’analyse dans mon travail de thèse – avec pléthore d’autres intellectuels27 – ce concept a donné lieu depuis plus de 30 ans à la poursuite de l’existant, au maintien des mécanismes de la Mégamachine, à la persistance de la foi dogmatique dans la technoscience, le marché et la croissance comme réponses adaptées aux crises. Les organisations et institutions les plus ignorantes ou les plus cyniques ne s’y sont pas trompées : nombre d’entre elles – a fortiori les plus nuisibles, les plus destructrices du vivant, les plus obsolètes – possèdent leur charte éthique, leur code d’engagement pour la planète, leur plan de développement durable, leurs engagements de RSE, etc. Ce concept de « développement durable » est consensuel, inopérant, historiquement et structurellement arrimé au maintien des logiques de croissance économique et du développement écocidaire. Il n’implique aucune contrainte, permettant de donner l’illusion du changement et du verdissement à la mode.
Une réelle politique de métamorphose passe donc de toute évidence par l’abandon de ce concept fallacieux (on parle d’oxymore), véritable voie de garage, de chgmt1. L’idéologie managériale actuelle ne doit pas être amendée ou ajustée, elle doit être abandonnée car obsolète. Brandir quelques cours à option, quelques « mineures » (sic) qui abordent les « enjeux sociétaux » (sic) ne contrebalance pas le maintien de l’idéologie managériale écocidaire dans l’ensemble des autres cours. C’est seulement dans un autre cadre général, après un changement radical, que certains outils intellectuels et techniques déjà invoqués – économie circulaire, démarche éthique, indicateurs alternatifs, voire méditation, développement personnel, etc. – pourront concourir à autre chose qu’au greenwashing. Aucun outil n’est neutre, chaque outil n’acquiert son sens que par rapport au cadre dans lequel il est mobilisé. Dans un cadre sociétal illimitiste de capitalisme néolibéral toutes ces pratiques y sont engluées, teintées, récupérées. Elles servent de caution morale à la poursuite de l’existant, de commerce des indulgences. Elles masquent à peine le fait que l’empereur est nu. Tant que la nature du système économique mondial implique l’exploitation illimitée des écosystèmes et des humains, implique la prédation de tout le vivant, aucune charte éthique ni aucune pratique certifiée ne pourra empêcher l’écocide.
Pour le dire sans détour : appeler au « développement durable », à la « transition », à « l’économie verte-dématérialisée-décarbonée-circulaire », à la « finance éthique », à la « responsabilité sociétale des entreprises », à la « consommation responsable », relève – mécaniquement et ne peut que relever dans le cadre actuel – du greenwashing. Si la méditation par exemple est une pratique précieuse, elle devient la pire des choses lorsqu’elle est enseignée dans les business schools actuelles, elle est le pire de l’existant lorsqu’elle est utilisée dans les organisations afin de permettre aux salarié·e·s de mieux supporter des pratiques toxiques, une absence de sens, des conditions matérielles précaires28.
Dans cette absolue nécessité de métamorphose, tous ce qui relève d’un chgmt1 est – comme nous l’indiquions – nécessairement contre-productif. Oui à la RSE, oui à la circularisation des flux de l’économie, oui à la méditation, oui aux pratiques de connaissance de soi, etc., mais surtout pas dans le cadre actuel. Si une série de ces cours sont fondamentalement creux et ne peuvent relever que du greenwashing29, d’autres sont féconds. Ce sont sans doute les titulaires de ces cours qui sont susceptibles d’être les déviant·e·s dans le système. Ce sont sans doute ces titulaires qui peuvent en premier porter la radicalité et l’engagement, qui peuvent exercer toute la pression pour forcer l’organisation à muter. Le message doit être clair : ne plus cautionner l’existant, ne plus se satisfaire des chgmt1, ne plus être complice du mensonge. Car aucune carrière académique n’a de sens sur une planète morte.
Chercheur·e·s et enseignant·e·s, ne soyons plus les idiots utiles du système actuel. Avec les étudiant·e·s et la société civile, mobilisons-nous avec force19 pour engager cette métamorphose.
Deux étapes stratégiques pour la suite : Caminante, no hay camino30
Je pense l’avoir explicité, la métamorphose – dans laquelle l’enseignement de la gestion n’a pas encore mis un pied – n’est pas un parcours de santé et va nécessiter courage, humilité et intelligence. Dans ce chemin, il me paraît indispensable de distinguer très clairement deux étapes afin de ne pas continuer les tergiversations actuelles et la mollesse des réformes : celle de l’intention radicale, suivie par celle de l’implémentation.
La première étape est de poser au plus vite l’intention de la métamorphose (au niveau organisationnel, institutionnel, politique). De manière nécessairement radicale, avec clarté, l’organisation – suite par exemple à un processus d’États généraux qui associe l’ensemble de sa communauté interne (académiques, chercheur·e·s, étudiant·e·s, personnel administratif et logistique, etc.) et externe (alumni, pouvoirs de tutelle, mécènes, citoyen·e·s, etc.) – signifie publiquement qu’elle quitte définitivement le cadre actuel, qu’elle entame un chgmt2. Le grand danger à cette étape est de vouloir garder l’existant, de ménager les susceptibilités, de reporter au lendemain, de se rassurer via des chgmt1. Le danger est de vouloir mettre de l’eau dans son vin pour satisfaire les forces conservatrices au sein de l’institution. Faire cela est la meilleure manière de ne rien faire, de diluer l’engagement et de continuer durant quelques décennies les ajustements dans le même cadre.
Ce premier temps doit donner une orientation qui signifie, aux yeux du monde, le changement de nature du système, qui indique très clairement que l’institution – la LSM par exemple – va faire tout autre chose dans l’enseignement de la gestion. Il est question de lucidité dans le diagnostic de la situation, d’honnêteté dans le discours et d’intégrité dans les actes. L’intention serait par exemple :
En tant qu’école universitaire de gestion, nous décidons dès maintenant d’abandonner l’enseignement du business-as-usual (sa doxa néoclassique et néolibérale, le dogme hors-sol de la croissance et de l’illimitisme, etc.) et ses avatars au service du greenwashing (développement durable, etc.), afin d’intégrer le cadre scientifique des limites planétaires, d’une descente matérielle et énergétique conséquente, dans une démarche de formation à la raison critique. Nous engageons pour cela – en délibération avec l’ensemble des autres disciplines, des autres facultés, des acteurs de la société – un processus de métamorphose radicale de nos enseignements, des paradigmes sous-tendant les pratiques de la gestion, des axes de recherche afin que la communauté de la gestion devienne une force qui contribue à nous sortir de la trajectoire d’écocide planétaire.
La seconde étape – qui sera sans doute en partie l’objet d’un acte 3 de la part des déviant·e·s – est de se mettre en route concrètement, d’étudier, de concevoir et d’implémenter un nouveau programme de formation adapté aux engagements de la première étape. Cette mise en chantier complète des programmes de formation sera bien entendu incrémentielle (chgmts1), mais inscrite dans le nouveau cadre (chgmt2) issu de la première étape. C’est seulement ici qu’il est judicieux de se doter d’un calendrier sur quelques années, de remettre une certaine douceur dans l’enchaînement des nombreuses étapes qui suivent. Gardons à l’esprit qu’il est impossible – dans un chgmt2 – de planifier tout le voyage à l’avance ou de vouloir en maîtriser les moindres détails. C’est uniquement ici qu’est à nouveau audible l’argument que cela prend du temps.
Car si le chemin se fait en marchant, il faut au préalable se remettre debout et se doter d’une réelle volonté de voyage. C’est l’organisation de cette première étape, dans les plus brefs délais, que nous avons à construire, susciter, imposer par notre mobilisation collective. Même si nous en sommes encore loin dans les écoles de gestion, la métamorphose est l’unique chemin susceptible de permettre la bifurcation face à l’écocide et ses effondrements, et la seule voie capable de re-insuffler du sens et des égards dans nos manières d’habiter cette planète.
Laurent Lievens
Ingénieur de gestion, Sociologue, Psychomotricien
Enseignant-chercheur
[1] Mon propos continuera de prendre appui sur la situation de la Louvain School of Management et de l’UCLouvain,
étant des institutions que je connais de l’intérieur. Mais ces analyses et propositions font aisément sens pour une large
partie du paysage des organismes de formation, des facultés, des universités, en Belgique ou à l’étranger.
[2] Voir notamment les travaux de Lewis Mumford (Le Mythe de la machine, tomes 1 et 2, Fayard, 1973-1974) et de
Serge Latouche (La mégamachine : raison technoscientifique, raison économique et mythe du progrès, Broché, 2004).
[3] Comme illustré par la croissance des appels à la mobilisation, notamment de la part des scientifiques. Tout
récemment par exemple, plus de 1000 scientifiques de 47 pays – dont certains principaux membres du GIEC –
signaient une nouvelle lettre ouverte alertant de l’impossibilité de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C
(https://signon.scientistrebellion.com).
[4] Selon le philosophe Edgar Morin, « Le principal moteur interne de l’histoire est celui d’une déviance qui se développe
en même temps que se paralyse la régulation qui la réfrène ou que s’affaiblit la force qui la réprime. » Il expose les
principes de la déviance et le rôle des déviants, en donnant de nombreux exemples de déviants illustres dans le champ
scientifique, comme Einstein, Fermi, Marie Curie. La déviance est toujours qualifiée d’hérésie par les tenants des
vérités établies et « suscite la haine mortelle des défenseurs de l’Invariance » (sic).
[5] Illustrant le célèbre dilemme du prisonnier appliqué à l’engagement militant (voir notamment :
[6] Au lieu d’une réponse, mentionnons p.ex. quelques réactions sous la forme de posts sur les réseaux sociaux de la
part des autorités LSM 3 jours après l’acte 1, un communiqué de presse de l’UCLouvain au sujet du plan de transition
6 jours après, etc.
[7] Notamment pour le cours d’économie, le fameux manuel dit « Mankiw », de N. Gregory Mankiw, véritable ode à
l’idéologie néolibérale.
[8] Le contrat officiel entre l’enseignant·e et l’étudiant·e pour chaque cours, précisant notamment les objectifs, les
modalités d’évaluation, les ressources bibliographiques et les contenus de cours. Ces cahiers de charge sont publics et
disponibles en ligne.
[9] Par exemple les termes : écosystème, biotope, terre, climat, écologie, sol, terrestre, fossile, carbone, cycles,
coopération, territoire, énergétique, permafrost, résilience, GIEC, IAASTD, IPBES, etc.
[10] Par exemple les termes : empreinte (écologique), pollutions, ressources naturelles, écocide, effondrement, colonialisme, extractivisme, greenwashing, idéologie, anthropocène, gafam, productivisme, effet rebond, techno-
solutionnisme, etc.
[11] Par exemple les termes : capitalisme, capitalocène, marxisme, matérialisme, propriété privée, néolibéralisme,
économie néoclassique, orthodoxe, hétérodoxe, sobriété, décroissance, descente énergétique et matérielle, économie
coopérative, bien commun, permaculture, etc.
[12] Par exemple les termes : open source, démantèlement, low tech, biomimétisme, logiciels libres, linux, indicateurs
alternatifs, reconversion, monnaies alternatives, coopératives, etc.
[13] Par exemple les termes : désobéissance, écoféminisme, précarité, genre, patriarcat, imaginaire, domination,
pauvreté, épistémologie, etc.
[14] Disponible ici : https://uclouvain.be/fr/decouvrir/universite-transition/plan-transition.html
[15] Si d’aventure les autorités avaient la volonté de résorber cette fracture intellectuelle, la littérature comporte une série
d’auteur·e·s à (re)découvrir : Ivan Illich, Bernard Charbonneau, André Gorz, Jacques Ellul, Alain Gras, Thierry Paquot,
Fabrice Flipo, Jacques Testart, Gilbert Rist, Jean Baudrillard, Geneviève Azam, Karl Polanyi, Marcel Mauss, Günther
Anders, Isabelle Stengers, Bruno Latour, etc.
[16] Continuer par exemple de percevoir la numérisation du monde comme une voie d’avenir susceptible de nous faire
quitter la trajectoire d’écocide ne peut se faire qu’en oblitérant totalement la matérialité et la non soutenabilité de ce
secteur. Voir notamment les travaux de la géologue minière Aurore Stephant, de Philippe Bihouix, de Jean-Marc
Jancovici, de Vincent Mignerot, de Nicolas Meilhan, ainsi que ceux de Michel Desmurget au sujet de la fabrique du
crétin digital.
[17] Pour alimenter la réflexion, voir par exemple les analyses fécondes de François Terrasson, Hartmut Rosa, Baptiste
Morizot, Vinciane Després, David Abram, etc.
[18] Edgar Morin : La Voie, Fayard (2011), et Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Points (2015).
[19] Exemple récent encourageant : après 7 jours de mobilisations et de blocages, les étudiant·e·s et activistes
obtiennent de l’Université de Barcelone la mise en place d’un cours dédié aux mécanismes et conséquences de la
crise climatique pour l’ensemble des formations. Un premier pas !
https://www.theguardian.com/world/2022/nov/12/barcelona-students-to-take-mandatory-climate-crisis-module-from-
2024
[20] Greta Thunberg on the climate delusion : ‘We’ve been greenwashed out of our senses. It’s time to stand our ground’,
https://www.theguardian.com/environment/2022/oct/08/greta-thunberg-climate-delusion-greenwashed-out-of-our-
senses
[21] Climat : le monde n’a plus le luxe du « greenwashing », insiste le chef de l’Onu, https://www.rtbf.be/article/climat-le-
monde-n-a-plus-le-luxe-du-greenwashing-insiste-le-chef-de-l-onu-11093946
[22] COP27 : ‘Nous sommes sur l’autoroute vers l’enfer climatique’, lance le chef de l’ONU,
https://www.lesoir.be/475526/article/2022-11-07/cop27-nous-sommes-sur-lautoroute-vers- lenfer-climatique-lance-le-
chef-de-lonu
[23] Radical renvoie à l’idée de « reprendre à la racine », c’est notamment le travail de l’épistémologie des sciences.
[24] Voir par exemple le texte du philosophe André Gorz, « Leur écologie et la nôtre » (1974), https://www.monde-
diplomatique.fr/2010/04/GORZ/19027
[25] Un article scientifique de l’université de Cambridge – intitulé Discourses of climate delay – a mis en évidence 12
excuses récurrentes brandies par les partisans du statu quo afin de retarder toute action sérieuse. Disponible ici:
https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-
core/content/view/7B11B722E3E3454BB6212378E32985A7/S2059479820000137a.pdf/discourses_of_climate_delay.pdf
[26] Six des neufs limites planétaires à ne pas dépasser, identifiées par les scientifiques, ont déjà été franchies. Voir
Wang-Erlandsson, L., Tobian, A., van der Ent, R.J. et al. A planetary boundary for green water. Nat Rev Earth Environ
3, 380–392 (2022). https://doi.org/10.1038/s43017-022-00287-8
[27] Voir notamment le courant de pensée de la décroissance, dont les auteurs (Latouche, Ariès, Parrique, Sinaï, etc.)
ont déconstruit cet oxymore. Nous renvoyons également aux 16 numéros d’Entropia (Revue d’étude théorique et
politique de la décroissance), ainsi qu’au corpus de l’économie écologique.
[28] Les ouvrages abordant ces questions existent, notamment : Happycratie (de Eva Illouz et Edgar Cabanas), La
méditation de pleine conscience, l’envers du décor (de Elisabeth Martens), Contre le développement personnel (de
Thierry Jobard), etc.
[29] Nous renvoyons par exemple au travail d’Alain Grandjean, Julien Lefournier et Gaël Giraud au sujet de l’illusion de la
finance verte, aux Éditions de l’Atelier (2021). L’actualité l’illustre également avec la récente mise en demeure d’une
grande banque engagée et éthique, dans le cadre de financements à l’industrie fossile.
[30] Extraits du poème d’Antonio Machado : Caminante, no hay camino, […] Se hace camino al andar, [trad.] :Toi qui
chemines, il n’y a pas de chemin […] Le chemin se fait en marchant.
Laisser un commentaire