Retranscription de C’est aujourd’hui que ça passe ou ça casse, le 5 avril 2022
Bonjour, nous sommes le 5 avril 2022 et je n’ai rien à dire qui soit fondé sur une quelconque certitude et quant à mes certitudes, j’aimerais beaucoup qu’elles soient fausses.
Alors, que dire quand même ? Que dire quand même ? Je n’ai pas la moindre idée de ce qui va se passer sur le terrain en Ukraine. Je ne sais pas s’il y a véritablement une retraite des Russes ou s’ils se préparent à utiliser d’autres types d’armes. Je ne sais pas du tout ce qui se passe dans la tête de M. Poutine. Ça a l’air d’un personnage assez rigide et fermé et donc, il n’a pas l’air du style à se laisser impressionner par des évènements en tant que tels.
Je viens de lire un article dans Le Monde par Mme [Marie] Mendras qui a l’air bien fait, qui parle d’un entourage de plus en plus sceptique sur ses actions, d’élites intellectuelles, je ne dis pas « financières », d’élites intellectuelles russes dans le désarroi qui s’efforcent de quitter le pays.
On aimerait bien qu’on retrouve la nuance. On n’est pas dans la nuance : on est obligé, nous sommes obligés, pays occidentaux, de nous rallier autour de l’OTAN, de mettre entre parenthèses comme quantité négligeable des erreurs politiques, des erreurs d’appréciation, des comportements agressifs du côté occidental. Pourquoi ? Parce qu’on a, voilà, véritablement la monstruosité dans l’autre camp et que l’on n’a donc pas le choix. Est-ce que ces comportements belliqueux de notre côté en réaction, en représailles, à des comportements véritablement odieux, est-ce que ça va nous conduire vers des lendemains qui chantent ? C’est peu probable. Est-ce qu’on est dans la 3e guerre mondiale ou est-ce qu’on est dans le règne des « opérations spéciales » ? On ne sait pas : c’est demain qui va en décider, c’est demain qui nous montrera ce qui se passe véritablement, qui nous fera comprendre a posteriori dans quoi nous étions engagés depuis un certain temps.
Et en arrière-plan de cela, dernier rapport du GIEC qui nous dit : 2025, c’est la dernière limite pour prendre les mesures qui s’imposent. Alors, 2025, c’est quoi ? c’est dans trois ans. Est-ce que nous nous serons mobilisés pour prendre les mesures qui s’imposent ? Bien entendu que non. Toutes les crises sont des prétextes à continuer à faire comme avant. Quand il y a une pression sur le prix du pétrole et donc du prix à la pompe, est-ce qu’on essaye d’en tirer parti pour faire une transition énergétique ? Non. On fait ce qu’il faut pour que les populations ne se rebellent pas, ne se retrouvent pas sous forme de Gilets jaunes sur les ronds-points. Or, on offre des subventions pour compenser l’augmentation du prix du pétrole. Est-ce qu’on prendra jamais – et en particulier d’ici 2025 – les mesures qu’il faut ? Non.
On m’a proposé, c’était vraiment il y a quelques jours, de participer à un numéro spécial d’une revue sur les crises, et je me suis abstenu. J’ai dit « Non, je ne pense pas que nous soyons dans une crise. Je pense que nous sommes dans un effondrement généralisé. » Tous ces éléments que nous voyons autour de nous : les pandémies, le retour à des guerres mondiales, et en arrière-plan la température qui aura augmenté de 3°C d’ici la fin du siècle, on voit déjà ce que ça donne quand on est entré dans un régime comme dans nos pays avec des gouttes froides et des gouttes chaudes parce que la ceinture autour du pôle Nord ne joue plus ou plus suffisamment, ça nous montre déjà un certain nombre de récoltes cramées d’avance au début du mois d’avril pour le reste de l’année.
J’ai dit : « Non, non, je ne participe pas à un numéro où on parle de crises. » Une crise, c’est un mouvement paroxystique. On se dit que c’est quelque chose qui va passer et en général, les crises, heureusement, ont passé. Or, ces crises maintenant se combinent, elles se cumulent, elles forment des ensembles de plus en plus dangereux. Les guerres vont produire des ruptures de stock tout à fait considérables. Les ruptures de stock vont faire augmenter le prix de denrées qui paraissent de première nécessité en plus de, voilà, tous les produits qui sont nécessaires pour faire encore des bagnoles, des machins comme ça. Tout ça va être bloqué à un endroit ou un autre et on ne pourra pas continuer.
Qu’est-ce qu’on m’a répondu au niveau de la rédaction de la revue ? On m’a dit : « Monsieur, oui, il n’est peut-être plus temps de parler de crises. Il est peut-être temps de parler, comme vous le dites, d’effondrement. Nous vous serions très reconnaissant si vous faisiez pour nous un article sur l’effondrement ». Alors, je vais faire ça et, comme je le disais tout à l’heure pour commencer, j’espère, j’espère que je me trompe.
Il y a encore quelques commentateurs, quelques critiques, qui me disent que je fais des prévisions catastrophiques pour avoir le plaisir d’avoir raison. Non, non : j’aimerais bien mieux avoir le plaisir d’avoir tort ! Malheureusement, depuis une quinzaine d’années, je ne bénéficie absolument pas du plaisir d’avoir tort, hélas, devant mes prévisions catastrophiques. Alors, je vais m’atteler à mon article sur « Un effondrement n’est pas une crise » et je vais vous tenir au courant de ce que je pense de l’actualité même comme dans un cas comme celui-ci, en étant totalement privé de capacités et de talent à comprendre des mouvements de troupes sur le terrain, je m’abstiens de le faire. Je me contente d’impressions générales, globales, et je vous les communique parce que j’ai l’impression que, peut-être, ça peut vous aider à continuer l’un ou l’autre à réfléchir et surtout, à parler autour de vous et à produire de la rétroaction, du feedback, voilà, donner un écho à notre mécontentement devant la manière dont nos gouvernements – et surtout ceux des autres – ignorent la gravité de la situation.
Essayons de nous sortir du début d’une guerre, de la 3e guerre mondiale, et en arrière-plan, il y a un effondrement total des civilisations lié au fait que nous ignorons de fait les avertissements autour du réchauffement climatique. Nous parlons « Russie », nous nous mettons d’accord sur des mesures qu’il faudra prendre d’ici 2050 mais le GIEC nous dit : « C’est d’ici 2025, d’ici trois ans, encore un peu moins de trois ans, qu’il faut prendre ces décisions » et nous ne les prendrons pas. Nous trouverons des prétextes X ou Y comme le fait d’être en guerre ici ou là pour ne pas le faire et donc, les choses sont vraiment très très mal barrées. Ce qui ne veut pas dire que nous ne devons pas unir tous nos efforts et essayer de renverser la tendance. Quelqu’un me demande hier : « Comment pourriez-vous faire pour qu’il y ait davantage d’écho à ce que vous dites, parce que tout ça a l’air quand même assez sensé ? ». Je n’en sais rien, je ne sais pas du tout, je ne vois pas… Enfin, j’ai déjà réfléchi à comment donner davantage d’écho : il faut me donner accès à des chroniques dans des journaux. Si on me les retire [comme c’est le cas en ce moment], c’est encore ça de moins. Il faut m’inviter à parler de ceci ou cela, de lancer des appels au bon sens, un retour à la paix, à éviter les escalades. Mais nous ne sommes pas partis dans cette direction-là et le camp d’en face ne nous aide certainement pas.
Si vous avez des idées, n’hésitez pas quand même, mettez-les en commentaire sur mon blog, appelez-moi, envoyez-moi des mails, mobilisez les gens autour de vous. Prenez des initiatives parce que, comme dit le GIEC, c’est vraiment maintenant que ça passe ou ça casse. S’il y a quelque chose à faire, faisons-le à l’instant même !
Allez, à bientôt !
Laisser un commentaire