Dans Moïse ou la Chine. Quand ne se déploie pas l’idée de Dieu de François Jullien paru ce mois-ci chez L’Observatoire.
Pages 131 et 132 :
… « normes comportementales » – c’est ainsi que je traduirai désormais le terme li, forcé que l’on est de déborder la notion de « rite » et de dé-catégoriser nos mots. […] Il est coutumier […], dans la pensée chinoise, de rapporter ce terme li à deux homonymes. D’une part, […] la « chaussure. Car de même que la chaussure encadre le pied et le maintient ferme, en lui servant à la fois de forme et d’appui, une telle norme comportementale encadre la conduite, dans sa démarche, et lui permet de ne pas déraper. […] D’autre part, […] li […] consonne avec le terme […] qui est devenu le plus abstrait de la pensée chinoise et signifie la « raison » des choses. Ce terme a d’abord désigné les fines lignes de veinure que le polissage fait apparaître dans un morceau de jade et selon lesquelles celui-ci peut se laisser le plus commodément fissurer et cliver ; puis, à partir de ce sens de linéaments structurants, en est venu à signifier la cohérence foncière à laquelle se conforme le procès du monde. D’homonyme devenant synonyme, la norme comportementale s’apparente ainsi au principe le plus subtil de la pensée.
P.S. Je m’amuse que des réflexions de Jullien autour du Livre (ou « Classique ») des Documents, un texte de diverses époques, mais d’il y a ± trois mille ans en tout cas, reprises par moi sous forme de citations, puissent être qualifiées par certains commentateurs de mon blog de « propagande chinoise » 😀 .
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