Ça y est, la Chine offre de soigner l’Afrique et de lui remettre sa dette.
Elle se comporte donc exactement avec la générosité (bien comprise) des USA à la fin de la 2de guerre mondiale, quand ses surplus et sa machine à produire avaient besoin de marchés d’accueil solvables. Le plan Marshall visait entre autres cet objectif d’apporter rapidement des débouchés aux biens qui ne seraient désormais plus détruits dans les combats, tout en faisant un bien réel aux économies des pays ruinés par le conflit. Ce faisant, les USA pouvaient asseoir par la manne financière et la relance de la machine économique, un contre pouvoir puissant à l’idéologie soviétique, qui elle-même cherchait à émanciper les peuples du joug capitaliste.
C’était la quadrature parfaite : des ressources quasi-illimitées à ceux qui en avaient besoin, détournant ces derniers d’un autre « possible » porté par l’URSS, avec une des abandons de créances – les dettes des pays via le plan et durant le conflit – au fur et à mesure que la prospérité des uns augmentait celle des autres. Les 30 glorieuses étaient en route. N’oublions pas qu’au-delà de ces financements fléchés pour les états (sic !), les USA par ailleurs ont massivement converti à l’époque, en Europe de l’ouest surtout, leurs bases militaires et autres installations en hôpitaux, sanatoriums ou centre de soins, augmentant de fait et sincèrement leur image positive de générosité et de bienfaiteur. Le travail d’oubli du premier contributeur au conflit en nombre de vies – l’URSS – commençait aussi par là ! Bien sûr, il y avait du côté Pacifique la consolidation de la première et de la seconde ceinture de containment du communisme mais qu’importe, l’Europe se reconstruisait à grande vitesse et le maintien de l’ordre et la paix mondiale étaient confiés au seul pays capable d’en assumer le coût et la tâche. D’ailleurs, ne reconstruisait-il pas également le Japon ? La Chine de Mao s’enfonçait pendant ce temps-là dans ses grands « bonds en avant » contradictoires, guidant sa population d’un pas certain vers un moyen-âge peu gênant pour le reste du monde.
Puis Deng est arrivé… et aujourd’hui, avec Xi, la manne financière et le pouvoir économique ont changé de rives sur le Pacifique…
Dans le même temps, quelques guerres ingagnables et ruineuses pour les USA et ses alliés, ont fini par siphonner toute marge de manœuvre financière qui aurait pu financer et maintenir un modèle de société plutôt séduisant dans les années 50 et 60.
Oh, bien sûr, il y aura toujours quelqu’un pour pointer la dictature… renforçant le bon vieux proverbe : « Alléguer les défauts des autres pour vouloir excuser les siens, c’est vouloir se laver les yeux avec de la boue » ! Parce que maintenir en bonne santé sans COVID un peuple de 1,4 milliards d’habitants – certes de façon très dirigiste – c’est toujours moins préférable à la liberté de contaminer qui je veux, quand je veux, par ignorance et liberté individuelle ! Plutôt la mort que la contrainte !
Il reste qu’assister à ce spectacle a quelque chose de triste, de nostalgique d’une générosité perdue au profit d’une « America first » qui ne cherchera donc plus qu’à ralentir ou empêcher par tous moyens cet ordre nouveau d’advenir. Avec des armes ? Pourquoi pas ! Taïwan pourrait être un bon prétexte, mais il y en a tant d’autres par-ci par-là.
Et l’Afrique dans tout ça ?
L’offre généreuse de lui donner 1 milliard de doses vaccinales et d’organiser unilatéralement une vaste remise de dettes pourrait bien lui faire porter un tout autre regard sur l’Occident et sa « bienfaisante influence » avant, pendant et après la colonisation. Soigner et aider au développement, c’est ainsi qu’on détourne les regards, non ? L’Histoire n’est pas encore écrite… car la proposition chinoise vise en même temps – c’est évident – à satisfaire ses propres besoins immenses et insatiables, au service d’une prospérité pour son peuple cherchant à rejoindre nos standards de vie. Elle ne tient pas forcément compte des aspirations des peuples africains à disposer d’eux-mêmes et de leurs ressources naturelles, ni des contre-propositions généreuses que pourraient formuler les USA et l’Occident pour contrer l’ogre pékinois. C’est ainsi que naissent les surenchères de bienfaisance à défaut de conflits ruineux. Ou pas. Affaire(s) à suivre…
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