L’heure des bilans
A quarante ans, on dit que c’est l’heure des bilans,
Assurément, ce n’est pas là pur boniment,
Car aujourd’hui, je viens de souffler ces bougies,
Et cette nuit, à mes soucis point d’embellie.
Réfléchissant, me demandant bien comment,
Evidemment, il pourrait en être autrement,
Quelle magie, quel changement serait induit,
Soleil qui luit, quarante ellipses autour de lui ?
Pour le moment, mes pensées inlassablement,
A mes enfants, vont, accentuant mon tourment,
A leur vie qui, bientôt à rien ne se réduit,
Car leur survie, n’est aujourd’hui plus garantie.
Ce que je sens, ce qui arrive est sidérant,
C’est maintenant, et ça se voit, c’est éclatant,
Quel ahuri, ignorerait ce qui surgit,
Quel abruti, se banderait les yeux ainsi?
Des éléments, partout c’est le déchainement,
Un hurlement, jeté par l’Environnement,
Mais sans sursis, mon existence je poursuis,
Et sans merci, plus de ressources m’approprie.
Pour le vivant, un véritable effondrement,
L’enterrement, d’espèces jadis foisonnant,
Silencieux cri, qui échappe aussi à mon ouïe,
Et j’amplifie, chaque jour cette tragédie.
En ignorant, malgré les avertissements,
Tous les vivants, mes désirs, mes comportements,
Mes appétits, les précipitent dans l’oubli,
Quelle ironie, c’est à eux que je dois la vie.
Mon carburant, de mes objets le composant,
Mes vêtements, de lui tout mon confort dépend,
Jusqu’à la lie, l’or noir je le bois, l’engloutis,
Mon mode de vie, de pétrole brut est confit.
En le brulant, tel un grand génie malfaisant,
Il se répand, gaz ses serres en refermant,
Le climat cuit, vent devient tempête en furie,
L’air s’alourdit, fine particule l’obscurcit.
Dans l’Océan, de plastique un nouveau continent,
Grâce aux courants, mes poubelles en sont l’aliment,
Mais c’est aussi, piège mortel qui s’en saisit,
Et bientôt git, mouette, hareng, posidonie.
Anciens ciments, les glaciers fondent lentement,
Comme saignant, gaz et virus libérant,
A l’agonie, surface froide qui fléchit,
Elle s’assombrit, et puis plus rien ne réfléchit.
L’eau en montant, grignote irrémédiablement,
L’enrochement, la digue faite prudemment,
La plage ici, à vue d’œil se rétrécit,
Gare à celui, qui près du rivage a construit.
C’est fait sciemment, ou s’embrase par accident,
En un instant, les forêts partent en brûlant,
D’Amazonie, de Sibérie ou d’Australie,
Partout de suie, le paysage se noircit.
Retournement, labour profond, écrasement,
Les traitements, le béton, le goudron puant,
La terre aussi, d’où pousse tout ce qui nourrit,
N’est plus l’abri, du lombric ou de la souris.
Les aliments, que nature fait gratuitement,
Moi seulement, les gouterai trop goulûment,
Pour le petit, d’une autre espèce j’interdis,
Le gout du fruit, par le poison je le châtie.
Entre les gens, les fossés se creusent, béants,
Et le puissant, idiot cynique ou fascisant,
Celui qui joui, et qui sans limite grossit,
Sur le petit, renforce sa suprématie.
Et les migrants, que l’on qualifie de brigands,
De nos mendiants, ils viennent gonfler les rangs,
En ennemi, je reçois ce frère transis,
Il trouve ici, cellule, barreaux, ou taudis.
Le dirigeant, de toute nation attendant,
Plus d’argent, d’argent sonnant et trébuchant,
Pour ses amis, ceux-là qui déjà ont tout pris,
Pour les nantis, si dur il œuvre jour et nuit.
Habilement, flattant mon ego gentiment,
Consentement, il obtint bien facilement,
Mon regard fuit, devant les crimes impunis,
Et les conflits, trop lointains pour être suivis.
Je le comprends, ma langue il parle couramment,
Car le tyran, point ne s’exprime en allemand,
Apologie, du chacun pour soi, du profit,
Démocratie, foulée aux pieds dans l’incurie.
Le parlement, est chambre d’enregistrement,
Le jugement, n’est bientôt plus indépendant,
Devant Bercy, se prosternent les plus instruits,
Et les képis, jusqu’aux écoles ont envahi.
Le Président, s’est fait laquais des possédants,
Au firmament, un Jupiter omnipotent,
L’urne remplie, tous les reculs justifie,
Tous les acquis, tous les biens communs sont détruits.
Condescendant, à l’égard des cons, des sans-dents,
C’est dans le sang, qu’il réprime ses opposants,
Dans le pays, de Nantes, Toulouse ou Nancy,
Elle grandit, la colère des tout petits.
Soulèvement, multicolore assourdissant,
Un grondement, de toute part tu entends,
Oligarchie, tu crus que tout t’étais permis,
Petit Paris, de pouvoir tes derniers jours tu vis.
Entre les gens, beaucoup de discours on entend,
Qui alarmants, qui plus ou moins attendrissants,
Certains ici, ouvrant les yeux ont bien compris,
Que cette orgie, cette fête est bientôt finie.
Et vaillamment, ils se sont mis en mouvement,
Des militants, ils ont rejoint les contingents,
Du colibri, tout l’effort contre l’incendie,
Point ne suffit, à qui veut entendre ils le crient.
Il n’est plus temps, des mea culpa larmoyants,
Questionnements, ou tout autre atermoiement,
Toi qui me lis, qu’est criminel ton déni,
Dès lors agis, et la résistance agrandis.
Choisis ton camp, avec ton espoir mourant,
En contemplant, la catastrophe s’avançant,
La barbarie, que d’aucuns pourtant ont prédit,
L’ignominie, montre que tout n’est pas écrit.
Laisser un commentaire