L’appel de Politis pour le climat : « Votre inaction est un crime ! »
À l’heure où les gouvernements entament de nouvelles négociations sur le climat, la rédaction de Politis s’engage. L’appel que nous lançons, rejoint par 225 personnalités, traduit une colère qui grandit. Il porte la voix de celles et ceux qui refusent la résignation et tenteront encore de se faire entendre dans la rue, le 6 novembre, lors de la grande marche pour la justice climatique. Joignez votre voix à la nôtre, en signant cet appel.
Cela fait plus de trente ans que les scientifiques du Giec vous alertent, vous les décideurs politiques et économiques. Trente ans que les climatologues du monde entier accumulent des données qui font la démonstration de l’urgence climatique, de son origine anthropique et de l’effondrement des écosystèmes de la planète. Presque autant que la société civile répète à l’envi que les discours ne suffisent plus. Que le temps de l’action est venu. Et pourtant rien ne vient. Du blabla. Encore du blabla. Toujours du blabla. Au mieux du greenwashing, au pire des reniements et des renoncements à n’en plus finir.
Qu’avons-nous observé ? Que cela fait près de trente longues années que vous négociez, que vous tentez de nous faire croire que vous allez vous attaquer à l’urgence climatique. Qu’il ne faut plus s’inquiéter. Et pourtant, en trente ans, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont explosé de 64 %. Si nous vous laissons faire, elles vont encore augmenter d’au moins 16 % d’ici à 2030.Votre procrastination, cette irresponsable tendance à repousser à plus tard ce qui devrait être fait aujourd’hui, est un crime climatique, perpétré en toute connaissance de cause. Des gens meurent à cause du réchauffement climatique. Car celui-ci se conjugue au présent, contrairement à vos promesses, que vous n’envisagez qu’au futur. L’été, le thermomètre approche ou dépasse les 50 °C aux quatre coins de la planète, tandis que les canicules, feux de forêt et inondations se multiplient et s’intensifient. Sans parler de la fonte des glaces ou de la montée des eaux. Des villes et des villages sont peu ou prou rayés de la carte ou rendus inhabitables. Des écosystèmes sont détruits ou transformés à jamais. Vous en avez la responsabilité. Nous en payons tous le prix.
Le 9 août dernier, le Giec a énoncé ce cruel constat avec encore plus de force : « Le changement climatique s’accélère et s’intensifie » à un rythme « sans précédent ». Combien d’entre vous, chefs d’État et de gouvernement, ministres, parlementaires, élus locaux, patrons d’entreprise, ont lu le résumé aux décideurs (39 pages) du dernier rapport du Giec ?
Certes, vous n’avez pas rien fait. Vous avez négocié et ratifié l’accord de Paris sur le climat. Mais celui-ci ne vous contraint à rien, et vous ne le respectez pas. Les engagements posés sur la table par les États depuis 2015 nous conduisent à un réchauffement climatique supérieur à 3 °C. Charge à nous, citoyens, de faire respecter les objectifs de 1,5 °C ou 2 °C. Plutôt que de mettre le paquet sur des politiques climatiques ambitieuses à court terme, vous leur avez substitué un concept vaseux de neutralité carbone à long terme, pariant sur d’improbables innovations technologiques pour nous sauver.
Pire, vos plans de relance ont débloqué plus de financements nocifs pour le climat (3 000 milliards de dollars environ) que pour des projets supposés « verts » (1 800 milliards). La pandémie a tué des millions de personnes et montré combien l’économie mondiale était insoutenable. Que trouvez-vous comme réponse ? Relancer, quoi qu’il en coûte – en mobilisant ce pognon de dingue qui n’est prétendument pas disponible pour assurer les besoins élémentaires des populations –, un système économique qui détruit la planète, accroît les inégalités et broie les hommes et les femmes qui travaillent pour survivre.
Nous ne détournerons pas le regard. Nous vous garderons à l’œil, lors de la COP 26, et tenterons de faire pression. Parce que vous n’avez toujours pas débloqué les 100 milliards de dollars que vous aviez promis aux pays pauvres il y a douze ans à Copenhague. Parce que vous déroulez le tapis rouge aux pollueurs, aux as de l’évasion fiscale, aux champions des dividendes et du greenwashing. Parce que vous voulez créer de nouveaux marchés partout en transformant la nature en un capital qu’il faudrait valoriser.
Nous vous avons à l’œil, mais nous savons que cela ne suffira pas. Parce que nous en avons déjà fait l’expérience. Parce que nous savons que vous n’avez aucune intention de laisser 80 % des réserves d’hydrocarbures dans le sol : en trente ans de négociations, vous avez toujours refusé ne serait-ce que d’évoquer des restrictions à l’exploitation des énergies fossiles. Parce que vous n’avez aucune envie de démanteler le pouvoir de nuisance que constituent les TotalEnergies, Exxon et consorts, qui savent depuis plus de cinquante ans qu’ils sont à l’origine du réchauffement climatique et qui ont tout fait pour le cacher. Parce que vous avez exclu le commerce international des secteurs couverts par l’accord de Paris.
Pour toutes ces raisons, et pour tant d’autres, nous avons besoin d’un ouragan citoyen en mesure de renverser, si ce n’est la table des négociations, le cours des choses. À la déception et à la désillusion, nous préférons la force de la lucidité et de la détermination. Depuis plusieurs années désormais, la jeunesse a montré la voie : ses mobilisations avancent plus vite que les négociations sur le climat. Si nous ne voulons pas faire face à l’impensable, nous devons faire l’impossible.
Les 220 premiers signataires :
Paul Ariès, politologue • Pierre Aschieri, maire de Mouans-Sartoux • Hervé Aubert, président de l’association Pour Politis • Manon Aubry, coprésidente LFI du groupe de la Gauche au Parlement européen • Aurélien Gabriel Cohen, université de Paris • Clémentine Autain, députée LFI • Geneviève Azam, économiste, militante à Attac • Anne Babian Lhermet, conseillère régionale EELV Auvergne-Rhône-Alpes • Benjamin Ball, organisateur • Alexis Baudelin, avocat au barreau de Paris • Julien Bayou, secrétaire national d’EELV • Guy Benarroche, sénateur des Bouches-du-Rhône • Esther Benbassa, sénatrice écologiste de Paris, professeure émérite à l’École pratique des hautes études • Tony Berbard, maire de Châteldon • Ugo Bernalicis, député LFI • Benoît Biteau, député européen EELV • Manuel Bompard, chef de la délégation LFI au Parlement européen – Groupe GUE-NGL • Évelyne Boulongne, porte-parole du Miramap • Dominique Bourg, professeur honoraire • Philippe Boursier, professeur de sciences économiques et sociales • Pauline Boyer, porte-parole d’Alternatiba • Géraldine Boÿer, membre du bureau exécutif d’EELV • Charles Braine, ancien marin pêcheur, président de Pleine Mer • David Buisson, conseiller régional Auvergne-Rhône-Alpes • Mélissa Camara, conseillère municipale EELV à Lille • Damien Carême, député européen • Émilie Cariou, députée, coprésidente des Nouveaux Démocrates • Julian Carrey, enseignant-chercheur • Nathalie Caspard, maître de conférences en mathématiques • Florence Cerbaï, conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes (EELV) • Leila Chaibi, députée européenne LFI • Patrick Chamoiseau, écrivain • Pierre Charbonnier, chercheur CNRS, Sciences Po • Eve Chiapello, sociologue • Yves Citton, codirecteur de la revue Multitudes • Laurence Cohen, sénatrice communiste • Marie Cohuet, porte- parole d’ANV-COP 21 • Albane Colin, conseillère régionale Auvergne-Rhone-Alpes • Maxime Combes, économiste • Éric Coquerel, député LFI • Alexis Corbière, député LFI • Mickael Coriat, astrophysicien • David Cormand, député européen • Sergio Coronado, ancien député des Français de l’étranger • Dominique Coujard, magistrat honoraire • Alain Coulombel, porte-parole national EELV et économiste • Annick Coupé, coporte-parole Attac • Jézabel Couppey-Soubeyran, économiste, Université Paris-I Panthéon-Sorbonne • Franck Courchamp, directeur de recherches au CNRS • Jérémie Crépel, conseiller municipal de Lille, membre du bureau exécutif d’EELV • Alexis Cukier, philosophe • François Cusset, historien des idées • Flavia Cutivet, membre Youth For Climate • Michele d’Auria, président Les Démocrates • Lang Dany, économiste, maitre de conférence Université Paris-XIII • Renaud Daumas, conseiller régional d’Auvergne-Rhône- alpes • Laurence De Cock, historienne, enseignante • Geoffroy De Lagasnerie, philosophe • Monique De Marco, sénatrice de la Gironde • Brigitte del Perugia, retraitée de l’Éducation nationale, ancienne élue municipale EELV • Gwendoline Delbos-Corfield, députée européenne Verts/ALE • Karima Delli, députée européenne EELV • Julien Delord, enseignant-chercheur • Damien Deville, géographe et anthropologue de la nature • Emmanuel Dockès, professeur de droit, université Paris-Nanterre • Thomas Dossus, sénateur écologiste du Rhône • Emmanuel Drouet, professeur des universités • Grégory Doucet, maire de Lyon • Dub Inc, musiciens • François Dubreuil, administrateur Unis pour le climat • Olivier Dubuquoy, géographe • Cédric Durand, économiste • Sarah Durieux, activiste et autrice • Simon Duteil, codelegué général de l’Union syndicale Solidaires • Bernard Duterme, directeur du CETRI – Centre tricontinental • Yannick Duvergé, directeur général d’Exemplary • Annie Ernaux, écrivaine • Txetx Etcheverry, militant pour la justice climatique • Camille Étienne, activiste pour la justice sociale et climatique • Fatima Ezzahra Benomar, militante féministe • Didier Fassin, professeur de sciences sociales • Michel Feher, philosophe • Julie Ferrua, secrétaire nationale Union syndicale Solidaires • Caroline Fiat, députée LFI • Gérard Filoche, porte-parole de la Gauche démocratique et sociale • David Flacher, professeur des universités • Jean Gadrey, économiste • Khaled Gaiji, président des Amis de la Terre France • Raquel Garrido, conseillère régionale IDF • Noé Gauchard, Youth For Climate France • François Gemenne, professeur de géopolitique de l’environnement • Jacques Généreux, maître de conférences des universités -Sciences Po. • Susan George, autrice • Charlotte Girard, enseignante-chercheuse en droit public • Nicolas Girod, porte-parole Confédération paysanne • Jérôme Gleizes, économiste, conseiller EELV de Paris • Barbara Glowczewski, directrice de recherche CNRS • Guillaume Gontard, sénateur Isère président du groupe écologiste • Roland Gori, psychanaliste, professeur émérite • Pierre-Henri Gouyon, professeur • Adeline Grand- Clément, enseignante chercheuse • Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT spectacle • Fabienne Grebert, conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes • Alban Grosdidier, Europe Organiser – Finance Campaign – 350.org • Claude Gruffat, député européen – groupe des Verts/ALE • Samuel Grzybowski, porte-parole de la Primaire populaire • Murielle Guilbert, codeleguée générale de l’Union syndicale Solidaires • Hélène Hardy, bureau exécutif EELV • Jean-Marie Harribey, économiste • Nadia Hatroubi Saf-Saf, rédactrice en chef du Courrier de l’Atlas • Quentin Heim, chargé de communication chez FAIRe un monde équitable • Anne Hessel, coprésidente d’honneur de Nouvelle Donne • Jean-Michel Hupé, chercheur CNRS en écologie politique • Yannick Jadot, eurodéputé, candidat à la présidentielle • Pascale Jamoulle, anthropologue • François Jarrige, historien • Yassine Jioua, machiniste • Paul Jorion, chroniqueur • Régis Juanico, député Géneration·s de la Loire • Wandrille Jumeaux, conseiller municipal à Montreuil (93) • Stéphen Kerckhove, directeur général d’Agir pour l’Environnement • Pierre Khalfa, Fondation Copernic • Isabelle L’Héritier, Team leader et campaigner pour 350.org en France • Thierry Labica, professeur de science politique comparée • Bastien Lachaud, député LFI • Myriam Laïdouni-Denis, conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes/
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