L’augmentation régulière, depuis plusieurs mois, des prix de l’énergie révèle fortuitement le désarroi de la troïka Macron / Castex / Lemaire face à la perspective d’une explosion sociale à la mode Bonnets rouges et Gilets jaunes. La valse hésitation dont nous avons été les témoins entre baisse de la fiscalité sur les carburants et aide directe aux usagers montre assez que les rois sont nus et la caisse à outils du système capitaliste désespérément vide. Quant à l’offre récente au bout de la réflexion, de signer un chèque de cent euros en compensation de la hausse des prix à l’intention des citoyens « économiquement faibles » comme on les qualifiait autrefois, elle mériterait une analyse fine.
Il faudrait bien aller voir ailleurs et en profiter pour élargir la problématique à l’ensemble des ressources nécessaires aux productions et aussi à tous les biens de consommation indispensables à une vie bonne des humains … dont les prix tirés à hue et à dia dans un contexte de compétition internationale, de reprise de croissance et de retour aux vieilles lunes sont actuellement fixés sans contrôle par les marchés ; nous n’attendrons sans doute pas longtemps pour découvrir en outre le rôle des spéculateurs. Se demander enfin si le capitalisme est plus qu’une misérable utopie, une option crédible pour organiser des activités durables sur la Terre et protéger les humains et le vivant.
La certitude nous vient alors que dans les circonstances actuelles beaucoup de nos dirigeants, dans les domaines économique, financier, politique prennent lentement conscience que le dogme capitaliste auquel ils ont accordé une confiance absolue depuis le début de leur carrière ne peut leur être d’aucun secours. Face aux questions multiples qui sont posées, nul n’a plus de réponses pertinentes. Pire, en raison de la complexité d’un système dont la mise en œuvre exigerait nécessairement un surdimensionnement, la paralysie est fatale.
Et puis, rappelons-nous qu’au début du premier confinement, en mars 2020, Macron avait avalé son chapeau lorsqu’il avait déclaré : Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie à d’autres, est une folie. »
Révélation ou imposture ? Conscience ou inconscient ? Nous verrons, mais ces questions demeurent.
Alors, en attendant que faire ?
La gestion soutenable des ressources qui devrait être collective nous oblige ainsi à l’envisager le plus démocratiquement possible, en donnant la parole au plus grand nombre de citoyens ; elle nous contraint à prévoir une stricte organisation tenant compte des nombreuses situations des habitants de ce pays. Je pense qu’il existe parmi nous assez de connaisseurs de nombreux domaines pour dresser la liste des interrogations indispensables et décrire la problématique.
Moi qui ne suis ni expert ni mathématicien je me bornerai à distinguer les usages nécessaires et les usages superflus dans la perspective de ne pas gaspiller ce que la nature met gratuitement à notre disposition. (Bien sûr, des définitions, ici, sont nécessaires, n’est-ce pas ?)
De quelles ressources primaires faudrait-il parler ? Mais de l’énergie, au sens large, de l’eau et de l’alimentation, des matières premières, des réseaux divers … de l’habitat, de l’éducation, de la culture et de la formation, de la communication…
Tout le reste n’est-il pas superflu ? Débattons-en !
Dans son blog, Paul a souvent évoqué la gratuité l’opposant aux allocations diverses qui finiraient toujours, selon lui, dans les poches des prédateurs et dans les paradis fiscaux.
Une des solutions ne serait-elle pas, en réalité, la transformation de nos rapports d’échanges en étendant la sphère de la gratuité qui reposerait sur l’usage et renchérirait le mésusage ?
Quels biens de consommation pourraient alors être l’objet de dotations gratuites ? Et sous quelles formes ?
L’exemple de l’eau.
Après débats et calculs, il serait possible de définir une quantité d’eau potable dont les familles pourraient avoir besoin pour un usage domestique mesuré. Elle leur serait attribuée gratuitement. Pour des consommations additionnelles, des tranches supplémentaires seraient créées avec une échelle des prix allant de « élevé » à « dissuasif ».
Mêmes démarches pour les autres biens communs de l’humanité.
À la gratuité, il paraît utile d’associer les Monnaies Locales Complémentaires afin de peser sur les déplacements et les transports de marchandises. Utile d’encourager aussi la pratique du jardinage et des petits élevages.
Le rappel d’impérieux principes constitueraient un nouveau cadre. Je cite pêle-mêle : entraide, solidarité, réparation systématique, interdiction de la publicité, usage et mésusage, limitation draconienne de la propriété privée, abandon des niches économiques et des activités inutiles ou destructrices, préservation des sols… Et j’en oublie…
Chacun devant participer à l’organisation sociale et économique et occuper plusieurs fonctions et / ou activités.
Puisqu’il s’agit bien de rationner en partageant des ressources limitées, peut-être faudrait-il regarder les périodes des deux guerres mondiales pour s’en inspirer au cours desquelles les Français ont eu à connaître des tickets de rationnement.
« Le bon combat pour le xxème siècle, ce n’est pas de manifester pour l’augmentation du pouvoir d’achat, c’est de manifester pour la défense et l’extension de la sphère de la gratuité. » Paul Ariès
« L’école sera un relais essentiel pour développer une culture de la gratuité et apprendre le métier d’humain, et non plus celui de bon producteur et consommateur. Parions que la gratuité ayant des racines collectives et individuelles beaucoup plus profondes que la vénalité en cours, il ne faudrait pas très longtemps pour que raison et passion suivent. » Paul Ariès
À la relecture de ce texte, je me rends compte que mes premiers doutes sont avérés, que la tâche est considérable et s’inscrit évidemment dans le plan A, mais d’autres que moi pourront peut-être contribuer à défricher ! Peut-être…
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