Le Blog de Paul Jorion, le 27 juillet 2015 : Chine : « Traverser le gué en tâtant une pierre à la fois »
Teng Hsiao-Ping avait dit à propos de l’exploration chinoise du capitalisme qu’il initiait : “Traverser le gué en tâtant une pierre à la fois”. C’est-à-dire, que l’on garderait un pied dans le communisme et que l’on essaierait de voir prudemment si tel ou tel aspect du capitalisme marche ou ne marche pas, en se réservant toujours la possibilité de revenir un pas en arrière si telle ou telle pierre du gué se révèle trop branlante. À la chinoise : sans confiance aucune accordée à une théorisation quelconque : par essais et erreurs uniquement !
J’avais rappelé cela il y a cinq ou six ans [donc 2009-10] à un groupe d’anthropologues de retour de Chine qui m’assuraient, croix de bois, croix de fer, que le communisme en Chine, c’était fini, f – i – fi, n – i – ni, fini !
Le Monde, cinq ans plus tard, aujourd’hui 7 septembre 2021 : Le virage à gauche de Xi Jinping révèle la crainte d’une occidentalisation de la Chine, par Frédéric Lemaître
Tout se passe comme si, durant une quinzaine d’années, les autorités avaient laissé les jeunes pousses croître et prospérer mais qu’elles estimaient l’heure venue de leur appliquer désormais les règles communes. Ou, plutôt, la seule règle qui vaille dans la Chine de Xi Jinping : la suprématie du Parti. Cette mise au pas va donc bien au-delà du nécessaire toilettage des règles de la concurrence. En l’absence d’explications convaincantes à cette véritable mousson réglementaire, les observateurs en sont réduits à suivre la lecture qu’en a faite un blogueur chinois, un certain Li Guangman.
Nul ne connaît vraiment cet homme mais, son blog ayant été relayé par les plus grands sites officiels – depuis l’agence de presse Chine nouvelle jusqu’au quotidien de l’Armée populaire de libération –, nul ne doute qu’il reflète la voix de son maître. On y lit notamment qu’« un changement profond ou une révolution est en train de prendre place dans les champs de l’économie, de la finance, de la culture et de la politique. (…) Ce profond changement est aussi un retour aux aspirations initiales du Parti communiste chinois, un retour centré sur le peuple, un retour à l’essence du socialisme. (…) Le marché des capitaux n’offrira plus aux capitalistes un paradis où ils pourront s’enrichir du jour au lendemain,[il] ne sera plus un paradis pour les stars efféminées, les nouvelles et l’opinion publique ne seront plus en position de vénérer la culture occidentale. Nous avons besoin de reprendre le contrôle sur le chaos culturel et de bâtir une culture vivante, saine, virile, orientée vers les gens ».
Plus la mesure qui va creuser de manière spectaculaire l’écart entre la Chine et le monde occidental :
interdiction aux moins de 18 ans de jouer plus de trois heures par semaine aux jeux vidéo en ligne…
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