Pas facile de rendre compte des sorties de films ces temps-ci, mais comme je ne suis de toute manière pas critique de cinéma…
Si le spectateur se dit durant la projection d’un film : « Vivement que je puisse voir le making of ! », les choses se présentent très mal pour le producteur et le metteur en scène. Et si c’est durant les toutes premières minutes qu’il se dit cela, c’est évidemment encore bien pire. Or c’est le cas ici.
Bien sûr, il vaut mieux cela que de ne plus jamais avoir envie d’entendre parler du film, mais là le risque est quand même minime quand il s’agit de Christopher Nolan. Parce qu’il y a toujours chez lui une idée choc au départ : le type qui, chaque matin, ne se rappelle de rien comme dans Memento (2000) ou un rêve à l’intérieur d’un rêve à l’intérieur d’un rêve… dans Inception (2010). Il ne reste plus alors aux frères Christopher et Jonathan Nolan qu’à créer à partir de cette amorce un scénario plausible. Mais quand l’idée choc c’est un monde où le temps passe à l’envers cohabitant avec le nôtre où il passe dans le bon sens, l’idée même d’un scénario plausible devient automatiquement chimérique, et Nolan aura beau – comme il le dit lui-même dans le making of – mobiliser toutes les ressources des premiers James Bond : un super-vilain vraiment très méchant, une jolie fille compliquée, du plutonium dérobé, etc. il n’arrivera à rien parce que la tâche est tout simplement impossible. Il aura beau animer, comme des morceaux de bravoure, une poursuite automobile dans les deux sens du temps, ou mettre en scène une bataille où l’ennemi est pris en tenaille (sic) entre deux bataillons où l’un attaque selon l’habitude en créant du passé derrière lui et en grignotant dans le futur et l’autre en détricotant résolument le passé en provenance de l’avenir, nous serons cependant réduits à savourer ces scènes comme des épisodes isolés, à la pensée qu’ici, comme dans ses films antérieurs, Nolan n’aura recouru qu’au strict minimum de trucages et d’images numériques. On retiendra aussi comme élément positif, Kenneth Branagh en super-vilain très vicieux : « Pas facile, dit l’acteur, de prononcer, en marchant à reculons, du russe à l’envers ! » ; on le croit sur parole. Et excellente performance, dans le rôle de la belle fille perverse mais le cœur sur la main, d’une actrice que je ne connaissais pas encore : Elizabeth Debicki. Remarquable bande-son aussi de Ludwig Göransson, que l’on pourrait écouter en se passant du reste. Quant à John David Washington, fils de Denzel, dans le rôle du Protagoniste (sic), je laisserai la parole à la productrice Emma Thomas, par ailleurs épouse de Nolan, qu’il interprète son personnage « tout en sensibilité », propos qui, quand ils s’appliquent à une supposée machine à tuer de la CIA, sont l’équivalent du tout aussi charitable « très charmante » appliqué à certaines dames.
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