« Pourquoi les explications complotistes semblent-elles avoir une audience croissante ? »
Je n’ai pas « la » réponse, et je soupçonne que les causes sont multiples. Quelques pistes que j’explorerais, sans ordre particulier :
– Le niveau éducatif moyen en France chute
Je renvoie aux diverses comparaisons internationales, aux comparaisons douloureuses entre le contenu des enseignements aujourd’hui et il y a quinze ans, sans parler de la comparaison avec ce qu’il en était il y a trente ans.
Il serait intéressant de vérifier si le complotisme connaît une telle fortune dans des pays comme Japon ou Corée du Sud – bref ces pays où au contraire le niveau moyen d’éducation monte. Je ne serais absolument pas surpris que les explications complotistes y aient moins de public.
Ce n’est pas par hasard, ni par caprice, que les partisans du régime républicain ont toujours considéré l’éducation comme « après le pain, le premier besoin du peuple ». Un consommateur, un sujet, peuvent éventuellement être ignorants. Un citoyen ne peut tout simplement pas se le permettre. Ce qui suppose que l’Etat considère l’éducation, mesurée par ses résultats et sa performance, comme l’une de ses missions les plus sacrées.
===> Comment imaginer qu’une chute continue pendant trente ans soit sans conséquence ?
– Les journalistes ont un niveau moyen assez déplorable
Lorsque l’on entend ou on lit un journaliste sur un sujet que l’on se trouve connaître, le plus souvent, « ça fait mal aux oreilles ». Cette expérience bien partagée suggère très fortement que cette règle s’applique aussi aux sujets que l’on connaît moins. Simplement, on a davantage de mal dans ce cas à détecter l’incompétence.
Naturellement, il y a des exceptions. Trop rares.
===> Comment imaginer que propulser des ignorants journalistes soit sans conséquence ?
– La nature des médias pousse à la superficialité
Argument certes connu, mais qui n’en est pas moins vrai. Moins de lecture, plus d’écrans. Moins de temps, moins de « rumination » (que conseillait Nietzsche), plus de papillonnage donc plus de lieux communs et de pièges conceptuels qu’une réflexion un peu plus approfondie donnerait une chance d’éviter
===> Comment la superficialité pourrait-elle être sans conséquence ?
– Les croyants deviennent plus rares, sans que les véritables athées se multiplient, mais plutôt au bénéfice du « marais » qui se trouve entre eux
Souvenir d’un sondage – je n’ai plus le lien – sur la croyance à l’astrologie et autres idées de ce genre, qui montrait qu’en France, les deux groupes les mieux protégés sont d’une part les catholiques pratiquants, d’autre part les athées convaincus, tandis que les personnes dont les positions sur le sujet sont intermédiaires, ou peu définies, sont particulièrement sensibles.
===> Il serait intéressant de savoir si la vulnérabilité aux explications complotistes elle aussi pourrait être maximale chez ceux qui à la religion ne disent ni « Oui », ni « Non »
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