Qui écrivait, en 2019 : « Rappelons que nous ne serons jamais à l’abri d’une épidémie inédite. » ? Et qui préconisait, dans le même texte écrit l’année dernière, le retour à la planification comme la clé de voûte d’une croissance maîtrisée au service des citoyens ? C’est Paul Jorion et Vincent Burnand-Galpin, dans le livre qu’ils ont intitulé « Comment sauver le genre humain », que nous avons salué lors de sa parution, en mars dernier. C’était juste avant « le confinement », et cela n’a pas aidé à la diffusion de ses idées.
Et voilà que l’épidémie a explosé. On en connaît l’étendue et les dégâts : sanitaires, humains, économiques et sociaux.
Et voilà que le Président de la République décide de revenir à la planification, abandonnée progressivement à partir des années 90, qui avait été l’un des principaux leviers de la croissance de la France après 1945, et de nommer, le 4 septembre dernier, François Bayrou haut-commissaire au plan.
Emmanuel Macron a-t-il lu le livre de nos deux auteurs ? Toujours est-il qu’il va dans leur sens, et d’autant mieux que l’idée de revenir au plan – qui germait sans doute – a fait son chemin dans quelques esprits éclairés, visant à fixer des caps collectifs (impliquant également l’individu) à moyen et long termes, dépassant la gestion à court terme, la navigation à vue répondant aux aspirations ou remous de l’opinion et les promesses liées à des échéances électorales, les unes et les autres allant à l’encontre de la définition et de la réalisation des grands projets nécessaires au pays.
Si Paul Jorion est un auteur reconnu de plus d’une vingtaine d’ouvrages, Vincent Burnand-Galpin, élève à Janson de Sailly de la classe de 4e aux classes préparatoires, est encore étudiant à l’ENSAE ParisTech et à Sciences Po, et auteur d’un seul livre, le Guide d’action du lycéen engagé. Dans ce guide, il plaide pour un engagement très précoce ; il l’illustre concrètement dans cette collaboration avec Paul Jorion.
Revenons donc, pour nous y attarder un instant, à ce plan qu’ils appellent de leurs vœux, et qui doit être accompagné, disent-ils, d’ « un véritable effort de guerre », comme celui dont avait été capable la France au lendemain de la 2nde guerre mondiale.
Le principe de base requis est la mise en place d’une économie dirigée au lieu de l’économie libérale qui prévaut. Il faut revenir à la planification étatique qui a longtemps été la règle, et tirer la leçon de toutes celles qui ont été mises en place, en France et ailleurs, pour l’optimiser dans le monde qui est le nôtre aujourd’hui. Plusieurs propositions concrètes s’ensuivent. Il faut réinventer l’État-providence en dissociant les droits sociaux du travail effectué. S’agissant de la meilleure façon de procurer un socle commun d’accès aux biens fondamentaux capables d’assurer une vie décente, les auteurs choisissent une avancée sociale très forte dont le coût doit être pris en charge par la collectivité, au travers de l’impôt et des différentes taxes : « Certains proposent le revenu universel, nous proposons la gratuité pour tout ce qui relève de l’indispensable : alimentation, logement, vêtement, santé, éducation, transports et, aujourd’hui, connectivité ». Pour un coût bien moindre que le Revenu Universel de Base, à l’abri de tout détournement, n’encourageant pas le consumérisme puisque centré sur l’indispensable et définissable avec précision.
Le plan qui va être mis en place correspondra-t-il aux vœux de nos deux auteurs ? Un véritable « effort de guerre » l’accompagnera-t-il, comme ils le prescrivent ? Nul doute qu’ils seront très attentifs à la mise en place de ce plan.
Pour notre part, nous recommandons vivement la lecture de leur livre aux élèves, anciens élèves et amis du lycée Janson de Sailly : ils y trouveront matière à une réflexion judicieuse – et peut-être décisive. C’est le vœu des auteurs.
Éric Blaisse, professeur de lettres honoraire au lycée Janson de Sailly
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