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Pour que tout le monde la voie, une réponse que je reçois à la question que je posais l’autre jour :
Vous avez dû remarquer comme moi, que dans un film doublé, les doubleurs, au lieu de parler normalement, parlent d’une voix robotique, détachant chacune des syllabes, n’exprimant aucun sentiment, comme si le sens des mots qu’ils prononcent leur échappait complètement. […] qu’est-ce qui peut expliquer cela ? Est-ce lié à la difficulté de faire coller un texte traduit à un mouvement des lèvres dans une autre langue ? Est-ce dû à la trop faible rémunération des spécialistes du doublage, qui les force à déjà penser à ce qu’ils feront tout à l’heure ?
« Par rapport à ces questions sur le doublage, je dirais que comme dans toutes les professions, artistiques ou pas, il y a des bons et des mauvais professionnels. Et il y a pour certains programmes, notamment les séries télé si abondantes, un budget et des délais restreints qui peuvent expliquer la mauvaise qualité d’une version française. Le doublage est une filière de diffusion aux mains des grands distributeurs et diffuseurs, qui suit en général une logique libérale : on paye le moins possible tous les professionnels dans la chaîne de fabrication, dans des conditions de travail précaires, au mépris de toute considération artistique ou simplement humaine. Et les plateformes telles que Netflix, Amazon Prime, Orange, Proximus TV, Black Pills, Fox TV et j’en passe, font tout ce qu’ils peuvent pour payer a minima les créateurs et détériorer les conditions de travail de tout le monde.
Cela dit, dans le doublage comme dans le reste du monde artistique, il y a des studios ou labos de doublage qui ont à coeur de faire une belle version française, des comédiens qui jouent leur texte, certes en lisant la rythmo (ce qui est une performance technique à acquérir, comme de monter sur scène et déclamer : il faut se former, s’entraîner, pratiquer ! seuls les pays francophones l’utilisent et la qualité de la synchronisation en a été fortement augmentée) mais en connaissant le rôle et le texte avant, en ayant répété et en y mettant tout leur savoir-faire et beaucoup d’énergie.
Il y a des dialoguistes qui passent du temps à peaufiner la traduction, avec quatre ou cinq relectures parfois d’interlocuteurs différents (le diffuseur, le réalisateur ou son assistant, un représentant de la société de doublage, le/la directeur/trice artistique, le coordonnateur avec les sous-titres…) Et il y a des ingénieurs son/mixeurs qui repassent sur le tout. C’est à cette étape-là qu’une bande son peut être enrichie ou appauvrie.
Quant au point spécifique de la rémunération des comédiens, là aussi, la question est la même pour tout le monde. Est-ce que le travail qu’on effectue est payé à sa juste valeur? Et si on a le sentiment de ne pas être assez payé, est-ce une raison pour le bâcler ou le bousiller ? Chacun gère cette question à sa manière, je pense qu’il y a des choix très différents, selon les individus. J’ai vu des comédiens se donner à fond, dans des conditions très mauvaises. N’est-ce pas pareil au théâtre ? D’ailleurs, les comédiens de doublage sont à 95% des comédiens de théâtre. »
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