En temps ordinaire, si vous prêtez de l’argent pour 2 ans, on vous versera disons 2% d’intérêts, et si vous prêtez pour 5 ans, disons 3% d’intérêts.
Ce sont des chiffres « comme ça », mais vraisemblables, en temps ordinaire.
Les économistes vous expliquent que si l’on paie davantage d’intérêts quand vous prêtez pour une plus longue période que pour une courte, c’est pour compenser votre souffrance : « vous vous privez » de la somme prêtée pour plus longtemps et votre douleur sera allégée à la pensée que vous recevrez davantage de sous.
Cette explication est bidon : si vous prêtez une somme X, c’est précisément parce que cela ne vous prive en rien du tout, parce que si vous en aviez vraiment besoin, vous l’utiliseriez à quelque chose d’utile, comme manger. Les gens qui prêtent de l’argent, c’est parce qu’ils ne savent pas quoi en faire – un enfant de 5 ans sait ça.
Une explication plus convaincante est que celui à qui vous prêtez pourra gagner plus d’argent lui-même en disposant de la somme pour plus longtemps. Pourquoi ? Parce que, comme le disait Proudhon, primo, la nature nous offre des « aubaines » : les plantes dans un champ poussent toutes seules, sans que nous devions les pousser, les veaux dans un pré poussent tout seuls en mangeant de l’herbe, une mine de fer contient du fer que l’on peut aller chercher en creusant, etc., deuzio, parce que les hommes et les femmes unissent leurs efforts et qu’en unissant leurs efforts, ils obtiennent plus qu’en travaillant tout seuls, toujours Proudhon dixit : « 200 grenadiers dressent en une heure l’obélisque de la place de la Concorde, alors qu’un seul grenadier en 200 heures n’y arrive pas ».
Donc il est « normal » que l’on verse davantage d’intérêts si le prêt est pour une durée plus longue.
Comment est-il possible alors que, comme depuis ce matin (voir l’image ci-dessus), les intérêts pour un prêt américain de 10 ans soient moindres que pour 2 ans ?
Ce n’est pas parce que les prêteurs auraient soudain déterminé qu’ils souffriront moins d’être privés de leur magot pour 10 ans que pour 2, mais parce qu’ils pensent qu’on pourra tirer proportionnellement moins d’aubaines du monde autour du nous, et du travail conjoint des travailleurs et des machines, dans la période qui va de dans 3 ans à dans 10 ans, que dans les deux années qui viennent. Autrement dit, ils pensent que si les choses vont encore aller plus ou moins bien dans les 2 années qui viennent, elles risquent d’aller mal au-delà.
C’est-à-dire – et c’est ça qui est très intéressant dans la Bourse qui plonge aujourd’hui – que si les « marchés » (= en français : « les gens qui ont des sous à ne ne pas savoir qu’en faire ») prétendent que Greta Thunberg est une petite péronnelle que ses parents devraient garder à la maison parce qu’elle n’est pas bien dans sa tête et pour qu’elle n’embête pas les gens sérieux avec ses balivernes apocalyptiques, ils lui donnent cependant raison en leur for intérieur.
Voilà pourquoi « les marchés dépriment », que la Bourse plonge aujourd’hui et que votre fille est muette.
« Qui peut le plus peut le moins » avait dit jadis Aristote. En appliquant ce principe il est normal que certains…