À propos de Patrick Artus, Discipliner la finance, Paris : Odile Jacob, 2019. Ouvert aux commentaires.
L’idée centrale de ce livre est que l’accroissement du poids de la finance par rapport à l’économie réelle accroît fortement le risque de crise. Alors que dans le passé, c’étaient les chocs de l’économie réelle qui influençaient la sphère financière, ce sont aujourd’hui les chocs financiers qui conduisent au dérèglement de l’économie réelle.
La dynamique de la globalisation de l’économie réelle s’est arrêtée et elle commence à s’inverser tandis que la crise financière de 2008-2009 n’a pas mis fin à la globalisation de la finance. On observerait ainsi une tendance avec la relocalisation de la production auprès de l’acheteur final des biens et services. On assiste à une « désegmentation » des chaînes de valeur. Elle résulte :
- d’une demande accrue en flexibilité venant des entreprises
- de la hausse des coûts de production dans les pays émergents
- une demande croissante des Etats pour que le « contenu local » des biens achetés soit important. C’est le retour du protectionnisme de l’économie réelle.
Pour la sphère financière, pourquoi ne cesse-t-elle de grandir ? Vieillissement de la population et préparation de leur retraite ; forte demande mondiale mondiale pour les dettes sans risque ; le rôle de banquier du monde des Etats-Unis ; les politiques monétaires expansionnistes ; la nécessité de maintenir des taux d’intérêt bas.
Il montre en suite que le développement excessif de la finance appauvrit les populations. Il recense les différentes causes de l’appauvrissement du Royaume-Uni notamment dû à la taille anormalement élevée de la finance : l’évasion fiscale et l’apparition des paradis fiscaux, les rentes de monopole des banques, le fait que les capitaux spéculatifs ont financé les bulles immobilières par des activités productives, le développement des places offshore, le coût excessif de l’intermédiation financière, les fraudes,…
Il fait ses pronostics sur la prochaine crise financière. Ce sera, dans les pays de l’OCDE, une crise des dettes publiques ; une crise de la dette extérieure des Etats-Unis ; dans les pays émergents, une crise due à des sorties massives de capitaux ; en Chine, de l’incapacité à maintenir des taux d’intérêt très bas, seule possibilité pour éviter une crise massive de solvabilité des emprunteurs.
Il souhaite enfin donner des pistes possibles pour éviter ces crises à répétition :
- obtenir des banques centrales qu’elles sortent des politiques monétaires expansionnistes dans les périodes de croissance économique ;
- réduire les mouvements des capitaux internationaux en réhabilitant les contrôles des capitaux en particulier dans les pays émergents pour éviter l’instabilité des taux de change ;
- Pénaliser, réglementairement et fiscalement, les actifs et instruments financiers liquides ;
- obtenir des Etats-Unis qu’ils renoncent à profiter du rôle de monnaie de réserve dominante en abandonnant la politique de déficit extérieur constant qu’ils ont menée depuis les années 1970 ;
- Privilégier les financements à long terme stables.
(suite) (« À tout seigneur tout honneur ») PJ : « il n’est pas exclu du tout que je me retrouve dans la…