Retranscription de Ma candidature aux élections européennes : le point, le 16 avril 2019. Ouvert aux commentaires.
Bonjour, nous sommes le mardi 16 avril 2019 et, aujourd’hui, je vais vous parler, je vais faire le point sur ma candidature aux élections européennes.
Je vais commencer par vous dire comment tout ça a débuté. Je vous l’ai dit, à l’époque, c’était il y a plus d’un an, j’étais assis devant la Gare du Nord à Paris et un monsieur est venu s’asseoir à côté de moi, apparemment délibérément puisqu’il a engagé aussitôt la conversation et m’a dit : « Vous êtes M. Jorion ». Il s’est présenté en disant qu’il était commissaire européen et, en quelques minutes – parce qu’il avait un train à prendre et moi aussi – il a dit « Nous avons besoin de gens comme vous au Parlement européen ». Il m’a donné bien entendu son numéro de téléphone : « Il faut que l’on en parle plus longuement ». Il se faisait que j’allais à Bruxelles quelques jours plus tard, la semaine suivante si j’ai bon souvenir. Il m’a invité à déjeuner et nous avons bavardé. Ce monsieur m’a convaincu ce jour-là que ce ne serait pas une mauvaise idée que je sois au Parlement Européen.
Il ne se faisait aucune illusion sur ce que l’on peut faire au Parlement européen, moi non plus. J’y suis déjà allé. J’ai été invité au titre d’expert un certain nombre de fois. Je sais comment ça marche. Je sais que l’on ne prend pas de décisions, que ce n’est pas de l’exécutif. C’est plutôt de l’ordre du consultatif mais comme je n’ai jamais eu l’intention dans ma vie de devenir ministre ou de donner des ordres d’une manière ou d’une autre, ou de devenir l’empereur de l’Europe ou du monde en général, ça ne va pas beaucoup me frustrer. Par contre, de gueuler, de dire que je ne suis pas d’accord, de dire qu’il y a des idées importantes que l’on peut encore mettre en œuvre, ça oui. Là, je sais que c’est une caisse résonnante pour le faire.
J’ai vu M. Nigel Farage, qui est un pitre, et dont je sais que, la prochaine fois, il y aura 20 pitres comme lui qui seront là à essayer de saboter les choses et je sais, je vous l’ai déjà dit, que j’étais un peu déçu de voir que le président de séance ne le remettait pas à sa place. Je me suis dit que, moi, j’aurais su comment le faire et que j’aurais pu lui répondre et qu’il aurait fini par se taire.
Voilà ! Tout ça m’a encouragé. J’en ai discuté, toujours devant vous, dans un dialogue. Vous avez fait vos commentaires. J’ai eu l’occasion de voir des personnes qui m’ont donné des avis là-dessus. Tout récemment, un petit groupe s’est constitué autour de moi, de 3 personnes extrêmement efficaces. Nous avons fait pas mal de choses. Vous avez dû voir qu’ils m’ont aidé énormément non seulement sur les textes à rédiger mais aussi dans la stratégie à développer.
Alors, où est-ce que nous en sommes ?
Je me suis présenté, vous avez vu à quel endroit. J’ai sympathisé avec Claire Nouvian quand on s’est trouvés tous les deux à Bordeaux, à être sur le même panel. Son nom me disait quelque chose et je me suis souvenu que quelques jours auparavant, elle avait créé avec Thomas Porcher et Raphaël Glucksmann un mouvement et je me suis rallié devant tout le monde à ce mouvement. Ce mouvement était en discussion avec le Parti socialiste. Il l’est toujours.
J’avais eu l’occasion, ce n’est un mystère pour personne, de rencontrer des personnes comme Paul Magnette que j’aime beaucoup, et je crois qu’il a l’amabilité de m’aimer bien aussi. J’avais eu l’occasion de rencontrer M. Olivier Faure, Mme Pervenche Berès qui est la personne qui m’a invité plusieurs fois à Bruxelles et ainsi de suite. Je connaissais déjà un petit nombre de gens de ce milieu-là et l’idée de Parti socialiste ne me faisait pas fuir en courant.
Ce matin, vous savez ce qu’il s’est passé hier dans la soirée : quand je vous dis que l’idée de rebâtir quelque chose de grand qui s’est effondré, ça m’a parlé. Vous êtes nombreux, nous en avons discuté sur le blog pendant toute la soirée hier, vous étiez comme moi, nous avions envie de bavarder autour de ça, de la destruction de ce grand monument. Il y a des monuments qui sont construits pour essayer d’assurer l’avenir d’une illusion. Vous avez entendu, c’est le titre d’un livre remarquable de Sigmund Freud, un de mes maîtres à penser. Il n’est pas mal non plus de construire des monuments, des choses qu’il faut encore faire et autour d’idées qui sont de bonnes idées. L’idée de socialisme, tout le monde le sait, j’ai été Étudiant socialiste à partir de l’âge de 15 ans. Pourquoi j’étais socialiste ? Essentiellement parce que le choix, à l’époque, était être Étudiant communiste ou être Étudiant socialiste et, là, il y avait quelque chose dans le communisme soviétique qui m’est toujours resté en travers de la gorge, déjà à l’âge de 15 ans, et puis c’est resté comme ça.
Le socialisme, ce sont les noms de ces « socialistes utopiques ». Ce sont ces « socialistes petits bourgeois ». Ce sont ces « socialistes bourgeois ». Ce sont ces « socialistes chrétiens ». J’emploie tous les termes plus ou moins paternalistes, condescendants et insultants que Mrs Marx et Engels ont utilisé à leur propos. Ce sont mes véritables maîtres. J’ai encore signalé certains qui sont du côté de l’anarchisme comme Reclus, Proudhon, Bakounine, Kropotkine, des gens qui ont réfléchi à l’entraide et à la solidarité.
Ce sont les idées qui vont venir. Ce sont les idées qu’il faut mettre en place tout de suite. Je vous rappelle que les grands ennemis – des gens extrêmement dangereux pour le socialisme – comme M. Schumpeter, M. Von Hayek, ces gens-là étaient convaincus, je vous le rappelle, de mener un combat d’arrière-garde, que le socialisme vaincrait un jour et ces personnages-là étaient convaincus que tout ce qu’ils pouvaient faire, c’était retarder la venue inéluctable du socialisme.
Si nous voulons le faire advenir, il faut aller vite parce que l’humanité est menacée d’extinction. C’est l’autre jour, une discussion avec des étudiants, si j’ai bon souvenir, des étudiants de ParisTech qui voulaient que je m’entretienne avec eux, qui m’ont donné des chiffres que je ne connaissais pas encore. Ils se reconnaîtront peut-être. 2100. J’avais des chiffres, disons 2200 certainement, en raison de la chaleur. Là, ils me donnent un chiffre sur la disparition de la capacité du plancton à faire les échanges gazeux. C’était 2100. Donc, c’est tout près. Il y a des gens qui nous parlent d’immortalité. Que vont faire des gens immortels dans un monde où il n’y a plus moyen de survivre ? Il faut encore bouffer pour rester immortel.
Rebâtir une cathédrale ou construire une cathédrale, à faire, ce n’est pas une idée qui me dérange. On me dit « Le Parti socialiste, ça ne représente plus rien du tout ». Justement, le mot est toujours là. Le mot a de l’avenir, je vous le dis, même chez ces néolibéraux enragés. Il y a des choses à faire. Il faut les faire maintenant. Nous n’avons pas pu le faire à l’époque où ces idées sont apparues, dans la 1ère moitié du XIXème siècle. C’est Proudhon qui a dit « Un enfant mort-né » à propos de la révolution sociale qui était la venue du socialisme. Il est temps de le faire. Il n’est pas trop tard mais il est temps. Il faut le faire maintenant. Le fait qu’il n’y ait pas de structure, pour moi, cela ne fait aucune différence.
Alors, est-ce que Place Publique va vouloir que je sois au Parlement européen ? Est-ce que le Parti socialiste français va vouloir que je sois au Parlement européen ? Ou qui que ce soit d’autre ? Là, je dois vous dire, très honnêtement, aujourd’hui, je n’en ai absolument pas la preuve. Je n’ai pas le sentiment qu’il y ait, ni d’un côté, ni de l’autre, une grande houle d’enthousiasme pour me porter là. Il y a des discussions entre ces personnes. Jusqu’ici, personne ne m’a envoyé de lettre. Personne ne m’a envoyé de mail. Personne ne m’a donné de coup de fil. Je ne sais pas ce qui va se passer. Vous avez eu l’amabilité, vous êtes 2.800, de voter sur cette pétition qui attire l’attention de Place Publique et du Parti socialiste, sur le fait qu’il faudrait me mettre sur la liste. Est-ce que cela aura le moindre impact sur ce qui se passera ? Je n’en sais rien. Je vous remercie en tout cas de l’avoir fait. Cela continue : vous continuez à voter – je ne sais pas, de l’ordre d’une cinquantaine par jour – pour que cela ait lieu mais est-ce que ce sera entendu où que ce soit ? Je n’en ai pas la moindre idée.
Voilà, en tous cas, vous, de votre côté, la petite équipe autour de moi et moi-même, nous avons fait ce que nous pouvions pour que cela se passe. Si cela ne se passe pas, tant pis. Comme je vous l’ai dit, je n’en ferai pas une maladie. J’ai des tas d’autres moyens de continuer à me faire entendre et j’en découvre, comme vous le voyez, de nouveaux tous les jours ! Ce n’est pas cela qui manque. Pour le moment, ce n’est pas l’énergie non plus. Je sais aussi que si je veux me présenter, pour être un parlementaire digne de ce nom, il faut que je le fasse cette fois-ci. J’ai 72 ans. La prochaine fois, j’en aurai 77. La prochaine fois, je vous le promets, j’en suis certain, bien que je sois en excellente santé maintenant, je ne me présenterai pas dans 5 ans. Cela n’a pas de sens. A ce moment-là, je trouverai peut-être vraiment autre chose à faire. J’aurai peut-être envie de faire autre chose. Je n’aurai peut-être plus les moyens. Vous le savez, la santé, même si la Faculté me dit en ce moment que l’on ne sait pas de quoi je pourrais un jour souffrir parce qu’il n’y a aucune indication, dans aucun sens, dans 5 ans, ce ne sera probablement plus vrai. Et même si c’était encore vrai, cela perdrait beaucoup de sa plausibilité de jour en jour.
Voilà où nous en sommes. Merci à vous pour ce que vous avez fait. Merci à vous pour ce que vous pouvez encore faire, Dieu sait ! Mais voilà, il y a quelque chose à faire et, d’une certaine manière, cela tombe bien que je doive en parler maintenant, quand cette image de quelque chose à bâtir, à reconstruire, a un sens tout particulier. Je vous ai souvent parlé de ce film, si vous avez l’occasion de le voir, c’est un grand film des années 30. J’ai oublié le nom du metteur en scène [W. S. Van Dyke]. C’est un des grands metteurs en scène. Les acteurs, ce sont Clark Gable, Spencer Tracy, Jeanette MacDonald. C’est un film qui s’appelle San Francisco. San Francisco, je vous le rappelle, quand il y a eu cet incendie extraordinaire, je confonds toujours les dates, je ne sais jamais si c’est 1905 ou 1909 [c’est en 1906 !], quand San Francisco a disparu entièrement, a été rayée de la carte. Au départ, c’était le tremblement de terre mais, après, c’est essentiellement l’incendie. Pourquoi ? Il y avait le gaz et les tuyauteries de gaz ont sauté absolument partout et la ville a été détruite par un immense incendie. Je vous parle de cela parce que, justement, et ça parle aux évènements d’hier, le film se termine sur une note extraordinairement optimiste au point qu’il y a manifestement dans ce film américain des années 30, une évocation des films faits un peu avant par Eisenstein en Union Soviétique [au point que ces Californiens ressemblent étrangement à des Russes !]. Il y a quelque chose dans cet enthousiasme de la fin, quand on voit que l’incendie s’est éteint et quand on voit la foule qui se lève pour aller rebâtir, il y a là quelque chose d’extrêmement émouvant et qui démontre que notre humanité, notre genre humain, qui est capable du pire – vous n’avez pas besoin d’exemples, je peux vous en fournir, vous les connaissez – mais est aussi capable du meilleur. Il y a des tâches à faire. On ne peut les faire que quand on est vivant. Une fois que l’on est mort, c’est beaucoup plus compliqué. (Je ne crois pas que l’on puisse le faire après !).
Voilà : le point sur ma candidature aux élections européennes. Merci pour votre soutien. Merci pour ce que l’on va peut-être encore faire et à bientôt. Je vous tiens de toute manière au courant.
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