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Je propose un simple test de réalité de la volonté politique de nos dirigeants : le budget de l’État.
Le premier ajustement budgétaire et fiscal d’un gouvernement sérieux avec la transition écologique et solidaire.
« Une étude commandée par le WWF démontre que l’État belge distribue chaque année au moins 2,7 milliards € d’avantages fiscaux pour les énergies fossiles (pétrole, kérosène, mazout, gaz), cause majeure du changement climatique, dans deux domaines de notre vie quotidienne : le logement et la mobilité. Étant donné le manque de transparence de l’État sur les montants exacts alloués aux énergies fossiles, cette somme est sans doute encore plus élevée. »
La situation est comparable en France et ailleurs dans le monde.
On ne peut que constater que les ressources entières de la société (RH, budgets publics, investissements privés, R&D, accompagnement public, espace médiatique, etc.) sont davantage tournées vers le renforcement et le maintien du « système » que vers sa transition écologique et solidaire.
Dès lors il n’est nullement étonnant que, d’un point de vue général, la dynamique du système sociétal continue à le diriger vers la catastrophe environnementale, économique et sociale. On ne devrait nullement s’étonner de l’inertie générale du système à partir du moment où ses drivers principaux sont entretenus volontairement à coups de milliards et que les drivers de la transition vivotent à coups de petits subsides précaires.
Nous ne détruisons pas seulement la Biosphère et le climat, ainsi que la santé et la tranquillité des gens, par inadvertance, nous subsidions massivement cette destruction avec l’argent public : transport en voiture, en avion, chauffage mazout, éclairage public, alimentation carnée, étalement urbain, achat d’équipements sont, d’un point de vue économique, massivement « subsidiés », dans le sens où leurs externalités négatives ne sont pas internalisées, ou dans le sens propre. Par ailleurs, les alternatives durables sont, d’un point de vue économique, massivement « taxées », dans le sens où leurs externalités positives ne sont pas internalisées, ou dans le sens propre. Tous les domaines précités jouissent comparativement de beaucoup plus de moyens publics (RH, budgets publics, investissements privés, R&D, accompagnement public, espace médiatique, etc.) que les alternatives correspondantes de transition.
Le fait que je paie mes impôts et que je roule en vélo dans une infrastructure qui veut ma mort, est une forme de « taxation » indue. Le fait que mon voisin prenne l’avion pour aller en weekend à Ibiza 3 jours avec Ryanair à bas prix, est une forme de « subsidiation » indue.
De nombreuses ONG et initiatives de transition locale vivotent avec quelques permanents, de nombreux burnouts et une incertitude quant à leur financement futur. Alors que si on prenait la transition au sérieux, chaque pays se doterait d’une Agence nationale de la transition écologique et solidaire, avec un budget de plusieurs milliards et des milliers d’employés déployés partout sur le territoire, pour accompagner la transition. En face, chez la concurrence, additionnez les moyens de la R&D, des investissements, des lobbyistes du complexe automobile, du complexe agro-alimentaire (dont celui de la viande) et du complexe de la construction (et de la villa 4 façades T&P). Moyens privés ET publics !
Comparez les milliards investis dans l’aviation via des subsides publics aux aéroports et aux centres logistiques, et les moyens misérables consacrés aux pistes cyclables. L’investissement dans l’infrastructure/R&D/accompagnement/appui dans le logement/mobilité/alimentation (pour reprendre 3 domaines majeurs d’émissions de GES), est une gigantesque opération de « non internalisation des externalités », puisqu’on privilégie l’investissement dans les « solutions du passé » plutôt que dans celles du futur.
Je comprends parfois les économistes classiques quand ils disent : en fait, nous, on a la solution depuis longtemps : le problème environnemental serait réglé depuis longtemps si on appliquait nos théories : c’est-à-dire si on internalisait les coûts et bénéfices externes dans les prix.
On voit bien que c’est très très très loin d’être le cas. La simple application des principes des théories économiques classiques suffirait déjà à faire baisser les émissions : ainsi taxer le kérozène et le chauffage mazout comme les autres carburants (ça irait évidemment de part avec des aides à l’isolation massives)
Bref, le test de réalité de la transition écologique et solidaire, c’est le budget de l’État, des pouvoirs publics et leur fiscalité. Tout citoyen devrait exiger qu’on lui présente deux colonnes dans le budget et les impôts : colonne 1) budget ou impôt qui contribue à la destruction de la Biosphère 2) budget ou impôt qui contribue à la protection de la Biosphère. Et se demander ensuite : combien de milliards dans la colonne 1), combien de milliards dans la colonne 2) ? Cela donnerait une idée immédiate, même si grossière, du rapport de force entre « drivers de la catastrophe environnementale, économique et sociale » et « drivers de la transition écologique et solidaire ». Le reste, les discours et les vœux pieux des politiques, me semblent du blabla. Et le citoyen ne doit pas s’y fier.
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