Retranscription de Démission de Donald Trump : derniers préparatifs !, le 9 décembre 2018. Merci à Eric Muller et Olivier Brouwer ! Ouvert aux commentaires.
Bonjour, nous sommes le dimanche 9 décembre 2018, et aujourd’hui, mon entretien s’intitulera : Démission de Donald Trump : derniers préparatifs !
Hier, il y avait beaucoup de documents à lire, je n’ai pas encore terminé de les lire tous, mais je vais quand même vous faire un peu le point. J’avais fait un tout petit billet sur mon blog pour expliquer que j’étais en train de lire, et je faisais référence à un article de M. Garrett Graff [The Mueller investigation nears the worst case scenario]. Je ne sais pas si je vous ai déjà montré ce livre, mais c’est un livre excellent de M. Garrett Graff : The Threat Matrix, The FBI at war in the age of global terror. (J’ai un peu de mal à le lire parce que je le lis à l’envers !) En fait, c’est une histoire du FBI sous la direction de M. Robert Mueller. C’était l’époque où le FBI était dirigé par lui, et c’était l’époque, essentiellement, où le FBI s’est mis à s’intéresser à des questions de terrorisme effectivement, en particulier du fait qu’il y avait eu un acte de terrorisme de taille monumentale sur le territoire des États-Unis, je parle bien entendu de la destruction des deux tours jumelles à Manhattan.
Ce monsieur Garrett Graff écrit dans… fait des chroniques sur l’affaire Trump dans le journal-magazine qui s’appelle Wired – qui est donc le journal-magazine de référence des nerds et des geeks – articles d’excellente qualité que je lis en général avec beaucoup d’attention – le livre aussi mérite votre attention – et donc ce monsieur Graff, dans son dernière article, faisait référence à une échelle à sept niveaux qu’avaient établie, dans un article publié il y a à peu près un an, deux journalistes qui s’appellent Monsieur ou Madame – je n’ai pas fait attention aux prénoms, excusez moi – Jurecic et Wittes [Quinta Jurecic & Benjamin Wittes, 2 août 2018, Seven Theories of the Case, Updated: One Year Later, What More Do We Know About L’Affaire Russe?] où ils avaient établi une échelle dans la gravité de ce qu’on pourrait découvrir de collusion, ou non, entre l’équipe Trump et la Russie.
Ça commençait au plus bas niveau :
- Premier niveau : Que des coïncidences !
- Deuxième niveau : Les russophiles américains, il se trouve qu’ils aiment beaucoup Trump !
- Troisième niveau : Les Russes ont fait des ingérences dans la politique américaine, mais l’équipe Trump n’était pas au courant.
- Quatrième niveau : Ils étaient au courant.
- Cinquième niveau : Non seulement ils étaient au courant, mais ils jouaient un rôle actif dans les ingérences russes – c’est-à-dire, qu’ils servaient d’alliés.
- Sixième niveau : Monsieur Trump est l’otage des Russes, il est compromis pour une raison X ou Y.
- Et septième niveau : Haute trahison – Il se fait que M. Trump est un agent russe depuis un certain temps.
Alors, ce que M. Graff disait, c’est qu’on était sans aucun doute au niveau cinq. Il expliquait pourquoi, c’est-à-dire : « ingérence russe dans la politique américaine » et « participation active de l’équipe Trump ». Il laissait en blanc le fait que M. Mueller a peut-être encore dans ses documents ce qui permettrait d’établir le niveau six ou le niveau sept.
Alors je vais d’abord dire un mot de ces niveaux six et sept.
Niveau 6 : M. Trump compromis du côté russe. Vous vous en souvenez peut-être, on a parlé il y a un peu plus d’un an d’un rapport Steele. [Christopher] Steele est un ancien espion britannique qui avait fait un rapport à la demande du Parti démocrate sur ce qu’on pouvait savoir d’une collusion éventuelle de M. Trump avec la Russie.
C’est un rapport assez long, c’est une trentaine de pages si j’ai bon souvenir [35 pages]. Tout ce qu’il y a là-dedans n’est pas du même intérêt, mais ce qu’il faut noter, c’est que la plupart des choses qu’on ne pouvait pas savoir avec exactitude au moment où le rapport Steele est sorti, et si j’ai bon souvenir c’est au début de l’année 2017 [10 janvier 2017], la plupart des choses qui se trouvent dans ce rapport ont été vérifiées depuis.
Donc, l’information était de bonne qualité. Il y a des choses qui ne sont pas vérifiées parce que l’actualité a changé. Voilà : je dirais que les choses qui n’ont pas été vérifiées, c’est parce que des événements sont intervenus, d’une autre nature, qui ont empêché que des scénarios envisageables se déroulent, mais la seule chose qui n’a pas été vérifiée depuis, c’est la documentation qui porte sur une compromission… de faits compromettants vis-à-vis de M. Trump à l’époque d’un de ses voyages en Russie – où il aurait voulu que se passe quelque chose de bien particulier : dans le lit que M. Obama avait occupé à l’époque où il se trouvait à Moscou, M. Trump aurait demandé à des prostituées d’uriner sur ce lit. C’est cette chose-là qui n’a pas été vérifiée depuis, mais comme je le souligne, c’est peut-être la seule chose dans le rapport Steele qui n’a pas été vérifiée.
Les Russes auraient filmé ça, et donc auraient des choses compromettantes à ce propos-là. Ceci dit, il y a d’autres possibilités : deux livres que je n’ai pas descendus là mais que j’aurais pu vous montrer aussi, deux livres sont consacrés à l’ensemble des relations de M. Trump avec la mafia russe au fil des années, en particulier du blanchiment d’argent sale [l’un est le livre de Craig Unger sur lequel je reviens plus loin, l’autre est Russian Roulette. The Inside Story of Putin’s War on America and the Election of Donald Trump (Roulette russe. Les dessous de la guerre menée par Poutine contre l’Amérique), Twelve Books 2018], et il est possible qu’à cette occasion-là aussi, les Russes aient des documents compromettants vis-à-vis de M. Trump – là, ce serait d’un point de vue commercial.
Et, autre chose qui est imaginé aussi, ce qu’on appelle le « kompromat doux » dans la littérature journalistique américaine. Ce serait une autre chose encore, ce serait le sentiment de M. Trump, sans en avoir de preuves, que les Russes ont des choses qui peuvent le compromettre, mais sans qu’il sache exactement quelle en est la nature et sans même peut-être que les Russes aient manifesté la moindre menace de ce côté-là. Mais il pourrait penser qu’il existe un chantage parce qu’il faut toujours expliquer l’attitude de M. Trump vis-à-vis de M. Poutine lors du rendez-vous d’Helsinki. Vous vous souvenez sans doute que, juste avant, je vous avais fait part d’informations de la part de Mueller, des accusations de la part de Mueller qui avait d’une certaine manière tendu un piège à Trump en disant : « Voilà ce que nous disons et on va voir, on va voir dans les jours qui viennent – ce n’était pas dit explicitement du tout – mais on va voir comment il va se conduire, s’il confirme ou non la thèse d’une compromission» et là, l’attitude, je dirais, ça a frappé tout le monde – même des partisans, je dirais, fanatiques de M. Trump – qu’il s’est couché, qu’il s’est conduit de manière obséquieuse, qu’il s’est conduit de manière, je dirais, indigne et gênante vis-à-vis de M. Poutine – comme si c’était son patron – devant les caméras de la presse internationale, et donc, je vous avais souligné que si la commission Mueller, à l’époque, voulait mettre quelque chose en évidence, c’était bien possible que ça ait eu lieu à ce moment-là. Voilà.
Il n’est pas impossible non plus, et ça c’est dans le livre, je ne me souviens plus, « Unger » je crois que l’auteur s’appelle Unger, qui s’appelle House of Putin, House of Trump (Maison de Poutine, maison de Trump) [Craig Unger, House of Trump, House of Putin. The Untold Story of Donald Trump and the Russian Mafia, Penguin 2018] et dans lequel il apporte une documentation quand même extrêmement détaillée sur le fait que M. Trump aurait pu carrément devenir un agent, ce serait tchèque à ce moment-là, en raison du voyage qu’il avait fait en Tchécoslovaquie, mais un voyage au retour duquel, dans les années 80 – ça ne date pas d’aujourd’hui, ça date de plus de 30 ans – dans les années 80, M. Poutine, euh pardon, je les confonds toujours, M. Trump est revenu d’un voyage et a acheté (j’en ai parlé [le 10 septembre 2018 dans Le Monde et l’Écho]) a acheté pour cent mille dollars de l’époque, des années 80, une page entière dans le Boston Globe, dans le New York Times et dans le Washington Post, où il défendait, de manière, je dirais, lumineuse (c’était presque du copier/coller) la politique russe par rapport à l’Otan.
Donc, là, il y a quand même aussi quelque chose d’assez extraordinaire qui pourrait suggérer non pas que M. Trump est compromis du côté de ce qui était à l’époque l’URSS, le monde communiste, mais que il aurait pu devenir un agent à cette époque puisque, de manière je dirais tout à fait spectaculaire et tout à fait inattendue pour un promoteur immobilier, il se lance dans la politique par une grande déclaration qui fait une page et qui est simplement une reproduction de la politique de l’URSS à l’époque en matière internationale.
Donc, on n’a pas éliminé complètement l’hypothèse six et sept, six : « Compromission » et sept : « Agent russe ». Moi, depuis quelques semaines, je vous émets l’opinion suivante, l’hypothèse suivante : On n’a pas intérêt aux États-Unis, ni au niveau de la CIA ni au niveau du FBI, à ce qu’apparaisse que le pays est dans un tel état qu’un agent russe est devenu président de la république. Ni, non plus – ce n’est pas bon pour l’image, soyons d’accord – qu’apparaissent des preuves des situations compromettantes dans lesquelles s’est trouvé M. Trump, et donc on le pousse, on le pousse vers la sortie alors qu’on est sur l’échelle à sept niveaux, on est au niveau cinq, c’est-à-dire « collusion effective » : campagne russe d’ingérence dans la politique américaine et collaboration enthousiaste de l’équipe Trump à différents niveaux, qu’il s’agisse de M. Jared Kushner, le gendre, qui demande à ce qu’on établisse un canal parallèle de communication [avec la Russie], qu’il s’agisse de M. Donald Trump Jr., qui dit : « Formidable ! » quand les Russes proposent des informations compromettantes à propos de Hillary Clinton, et ainsi de suite.
Alors, est-ce que j’ai des choses pour soutenir l’hypothèse de la démission ? Eh bien oui, effectivement, dans les jours récents – avant-hier et hier – le fait que soit apparu dans les déclarations autour du procès qui va être fait à M. Manafort pour ne pas avoir respecté le plea deal, pour avoir trahi l’accord de coopération en mentant délibérément, il est mentionné le fait qu’il a témoigné déjà deux fois, M. Manafort, devant un grand jury. Alors, je vous rappelle ce que c’est un grand jury aux États-Unis : avant d’inculper quelqu’un pour une affaire sérieuse, pour un délit, pour un crime, on réunit un jury, et le jury va déterminer si il y a lieu de poursuivre.
Alors, posons-nous la question: dans le cadre de quelles inculpations éventuelles M. Manafort aurait pu intervenir. Il y a une hypothèse douce, c’est qu’il s’agirait de M. Roger Stone. M. Roger Stone, c’est la personne dont il apparait qu’il a été en rapport étroit avec WikiLeaks pour la diffusion d’informations dommageables au parti démocrate, sous la forme de mails piratés de Mme Clinton.
Ce monsieur Roger Stone a été un associé de Manafort, et il y a une photo (je vous l’ai déjà montrée [et la revoici]) ils sont jeunes, ce sont des jeunes communicants du parti républicain, et ils travaillent à trois, (avec un troisième qui est mort rapidement, mort jeune et qui a disparu, bien entendu, de la circulation du point de vue de l’actualité [Lee Atwater]), mais on voit très bien un jeune M. Manafort, un jeune M. Roger Stone. Il est possible qu’on ait fait témoigner M. Manafort à propos d’une inculpation possible de M. Roger Stone, encore que, dans les années récentes, il n’y ait pas de rapport direct entre les uns et les autres.
On pourrait de manière beaucoup plus plausible imaginer que M. Manafort… qu’on lui aurait demandé son témoignage à propos d’une inculpation possible de Donald Trump Jr., parce qu’ils se sont trouvés ensemble dans cette fameuse réunion dans la Trump Tower, dans l’immeuble appartenant à Trump, où ils ont rencontré des émissaires russes qui promettaient que, durant cette réunion, des informations importantes, qui plus est dommageables à Madame Clinton, seraient échangées. L’équipe Trump se défend par rapport à cela en disant que, finalement, aucune information importante n’a été échangée, mais, comme vous le savez, tout particulièrement en droit américain, l’intention, l’intention doleuse compte aussi. Si c’était dans un but de conspiration que les gens se sont réunis, et même si aucune information importante n’a été transmise, on pourrait quand même avoir un cas criminel.
Donc, M. Manafort a peut-être témoigné à propos d’une inculpation possible de M. Donald Trump Jr., le jeune, qui avait manifesté son enthousiaste avant cette réunion – pour qu’elle ait lieu – et durant la réunion. Il est possible aussi que la personne qu’il s’agirait d’inculper – et dont on a demandé le témoignage de M. Manafort – ne soit ni Roger Stone ni Donald Jr., mais soit Donald lui-même.
Et cette information que Manafort a témoigné ferait partie, je dirais, de faire monter la pression autour de Trump pour qu’il se retire avant qu’on ne doive sortir, je dirais, les pièces les plus chaudes, mais aussi les plus gênantes pour la gestion d’un pays, en termes de « président compromis vis-à-vis d’une puissance étrangère hostile », ou carrément : « agent d’une puissance étrangère hostile ».
Et dernier élément qui va dans le sens de soutenir l’hypothèse d’une démission proche de M. Trump, le fait qu’on prenne des mesures en fonction de cela. M. [John] Kelly, qui est depuis pas mal de temps le Chief of Staff (il est directeur de cabinet de M. Trump à la Maison Blanche), on l’a fait venir, un général, on l’a fait venir mettre un peu d’ordre dans l’équipe autour de Trump. Le problème ne se pose plus – parce que, vous l’avez bien compris, Trump c’est pas un type qui a une équipe autour de lui – mais il va être remplacé à la nouvelle année, dans les jours qui viennent. Et par qui va-t-il être remplacé ? C’est là mon petit scoop, quand même, d’aujourd’hui. Vous l’aurez peut-être déjà lu dans le journal, mais les gens n’y attachent pas énormément d’importance – moi, dans mon hypothèse « démission Trump », ça joue un rôle tout à fait clé.
Qui est-ce qui va remplacer M. Kelly à la Maison Blanche comme étant le chef de cabinet, comme étant le directeur de l’équipe ? [Nick Ayers] : l’actuel directeur d’équipe de M. Mike Pence, le vice-président.
On serait en train de préparer une transition entre M. Trump et M. Pence que, chers amis, on ne s’y prendrait quand même pas autrement, hein ! De remplacer le chef de cabinet de M. Trump par celui de M. Mike Pence, ça faciliterait quand même les choses si une telle transition devait avoir lieu, dans les jours qui viennent ou dans les semaines qui viennent. Voilà. [Le lendemain, Nick Ayers déclinait l’invitation ; ce qui n’affaiblit en rien cependant le scénario de la transition].
Alors, vous avez compris pourquoi j’ai appelé ma petite vidéo « Démission de M. Donald Trump, les choses se précisent ! » ou bien, je ne sais plus exactement le titre que j’avais donné, « Derniers préparatifs ! » voilà, vous avez compris, j’espère avoir illustré ma thèse de manière convaincante.
Parce que, demain, il sera question à nouveau de la publication sous forme de livre de mes profondes réflexions – qui datent quand même de plus de deux ans maintenant, trois ans quasiment – sur Monsieur Trump et nous : tout le mal qu’il fait à l’humanité en général et aux Américains en particulier.
Voilà, allez, à bientôt.
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