Trump : l’affrontement final ? le 18 septembre 2018 – Retranscription

Retranscription de Trump : l’affrontement final ? le 18 septembre 2018. Merci à Olivier Brouwer et Eric Muller !

Bonjour, nous sommes le mardi 18 septembre 2018. Et, avant tout, merci à vous tous qui m’envoyez des vœux de prompt rétablissement ! Je me soigne et je me repose !

Deux événements dans l’actualité des États-Unis, qui font penser qu’on arrive à un showdown, la clôture, le grand finale, dans les aventures de M. Trump. Il y a une chose qui ne vient pas de lui, et qui ne lui est pas favorable, et puis il y a une chose qui vient de lui et qui ne fera que précipiter les choses : c’est une manœuvre un petit peu désespérée de sa part.

Alors, d’abord la chose qui ne vient pas de lui : c’est la publication prochaine d’un livre qui s’appelle Full Disclosure (full disclosure, ça veut dire : « divulgation complète »), par Mme Stormy Daniels, de son nom de naissance Stephanie Gregory, et plus connue sous le nom de Stephanie Clifford qui est son nom de mariage. C’est la star du porno qui a eu une liaison avec M. Trump et qui a décidé de vendre la mèche, parce qu’elle s’est trouvée menacée, et elle a pensé – elle a tout à fait raison – qu’en rendant cette histoire absolument publique, les menaces en particulier qui avaient été proférées à l’encontre de sa petite fille, allaient être… C’est une manière de se défendre de rendre les choses publiques, et j’en avais parlé à l’époque, et je vous avais conseillé, si jamais vous vous trouvez dans une situation comme celle-là, de faire exactement comme ça. C’est comme ça que j’ai gagné le procès que la VUB m’avait intenté : en parlant de tout devant vous !

Alors, de quoi s’agit-il dans ce livre ? Il s’agit de révélations dont, dit la presse, certaines sont assez salaces, mais ce n’est pas ça qui nous intéresse, ce n’est pas ça qui intéressera, je dirais, les politiciens. Ce seront des informations supplémentaires sur M. Trump comme une personne malhonnête et surtout dangereuse, surtout à la tête d’un État.

La preuve en est : la deuxième information que je dois vous communiquer pour la journée, c’est le fait qu’il vient de donner l’ordre de divulguer, précisément, des informations qui sont protégées par le secret défense, et en particulier des informations qui sont en possession du FBI (donc le service de police) et du ministère de la Justice américain. Et dans la déclaration qui est faite du côté de la Maison-Blanche, il est bien dit que c’est pour faire apparaître en surface la corruption, la corruption qui existe au niveau du ministère de la justice américain et au sein du service de police des États-Unis.

Alors, j’en avais parlé longuement : il est évident que si M. Trump est un agent de la Russie, comme le laisse entendre M. Woodward dans son nouveau livre, Fear, comme le laisse entendre M. John Brennan, l’ancien président de la CIA, il est évidemment dans son intérêt, depuis le début – et il a commencé à le faire dans sa campagne électorale – d’essayer de discréditer la police et le ministère de la Justice de son propre pays : toute l’institution judiciaire.

Alors là, il donne l’ordre de divulguer des informations qui sont couvertes par le secret, qui sont confidentielles. Pourquoi [sont-elles confidentielles] ? Parce qu’il s’agit de protéger, bien entendu, le personnel du ministère de la Justice et le personnel de la police, qui s’occupent de choses qui n’apparaissent pas nécessairement en surface. Alors, en faisant cela, pour dénoncer, selon ses termes, le « Deep state », l’« État parallèle », qui voudrait sa peau et dont le « résistant » qui est apparu il y a quelques semaines pour nous dire que, heureusement, au sein de l’administration, au sein du gouvernement, il y avait des gens qui s’opposaient aux « noirs desseins » de M. Trump, et ce « résistant » disait : il ne s’agit pas de Deep state, il ne s’agit pas d’État parallèle, il s’agit de Steady state. Et qu’est-ce que c’est, un Steady state ? Eh bien, c’est une expression qu’on utilise, bien entendu, dans les hôpitaux pour parler d’une personne qui récupère, et c’est un état d’équilibre vital. Voilà, pas Deep state, mais Steady state, selon ce « résistant ».

Alors on a compris, à l’époque, quand c’est sorti il y a quelques semaines, cette déclaration des « résistants », c’est pour dire que l’État américain n’était pas à la dérive, que même si à sa tête, il y a un président qui est à la dérive, que les choses sont encore maîtrisables et maîtrisées. Mais alors, comment va réagir ce Steady state, cet État – à proprement parler, l’armature, la structure de l’État – à cette injonction de M. Trump de révéler des tas d’informations qui vont mettre en danger des agents qui travaillent dans un certain secret pour maintenir cette structure ?

Il y a une réponse immédiate du côté du ministère de la Justice, disant : « Il y a des administrations, il y a des agences, il y a des services, des départements qui vont examiner soigneusement l’information qu’on pourra divulguer ». C’est-à-dire que, dans cette déclaration, déjà, il est dit qu’il existe effectivement une structure qui est en train de protéger les États-Unis contre les divagations, les diversions, les délires divers de M. Trump. Mais, bien entendu, c’est un affrontement. Cela va sans doute précipiter les réactions de cette structure – des services secrets, des différentes administrations comme le ministère de la Justice, l’Agence du renseignement, etc. – cette solidarité qui a été manifestée, non seulement dans cette déclaration du résistant individuel, mais qui avait déjà été dite ouvertement par M. Rod Rosenstein, le numéro deux du ministère de la Justice. Ils vont devoir réagir, ils vont devoir défendre l’État américain contre cette offensive – désespérée, il faut bien le dire – de M. Trump.

Pourquoi désespérée ? Parce qu’il comptait beaucoup sur le fait que les informations qui sont détenues par M. Paul Manafort ne seraient pas révélées à la justice. Or M. Paul Manafort, il y a quelques jours, a déclaré qu’il allait coopérer, collaborer avec le ministère de la Justice, et donc la dernière personne qui n’avait pas promis, dans l’environnement immédiat de M. Trump, de vendre la mèche, de dire [ce qu’elle sait], cette dernière personne est passée de l’autre côté, donc il ne lui reste plus rien. Voilà : tous les documents de son avocat sont dans les mains de la justice, [ceux] du conseiller juridique de la Maison-Blanche également, de la presse à sensation qui était de son côté… J’en oublie, il y en a encore d’autres que j’oublie [ : le comptable de la Trump Organization, sa firme]. Enfin bon, tout le monde qui a de l’information sur ce que M. Trump a pu faire qui n’était pas légal, qui était dangereux, qui prouverait qu’il est effectivement un agent de la Russie – non pas de récemment mais probablement des années 80 -, tout cela se trouve dans les mains de la justice, et tout cela va apparaître.

En ce qui concerne M. Michael Flynn, un général qui avait été immédiatement inculpé pour les discussions avancées qu’il avait eues avec l’ambassadeur de Russie, mais qui est un monsieur qui s’est trouvé, dans des banquets, à une ou deux places de M. Trump… pardon, de M. Poutine (je les confonds toujours, ces deux-là !), qui est quelqu’un qui est dans un milieu très très proche de M. Poutine, tout cela est dans les mains de la justice, tout cela va apparaître.

Manifestement, l’appareil judiciaire ne veut pas s’occuper de ça en urgence – avant les élections du 6 novembre – pour ne pas avoir l’air d’interférer et de pousser dans une certaine direction. Mais de ce côté-là, tout est assez rassurant : il y aura probablement un raz-de-marée démocrate, c’est cela qui apparaît en ce moment : il y aura raz-de-marée démocrate, un rejet absolu de Trump, du côté du Sénat aussi bien que du côté du Congrès, c’est-à-dire du parlement, dans les élections du 6 novembre.

Et l’impression que nous avons, c’est que les choses vont se précipiter à partir de novembre. M. Michael Flynn va être jugé le 28 novembre, on tirera les conséquences des élections qui auront eu lieu – c’est-à-dire que les Démocrates seront en position de lancer des tas de… en fait, de faire l’inverse de ce que M. Trump a fait aujourd’hui, c’est-à-dire de protéger l’institution de la justice et des différents services du pays, et de lancer des enquêtes sur des choses bien particulières.

Il faut noter que l’action de M. Trump aujourd’hui, consistant à lancer l’ordre de rendre publics des documents confidentiels, va apparaître, bien entendu, comme un élément de plus dans l’accusation de M. Mueller, comme une tentative d’entrave à la justice, bien entendu, et par conséquent, le dossier ne fait que grossir. C’est une tentative, bien entendu, de M. Trump de torpiller ça. Mais où en est-il ? Tout le monde le décrit… Mme Omarosa Manigault-Newman le présente comme un homme à la dérive, et également ce rapport, enfin, cette tribune libre d’un personnage – ou d’une coalition de personnes au sein de son administration – pour dire qu’il existe une résistance et que le peuple américain n’a rien à craindre parce qu’il y a là une cellule secrète qui désamorce les décisions les plus dangereuses de M. Trump…

Comment cette histoire va se terminer ? On ne le sait pas, parce que, voilà, c’est une lutte, c’est un combat qui aura lieu.

Ce matin, j’ai répondu à quelqu’un, et vous êtes nombreux, malheureusement, qui me ditent que tout ça, c’est business as usual, que tout ça n’a pas beaucoup d’importance, que ce sont, comment dire, des ripples, des petits remous à la surface de l’eau. Non : tout ça, tout ça, je vous l’ai déjà dit et j’en suis convaincu, et je ne vous en parlerais pas comme ça – je ne vous bassinerais pas avec ça – si je n’en étais pas convaincu, tout ça fait partie des trois événements les plus importants du 21ème siècle, quoi qu’il arrive, et cela risque bien d’être le premier en importance.

Il n’y a pas que vous que j’ai du mal à convaincre ! [sourire] Les éditeurs aussi, avec qui j’ai des réunions dont les discussions me rappellent, bien entendu, celles que j’avais eues – en 2005, en 2006 – quand je parlais d’une crise majeure du capitalisme qui allait avoir lieu, et où on me disait (j’y ai fait allusion ce matin dans un petit billet) : « Oui, mais enfin, des gens qui ne remboursent pas leurs traites, qui ne paient pas, qui ne remboursent pas leur prêt immobilier, ça a toujours existé. Le prix de l’immobilier, de manière générale, ça monte, donc il n’y a pas de raison de s’inquiéter ». La question générale, c’est celle de l’ordre de grandeur. Vous qui me reprochez de dire que que ce que je dis, vous n’avez pas conscience de l’ordre de grandeur, de la crise des subprimes à l’époque où j’en parlais, et de ce qui est en train de se passer aux États-Unis. Ça risque bien d’être… si M. Trump est arrêté pour haute trahison, vous comprenez bien que c’est non seulement un événement majeur dans l’histoire des États-Unis, mais aussi dans l’histoire mondiale, depuis ses débuts !

Voilà, j’arrête là dessus, sur une note, je dirais, comment dire, optimiste.

Voilà. À bientôt !

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  1. Mes yeux étaient las, bien plus que là, juste après l’apostrophe : la catastrophe.

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