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Le pont Morandi de Gênes était condamné à s’écrouler car il n’avait pas été conçu pour le trafic actuel, ni pour exister plus de 50 ans – nous en sommes à 51 ! Si l’on ressortait son cahier des charges d’origine, on verrait non seulement qu’il a dépassé son espérance de vie mais aussi qu’il dépassait ses capacités physiques et matérielles.
On veut nous faire croire qu’il aurait suffi d’un ripolinage, d’une meilleure maintenance, alors que de par sa conception, un pont à chevalets et à haubans datant des années 60 ne pouvait pas supporter une autoroute contemporaine avec son trafic démultiplié et des véhicules souvent deux fois plus lourds qu’autrefois. On cherche à nous faire croire que l’on peut assurer une vie éternelle à un investissement qui en l’occurrence était sous-dimensionné. Le coût du blocage du pont aurait été trop important et on a donc mis dans la balance (nos politiques, mais avec notre assentiment tacite) un risque qui a fini par se matérialiser, avec le coût financier qui aurait résulté du blocage d’un nœud routier international. C’est là la politique de nos temps ultralibéraux ou le moindre-coût fait loi, censé prévaloir même – comme on l’a constaté hier – sur les lois de la physique.
Au bilan : 39+ morts, mais qui coûteront moins cher en compensations de compagnies d’assurances qu’un détournement du trafic pendant plusieurs années. Les morts seront pleurés quelques jours, par ceux qui les auront connus – ce qui n’est pas le cas pour l’immense majorité d’entre nous – tandis que notre porte-monnaie continuera d’être placé au tout premier rang de nos préoccupations.
C’est dans la même logique que nous gérons aujourd’hui notre parc de centrales nucléaires. Tant qu’il n’y a pas d’accident, le risque est confortablement mis entre parenthèses. On a prolongé leur vie de 10 ans, puis de 10 ans encore, leur assurant une durée de vie hors-sol, décollée du cahier des charges d’origine – que l’on n’exhumera jamais des archives. Le risque augmentera exponentiellement – pour autant qu’il reste évaluable – jusqu’à l’accident, mais tant qu’il n’a pas lieu, tout va bien : on fait comme si toute cette affaire pouvait durer éternellement. Le risque est évidemment là infiniment plus grand que pour le pont de Gênes mais, chance pour nous, la fatalité est d’abord tombée chez nos voisins : Gênes, c’est en Italie, n’est-ce pas ? et Fukushima, jusqu’à nouvel ordre, c’est au Japon, ouf !
L’homme est un animal qui n’a peur que pour son porte-monnaie, qui n’arrive à conceptualiser que ce qui lui arrive personnellement : l’ultralibéralisme est bien conforme à la nature humaine : court-termiste et égoïste.
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