Résumé des épisodes précédents : James B. Comey, ancien chef du FBI limogé par Trump parce qu’il s’était rebiffé devant la nouvelle norme du Président que l’ensemble de ses subordonnés le révèrent comme un parrain de la mafia, a rédigé un ouvrage intitulé « A Higher Loyalty » : une loyauté d’un autre ordre, à paraître demain.
Dans cet ouvrage, Comey explique que le FBI est attaché viscéralement aux valeurs de la République états-unienne et que Trump est un gredin qu’il s’agit d’abattre, de préférence à la faveur d’une élection, toute autre procédure de destitution laissant intacte sa légitimité aux yeux de cette partie de l’opinion qui est prête à soutenir une crapule affirmant à propos du meurtre d’une contre-manifestante lors d’une manifestation de néo-nazis et autres suprémacistes blancs, qu’il y a « des gens bien dans les deux camps ». Comey s’embrouille cependant les pinceaux quand il explique ses déclarations un peu contradictoires dans les derniers jours de la campagne présidentielle où il avait affirmé dans un premier temps que l’affaire d’Hillary Clinton envoyant ses mails officiels de ministre des Affaires étrangères à partir d’une boîte privée était très sérieuse, pour déclarer dans les jours qui suivirent qu’il n’y avait pas là en réalité de quoi fouetter un chat. Les Démocrates lui en veulent à mort pour ces atermoiements auxquels ils attribuent la défaite de leur candidate. Comey se défend en disant que l’élection de Clinton lui semblait acquise et qu’il n’aurait pas été souhaitable pour la République qu’il y ait le moindre soupçon quant à sa légitimité.
Hier soir, Comey est venu s’expliquer à l’émission “20/20” sur la chaîne ABC. À première vue, il n’a rien fait que répéter ce qui se trouve déjà dans son livre, à ceci près que l’entretien a duré cinq heures en réalité, et que le texte complet en est disponible. Et là, entre les lignes, une image légèrement différente émerge, en contradiction à la fois avec le message martelé par Trump que le FBI c’est en réalité « Démocrates et compagnie » déterminés à l’abattre par les moyens les plus déloyaux, et avec la propre version officielle de Comey, Républicain de toujours en réalité, comme Jeff Sessions, son ministre de la Justice, comme Robert Mueller chargé d’enquêter sur une collusion éventuelle entre l’équipe Trump et la Russie, comme Rod Rosenstein, numéro 2 du ministère de la Justice, commanditaire de la commission d’enquête spéciale de Mueller, comme … etc. à savoir que le FBI, dans le sens historique du fil, a commencé par rouler pour Trump dans la mesure où il était le candidat du Parti républicain, avant de prendre conscience qu’il était un gredin mafieux absolument irrécupérable et de faire alors machine arrière toute.
Le torpillage d’Hillary Clinton dans la dernière ligne droite de la présidentielle, n’était alors pas une simple illusion d’optique, mais une tactique délibérée et ce n’est qu’à la fréquentation du président nouvellement élu que le FBI, incarnation du deep state (l’État dans l’État), se serait rapidement mordu les doigts et aurait changé son fusil d’épaule, déterminé désormais à abattre une vermine : « Inapte sur un plan moral à être le président des États-Unis », pour reprendre les termes de Comey hier dans l’émission.
P.S. Je rappelle, à l’intention de ceux d’entre vous qui ne me liraient qu’occasionnellement que j’ai toujours partagé le sentiment de 60% des électeurs américains à la veille du vote, que les deux candidats à la présidentielle étaient également exécrables. Ce qui me retient en ce moment – pour en produire un tableau complet le moment venu -, c’est comprendre la manière dont nos démocraties à dérive oligarchique fonctionnent désormais dans leur réalité quotidienne.
Au départ, il faut remplir certaines conditions au sein d’une nation pour s’engager dans une guerre. Un consensus maximal. L’union…