Imaginez que vous jouiez aux échecs pour la première fois avec une certaine personne et que celle-ci vous dise à un moment de la partie : « Je mets ma reine sur la même case que le roi, il sera mieux protégé ainsi ! ». Vous vous récrierez que l’on ne peut pas faire cela. À quoi cette personne vous répondrait : « Montrez moi le règlement ! » Et comme le règlement ne mentionne rien quant au nombre de pièces que l’on peut placer sur une case, le fait que ce soit zéro ou une allant de soi pour les joueurs de ce type de jeux de société, votre partenaire vous affirmerait triomphant : « Vous voyez bien ! Continuons donc de jouer ! »
Tout le monde aura reconnu dans votre adversaire hypothétique, Donald Trump, président des États-Unis. Car Trump ignore les règles implicites des parties qu’il joue. C’est lui en effet qui a demandé à son entourage s’il était interdit que, ayant été reconnu coupable d’un méfait, il s’accorde à lui-même la grâce présidentielle. Et comme effectivement, personne avant lui n’ayant posé une question aussi incongrue, rien n’est dit dans les règlements qui l’exclue explicitement, Trump a commenté : « Eh bien dans ce cas-là, je n’hésiterai pas ! »
La longue liste de comportements de ce type de la part de Trump a conduit hier mercredi la commission sénatoriale judiciaire à Washington à mettre au point un texte mettant, à l’intention du Président, tous les points sur les « i », précisant que, non – comme tout le monde le comprend sauf lui apparemment – il n’a pas le droit de révoquer sans cause majeure le procureur spécial de la commission enquêtant sur son comportement à lui, tout Président qu’il soit.
L’initiative de ce projet de loi, dont le vote est à l’agenda du 26 avril, revient à quatre sénateurs appartenant aux deux principaux partis, deux Démocrates et deux Républicains : Cory Booker, Démocrate du New Jersey, Lindsey Graham, Républicain de Caroline du Sud, Chris Coons, Démocrate du Delaware, et Thom Tills, Républicain de Caroline du Nord.
En plus de mettre noir sur blanc ce qui avant Trump allait sans dire, le texte en préparation spécifie qu’un procureur spécial, tel Robert Mueller aujourd’hui, aurait le droit de contester sur une période de dix jours son limogeage, et que les documents qu’il aurait rassemblés seraient protégés de toute destruction aussi longtemps qu’une décision de justice n’aurait pas statué autrement.
Bien entendu, les Républicains n’ont montré aucun empressement jusqu’ici à faire voter ce genre de propositions, un vote allant immanquablement révéler aux yeux du public quels sénateurs parmi eux ne sont pas prêts à irriter la base du parti, laquelle manifeste toujours son soutien enthousiaste à un Président qui à ses yeux « donne un coup pied dans la fourmilière », et quels sont ceux qui, attachés à la République et ses institutions, refuseront de vendre leur âme au diable.
@Chabian Une étude des services de la CIA, datant de 1982 (document 14), analysait les effets de l’embargo sur Cuba…