Retranscription de Le temps qu’il fait le 5 janvier 2018. Merci à Marianne Oppitz et Catherine Cappuyns !
Bonjour, nous sommes le vendredi 5 janvier 2018 et avant tout : bonne année, bonne santé ! Tous les gens qui me souhaitent une bonne année se sentent obligés d’ajouter quelque chose du genre : « Touchons du bois ! » et « Espérons que ce ne soit pas pire que 2017 ! ».
Nous avons le sentiment tous que nous sommes entrés dans une grande phase d’effondrement et que dans un avenir prévisible, chaque année sera un peu pire que la précédente, malgré les efforts louables de certains de nos représentants – pas tous, j’y reviendrai (rires) – d’essayer de nous convaincre que tout est comme avant, « business as usual », qu’on va régler les affaires comme on le faisait précédemment. Tout ça c’est très aimable dans un but – je dirais – de maintien de l’ordre, pour que les populations soient rassurées, mais c’est un peu inquiétant aussi de voir que la mesure n’est pas prise des dangers qui nous menacent, des changements, des choses qui ne se passent vraiment pas comme avant et dont il faudrait prendre la mesure, en prenant justement, en adoptant, des remèdes qui soient à la hauteur des choses qui se présentent.
L’Allemagne
Alors, bien entendu, on ne peut pas tout faire tout seul, c’est vrai. C’est vrai, on peut prendre des initiatives au niveau de la France et si l’Allemagne ne suit pas, eh bien, il ne se passera rien. Mais, comme je l’ai déjà dit, on a perdu beaucoup de temps et maintenant on dit : « Ah oui, c’est plus difficile de négocier avec l’Allemagne ! », oui bien entendu, ça veut dire que c’était plus simple avant, au moment où, par exemple il y a dix ans, pas mal de gens disaient : « C’est le moment de faire des choses ! » Rien n’a été fait, on a essayé de réparer les choses avec des sparadraps, des bouts de ficelles, etc. Comme si on n’avait pas compris la mesure des craquements que l’on peut voir, de l’effondrement en fait qui se dessine. Enfin bon, continuons de réfléchir, continuons de proposer des choses, il faut changer de stratégie, ça, j’ai déjà attiré l’attention là-dessus parce que dire : « On va chacun mettre davantage de courgettes dans notre jardin », ça ne risque pas de déboucher sur une solution générale. Crier dans le désert, ça ne sert à rien non plus, si on a pu constater qu’on l’a fait pendant dix ans et sans résultat. Donc, il faut faire autrement.
Le blog
Je vous l’ai dit, je change la formule du blog à partir de la fin février, à l’anniversaire des onze ans du blog, la formule doit se modifier. Je ne sais pas encore trop ce qu’on va faire, on a discuté pas mal de faire un forum à la place du blog proprement dit. Mais j’ai l’impression que ça durera trois semaines et puis il n’y aura plus rien. Donc, c’est peut-être beaucoup d’efforts pour pas grand-chose. Pour ce qui est de ces petites vidéos du vendredi, là je vais cesser de les faire. C’était trop contraignant de les faire le vendredi matin quoi qu’il arrive, avec parfois un peu de retard, dans la journée du vendredi, parfois le faire le jeudi. Mais, vous avez vu, dans des situations acrobatiques : parfois assis sur les toilettes dans une chambre d’hôtel parce qu’il n’y a pas de lumière ailleurs, parfois tenant une tablette à bout de bras, ma tête sur un oreiller parce qu’il n’y avait pas de moyen de faire autrement. Il n’y a pas de – j’allais dire qu’il n’y a pas d’urgence, ça ce n’est pas vrai : ce n’est pas sûr qu’il n’y aura pas d’urgence d’aller, au contraire mais justement : l’urgence demande peut-être autre chose que des rendez-vous hebdomadaires où je fais comme aujourd’hui le point sur l’actualité, l’actualité du monde et la mienne, tous les vendredis. Ce que je vais peut-être faire, c’est intervenir de manière ponctuelle sur des thèmes particuliers. Je vais sans doute faire des vidéos sur un thème particulier. Alors, ce sera l’actualité qui décidera un petit peu du rythme. Est-ce que ça veut dire qu’il y en aura beaucoup moins ? Espérons-le ! Espérons-le : ce serait un bon signe ! Est-ce qu’il y en aura beaucoup plus ? ce n’est pas impossible ! on verra : je m’adapterai aux circonstances, mais je ferai un sujet par vidéo. Voilà !
Michael Wolff, auteur de Fire and Fury
Alors, jusqu’à la fin février, je continue avec l’actualité, un peu l’actualité de la semaine, celle générale et la mienne. Actualité de la semaine : je suis assez époustouflé du peu d’intérêt qu’il y a en France pour la commotion existant aux États-Unis à partir du livre de M. Michael Wolff qui s’appelle « Fire and Fury », « Le Feu et la fureur », expression utilisée par Trump pour parler de la manière dont il allait régler« diplomatiquement » le problème de la Corée du Nord (rires) et j’ai vu, j’ai regardé ce qu’il y avait dans la presse en France hier matin, quand j’ai fait un billet là-dessus. Il y n’y avait encore qu’un papier sur Libération, mais bon, Libération n’avait pas jugé, en tout cas sur la toile, de le mettre en première page. Il y avait un lien qui vous permettait d’aller vous occuper de ça ailleurs. Puis c’est venu dans la journée, il y a eu un article dans Le Monde en ligne mais qui était du type qui n’a rien compris de ce que c’était ce bouquin, qui l’a appelé un tissu d’anecdotes à partir des trois, quatre pages qui avaient été publiées. Non, qu’est-ce que c’est ce bouquin de Michael Wolff ? D’après ce qu’on comprend, d’après ce qu’il en dit lui-même, il avait signalé à Trump, il y a pas mal de temps, qu’il avait jugé, lui, Michael Wolff, qu’un article à son sujet – au sujet de Trump – avait été injuste. Ça avait beaucoup plu à Trump qui l’avait laissé circuler pendant des mois et des mois dans la Maison blanche et il explique bien, ce M. Wolff, qu’il y avait un siège dans un corridor qui était devenu le sien et il accrochait des gens au passage, des gens qui allaient vers Trump ou des gens qui revenaient de Trump et faisait une causette au passage. D’après ce qu’on comprend, il était assez ouvert à ce qu’il allait voir. Il faisait un rôle de journaliste – je dirais – comme il faut et, petit à petit, il s’est convaincu qu’il y avait là, dans la Chambre ovale, qu’il y avait là un personnage qui n’était pas du tout à la hauteur de la fonction. Un personnage… voilà, de plus en plus il se convainquait qu’on avait affaire à, on appelle ça maintenant un pervers narcissique, autrefois on était moins charitable, on appelait ça « borderline » ce type de personnalité. Borderline, ça voulait dire « sur la frontière ». Sur la frontière entre quoi ? Eh bien, sur la frontière entre la névrose et la psychose. C’était des cas que les psychanalystes n’aimaient pas parce que la psychose, on sait que ça résiste, ça résiste à la parole simplement. La névrose, ça se décompose, ça se guérit à la parole énoncée. La psychose, c’est plus compliqué. Alors voilà, c’est pour ça que les psychanalystes n’aimaient pas les borderline – qu’on appelle maintenant pervers narcissiques – parce qu’il n’est pas certain que ce ne soit pas de la psychose plutôt que de la névrose ; ce qui veut dire donc du solide et pas nécessairement du réparable, même par des moyens chimiques avancés.
Michael Wolff, lanceur d’alerte
Enfin bon, donc ce Monsieur Wolff se convainc qu’il y a là un personnage dans ce bureau de Président de la République du pays le plus puissant encore du monde, un personnage qui n’est pas à la hauteur et qui est extrêmement dangereux dans le fait qu’il exerce cette fonction. Et qu’il est entouré de gens éventuellement de bonne volonté comme son beau-fils et sa fille mais qui ne sont eux-mêmes pas à la hauteur de diriger un pays à la place du personnage déficient qui le fait en ce moment. Alors, qu’est-ce qu’il se dit ? Eh bien il se dit : « Voilà, j’ai un rôle à jouer, il faut que j’alerte le pays sur le fait que ce type n’est pas en état de faire ce qu’il fait et je vais faire un livre là-dessus ».
Trump : l’incompétence au pouvoir
Alors, où est-ce qu’on en est aujourd’hui ? Eh bien il y a des choses, des pages qui ont circulé, dans une revue américaine et sur le Guardian en Angleterre. Le livre sort en principe mardi et des efforts considérables sont faits en ce moment par la Maison blanche pour empêcher sa parution parce qu’ils savent que même si au niveau du politique, il y a des institutions qui font que si on veut « impeach » M. Trump, ça prend du temps, il y a des procédures à faire. Si on veut le pousser à la démission, il y a aussi d’autres procédures. L’opinion publique va peut-être se convaincre dans une très large majorité qu’il y a là, aux manettes, un personnage qui ferait mieux d’être ailleurs et qu’on devrait remplacer par quelqu’un, en tout cas de plus compétent, quelqu’un de capable d’assumer la fonction.
Steve Bannon accuse l’entourage de Trump de haute trahison
Alors, au passage, évidemment, ce qui est réglé dans ce bouquin, ce sont les rapports entre M. Steve Bannon, le patron de l’agence de presse d’extrême-droite Breitbart et Trump. Le fait que Steve Bannon a voulu mettre la droite identitaire suprématiste, enfin l’extrême-droite identitaire suprématiste, il a voulu la mettre sur l’échiquier politique américain, la faire apparaître en surface. Et là, il a réussi. Et, ce qui explique a posteriori sa déclaration du mois d’août, en disant : « Pour moi, cette affaire Trump est terminée. J’ai fait ce que je devais faire et ce personnage va disparaître ». Et il participe à la disparition de Trump puisqu’il l’accuse, il l’accuse de manière indirecte de haute trahison, de collusion avec une puissance étrangère, avec la Russie, parce qu’il dit que dans la réunion où s’est trouvé le gendre, où se sont trouvés le gendre, Jared Kushner, et le fils, Donald Junior, que dans cette réunion, ces deux personnages très proches de la Maison blanche ont commis une haute trahison et il dit : « Je suis 100% sûr qu’ils ont sûrement fait un rapport à leur père et beau-père ». Donc voilà : une accusation très forte, mais qui peut, si l’opinion américaine se convainc entièrement du fait que ce soit vrai, ça peut évidemment changer les choses. Le Parti républicain peut aussi considérer qu’il a fait ce qu’il avait à faire en modifiant les taxes, en facilitant la concentration de la richesse, en récompensant les milliardaires qui avaient mis Trump au pouvoir. Le Parti républicain considère peut-être qu’il a fait ce qu’il devait faire et va peut-être aussi prendre ses distances envers ce personnage dangereux.
Le prix à la mémoire d’Élisée Reclus pour L’argent, mode d’emploi
Quelle autre actualité ? Eh bien, quelques mots d’une actualité personnelle. Vous avez vu, hier, j’ai annoncé – on me l’avait déjà signalé officieusement, mais voilà, l’annonce officielle a été faite hier – que j’obtiens pour la réédition de L’argent, mode d’emploi, un livre qui a eu mauvaise presse, qui a encore mauvaise presse auprès des complotistes, des gens qui ont mis tout leur argent, je dirais, derrière le fait que les banques créent ex nihilo de l’argent à partir de rien. Un message que j’ai été véritablement navré, évidemment, de voir colporté dans le film Demain. C’est dommage que ce film soit entaché par ces rumeurs complotistes. Mais enfin bon ! voilà : un prix et un bon prix ! Un prix que j’aurai plaisir à recevoir, le prix à la mémoire d’Elisée Reclus, grand géographe libertaire, comme on dit maintenant, mais qu’on appelait anarchiste à l’époque, et qui s’appelait anarchiste, lui-même. Très, très grand géographe. On republie ses livres qui sont de nouveau des best-sellers. Vous pouvez voir ça : sur les rivières, sur les mers, des choses comme ça, c’est un très, très grand penseur. Très grand penseur aussi du point de vue de la réflexion politique. C’est à lui qu’on doit cette réflexion que je cite souvent : « On ne peut pas confier l’avenir du monde à des balles perdues ». Une réflexion pacifiste sur la manière dont il faut changer les choses et que voilà : qu’échanger des coups de feu dans les rues, ce n’est pas le moyen d’être sûr qu’on tombera sur une bonne solution par la suite. Ça, c’est l’actualité d’hier.
Ma vidéo pour le syndicat socialiste flamand BBTK
Dans l’actualité d’hier, aussi, vous avez peut-être vu, je savais que ce monsieur, Pieter De Vos, fait des vidéos extraordinaires et, quand il m’avait demandé s’il pouvait faire pour l’ouverture d’un congrès d’un syndicat, le syndicat socialiste flamand en Belgique, s’il pouvait faire une petite vidéo, j’ai dit oui tout de suite. J’avais déjà travaillé avec lui, on avait travaillé, il y a pas mal d’années sur qu’est-ce qui avait mal tourné en Europe, il avait fait un très bon petit film là-dessus. Il a travaillé aussi sur la fraude fiscale et c’est un très grand cinéaste en plus d’être un très bon interviewer et cette petite vidéo que vous avez vue, moi, elle ne m’a pas déçu. Il interroge aussi un syndicaliste flamand sur la question du travail. Quelqu’un m’a déjà signalé qu’il allait la passer à la CGT, en France, pour montrer comment il y a moyen de faire les choses. Faites la voir ! [P.J. La vidéo est corrigée en ce moment]. Je crois qu’il a très bien extrait ce qu’il faut faire savoir sur la disparition du travail. Il a repris mon message sur la gratuité, m’a encouragé à en parler. Je crois que c’est très intéressant.
Causalité et corrélation
Alors, dernière petite chose. Dernière petite chose, parce que vous avez peut-être vu, quand je suis passé, c’était à Beaubourg, c’était – je dis toujours il y a 3 mois, mais non, c’est beaucoup plus récent que cela – c’était peut-être il y a un mois, réunion organisée par la revue « Études digitales », dont les deux dirigeants Jacques Athanase Gilbert et Franck Cormerais sont aussi les personnes qui m’avaient interviewé pour faire le petit volume qui s’appelle : À quoi bon penser à l’heure du grand collapse ? (je suis arrivé à le dire !) J’avais réagi à l’opposition qu’il y a du côté de « Ars industrialis », le mouvement de Bernard Stiegler : il y a une attaque en règle sur le big data, fondée sur le fait que ça repose essentiellement sur des calculs de corrélation, de coefficients de corrélations entre différents phénomènes et que dans la pensée, il y a un progrès qui est de faire une réflexion de type causal : A cause B, plutôt que de dire il y a une corrélation de 0,7 entre le phénomène A et le phénomène B. Et, là, j’avais attiré l’attention sur le fait que, effectivement, la causalité, c’est une chose sur laquelle notre culture a mis l’accent. Nous avons fondé la science moderne sur l’idée de causalité mais, que le modèle, dit de causalité, suppose une représentation d’un feuillet intermédiaire entre le monde empirique – c’est-à-dire celui dans lequel nous vivons et que nous comprenons de manière intuitive – et l’Être-donné, la Chose-en-soi, le monde tel qu’il est vraiment et, au-delà de nos capacités à le comprendre, de mettre un feuillet intermédiaire que nous avons appelé, de manière classique, à partir du XVIIe siècle, la Réalité-objective. Et, dans la Réalité-objective, il y a effectivement des mécanismes causaux et des choses qui sont plutôt de l’ordre de la corrélation, c’est-à-dire des choses qui se passent ensemble, mais pas toujours, et ça, c’est une démarche à nous. Alors que la pensée chinoise est une pensée qui est restée… – évidemment les Chinois ont commencé à lire l’anglais, à lire le français et à comprendre comment nous faisons : ils ont compris la « science moderne », ils savent faire de la « science appliquée », maintenant. Mais la tradition culturelle chinoise est une tradition simplement de la corrélation. Il y a des choses qui sont très corrélées, il y en a qui le sont moins, etc.
L’ordinateur et la corrélation
Et, là, j’avais attiré l’attention sur le fait que, voilà – quand j’étais à Beaubourg, l’autre jour – sur le fait que ce n’est pas nécessairement une régression de parler en termes de corrélations. Et en particulier, si la machine fait des prévisions, et qu’elle le fasse avec un coefficient de corrélation de 1 entre deux phénomènes A et B – c’est-à-dire qu’il doit y avoir ce que nous appelons un mécanisme causal entre les deux – ou qu’elle fasse ses calculs à partir de 0,7, 0,3 ou 0,2, la machine, elle s’en fiche : elle n’a pas notre représentation qu’il y aurait peut-être un feuillet intermédiaire de Réalité-objective entre le monde empirique et la Chose-en-soi : ça n’a pas d’importance de son point de vue. Alors, est-ce que c’est une régression du point de vue de la pensée ? Là, personnellement, je ne le pense pas. Je ne le pense pas : c’est une trahison de notre tradition culturelle mais, voilà ! nous avons utilisé la corrélation, nous l’utilisons encore. Quand nous faisons de la simulation, d’une certaine manière, nous restons à l’intérieur du monde empirique, nous n’en sortons pas. La simulation informatique… dès qu’on a utilisé l’ordinateur, cette distinction très claire entre un mécanisme causal et une simple corrélation, a perdu un petit peu de sa signification.
Au niveau quantique notre compréhension du monde devient imparfaite
Alors, j’enchaîne sur autre chose, vous allez voir, vous allez trouver le rapport. Quand je me suis trouvé à France Culture, là, récemment, je crois que c’était la semaine dernière… oui, c’était la semaine dernière. Là, je me suis un petit peu opposé à Florian Delorme qui m’interviewait. Parce qu’il avait l’air de ne pas comprendre ou il faisait semblant de ne pas comprendre – comme un moyen didactique vis-à-vis du public – ce que ça voulait dire ne plus comprendre exactement ce que font les ordinateurs, en raison de la complexité. J’avais fait un parallèle, j’avais dit : « Mais quand on descend dans l’échelle microscopique, quand on descend dans les tailles, nous arrivons à un niveau où nous ne comprenons plus exactement ce qui se passe non plus. Où nous ne savons plus faire la différence entre la réalité dont nous essayons de parler et les instruments de mesure que nous utilisons ou alors, la lecture que nous faisons de ces instruments de mesure ». Et il m’avait répondu : « Mais, non, il y a un truc qui s’appelle l’indétermination quantique ». Et là, je l’ai laissé, on n’avait pas le temps de parler de mécanique quantique mais j’ai laissé entendre que non, ce n’était pas une question que le monde était de telle ou telle manière, c’est qu’à ce niveau là, nous n’avions plus les outils, véritablement, pour parler du monde, sachant clairement de quoi on parle.
The Nature of Physical Reality (1950) de Henry Margenau
Alors, pourquoi est-ce que je vous parle de corrélations et pourquoi je vous parle de ça : des principes mêmes de la mécanique quantique ? C’est parce que vous le savez peut-être, à une époque, je me suis fort intéressé à ces questions et qu’en particulier, j’ai écrit un livre qui s’appelle Comment la vérité et la réalité furent inventées où je parle longuement de ces choses. Et, nous avons la chance, maintenant, de pouvoir acheter tous les livres qu’on veut parce que c’est une possibilité que nous offre la toile. Et, à une époque, on était au début des années 70, ou au milieu plutôt des années 70, je lisais des tas de livres que je pouvais lire uniquement en bibliothèque. Voilà, et donc je ne les ai plus parce que c’était des livres qui étaient introuvables. Et en particulier, sur cette question de la manière dont nous nous représentons le monde, j’utilisais beaucoup un livre. Et, là, je vais vous le montrer parce qu’on a maintenant la chance de racheter les livres qu’on a envie d’acheter (montre le livre). Voilà, c’est La nature de la réalité physique d’un certain monsieur Henry Margenau. Henry Margenau n’est pas la personne la plus célèbre au monde. C’est un physicien qui a vécu essentiellement aux États-Unis, mais une personne qui a énormément réfléchi à ce qu’il faisait en tant que physicien. On considère même, il est parfois mentionné comme plutôt philosophe que physicien et comme étant un philosophe qui a conduit les physiciens à modifier la représentation qu’ils avaient de ce qu’ils faisaient eux-mêmes. Donc, c’est un penseur, en fait, important.
Émile Meyerson et l’irrationnel
Pourquoi je vous parle de ça ? C’est parce que, tout ce que j’ai pu vous dire sur la corrélation, il y a un instant, cette réflexion sur la manière dont nous cessons de comprendre le monde, c’est chez lui que je l’ai trouvée. C’est chez Henry Margenau qui mérite d’être plus connu. Dont il ne serait pas mal qu’un de ses livres paru en 1950 sur la nature de la réalité physique, soit republié et pas simplement trouvé par le biais de l’antiquariat, que ses livres soient traduits en français aussi. Évidemment, il n’est pas le seul grand penseur, grand philosophe des sciences et des mathématiques mais, voilà, une occasion m’était donnée de mentionner son nom. Un très grand penseur, quelqu’un qui a vu très, très clairement ce que nous faisons quand nous représentons le monde. En France, il y a Émile Meyerson qui n’est peut-être pas très connu non plus de nos jours, très grand penseur de notre rapport au monde, de nos représentations. J’ai mentionné son nom, en fait, je crois, en parlant à Beaubourg. C’est lui qui nous a dit que l’irrationnel, c’est le mot que nous mettons sur quelque chose quand nous voulons le mettre entre parenthèses, en disant : « Nous l’avons compris, nous pouvons passer à autre chose ». En fait, non. Quand on a dit « irrationnel », c’est quelque chose qu‘on ne comprend pas et qu’on croit ne jamais pouvoir comprendre. Par exemple le rapport de la diagonale du carré au côté (sourire) mais dont on dit ce n’est pas important, voilà, « on va faire sans ».
À bientôt ! Une des dernières vidéos où je parlerai de tout ce qui me passe par la tête parce qu’on est vendredi. On verra, au mois de mars, des formules plus centrées sur un sujet particulier. En attendant, passez une excellente semaine. Voilà, au revoir.
Les traductions en temps réel, ça existe déjà. https://m.youtube.com/watch?v=iFf-nQZpu4o&pp=ygUedHJhZHVjdGlvbiB0ZW1wcyByw6llbCBhdmVjIElB